Facult´
e des sciences de base (SB)
Section de physique
Projet Science-Technique-Soci´
et´
e
(STS)
Philipp Lenard et la physique
aryenne
Christian Schlatter
11, avenue de Mont-Goulin
CH-1008 Prilly
avril 2002
Made with L
A
TEX
Table des mati`
eres
1 Introduction
1
1.1
Organisation du texte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
1.2
Sources . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2 La physique sous Hitler
3
2.1
Les grandes ´
ecoles allemandes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
2.2
Adolf Hitler et la science . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
2.3
La situation `
a G¨
ottingen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
2.4
Les minist`
eres de lâ´
education . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6
2.5
Les professeurs de physique
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7
2.6
Isolement international . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7
3 Lâ´
evolution de Philipp Lenard
9
3.1
Lenard et Einstein . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
4 Une physique aryenne
19
4.1
Vision du monde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
4.2
Une science raciste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
4.3
Point de vues s´
epar´
es . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
5 La promotion de la physique aryenne
24
5.1
La victoire de la physique aryenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
6 Guerre et d´
eclin de la physique aryenne
28
6.1
La physique nucl´
eaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
7 Conclusion
32
7.1
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
A Gesetz zum Berufsbeamtentum
39
B Deutsche Physik und j¨
udische Physik [60]
41
C âWeisse Judenâ in der Wissenschaft [45]
44
i
Table des figures
3.1
Philipp Lenard en 1900
. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, Ame-
rican Institute of Physics.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
3.2
Philipp Lenard en 1930
. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, Ame-
rican Institute of Physics.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
4.1
Johannes Stark
. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, American Ins-
titute of Physics. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
6.1
Le 80
e
anniversaire de Philipp Lenard le 7. juin 1942
. Lenard
re¸coit le titre dâun docteur honoris causa `
a lâuniversit´
e de Bratislava.
AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, American Institute of Physics. . . 31
ii
Chapitre 1
Introduction
Ce trait´
e examine la physique pendant la dictature national-socialiste de Hitler en
Allemagne. Il ne pr´
esente pas les performances fournies par les physiciens allemands
en d´
etail mais analyse leurs conditions de travail dans un milieu politique tendu.
Philipp Lenard, un physicien exp´
erimentateur qui a fourni des r´
esultats pour la
compr´
ehension de la structure de lâatome
(1)
, a d´
evelopp´
e pendant la r´
epublique de
Weimar une aversion prononc´
e contre les anglais, puis contre les juifs et ďŹnalement
contre les physiciens th´
eoriques.
Dans un environnement nazi il pouvait ďŹnalement d´
evelopper son id´
ee dâune phy-
sique allemande, que lâon appellera la physique aryenne, et qui est fond´
ee uniquement
sur lâexp´
erience exacte. Tout mod`
ele axiomatique comme la relativit´
e ou la physique
quantique est consid´
er´
e comme ´
etant faux. Avec lâarriv´
ee du r´
egime nazi au pouvoir,
le mouvement de la physique aryenne a trouv´
e une base pour la marche triomphale
contre la physique non-aryenne, dite juive. Le point culminant ´
etait incontestable-
ment la supplante de Werner Heisenberg dans la question du successeur de Arnold
Sommerfeld `
a Munich.
Avec le commencement de la guerre la chance a ďŹnalement tourn´
e. Le programme
pour la construction de la bombe avait besoin des th´
eoriciens et ainsi la physique
th´
eorique a ´
et´
e soutenue par lâarm´
ee. Il sâen suivit la d´
econďŹture rapide de la phy-
sique aryenne.
Les nazis et les activit´
es de Philipp Lenard et ses compagnons ont conduit `
a une perte
incroyable de physiciens remarquables et au retour au Moyen Ë
Age de la physique
en Allemagne. Mais la physique aryenne a peut-Ë
etre quand-mË
eme eu un bon cË
ot´
e :
Que se serait-il pass´
e si la physique th´
eorique allemande nâavait pas ´
et´
e tellement
saccag´
ee au d´
ebut de la deuxi`
eme guerre mondiale ? Hitler aurait peut-Ë
etre eu sa
bombe...
(1)
Pour lesquelles il a obtenu le prix Nobel.
1
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
2
1.1
Organisation du texte
Dans le premier chapitre, on ´
etudiera les cons´
equences que la prise du pouvoir par
Hitler a eu pour les sciences, en particulier lâexclusion des chercheurs juifs et son
impact sur le paysage scientiďŹque des hautes ´
ecoles. Dans le chapitre suivant, on
sâoccupera du physicien Philipp Lenard. Son altercation avec Albert Einstein sera
mise en particulier en ´
evidence. On ´
etudiera aussi les raisons pour lesquelles il a
pos´
e la premi`
ere pierre pour le groupement dâint´
erË
ets pour la physique aryenne et
dont lâid´
eologie sera pr´
esent´
ee au chapitre quatre.
Suit le chapitre sur la promotion de la physique aryenne o`
u les tentatives de mettre
la physique au pas du national-socialisme et ainsi lâintroduction de la question ra-
ciale comme motivation du chercheur seront discut´
ees. Un chapitre ult´
erieur montre
les cons´
equences que la guerre a caus´
e pour la physique aryenne et qui a conduit
ďŹnalement `
a son d´
eclin. Le dernier chapitre essaye de regarder cette ´
epoque plus
globalement et dâen tirer quelques conclusions.
1.2
Sources
Le texte de ce travail sâinspire de plusieurs livres ´
ecrits par Werner Heisenberg, en
particulier
â
Deutsche und J¨
udische Physikâ [58]. A la ďŹn du texte le lecteur trouvera
une indication des sources cit´
es.
Il existe plusieurs livres excellents qui retracent lâhistoire de la science en Allemagne.
La bible est sans aucun doute le trait´
e
â
Scientists under Hitlerâ de Alan Beyerchen
qui a ´
et´
e traduit en allemand [9]. Pour la querelle entre Lenard et Einstein on trouve
dans [30] une riche compilation de citations et pour le programme de la construction
de la bombe on trouve des excellentes informations dans
â
Alsosâ [59] de Goudsmit.
A la ďŹn du texte le lecteur trouvera ´
egalement une bibliographie dâĹuvres choisies.
Chapitre 2
La physique sous Hitler
La physique a une longue tradition en Allemagne. Entre les deux guerres mondiales,
la physique allemande faisait partie des meilleures du monde.
En 1887 la
ÂŤ
Physikalisch-Technische-Reichsanstalt
Âť
(PTR) est fond´
ee comme bu-
reau de v´
eriďŹcation des poids et mesures. En 1911 la
ÂŤ
Kaiser-Wilhelm-Gesellschaft
zur F¨
orderung der Wissenschaften
Âť
(KWG) est fond´
ee pour lâadministration dâun
nombre croissant dâinstituts de recherche. Apr`
es la premi`
ere guerre mondiale, la
R´
epublique de Weimar est proclam´
ee en Allemagne en 1919. La plupart des scien-
tiďŹques ´
etaient prË
ets `
a servir dans lâ´
etat, mais non pas `
a travailler pour un gouver-
nement social-d´
emocrate [1]. Ils ont consid´
er´
e le parlementarisme
(1)
comme ´
etant
d´
egradant. Mais la
ÂŤ
Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei
Âť
(NSDAP) de
Adolf Hitler nâ´
etait pas une alternative `
a cause de son caract`
ere dâun mouvement
de masse [9].
2.1
Les grandes ´
ecoles allemandes
Trois centres intellectuels ont jou´
e un rË
ole tr`
es important pour le d´
eveloppement
des th´
eories de la physique moderne : G¨
ottingen, Berlin et Munich. A G¨
ottingen,
il y avait une tradition de travail interdisciplinaire, entre les facult´
es de physique
et de math´
ematique. G¨
ottingen a contribuait beaucoup `
a la M´
ecanique statistique.
Les scientiďŹques fameux comme David Hilbert (th´
eorie de nombres, calcul varia-
tionnel et g´
eom´
etrie), Richard Courant (livre
ÂŤ
Les m´
ethodes math´
ematiques de la
physique
Âť
en 1924), Edmund Landau (th´
eorie des nombres), Amalie Emmy Noether
(alg`
ebre), Claus Hugo Hermann Weyl (th´
eorie de la relativit´
e), Max Born (relativit´
e,
m´
ecanique quantique et physique du solide), Robert Pohl et James Franck (physique
exp´
erimentale) ont travaill´
e `
a G¨
ottingen. Un grand pourcentage ´
etait des juifs.
Berlin ´
etait consid´
er´
e comme le centre de la physique en Allemagne. Max Planck
et Erwin Schr¨
odinger, p`
eres de la m´
ecanique quantique, ainsi que Max von Laue
(cristallographie) et Walther Nernst (troisi`
eme principe de la thermodynamique)
ont travaill´
e `
a Berlin. Otto Hahn et Lise Meitner (d´
ecouverte de la ďŹssion nucl´
eaire)
travaillaient au
ÂŤ
Kaiser-Wilhelm-Institut
Âť
(aussi `
a Berlin). Les scientiďŹques de Ber-
lin ont domin´
e la politique de la
ÂŤ
Deutschen Physikalischen Gesellschaft
Âť
(DPG),
lâassociation des physiciens allemands.
(1)
La Weimarer Nationalversammlung a ´
et´
e pl´
ebiscit´
ee en scrutin proportionnel.
3
CHAPITRE 2. LA PHYSIQUE SOUS HITLER
4
Sommerfeld ´
etait professeur en physique th´
eorique `
a Munich. Il a contribu´
e `
a la phy-
sique classique et moderne. En 1928 un tiers des professeurs en physique th´
eorique
en Allemagne ´
etaient des ´
el`
eves de Sommerfeld ! [2].
2.2
Adolf Hitler et la science
Adolf Hitler devint chancelier en 1933. Dans son livre programmatique
ÂŤ
Mein Kampf
Âť
[3] il avait ´
ecrit en 1925 :
Der v¨
olkische Staat muss von der Voraussetzung ausgehen, dass ein
zwar wissenschaftlich wenig gebildeter, aber k¨
orperlich gesunder Mensch
mit gutem, festem Charakter, erf¨
ullt von Entschlussfreudigkeit und Wil-
lenskraft, f¨
ur die Volksgemeinschaft wertvoller ist als ein geistreicher
Schw¨
achling.
Hitler nâavait donc pas de pr´
ef´
erence pour les intellectuels et il a gard´
e cette attitude
dans la suite.
Un des buts du nazisme ´
etait la disparition de la population juive en lâAllemagne.
Peu apr`
es lâaccession au pouvoir, Hitler a commenc´
e sa campagne de d´
enigrement
contre les juifs. Albert Einstein a aussi ´
et´
e victime de ces diďŹamations. Einstein ´
etait
peut-Ë
etre le scientiďŹque le plus connu `
a lâ´
epoque, mais avec son internationalisme, son
paciďŹsme et son sionisme il ´
etait terriblement d´
etest´
e par les antis´
emites. Einstein
´
etait en Am´
erique quand Hitler est devenu chancelier, et il nâest plus jamais rentr´
e
en Allemagne. Einstein d´
enonce imm´
ediatement son aďŹliation dans la
ÂŤ
Preussische
Akademie der Wissenschaften
Âť
, lâassociation la plus estim´
ee des savants, pour ex-
primer sa d´
esapprobation. Dans le public en Allemagne il fut consid´
er´
e comme un
traËÄątre.
Le 7. avril 1933 les nazis ont d´
epos´
e une loi au Reichstag qui a permis de r´
evoquer
les juifs du service public (
ÂŤ
Gesetz zur Wiederherstellung des Berufsbeamtentums
Âť
du 7. avril 1933 [5], cf. aussi appendice A). Dans lâarticle 3, alin´
ea 1 on lit :
Beamte, die nicht arischer Abstammung sind, sind in den Ruhestand [..]
zu versetzen; soweit es sich um Ehrenbeamte handelt, sind sie aus dem
Amtsverh¨
altnis zu entlassen.
La physique a ´
et´
e sensiblement touch´
ee par cette loi. Une fois adopt´
ee, un incroyable
exode forc´
e de sommit´
es commen¸ca qui mena les sciences pratiquement dans la
futilit´
e. 25 % de lâeďŹectif de physiciens a ´
et´
e perdu dans toute lâAllemagne [6], dont
11 ´
etaient laur´
eats du prix Nobel
(2)
!.
2.3
La situation `
a G¨
ottingen
Les incidents `
a G¨
ottingen ´
etaient caract´
eristique pour toutes les universit´
es en Al-
lemagne. A G¨
ottingen, trois des quatres directeurs dâinstitut (James Frank, Max
Born et Richard Courant) ´
etaient des juifs.
(2)
Albert Einstein, James Franck, Gustav Hertz, Erwin Schr¨
odinger, Viktor Hess, Otto Stern,
Felix Bloch, Max Born, Eugene Wigner, Hans Bethe et Dennis G´
abor
CHAPITRE 2. LA PHYSIQUE SOUS HITLER
5
Les ´
etudiants ont organis´
e une
ÂŤ
Aktion wider den undeutschen Geist
Âť
[7] le 13 avril
1933. Ils ont demand´
e aux ´
etudiants de consid´
erer les juifs comme des ´
etrangers
et que les Ĺuvres ´
ecrites par des juifs soient publi´
ees en h´
ebreu uniquement. Une
autodaf´
e de livres juifs a ´
egalement ´
et´
e organis´
ee. Par cons´
equent, lâadministration
universitaire a introduit un contingentement du nombre des ´
etudiants juifs.
Peu apr`
es James Franck
(3)
sâest d´
emis de ses fonctions en signe de protestation.
Mais sa d´
emission nâa pas ´
et´
e interpr´
et´
ee comme il lâavait pr´
evu. Dans la suite 42
professeurs dâuniversit´
e ont publi´
e la d´
eclaration suivante [8] :
Wir sind uns einig darin, dass die Form der obigen R¨
ucktrittserkl¨
arung
einem Sabotageakt gleichkommt, und hoďŹen, dass die Regierung die not-
wendigen Reinigungsmassnahmen daher beschleunigt durchf¨
uhren wird.
Deux jours apr`
es cette d´
eclaration, les professeurs Born, Courant et Noether ont ´
et´
e
suspendus.
Max Born a souďŹert sous lâantis´
emitisme et nâa pas voulu rester en Allemagne. Il a
accept´
e sa suspension et est parti `
a Cambridge.
Richard Courant, par contre, sâopposait `
a sa r´
evocation. 28 professeurs lâont soutenu
en signant une p´
etition contre la suppression de son poste. Mais cette intervention
nâa eu aucun eďŹet. `
A la ďŹn de lâann´
ee 1933, Courant est aussi parti `
a Cambridge.
Leur r´
esistance publique, ni active ni passive, nâa aid´
e - la seule solution pour les
scientiďŹques juifs ´
etait lâ´
emigration. Vu leur travail scientiďŹque et leur service mi-
litaire accompli pour lâ´
etat, il y avait plusieurs physiciens qui croyaient au d´
ebut
Ë
etre ´
epargn´
es. Courant en ´
etait un exemple. Mais Hitler nâa jamais voulu faire des
exceptions. Un jour Planck avait rendez-vous avec Hitler pour interc´
eder en faveur
des professeurs licenci´
es. Il paraËÄątrait que Hitler lui a r´
epondu [9] :
Unsere v¨
olkische Politik wird weder r¨
uckg¨
angig gemacht noch abge¨
andert
werden, auch nicht f¨
ur die Wissenschaftler. Wenn die Entlassung j¨
u-
discher Wissenschaftler die Vernichtung der zeitgen¨
ossischen deutschen
Wirtschaft bedeutet, dann werden wir eben einige Jahre lang ohne Wis-
senschaft auskommen.
Apr`
es une ann´
ee de dictature naziË
e, lâinstitut de physique `
a G¨
ottingen avait perdu
son directeur et la moiti´
e de ses collaborateurs. Lâinstitut de physique th´
eorique de
Born nâexistait plus et 3 des 4 professeurs en math´
ematiques avaient quitt´
e G¨
ottin-
gen. LâaďŹectation des postes vacants `
a des nouveaux professeurs fut report´
ee `
a plus
tard. La derni`
ere chaire `
a Ë
etre aďŹect´
ee `
a nouveau ´
etait celle de Born - en 1937 !
Lors dâun banquet o`
u Hilbert ´
etait assis `
a cot´
e du ministre de la science des nazis,
on a pu entendre la conversation int´
eressante suivante [10] :
le ministre :
Und wie steht es jetzt um die Mathematik in G¨
ottingen, da
sie vom j¨
udischen EinďŹuss befreit ist?
Hilbert :
Mathematik in G¨
ottingen? Gibtâs nicht mehr.
(3)
Plus tard il travaillait pour le Manhattan project `
a Chicago, le projet qui avait pour but de
construire la bombe atomique.
CHAPITRE 2. LA PHYSIQUE SOUS HITLER
6
2.4
Les minist`
eres de lâ´
education
Les positions cl´
es dans les minist`
eres de la science des pays ont ´
etaient occup´
ees
en 1933/34 par des adh´
erents du parti (de la NSDAP). En Bavi`
ere, câ´
etait Hans
Schemm qui est devenu ministre des AďŹaires culturelles. Schemm ´
etait fondateur du
ÂŤ
Nationalsozialistischen Lehrerbund
Âť
(lâunion des enseignants).
Sa position en ce qui concerne la formation peut Ë
etre comprise `
a travers la citation
suivante [11] :
Es ist l¨
acherlich zu glauben, man k¨
onnte Fremdrassige deutsche Kinder
erziehen lassen. Es fehlt beim Fremdrassigen die instinktive rassische
Sicherheit in der Nahrungsauswahl [..] Nur deutsche Menschen k¨
onnen
dem deutschen Volke Erzieher sein.
Lors dâun congr`
es `
a Munich, il a d´
eclar´
e devant des professeurs dâuniversit´
e :
Von jetzt an kommt es f¨
ur Sie nicht darauf an, festzustellen, ob etwas
wahr ist, sondern ob es im Sinne der Nationalsozialistischen Bewegung
ist.
Wilhelm Frick, ministre de lâint´
erieur du Reich, a coordonn´
e et surveill´
e tous les mi-
nistres allemands. Son minist`
ere pronon¸cait les renvois des personnes non-aryennes
dans les sciences. Lors dâun discours `
a la KWG `
a 1933 il a d´
eďŹni la maxime des
nazis [12] :
Es liegt im wissenschaftlichen Denken und Forschen etwas Souver¨
anes,
das den ganzen Menschen in Anspruch nimmt und alle anderen nicht
erfassen will; es liegt darin die Gefahr der Absonderung vom grossen
Ganzen, ja der Ablehnung oder Verkennung der PďŹicht, dem Ganzen zu
dienen. Lassen Sie uns daher bei aller Anerkennung der Freiheit der Wis-
senschaft dieser Gefahr das verpďŹichtende Bewusstsein gegen¨
uberstellen,
dass Dienst an der Wissenschaft Dienst am Volke sein muss; daĂ die Er-
gebnisse der Forschung wertlos bleiben, wenn sie nicht f¨
ur die Kultur des
Volkes Verwendung ďŹnden, und dass wir alle Glieder am Ganzen und
ihm zu dienen verpďŹichtet sind.
Ainsi, il a remplac´
e lâobjectivit´
e, le principe le plus important de la science, par
conscience politique et racisme. Pour r´
ealiser leurs id´
ees, les nazis poursuivaient le
principe de la mise au pas (Gleichschaltung). La premi`
ere ´
etape ´
etait lâexclusion des
juifs de toute activit´
e collective ou publique, et ensuite la seconde la concentration
du pouvoir des institutions par des adeptes convaincus du parti (le principe du lea-
der
(4)
).
La Prusse ´
etait le premier pays `
a priver les facult´
es du droit de d´
esigner les recteurs
dâuniversit´
e en 1933. En 1934, les nazis ont fond´
e le
ÂŤ
Reichserziehungsministerium
Âť
(REM), le minist`
ere de lâ´
education, qui r´
eorganisa les universit´
es en 1935 et qui
d´
ecida de la nomination des recteurs, vice-recteurs, des doyens ainsi que des diri-
geants des professeurs, charg´
es de cours et ´
etudiants.
(4)
en allemand : das F¨
uhrerprinzip.
CHAPITRE 2. LA PHYSIQUE SOUS HITLER
7
2.5
Les professeurs de physique
Sous le couvert de la l´
egalit´
e apparente de la prise du pouvoir progressive par les
national-socialistes, il nâ´
etait pas facile de faire opposition. Un grand nombre de
personnes croyait que la dictature serait de courte dur´
ee. Planck
(5)
a r´
epliqu´
e `
a un
confr`
ere ´
etranger qui sâinqui´
etait du futur des sciences en Allemagne [13] :
Ach, wo denken Sie hin, Kollege. Wenn Ihnen die jetzigen Zust¨
ande an
den Universit¨
aten nicht gefallen, so nehmen Sie einen Urlaub auf ein
Jahr. Machen Sie eine angenehme Studienreise ins Ausland. Und wenn
Sie zur¨
uckkehren, werden alle unangenehmen Begleiterscheinungen die-
ser Zeit verschwunden sein.
Pour la classe moyenne de la soci´
et´
e allemande les avantages du national-socialisme,
c-`
a-d. le d´
egagement du pacte de Versailles, lâ´
etablissement de millions de nouveaux
postes de travail, ainsi que la promotion du bien public etc. avaient le dessus sur les
inconv´
enients.
Mais avec les exigences d´
eďŹnitives de la politique des nazis, lâadaptation prudente
des scientiďŹques a c´
ed´
e la place `
a lâali´
enation de lâ´
etat. Ils ont essay´
e de motiver
les responsables `
a remettre les licenciements `
a plus tard
(6)
mais toujours en ´
evitant
toute confrontation entre le gouvernement et les institutions. Heisenberg explique
dans ses m´
emoires [14] sa lutte int´
erieure.
Radikale Gruppen von rechts und links demonstrierten auf den StraĂen,
bek¨
ampften sich mit WaďŹen in den Hinterh¨
ofen der ¨
armeren Stadtvier-
tel und agitierten gegeneinander in ¨
oďŹentlichen Versammlungen. Fast
unmerklich breitete sich die Unruhe und mit ihr die Angst auch im Uni-
versit¨
atsleben und in den Fakult¨
atssitzungen aus. Eine Zeitlang versuch-
te ich die Gefahr von mir wegzuschieben, die Auftritte auf den StraĂen zu
ignorieren. Aber die Wirklichkeit ist schliesslich doch st¨
arker als unsere
W¨
unsche...
Pour Heisenberg une ´
emigration volontaire ´
equivaudrait plutË
ot `
a un oubli de ses de-
voirs quâune protestation. Il avait compris quâ`
a une d´
emission de sa part ne change-
rait jamais lâavis du gouvernement. Heisenberg craignait une catastrophe et trouvait
que la pr´
esence de scientiďŹques ´
etait une n´
ecessit´
e urgente pour garantir une bonne
formation des jeunes physiciens. Ainsi il ´
ecrivait (toujours dans [14]) :
Fast beneidetete ich die Freunde, denen die Lebensgrundlage in Deutsch-
land mit Gewalt entzogen worden war und die daher wussten, dass sie
unser Land verlassen mussten.
2.6
Isolement international
Vu la situation en Allemagne, de moins en moins de scientiďŹques ´
etrangers visitaient
les universit´
es allemandes. Dâautre part, les voyages des scientiďŹques allemands `
a
lâ´
etranger ´
etaient soumis `
a des restrictions
(7)
.
(5)
Planck est mort en 1936.
(6)
Beaucoup de licenciements ont ´
et´
e eďŹectivement remplac´
es par des cong´
es.
(7)
Pour pouvoir prendre la parole aux congr`
es `
a lâ´
etranger, les allemands ´
etaient oblig´
es de
demander une autorisation aupr`
es le minist`
ere de la Propagande [15].
CHAPITRE 2. LA PHYSIQUE SOUS HITLER
8
Les revues scientiďŹques allemandes nâavaient plus le droit de publier des articles ´
ecrit
par des ´
etrangers et ont ainsi perdu la plupart de leurs abonn´
es `
a lâ´
etranger. En 1937,
ÂŤ
Nature
Âť
a ´
et´
e interdit en Allemagne [16]. Toutes ces actions conduiraient `
a un iso-
lement international des sciences en Allemagne et ďŹnalement `
a un d´
ep´
erissement.
Une minorit´
e de physiciens en Allemagne chercha `
a ďŹxer la priorit´
e au
ÂŤ
service du
peuple
Âť
en physique (cf. la premi`
ere citation `
a la page 6). Ces gens ´
etaient plutË
ot des
hommes politiques que des scientiďŹques. Pour eux, câ´
etaient les qualit´
es nationales
et non acad´
emiques qui comptaient. Ils ont essay´
e de modiďŹer les m´
ethodes de la
physique et dây introduire lâid´
eologie des nazis, en particulier lâantis´
emitisme. Les
repr´
esentants les plus fameux des ces id´
ees ´
etaient les laur´
eats du prix Nobel Philipp
Lenard et Johannes Stark. Dans le chapitre suivant, on va ´
etudier la biographie de
Philipp Lenard et essayer de r´
epondre `
a la question de savoir pourquoi un scientiďŹque
´
etabli et comp´
etent pouvait Ë
etre li´
e ´
etroitement au national-socialisme.
Chapitre 3
Lâ´
evolution de Philipp Lenard
Philipp Lenard est n´
e le 7 juin 1862 `
a Bratislava (Pressburg) durant la monarchie
dâAutriche-Hongrie. Sa grand-m`
ere a pris soin de Lenard la plupart du temps et elle
a ´
eveill´
e son admiration romantique pour les g´
enies du pass´
e [17]. En 1883 il est all´
e
en Allemagne ´
etudier la physique o`
u il a obtenu son doctorat `
es sciences chez Georg
Quincke `
a Heidelberg. En 1890, il a ´
emigr´
e en Angleterre. Mais lâAngleterre ne lui
convint pas et apr`
es seulement six mois il rentrait en Allemagne o`
u il devint assis-
tant chez Heinrich Hertz. Hertz ´
etait `
a moiti´
e juif, mais lâantis´
emitisme nâ´
etait pas
encore pr´
esent chez Lenard `
a lâ´
epoque. A ce moment il a commenc´
e les exp´
eriences
avec les rayons cathodiques, qui furent r´
ecompens´
ees en 1905 par le prix Nobel.
Avec le mort de Hertz en 1894 il du interrompre ses travaux et il accepta une chaire
de professeur `
a Breslau. Pour pouvoir continuer ses recherches exp´
erimentales, il a
donn´
e son cong´
e en 1895 et il est devenu assistant `
a la
ÂŤ
Technischen Hochschule
Âť
`
a Aachen (Aix-la-Chapelle), câ´
etait une mesure assez inhabituelle.
Le 8 novembre 1895, Conrad R¨
ontgen avait d´
ecouvert les rayons X
(1)
. Lenard ´
etait
convaincu que sâil nâavait pas du suspendre ses recherches, alors ce serait certaine-
ment lui qui les aurait trouv´
es. Lenard avait mË
eme expliqu´
e `
a R¨
ontgen comment il
fallait fabriquer le tube pour les produire. Mais R¨
ontgen nâ´
etait pas prË
et `
a partager la
gloire de sa d´
ecouverte avec Lenard, et Lenard ne lui pardonna jamais ce d´
edain [17].
En 1896, il partit `
a Heidelberg comme professeur extraordinaire en physique th´
eorique.
Lenard nâ´
etait pas vraiment int´
eress´
e pour la physique math´
ematique et a continu´
e
ses exp´
eriences. Int´
eress´
e par les travaux de Lenard, Joseph John Thomson lui a
rendu visite en 1896. Thomson ´
etait directeur du Cavendish Laboratory `
a Cam-
bridge. En 1899, Thomson a trouv´
e que les particules l´
eg`
eres constituant les rayons
cathodiques ´
etaient charg´
ees n´
egativement. Il a identiďŹÂ´
e lâ´
electron (publication
(2)
en
d´
ecembre 1899). En octobre 1899, Lenard a publi´
e ses travaux concernant lâeďŹet
photo´
electrique
(3)
, et aďŹrmait quâil avait envoy´
e ses r´
esultats `
a Thomson et que
celui ne savait pas appr´
ecier ses m´
erites [18].
Plus tard, Thomson a cit´
e une r´
e´
edition de lâarticle de Lenard, ce qui a rendu Lenard
furieux (ceci donnait lâimpression que Thomson ´
etait le premier `
a avoir publi´
e `
a ce
sujet). Lenard d´
etestait la mani`
ere
ÂŤ
anglaise
Âť
ďŹoue de rechercher et il les a accus´
es
de publier des r´
esultats impr´
ecis [19].
(1)
en allemand : R¨
ontgenstrahlung
(2)
prix Nobel de lâann´
ee 1906.
(3)
prix Nobel de lâann´
ee 1905.
9
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
10
Fig. 3.1: Philipp Lenard en 1900
. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, American Institute of
Physics.
Apr`
es sa gu´
erison dâune aďŹection du ganglion lymphatique, Lenard fut nomm´
e pro-
fesseur en 1907 `
a Heidelberg. Ses d´
emonstrations pendant les cours ´
etaient r´
eput´
ees
et ´
etaient de vrais spectacles. Carl Ramsauer, son assistant, lâappelait
â
Priester der
Physikâ
[20].
La physique th´
eorique qui se servait de plus en plus des math´
ematiques ne disait
rien `
a Lenard, car dans ce domaine il ´
etait mis `
a lâ´
ecart. Il est possible que son aver-
sion pour la physique th´
eorique venait du fait que Thomson ´
etait math´
ematicien
`
a la base. Pendant que la plupart des physiciens ´
etaient en train dâouvrir leur es-
prit `
a de nouveaux horizons de compr´
ehension, Lenard exigeait des directives pour la
physique qui faisaient appel `
a des recherches lentes, patientes, soigneuses et r´
ep´
et´
ees.
Dans son autobiographie Lenard se dit solitaire et incapable dâaimer ses prochains.
Sa frustration de la non-reconnaissance de ses travaux et son isolation sociale peuvent
Ë
etre des raisons pour lesquelles quâil a commenc´
e `
a sâengager pour le national-
socialisme. L`
a il a rencontr´
e un sentiment de solidarit´
e et de patrie.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
11
Avec le commencement de la premi`
ere guerre mondiale en 1914, Lenard a radicalis´
e
ses opinions. En aoË
ut, il a publi´
e un pamphlet qui condamnait lâentr´
ee en guerre de
lâAngleterre
(4)
[21] :
Man bemerkt da aus den letzten zehn Jahren in der Literatur meiner
Wissenschaft etwa das Folgende: England gibt sich den Anschein allei-
niger F¨
uhrung; ausw¨
arts erzielte Fortschritte werden reichlich benutzt,
oďŹen aber nur, wo sie keine wesentliche Rolle spielen, andernfalls wer-
den sie mit Hilfe einer gewissen Umgehung annektiert; der Ursprung
ďŹndet sich dann irgendwo an einer versteckten Stelle tief im Innern der
Publikation oder nur in irgendeiner schwer zug¨
anglichen Nebenpublikati-
on angegeben; manchmal wird auch das Hilfsmittel direkter historischer
Verdrehung benutzt. Kurzum, es zeigt sich beim einzelnen Engl¨
ander -
und sogar, wenn er Naturforscher ist - im Prinzip ungef¨
ahr dasselbe Bild,
das man auch aus Englands Politik hat.
Son livre regorge de sa haine pour les Anglais. Il accusait lâAngleterre dâavoir incit´
e
la Russie et la France `
a entrer en guerre. Il a sign´
e le
ÂŤ
Aufruf an die Kulturwelt
ÂŤÂť
,
une r´
esolution de 93 intellectuels qui contestaient la responsabilit´
e de la guerre,
le militarisme et la violation du droit international public par lâAllemagne. James
Franck ´
etait au front quand il a re¸cu une lettre de Lenard, dans laquelle celui di-
sait, quâil fallait surtout vaincre les Anglais, parce quâils ne lâavaient jamais cit´
e de
mani`
ere convenable [22].
Avant tout le reste Lenard sâest int´
eress´
e le plus `
a la d´
ecouverte des v´
eritables raisons
de la guerre `
a lâ´
epoque. Il a cherch´
e des raisons pour le mat´
erialisme soi-disant ´
ego¨Ĺste
des Anglais et pourquoi une nation avec des personnages historiques h´
ero¨Ĺques [34]
comme lâAngleterre pouvait devenir un pays avec des propri´
et´
es vulgaire et primitive.
Ainsi il commen¸ca `
a sâint´
eresser `
a la th´
eorie des races.
3.1
Lenard et Einstein
En 1905, Einstein travaillait `
a lâoďŹce des brevets `
a Berne quand il a publi´
e ces trois
travaux dans les
ÂŤ
Annalen der Physik
Âť
[23], notamment sur la
ÂŤ
Theorie der Brown-
schen Bewegung
(5)
Âť
,
ÂŤ
Zur Elektrodynamik bewegter K¨
orper
(6)
Âť
ainsi que
ÂŤ
¨
Uber
einen die Erzeugung und Verwandlung des Lichtes betreďŹenden heuristischen Ge-
sichtspunkt
(7)
Âť
Dans ce dernier article, il faisait mention des travaux de Lenard :
Die ¨
ubliche AuďŹassung, dass die Energie des Lichtes kontinuierlich ¨
uber
den durchstrahlten Raum verteilt sei, ďŹndet bei dem Versuch, die licht-
elektrischen Erscheinungen zu erkl¨
aren, besonders grosse Schwierigkei-
ten, welche in einer bahnbrechenden Arbeit von Herrn Lenard dargelegt
sind.
(4)
Hitler ordonnait lâinvasion de la Pologne `
a lâarm´
ee allemande le 1
er
septembre 1939. La
France et lâAngleterre ont d´
eclar´
e la guerre `
a lâAllemagne le 3
e
septembre.
(5)
contenant une preuve directe et d´
eďŹnitive de la structure atomique de la mati`
ere.
(6)
la relativit´
e restreinte.
(7)
Lâinterpr´
etation de lâeďŹet photo´
electrique `
a lâaide de la quantiďŹcation de la lumi`
ere.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
12
Le premier collaborateur dâEinstein ´
etait Johann Jakob Laub. Dans sa th`
ese de doc-
torat (1906) il avait utilis´
e la relativit´
e restreinte. En 1908 Laub est devenu assistant
chez Lenard `
a Heidelberg. En 1910 il a publi´
e un rapport
ÂŤ
¨
Uber die experimentel-
len Grundlagen des Relativit¨
atsprinzips
Âť
(cf. [24]) avec lâapprobation de Lenard.
Lenard avait donc accept´
e la relativit´
e restreinte et il avait connaissance de toutes
les publications dâEinstein. Mais Lenard nâ´
etait pas prË
et `
a accepter la nature quan-
tique de la lumi`
ere, il ne voulait en aucun cas abandonner les explications classiques.
Ainsi, il a suppos´
e que lâeďŹet photo´
electrique ´
etait du `
a un ph´
enom`
ene de r´
esonance
et il ´
ecrivit [25] :
[..] Annahme complicierter Bewegungsbedingungen der inneren Teile des
K¨
orpers [..] die Anfangsgeschwindigkeiten der ausgestrahlten Quanten
¨
uberhaupt nicht der Lichtenergie entstammen, sondern innerhalb der
Atome schon vor der Belichtung vorhandenen heftigen Bewegungen, so-
dass die Resonanzbewegungen nur eine ausl¨
osende Rolle spielen.
Bien que Lenard violait la vision classique de lâatome
(8)
avec ses travaux utilisant
les rayons cathodiques, il d´
efendait les concepts classiques. Il ´
etait convaincu de la
justesse du mod`
ele de lâether et a essay´
e dâ´
etendre le mod`
ele pour pouvoir expliquer
de nouveaux ph´
enom`
enes. En 1910, il publiait ses convictions dans son ouvrage
ÂŤ
¨
Uber ¨
Ather und Materie
Âť
[26] :
Ich glaube nicht, dass die Schwierigkeiten uns abhalten k¨
onnen, das vor-
handene Bild weiter zu entwickeln und zu pďŹegen, - denn dann w¨
urden
wir auf jedes solche Bild und die mechanische Begreifbarkeit der Natur
¨
uberhaupt verzichten. Ich glaube nicht, daĂ dies geschehen wird, auch
dann nicht, wenn wir, um die Mechanik des ¨
Athers klar zu haben, hinter
dem ¨
Ather und seinen Teilen noch einen anderen ¨
Ather sollten einf¨
uhren
m¨
ussen.
Einstein vint en 1914 `
a Berlin
(9)
et rendit public ses premiers travaux sur la relativit´
e
g´
en´
erale. Pendant les six derni`
eres ann´
ees, Einstein et Lenard nâavaient plus ´
et´
e en
contact. En 1918, Lenard a publi´
e son article
ÂŤ
¨
Uber Relativit¨
atsprinzip, ¨
Ather,
Gravitation
Âť
[26] avec lequel il voulait limiter la validit´
e de la relativit´
e g´
en´
erale :
Das Prinzip muss seine Allgemeing¨
ultigkeit aufgeben und nicht mehr
die Relativit¨
at aller Bewegungen behaupten, sondern sie auf solche Be-
wegungen beschr¨
anken, welche unter dem EinďŹuss massenproportionaler
Kr¨
afte
(10)
, wie es die Gravitation ist, vor sich gehen.
Einstein ripostait avec son c´
el`
ebre âDialog ¨
uber die Einw¨
ande gegen die Relativit¨
ats-
theorieâ [27]. Ce dialogue entre un critique et un partisan repr´
esente parfaitement
les points de vues oppos´
es de Einstein et Lenard et m´
erite absolument dâË
etre lu.
(8)
La vision de lâatome comme ´
etant un corps massif.
(9)
Preussische Akademie der Wissenschaften
(10)
[c-`
a-d. donn´
ees par un champ de gravitation.]
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
13
Lenard r´
e´
editait son article
ÂŤ
¨
Uber Relativit¨
atsprinzip, ¨
Ather, Gravitation
Âť
deux
ans plus tard en r´
ep´
etant les mË
emes objections. En plus il y a ajout´
e lâexigence
dâune th´
eorie compr´
ehensible pour le bon sens
(11)
. Einstein ne r´
eagisse plus `
a son
critique incompr´
ehensif. Le math´
ematicien Hermann Weyl ´
ecrivit en 1920 [27] :
Man muss einfach konstatieren, dass Lenard den Sinn der Einsteinschen
Lehre nicht erfasst.
Lenard nâ´
etait incontestablement pas le seul physicien qui invoquait des arguments
scientiďŹques contre la relativit´
e g´
en´
erale. Parmi les reproches on entendait entre
autres :
- la th´
eorie de la relativit´
e est une th´
eorie math´
ematique et non pas physique,
- la th´
eorie nâest pas encore suďŹsamment consolid´
ee exp´
erimentalement
(12)
,
- le concept de lâether ne doit pas Ë
etre abandonn´
e,
- le principe de la relativit´
e nâest valable que pour les mouvements qui d´
ependent
de la masse,
- lâespace euclidien et lâid´
ee classique du temps doivent Ë
etre maintenus.
Mais Lenard fut le seul qui `
a avoir des exigences ´
emotionnelles comme la clart´
e et
le conformisme au bon sens de la th´
eorie.
En aoË
ut 1920, une r´
eunion fut organis´
ee par Paul Weyland, qui nâ´
etait pas encore
connu `
a lâ´
epoque. Weyland avait pr´
epar´
e cette s´
eance par une s´
erie dâarticles dans
les journaux d´
enigrant Einstein comme plagiaire ([28] et [29]) et se r´
ef´
erait `
a Lenard.
Le soir mË
eme Weyland a pr´
esent´
e la relativit´
e comme une th´
eorie induisant en erreur
et sâest bas´
e sur le texte
ÂŤ
¨
Uber Relativit¨
at, ¨
Ather, Gravitation
Âť
de Lenard. Par la
suite Einstein ´
ecrivit un article dans le Berliner Tagblatt du 27 aoË
ut 1920 qui portait
le titre
ÂŤ
Meine Antwort
Âť
[30] :
Als ausgesprochenen Gegner der Relativit¨
atstheorie w¨
usste ich von den
Physikern von internationaler Bedeutung nur Lenard zu nennen. [..] Ich
bewundere Lenard als Meister der Experimentalphysik; in der theoreti-
schen Physik aber hat er noch nichts geleistet, und seine Einw¨
ande gegen
die allgemeine Relativit¨
atstheorie sind von solcher OberďŹÂ¨
achlichkeit, daĂ
ich es bis jetzt nicht f¨
ur n¨
otig erachtet habe, ausf¨
uhrlich auf dieselben
einzugehen.
On sait aujourdâhui quâon avait fait `
a tort le lien entre Lenard et Weyland (cf. par
exemple [30], ainsi que deux citation plus loin dans ce texte). Arnold Sommerfeld, qui
pr´
esidait la
ÂŤ
Deutsche Physikalische Gesellschaft
Âť
`
a lâ´
epoque, a essay´
e de r´
econcilier
Einstein avec Lenard en ´
ecrivant aux deux `
a ce sujet. Entre-temps Einstein regretta
sa r´
eaction, tandis que Lenard r´
epondit aigri `
a Sommerfeld [31] :
(11)
Par le bon sens, il entend un sens form´
e scientiďŹquement et ´
equip´
e selon le niveau scientiďŹque
de lâ´
epoque.
(12)
La th´
eorie conďŹrmait la d´
eviation de la lumi`
ere `
a proximit´
e de grandes masses lors de
lâobservation de deux ´
eclipses de soleil en 1919. Cet ´
ev´
enement faisait Einstein et sa th´
eorie
c´
el`
ebre dans le monde entier.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
14
Den Gedanken, eine Entschuldigung des Herrn Einstein mir gegen¨
uber,
noch dazu unter Voraussetzung einer ihm genehmen ¨
Ausserung meiner-
seits, f¨
ur zufriedenstellend zu halten, muss ich mit Entr¨
ustung zur¨
uckwei-
sen. [..] Diese ¨
Ausserungen des Herrn Einstein (an 3 Stellen des Artikels)
schreiben mir Eigenschaften zu, die mich in den Augen der Leser herab-
setzen m¨
ussen; sie sind jedenfalls ein Zeichen pers¨
onlicher Geringsch¨
at-
zung des Herrn Einstein gegen mich, deren Verwandlung in die erfor-
derliche Hochachtung aufgrund irgend einer Zusicherung von mir h¨
ochst
verwunderlich w¨
are.
Findet Herr Einstein seine ¨
Ausserungen f¨
ur bereuenswert, also wohl
f¨
ur falsch, so hat er sie ¨
oďŹentlich, als sie getan worden sind, wieder
zur¨
uckzuziehen; anders k¨
onnte er das an mir getane Unrecht nicht wieder
gut machen - soweit das ¨
uberhaupt m¨
oglich ist.
Die ¨
oďŹentliche Abgabe solcher Werturteile ¨
uber einen Kollegen, wie von
den Herren Laue, T¨
agl[iche] Rundschau und Einstein geschehen, ist mei-
nem Gef¨
uhl nach eine ganz ungeh¨
orige ¨
Uberheblichkeit und bezeichnet
einen Tiefstand der Gesinnung, welchen ich innerhalb der D[eutschen]
Phys[ikalischen] Ges[ellschaft], als deren wichtige Mitglieder die genann-
ten Herren als Berliner Vertreter der Physik wohl gelten, doch nicht ver-
mutet h¨
atte, obgleich ich sie f¨
ur sehr reformbed¨
urftig auch vorher schon
gehalten habe.
Au congr`
es de Nauheim, en septembre 1920, Lenard et Einstein se sont rencontr´
es
pour la premi`
ere fois personnellement et ont d´
efendu leurs avis de mani`
ere objective.
Lenard se trouva isol´
e et incompris avec ses objections. Dans sa troisi`
eme ´
edition de
ÂŤ
¨
Uber Relativit¨
at, ¨
Ather, Gravitation
Âť
parue en 1921 [32], il sâen plaignit :
Die AbschaďŹung des ¨
Athers wurde in Nauheim in der grossen Er¨
offnungs-
sitzung wieder als Resultat verk¨
undet [..] Man hat nicht dazu gelacht.
Ich weiss nicht, ob es anders gewesen w¨
are, wenn die Abschaffung der
Luft verk¨
undet worden w¨
are.
Einstein sâexcusa ďŹnalement, pour son article du 27 aoË
ut 1920 - dans le Berliner
Tageblatt, un jour apr`
es le congr`
es de Nauheim [32] :
Von den Professoren F. Himstedt (Freiburg) und M. Planck (Berlin) geht
uns aus Bad Nauheim die nachstehende Erkl¨
arung zur Ver¨
oďŹentlichung
zu: Im Berliner Tageblatt vom 27. August hat Herr Professor Einstein
unter dem Titel Meine Antwort ¨
uber die antirelativistische G.m.b.H.
einen Artikel der Abwehr gegen die Arbeitsgemeinschaft deutscher Na-
turforscher f¨
ur Reinheit der Wissenschaft gerichtet, in deren ersten Ver-
sammlung bekanntlich Herr Weyland ihn in pers¨
onlich geh¨
assiger Weise
angegriďŹen hat. In diesem Artikel hat er sich auch gegen Herrn Professor
Lenard gewendet, welcher neben anderen Physikern auf der Rednerli-
ste verzeichnet war. Bei Gelegenheit der j¨
ungsten Tagung der Naturfor-
scher[ver]sammlung in Bad Nauheim konnten wir feststellen, dass Herr
Lenard ohne sein Zutun auf die Rednerliste gekommen ist. Auf Grund
dieser Tatsache hat uns Herr Einstein erm¨
achtigt, sein lebhaftes Bedau-
ern auszusprechen, dass er die in seinem Artikel enthaltenen Vorw¨
urfe
auch gegen den von ihm hochgesch¨
atzten Kollegen Herrn Lenard gerich-
tet hat.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
15
Mais lâaigreur de Lenard ´
etait trop grande, il nâaccepta pas les excuses dâEinstein.
Lenard quitta la
ÂŤ
Deutsche Physikalische Gesellschaft
Âť
et il interdit aux membres
de cette association dâentrer dans son bureau `
a son institut `
a Heidelberg. Pour la
premi`
ere fois, il pronon¸ca des paroles racistes [32] :
Es ist bekannte j¨
udische Eigent¨
umlichkeit, sachliche Fragen leicht sofort
auf Gebiet des pers¨
onlichen Streits zu verschieben. [..] Lebt gesunder
deutscher Geist - der freilich PďŹege und Schutz n¨
otig h¨
atte - wieder auf,
so wird von selbst der Fremdgeist weichen m¨
ussen, der als dunkle Macht
¨
uberall auftaucht und der auch in allem, was zur Relativit¨
atstheorie
geh¨
ort, so deutlich sich auspr¨
agt. Wir leben in einem nicht weniger
dunklem Zeitalter als die Inquisition es war. Ich weiss, dass Mahner, die
Erleuchtung w¨
unschen, leicht ¨
ubel fahren in solchen Zeiten. M¨
ochte kla-
rer Sinn deutscher Naturforscher - statt solches an mir sich bew¨
ahren zu
lassen - die Erleuchtung bringen, und die allenthalben verf¨
ugbare Macht
des Dunkelgeistes brechen helfen.
Peu apr`
es lâacad´
emie des sciences su´
edoise a attribu´
e le prix Nobel de 1921 `
a Einstein
pour son travail sur lâeďŹet photo´
electrique
(13)
ce qui aďŹecta Lenard profond´
ement,
car câ´
etait lui qui avait fourni les faits exp´
erimentaux. Ainsi, il a protest´
e aupr`
es du
comit´
e pour cette attribution.
Avec la remise du prix `
a Einstein Lenard avait subi un ´
echec de ses essais de le
discr´
editer. Dans sa autobiographie il ´
ecrivit plus tard :
[Die Relativit¨
atstheorie war] ein Judenbetrug, was man mit mehr Ras-
senkunde, als damals verbreitet war, auch von vornherein h¨
atte vermuten
k¨
onnen, da der Urheber Einstein Jude war. Meine Entt¨
auschung war um
so gr¨
osser, als eine ganz ¨
uberwiegende Zahl von Vertretern der Physik
dem Rechengetue der Juden sich mehr oder weniger angeschlossen hatte.
Quels ´
etaient les motifs de son adh´
esion `
a lâantis´
emitisme et puis au national-
socialisme ? Trois incidents ont probablement eu une inďŹuence sur lui : En 1922,
son seul ďŹls ´
etait d´
ec´
ed´
e `
a cause de sous-alimentation
(14)
, lâinďŹation avait d´
evaloris´
e
ses titres de cr´
eances sur lâor quâil avait mis `
a disposition `
a lâ´
etat et ďŹnalement lâas-
sassinat
(15)
de Walther Rathenau par des extrË
emes droites. Rathenau ´
etait ministre
des aďŹaires ´
etrang`
eres et il ´
etait juif. Lenard a refus´
e de respecter le deuil national
ordonn´
e. Sous la pression des syndiqu´
es il fut arrË
et´
e, puis il lui fut interdit de rentrer
`
a lâinstitut. 600 ´
etudiants signirent une p´
etition pour sa red´
esignation. Ainsi, il entra
en contact avec des ´
etudiants dâextrË
eme-droite et il participa `
a des discussion sur
Hitler.
(13)
Einstein nâa pas ´
et´
e d´
ecern´
e en reconnaissance de ses m´
erites pour la th´
eorie de la relativit´
e
pour ne pas Ë
etre pris sous les feux de la critique.
(14)
Il y avait un blocus de lâAllemagne.
(15)
22 juin 1922.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
16
Le 1
er
avril 1924, Hitler fut emprisonn´
e
(16)
. Peu apr`
es, Lenard publia son ralliement
au national-socialisme et `
a Hitler [33] :
Wir erkennen bei Hitler und seinen Genossen eben denselben Geist [..],
den wir bei unserer Arbeit, damit sie tiefgehend und erfolgreich sei, selbst
stets gesucht, erstrebt, aus uns hervorgeholt haben: den Geist restloser
Klarheit, der Ehrlichkeit der Aussenwelt gegen¨
uber, zugleich der inne-
ren Einheitlichkeit, den Geist, der jede Kompromissarbeit hasst, weil sie
unwahrhaftig ist. Es ist das aber auch der Geist, den wir - als uns vor-
bildlich - fr¨
uh schon in den grossen Forschern der Vergangenheit erkannt
und verehrt haben, in Galilei, Kepler, Newton, Faraday. Wir bewundern
und verehren ihn in gleicher Weise auch in Hitler, LudendorďŹ, P¨
ohner
und ihren Genossen; wir erkennen in ihnen unsere allern¨
achsten Geistes-
verwandten.
Man bedenke, was es bedeutet, daà wir solcherart Geister verk¨
orpert
unter uns leben haben d¨
urfen. Selten waren sie zu allen Zeiten, diese
Kulturbringer-Geister. Es ruht aber auf ihrer T¨
atigkeit alles innerliche
H¨
oherstreben der Menschheit und aller Erfolg davon, der uns das Leben
auf Erden lebenswert und sch¨
on macht. Diese Geister ďŹnden sich erfah-
rungsm¨
assig nur im arisch-germanischen Blut verk¨
orpert, wie denn auch
die genannten Grossen der Naturforschung dieses Blutes waren [..]
[Es arbeitet jedoch ein gef¨
ahrlicher fremdrassiger Geist.] Es ist ganz die
gleiche T¨
atigkeit, immer mit demselben asiatischen Volk im Hintergrund,
die Christus ans Kreuz, Jordanus Brunus auf den Scheiterhaufen brachte,
Hitler und LudendorďŹ mit dem Maschinengewehr beschiesst und hinter
Festungsmauern bringt: der Kampf der Dunkelgeister gegen die Licht-
bringer, mit dem Streben, die letzteren aus der Erdenwirksamkeit aus-
zuschalten [..] [Hitler] und seine Kampfgenossen, sie scheinen uns wie
Gottesgeschenke aus einer l¨
angst versunkenen Vorzeit, da Rassen noch
reiner, Menschen noch gr¨
osser, Geister noch weniger betrogen waren.
Wir f¨
uhlen das, und die Geschenke sollen uns nicht genommen werden.
Dieser Gedanke allein muà schon gen¨
ugende Festigkeit verleihen, um
die V¨
olkischen zusammenzuhalten zu ihrem grossen Ziel: mit Hitler als
â
Trommlerâ ein neues Deutschland zu gr¨
unden, in dem deutscher Geist
nicht nur etwa wieder einigermassen geduldet und ausser Kerkern gelas-
sen wird, nein, in dem er gesch¨
utzt, gepďŹegt, betreut wird und dann end-
lich wieder gedeihen und sich weiter entwickeln kann zur Ehrenrettung
des Lebens auf unserem jetzt von minderwertigem Geist beherrschten
Planeten.
Son admiration romantique des h´
eros (cf. d´
ebut de ce chapitre) a donc pris une
coloration raciste. Bien que Lenard ne fut pas adh´
erent du parti jusquâen 1937, il a
nou´
e des contacts avec les nazis.
(16)
Pour sa participation au putsch de Hitler-LudendorďŹ au novembre 1923.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
17
Fig. 3.2: Philipp Lenard en 1930
. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, American Institute of
Physics.
CHAPITRE 3. Lâ ´
EVOLUTION DE PHILIPP LENARD
18
Lenard commen¸ca `
a r´
ediger des trait´
es historiques et des articles pour le
ÂŤ
Hand-
buch der Experimentalphysik
Âť
(tome 14 :
ÂŤ
Kathodenstrahlen
Âť
, 1927 ; tome 23 :
ÂŤ
Phosphoreszenz und Fluoreszenz
Âť
, 1928) puis
ÂŤ
Grosse Naturforscher
Âť
, 1929 [34].
Le dernier est ´
ecrit avec lâarri`
ere-pens´
ee imp´
erative que toutes les grands travaux
remontaient `
a la race aryenne-germaine. En 1931, il prit sa retraite.
En 1933, il sâadressa `
a Hitler pour se proposer comme conseiller pour lâaďŹectation des
postes en physique. Johannes Stark, qui avait une id´
eologie semblable, fut d´
esign´
e
peu apr`
es comme nouveau pr´
esident de la
ÂŤ
Physikalisch-Technischen Reichsanstalt
Âť
.
Lenard jubilait [35] :
Es war dunkel geworden in der Physik, und zwar von oben herab. Mit
dem m¨
achtigen Eindringen der Juden in massgebende Stellen, auch an
Universit¨
aten und Akademien, war die Grundlage alles Naturwissens,
die Beobachtung der Natur selbst, in Vergessenheit und ausser Geltung
gebracht worden. Es sollte das Wissen von den Dingen der Aussen-
welt in den Einf¨
allen menschlicher K¨
opfe seine Grundlage haben. Diese
Einf¨
alle, sofort
â
Theorienâ genannt, sollten dann von Experimentatoren
â
best¨
atigtâ werden. Letzteres erfolgte meist pďŹichtschuldigst und schnell
durch m¨
oglichst oberďŹÂ¨
achliche Arbeit. Die
â
Freiheit der Forschungâ be-
kam durch Zur¨
uckdr¨
angung freim¨
utiger ¨
Ausserungen gegen solches Vor-
gehen einen besonderen Anstrich.
Das hervorragendste Beispiel sch¨
adlicher BeeinďŹussung der Naturfor-
schung von j¨
udischer Seite hat Herr Einstein geliefert mit seinen aus gu-
ten, schon vorher dagewesenen Erkenntnissen und einigen willk¨
urlichen
Zutaten mathematisch zusammengestoppelten
â
Theorienâ, die nun schon
allm¨
ahlich in St¨
ucke zerf¨
allt, wie es das Schicksal naturfremder Erzeug-
nisse ist. Man kann hierbei selbst mit gediegener Leistung dastehenden
Forschern den Vorwurf nicht ersparen, daĂ sie den
â
Relativit¨
atsjudenâ in
Deutschland ¨
uberhaupt erst haben festen Fuss fassen lassen, nicht sehen
oder nicht sehen wollend, wie sehr irrig es auch in nicht-wissenschaftli-
cher Beziehung war, gerade diesen Juden f¨
ur einen
â
guten Deutschenâ
zu halten.
Pour d´
eraciner lâesprit de la physique moderne dans la formation des futurs
ÂŤ
phy-
siciens aryens
Âť
, Lenard sortit en 1936 le trait´
e de physique
ÂŤ
Deutsche Physik
Âť
en
quatre tomes [37].
Chapitre 4
Une physique aryenne
Les partisans de ce quâon appelle aujourdâhui la physique aryenne nâont jamais
form´
es un v´
eritable mouvement avec un programme propre. Mais ses adh´
erents
avaient tout de mË
eme des points communs caract´
eristiques, ils avaient tous une
vision du monde m´
ecaniste et d´
efendaient la physique classique. Il refusaient lâin-
troduction des concepts de la physique moderne et d´
esapprouvaient la physique
th´
eorique axiomatique. Pour eux, la physique se base uniquement sur lâobservation
de la nature et a comme seul outil lâexp´
erience pr´
ecise et consciencieuse. Vu leur
id´
eologie raciste antis´
emite, ils interpr´
etaient toute observation comme d´
ependante
du patrimoine raciste, ainsi seul lâaryen est un bon physicien. Par cons´
equent ils
avan¸caient en vue dâinďŹltrer la physique avec des id´
ees nationales et raciales.
Johannes Stark
(1)
et Philipp Lenard ´
etaient les personnalit´
es les plus ´
eminents de
ce groupement.
Une Ĺuvre fondamentale de la physique aryenne est le livre
ÂŤ
Grosse Naturforscher
Âť
[34] de Lenard. Il pr´
esente les grands naturalistes jusquâau 19
e
si`
ecle et justiďŹe les
grandes d´
ecouvertes comme ´
etant dues `
a lâorigine aryenne ou germaine des cher-
cheurs. Heinrich Hertz
(2)
apparaËÄąt dans ce livre, mË
eme sâil ´
etait `
a moiti´
e juif. Lenard
explique dans des ´
editions post´
erieurs que ses performances ´
etaient uniquement re-
devable au sang aryen coulant dans ses veines. Il attribuait `
a Friedrich Hasen¨
ohrl
(3)
,
un physicien autrichien, la d´
ecouverte de la formule c´
el`
ebre
E
=
m
¡
c
2
pour ainsi en
faire une conquË
ete aryenne.
La deuxi`
eme contribution de Lenard `
a la physique aryenne est lâĹuvre
ÂŤ
Deutsche
Physik
Âť
d´
ej`
a mentionn´
ee `
a la ďŹn du chapitre pr´
ec´
edent destin´
ee `
a lâenseignement
[37]. La premi`
ere partie traite de la physique de la mati`
ere (m´
ecanique, acoustique et
chaleur) tandis que la deuxi`
eme partie pr´
esente celle de lâether (optique, ´
electricit´
e
et magn´
etisme).
(1)
Biographie cf. [36], prix Nobel en 1919 pour la d´
ecouverte de lâeďŹet Doppler des rayons
canaux et lâeďŹet Stark (d´
edoublement des raies du spectre dâ´
emission dâun atome plac´
e dans
un champ ´
electrique). Avec la d´
ecouverte de lâeďŹet Stark il ´
etait un des premiers `
a d´
efendre
la th´
eorie de la relativit´
e dâEinstein et lâhypoth`
ese des quanta de Planck. Par la suite, Stark
changea de position et les attaqua violemment.
(2)
1857 - 1894. Hertz ´
etait professeur de Lenard `
a Bonn. D´
ecouverte de lâeďŹet photo´
electrique
ainsi que production et d´
etection des ondes ´
electromagn´
etiques.
(3)
1874 - 1915
19
CHAPITRE 4. UNE PHYSIQUE ARYENNE
20
Fig. 4.1: Johannes Stark
. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives, American Institute of Physics.
Le leitmotiv de cet ouvrage se trouve tr`
es clairement pr´
esent´
e au d´
ebut du premier
tome (introduction et m´
ecanique) :
â
Deutsche Physik?â wird man fragen. - Ich h¨
atte auch arische Physik
oder Physik der nordisch gearteten Menschen sagen k¨
onnen, Physik der
Wirklichkeits-Ergr¨
under, der Wahrheit-Suchenden, Physik derjenigen,
die Naturforschung begr¨
undet haben.
Stark a fait deux contributions : En 1934 il a publi´
e
ÂŤ
Nationalsozialismus und Wis-
senschaft
Âť
[38] qui raconte lâhistoire du conďŹit aryen-juif. Il identiďŹe les juifs comme
promoteur du gouvernement odieux de Weimar. Deuxi`
emement il a r´
esum´
e dans
un discours (publi´
e sous le titre
ÂŤ
J¨
udische und deutsche Physik
Âť
[39]) le pr´
etendu
dommage que les juifs auraient fait `
a la science allemande. Il a ´
egalement condamn´
e
la m´
ecanique quantique comme ´
etant un formalisme
ÂŤ
infructueux
Âť
.
CHAPITRE 4. UNE PHYSIQUE ARYENNE
21
4.1
Vision du monde
La tentative d´
esesp´
er´
ee de Lenard de maintenir lâether comme mod`
ele de base de
la physique nâest pas surprenante, car il ´
etait ´
el´
ement constitutif essentiel dâune
compr´
ehension m´
ecaniste de notre monde chez les physiciens aryens. Avec le refus
de la m´
ecanique quantique et de la relativit´
e, câ´
etait le seul outil restant pour essayer
dâexpliquer les ph´
enom`
enes physiques. Lâether est le milieu dans lequel se propagent
les ondes ´
electromagn´
etiques. Lenard a d´
eďŹni le
ÂŤ
Ur¨
ather
Âť
qui remplit lâunivers
tout entier et qui est uniforme loin de lâ´
energie. Comme ´
echappatoire `
a la fameuse
exp´
erience de Michelson et Morley
(4)
, il a introduit un ether individuel attach´
e `
a
chaque partie de la mati`
ere, tant particule ou que tant plan`
ete, la mati`
ere am`
ene
toujours son propre ether... ([37], tome 4)
En plus de la garantie dâune image m´
ecaniste du monde, lâether avait une signiďŹca-
tion toute diďŹÂ´
erente ([37], tome 1) :
Die BegriďŹe sind zwar gefunden, welche den Vorstellungen vom ¨
Ather
festen Anhalt geben; aber Mechanismen im ¨
Ather hat man vergeblich
gesucht; alles in dieser Richtung probeweise Erdachte stimmt schlecht
mit der Wirklichkeit. Der ¨
Ather ist oďŹenbar schwerer zu begreifen als
die Materie; er scheint schon die Grenzen des BegreiďŹichen zu zeigen.
Dass diese Grenzen beim Versuch, die Welt der Geister zu begreifen,
vollst¨
andig ¨
uberschritten sind, ist oďŹensichtlich; kein Menschengeist kann
auch nur seinen eigenen Geist begreifen.
Lenard parle ici dâun ind´
eterminisme de la cognition scientiďŹque dË
u `
a lâinsuďŹsance
de lâintellect humain. La pr´
ecision quantitative de lâexploration de la nature est
limit´
ee par lâhomme dans le mod`
ele de lâether, tandis que dans la th´
eorie de la
m´
ecanique quantique câest le processus de la mesure
(5)
qui la limite.
Quant `
a
ÂŤ
lâexp´
erimentalisme
Âť
de la physique aryenne, il existe un parall`
ele int´
eressant
avec un mouvement avec lequel elle a peu en commun : la th´
eorie de lâ´
evolution
ÂŤ
re-
nouvelant
Âť
(emergent
(6)
), qui se distingua `
a la ďŹn des ann´
ees vingt. Cette th´
eorie
admettait un univers qui confrontait constamment ses Ë
etres avec des nouveaux
ph´
enom`
enes quâil sâagissait de d´
ecouvrir. Le seul chemin qui pouvait conduire `
a
lâentendement de la nature ´
etait lâobservation et lâexp´
erience. Th´
eorie et d´
eďŹnition
ne servaient pas `
a grande chose sous ses conditions. La physique aryenne nâ´
etait
donc pas le premier groupement qui a d´
esign´
e lâexp´
erience comme sa maxime.
(4)
Si lâether existait, on devrait pouvoir mesurer un vent dâether dË
u au mouvement de rotation
relative de la terre par rapport `
a cet ether. Une mise en ´
evidence par Michelson et Morley
avortait en 1887.
(5)
Les relations dâincertitude de Heisenberg.
(6)
cf. par exemple [40]
CHAPITRE 4. UNE PHYSIQUE ARYENNE
22
4.2
Une science raciste
Dans lâintroduction de lâouvrage
ÂŤ
Deutsche Physik
Âť
[37] Lenard d´
eďŹnit :
In Wirklichkeit ist die Wissenschaft [..] rassisch.
Pour la physique aryenne, le chercheur aryen d´
eploie une activit´
e cr´
eatrice tandis
que lâactivit´
e du chercheur juif fournit des plagiats. Cette diďŹÂ´
erenciation se trouve
d´
ej`
a dans
ÂŤ
Die Grundlagen des 19. Jahrhunderts
Âť
du th´
eoricien des races, Houston
Stewart Chamberlain
(7)
[41] :
Die Erfahrung - d.h. genaue, minuti¨
ose, unerm¨
udliche Beobachtung - gibt
das breite, felsenfeste Fundament germanischer Wissenschaft ab, gleich-
viel ob sie Philologie oder Chemie oder was sonst betreďŹe: die Bef¨
ahigung
zur Beobachtung sowie die Leidenschaftlichkeit, Aufopferung und Ehr-
lichkeit, mit der sie betrieben wird, sind ein wesentliches Charakteri-
stikum unserer Rasse. Die Beobachtung ist das Gewissen germanischer
Wissenschaft.
Ce qui signiďŹe que le chercheur aryen entre en dialogue avec la nature, tandis que
le juif postule des th´
eories avec des calculs math´
ematiques sophistiqu´
es sans te-
nir compte des donn´
ees exp´
erimentales. Lors de lâinauguration de lâinstitut Philip-
Lenard de lâuniversit´
e de Heidelberg en 1936, un ´
etudiant de Lenard, Alfons B¨
uhl,
a exprim´
e ceci de la mani`
ere suivante [42] :
Diese ¨
Ubertreibung der mathematischen Behandlung physikalischer Pro-
bleme ist zweifellos j¨
udischem Geist entsprungen. Der Jude hat ¨
uberall,
wo er sich mit Physik besch¨
aftigt hat, dieses Zahlenm¨
assige, Rechneri-
sche als besondere Leistung der Physik empfunden. Und so wie er auch
sonst, etwa bei seinen Handelsgesch¨
aften, immer nur das Zahlenm¨
assige,
die Gewinn- und Verlustrechnung vor Augen hat, ohne sich viel um den
Sinn oder die Art der von ihm betriebenen Gesch¨
afte zu k¨
ummern, so
muĂ es auch in der Physik als ein typisches Rassenmerkmal des Juden
bezeichnet werden, daĂ er die mathematische Formulierung so in den
Vordergrund stellt.
Avec lâentr´
ee du racisme dans la physique aryenne, câen ´
etait fait de lâobjectivit´
e du
physicien. La science impartiale avait une tradition longue et couronn´
ee de succ`
es.
Les physiciens aryens interpr´
etaient lâobjectivit´
e du chercheur comme amour de la
v´
erit´
e manquante [42]. Au lieu de ce principe fondamental, Stark demandait aux
naturalistes allemands un engagement dans la politique [43] :
Ein deutscher Naturforscher soll jedoch nicht bloss ein enger Fachmann
sein, sondern er soll auch als deutscher Volksgenosse f¨
uhlen und handeln.
Er soll sich nicht in sein Laboratorium einschliessen und sagen:
â
Was da
draussen in der Politik vorgeht, ist mir gleichg¨
ultig. Ich gehorche eben-
sogut einem roten oder schwarzen Minister wie einem nationalsoziali-
stischen; es gen¨
ugt doch, dass ich in meinem Fache arbeite und etwas
leisteâ.
(7)
1855 - 1927. Chamberlain ´
ecrivait ce livre `
a la ďŹn du 19
e
si`
ecle. Il peint lâhistoire de lâOccident
comme la lutte des races. Les Germains jouent le rË
ole du cr´
eateur de la culture, le juda¨Ĺsme
celui du destructeur. Ce livre a ´
enorm´
ement inspir´
e les nazi plus tard.
CHAPITRE 4. UNE PHYSIQUE ARYENNE
23
De plus, Lenard a exig´
e le refus de lâinternationalisme, une propri´
et´
e `
a laquelle
Einstein tenait particuli`
erement [37] :
Juden sind ¨
uberall, und wer heute noch die Behauptung von der Inter-
nationalit¨
at der Naturwissenschaft verďŹcht, der meint wohl unbewusst
die j¨
udische, die allerdings mit den Juden ¨
uberall und ¨
uberall gleich ist.
4.3
Point de vues s´
epar´
es
En ce qui concerne les questions racistes, les partisans de la physique aryenne ´
etaient
ainsi du mË
eme avis. Il y avait quand mË
eme des sujets o`
u ils ´
etaient divis´
es en deux
camps, ce qui a limit´
e la puissance de frappe du mouvement. Dâune part, les opinions
sur le rË
ole de la technique comme domaine appliqu´
e de la physique diďŹÂ´
eraient : Stark
[38] et autres ont per¸cu la n´
ecessit´
e de la technique dans la lutte ´
economique, surtout
pour son usage militaire pendant la guerre. Lenard par contre faisait ďŹ du progr`
es
technique comme mat´
erialisme et lâa interpr´
et´
e comme oďŹense `
a la v´
en´
eration de la
nature [32] :
Ehrfurcht vor der grossen Lehrmeisterin und Entscheiderin Natur wird
doch immer erstes Kennzeichen wahrer Naturforschung bleiben m¨
ussen.
ce qui lâa conduit au rejet de la technique [37] :
In neuester Zeit haben die Erfolge der Technik eine besondere Art von
¨
uberm¨
utigem StoďŹwahn gebracht. Mit der Ausnutzung der praktischen
M¨
oglichkeiten, die das Verstehen der Natur gab, kam der Gedanke des
â
Beherrschensâ der Natur auf:
â
Der Mensch war langsam Herr der Na-
tur gewordenâ. Solche ¨
Ausserungen im Sinne geistesarmer Grosstech-
niker haben durch den Prunk, welchen deren Mittel erm¨
oglichen, viel
EinďŹuss gewonnen, und die Wirkung des allzersetzenden, in Physik und
Mathematik eingedrungenen Fremdgeistes hat ihn verst¨
arkt.
En outre, les opinions concernant les doctrines divergeaient : Lenard nâa jamais
mentionn´
e la th´
eorie ´
electronique de lâatome de Stark, tandis que Stark nâa jamais
soutenu Lenard pour sa th´
eorie de lâether.
En d´
epit de tout cela, ils avaient tous un but commun : Le bannissement de la phy-
sique th´
eorique des ´
etablissements dâenseignement sup´
erieurs en Allemagne. Pour y
arriver, ils ont discr´
edit´
e les physiciens th´
eoriciens allemands en les accusant dâune
ÂŤ
pens´
ee juive
Âť
et - apr`
es les avoir chass´
e de leurs places - ils les ont remplac´
es par
leurs semblables.
Chapitre 5
La promotion de la physique
aryenne
En 1935, les physiciens ont c´
el´
ebr´
e la rebaptisation de lâinstitut de physique
ÂŤ
Philipp-
Lenard
Âť
`
a Heidelberg. Cet ´
ev´
enement a marqu´
e le d´
ebut des tentatives dâ´
eviction des
th´
eoriciens modernes de leurs postes. Dans son discours, lors des festivit´
es, Lenard
a appel´
e au soutien accru `
a la physique aryenne, et il sâest plaint du fait que la phy-
sique
ÂŤ
juive
Âť
avait toujours la possibilit´
e de publier dans les revues et journaux [44].
Par la suite, il a gagn´
e lâappui de Alfred Rosenberg, qui ´
etait le chef de ďŹle du parti
national-socialiste. Rosenberg lui a conďŹÂ´
e la d´
esignation dâun conseiller scientiďŹque
pour la r´
edaction du
ÂŤ
V¨
olkischer Beobachter
Âť
, lâorgane du parti. La cons´
equence fut
une s´
erie dâarticles dans ce journal attaquant la physique dogmatique
(1)
personniďŹÂ´
ee
par Werner Heisenberg et Arnold Sommerfeld (cf. [60] ou lâannexe B). Par exemple
Stark d´
ecrivit [43] :
Nun, Einstein ist heute aus Deutschland verschwunden, und kein ernst-
hafter Physiker sieht mehr in seinen Relativit¨
atstheorien eine unantast-
bare OďŹenbarung. Aber leider haben seine deutschen Freunde und F¨
or-
derer noch die M¨
oglichkeit, in seinem Geiste weiter zu wirken. Noch
steht sein Hauptf¨
orderer Planck an der Spitze der
â
Kaiser-Wilhelm-
Gesellschaftâ, noch darf sein Interpretator und Freund, Herr von Laue, in
der Berliner Akademie der Wissenschaften eine physikalische Gutachter-
Rolle spielen. Und der theoretische Formalist Heisenberg, Geist vom Gei-
ste Einsteins, soll sogar durch eine Berufung ausgezeichnet werden. Ge-
gen¨
uber diesen bedauerlichen Zust¨
anden, welche nationalsozialistischem
Geist widersprechen, mag der Kampf Lenards gegen den Einsteinismus
eine Mahnung sein. Und es ist zu w¨
unschen, dass die zust¨
andigen Refe-
renten in den Kultusministerien sich von Lenard in der Besetzung der
physikalischen, auch der theoretischen Lehrst¨
uhle beraten lassen.
(1)
Stark nâutilisait pas la distinction physique aryenne versus physique juive mais pragma-
tique (physique exp´
erimentale, dans le sens aryen) versus dogmatique (physique th´
eorique
moderne et axiomatique).
24
CHAPITRE 5. LA PROMOTION DE LA PHYSIQUE ARYENNE
25
Malgr´
e le danger dâune intervention politique, les trois physiciens Heisenberg, Max
Wien
(2)
et Hans Geiger
(3)
r´
edig`
erent un m´
emoire qui fut sign´
e par 75 personnes. Ils
demandaient lâach`
evement de lâaltercation entre les deux partis, et d´
eploraient le
manque dâ´
etudiants en physique, le manque de rel`
eve scientiďŹque et les diďŹcult´
es
croissantes rencontr´
ees lors de nominations acad´
emiques. En outre, ils ont condamn´
e
les attaques contre la physique th´
eorique, en faisant remarquer que cela exer¸cait une
inďŹuence n´
egative sur le prestige de lâAllemagne `
a lâ´
etranger [9].
Par la suite, de tels articles (comme celui dans lâannexe B) ne furent plus publi´
es,
et donc les physiciens aryens eurent besoin dâun nouveau porte-parole.
Le
ÂŤ
Reichserziehungsministerium
Âť
(REM) a ´
et´
e fond´
e en 1934 avec la mission dâad-
ministrer les sciences. Cette institution ´
etait tr`
es bureaucratique et ses responsables
sâopposaient aux changements radicaux en sâengageant en g´
en´
eral pour le maintien
des valeurs de tradition morales dans le domaine de la science. Le REM se chargeait
dâattribuer les chaires acad´
emiques `
a des savants qualiďŹÂ´
es et jugeait les candidats
par leurs comp´
etences professionnelles. Par contre, concernant le jugement de la ďŹa-
bilit´
e politique, câ´
etait le
ÂŤ
Nationalsozialistischer Dozentenbund
Âť
qui sâen occupait.
Son dirigeant, Walter Schultze a d´
eďŹni le rË
ole de sa f´
ed´
eration de la mani`
ere suivante
[9] :
Der Nationalsozialistische Deutsche Dozentenbund hat als die Gliede-
rung der Hochschullehrer im Rahmen der NSDAP die Aufgabe, allen
deutschen Dozenten Anstoss zur Besinnung auf das neue geistige Werden
zu geben, sie zu einer festen weltanschaulich-wissenschaftlichen Kampf-
gemeinschaft zusammenzuf¨
uhren, sie in ihrer weltanschaulichen Haltung
und in ihrer wissenschaftlichen Arbeit nach der nationalsozialistischen
Idee auszurichten und dadurch den Neubau von Hochschule und Wis-
senschaft zu sichern.
Par cons´
equent plusieurs physiciens aryens se sont engag´
es par la suite dans le
ÂŤ
Do-
zentenbund
Âť
, et lâont utilis´
e comme plate-forme pour leur campagne.
Arnold Sommerfeld ´
etait professeur en physique th´
eorique `
a Munich et atteignit en
1935 lâË
age de sa mise `
a la retraite. Pour garantir la tradition, Sommerfeld d´
esirait
avoir son ancien ´
el`
eve, Heisenberg, comme successeur. Face `
a lâopposition du
ÂŤ
Do-
zentenbund
Âť
son ´
election fut empË
ech´
e. Comme solution transitoire, Sommerfeld
garda la place quelques temps.
(2)
Physicien technicien `
a I´
ena.
(3)
Physicien exp´
erimentateur `
a T¨
ubingen.
CHAPITRE 5. LA PROMOTION DE LA PHYSIQUE ARYENNE
26
En 1937, Philipp Lenard fË
eta son 75
e
anniversaire et devint membre du parti national-
socialiste. `
A lâoccasion des festivit´
es, ses partisans prirent un nouveau d´
epart pour
la politisation de lâenseignement sup´
erieur en se tournant vers la
ÂŤ
SchutzstaďŹel
Âť
(SS)
(4)
. En juillet 1937, Stark publia un article concernant les
ÂŤ
âWeisse Judenâ in
der Wissenschaft
Âť
dans la revue de lâSS
ÂŤ
Das schwarze Korps
Âť
[45] (cf. aussi lâan-
nexe C). Avec lâexpression
ÂŤ
juifs blancs
Âť
, il qualiďŹait quelquâun ayant les propri´
et´
es
que les promoteurs de la physique aryenne classaient comme ´
etant
ÂŤ
juives
Âť
, i.e. les
repr´
esentants dâune physique dogmatique. Dans le deuxi`
eme passage de lâarticle, il
parle de la dictature de la relativit´
e g´
en´
erale (
ÂŤ
la th´
eorie grise
Âť
) et il fait une attaque
de front contre Heisenberg. Il lui reproche dâavoir publi´
e des articles sympathisant `
a
propos dâEinstein et dâavoir engag´
e des juifs dans son institut. Dans lâavant-dernier
paragraphe de ce passage, on lit :
Heisenberg ist nur ein Beispiel f¨
ur manche andere. Sie allesamt sind
Statthalter des Judentums im deutschen Geistesleben, die ebenso ver-
schwinden m¨
ussen wie die Juden selbst.
Heisenberg demanda imm´
ediatement `
a Himmler une v´
eriďŹcation de ces accusa-
tions graves contre lui et exigea le r´
etablissement de son honneur. Mais il dut at-
tendre longtemps pour obtenir une prise de position. Vu sa situation d´
elicate expos´
e
pr´
ec´
edemment, il a pens´
e `
a d´
emissionner ou mË
eme `
a ´
emigrer. Apr`
es les interventions
de quelques sommit´
es
(5)
et amis aupr`
es des responsables de la SS, il re¸cut la r´
eponse
de Himmler, apr`
es une ann´
ee [46] :
Ich habe, gerade weil Sie mir durch meine Familie empfohlen wurden, Ih-
ren Fall besonders korrekt und besonders scharf untersuchen lassen. Ich
freue mich, Ihnen mitteilen zu k¨
onnen, dass ich den AngriďŹ des
â
Schwar-
zen Korpsâ durch seinen Artikel nicht billige und dass ich unterbunden
habe, dass ein weiterer AngriďŹ gegen Sie erfolgt.
(4)
la troupe dâ´
elite sous le commandement du Reichsf¨
uhrer Heinrich Himmler.
(5)
Parmi dâautres le sp´
ecialiste de lâa´
erodynamique Ludwig Prandtl.
CHAPITRE 5. LA PROMOTION DE LA PHYSIQUE ARYENNE
27
5.1
La victoire de la physique aryenne
En 1938, Arnold Sommerfeld attendait encore la d´
esignation de son successeur, trois
ans apr`
es la date de sa retraite pr´
evue ! Au d´
ebut de cette ann´
ee, les adh´
erents de
la physique aryenne, convaincus de la r´
eussite de la campagne de d´
enigration de
Heisenberg, propos`
erent leurs propres candidats, des physiciens exp´
erimentateurs,
bien entendu.
Apr`
es la r´
ehabilitation de Heisenberg, celui-ci se pr´
esenta `
a nouveau comme candi-
dat et recueillit un appui large parmi ses adeptes. Mais vu les incidents de 1935, le
REM d´
ecida en 1939, de ne pas d´
esigner Heisenberg.
Lâann´
ee 1939 fut d´
ecisive pour lâAllemagne. La deuxi`
eme guerre mondiale com-
men¸ca, Otto Hahn d´
ecouvrit la ďŹssion nucl´
eaire `
a Berlin et la physique aryenne fË
eta
sa victoire avec la nomination de Wilhelm M¨
uller `
a la chaire de physique th´
eorique
`
a Munich. M¨
uller nâavait jamais publi´
e dans un p´
eriodique de physique, nâavait ja-
mais assist´
e `
a un congr`
es de la physique et nâ´
etait pas membre de la
ÂŤ
Deutschen
Physikalischen Gesellschaft
Âť
[9]. Sommerfeld a dit dans sa autobiographie [47] que
son successeur ´
etait le plus mauvais que lâon pouvait sâimaginer. M¨
uller nâ´
etait pro-
fessionnellement incompetent en tant que professeur, mais en tant quâauteur du fas-
cicule
ÂŤ
Judentum und Wissenschaft
Âť
[48], il satisfaisait parfaitement `
a lâexigence
de conformit´
e `
a lâid´
eologie du parti.
Suite au reproche selon lequel il nâa avait plus de cours de physique th´
eorique
(6)
`
a
son universit´
e, le doyen mit les choses au clair [9] :
Ihre Behauptung, dass seit drei Semestern keine theoretische Physik ge-
lesen wird, entspricht nicht den Tatsachen. Jedermann hat die M¨
oglich-
keit, sich an Hand der Vorlesungsverzeichnisse davon zu ¨
uberzeugen,
dass theoretische Physik bei uns gelesen wird. Sollten Sie unter theoreti-
scher Physik nur die sogenannte moderne dogmatisch-theoretische Phy-
sik Einstein-Sommerfeldscher Pr¨
agung verstehen, so muss ich Ihnen mit-
teilen, daà diese in M¨
unchen allerdings nicht mehr gelesen wird. Die Be-
rufung Prof. M¨
ullers ist ja gerade deshalb erfolgt, um einen endg¨
ultigen
Wandel zu vollziehen. Die erfreuliche Art und Weise, wie Prof. M¨
uller
die theoretische Physik wieder zu Ehren bringt, wird auch von der Do-
zentenschaft in vollem Umfange gebilligt und unterst¨
utzt.
(6)
M¨
uller a enseign´
e la m´
ecanique classique.
Chapitre 6
Guerre et d´
eclin de la physique
aryenne
Apr`
es le commencement de la guerre encore dâautres scientiďŹques incomp´
etents, mais
soutenus par la physique aryenne, furent choisis comme professeurs. Par cons´
equent
plusieurs grands scientiďŹques ´
emigr`
erent dans lâindustrie. Malgr´
e cela, le placement
de leurs propres gens aux postes importants fut le seul succ`
es de Lenard, Stark et
compagnie.
LâaďŹaire Heisenberg a mobilis´
e les physiciens dans une campagne de r´
esistance. Au
d´
ebut des ann´
ees quarante, les hautes ´
ecoles ont commenc´
e `
a travailler pour la
guerre. Le projet de lâuranium qui visait `
a construire la bombe atomique fut mis sur
pied. Notamment, des physiciens, combattus par la physique aryenne, y ont parti-
cip´
e.
La physique th´
eorique a continuellement perdu de son importance en Allemagne.
Suite `
a lâisolation du pays, une recherche convenable nâ´
etait presque plus possible.
Malgr´
e tout, on enseignait toujours la relativit´
e g´
en´
erale dans les universit´
es, ceci
´
etait possible en supprimant simplement tout les noms des contributeurs juifs `
a la
th´
eorie.
Face au succ`
es propageant de la campagne des physiciens aryennes et dans lâint´
erË
et
de leur propre survie (le nombre dâ´
etudiants en physique diminuait de 65 % de 1931
`
a 1936), les physiciens des hautes ´
ecoles se pr´
epar`
erent `
a passer `
a la contre-attaque.
En 1940, ils organis`
erent un d´
ebat `
a Munich, dans lâid´
ee de dissuader le
ÂŤ
Dozenten-
bund
Âť
de son soutien `
a la physique aryenne. Les physiciens aryens, incomp´
etents,
nâavaient pas grand chose `
a opposer aux arguments de leurs adversaires et ainsi on
sâaccorda sur les 5 points suivants [46] :
1.
Die theoretische Physik mit allen mathematischen Hilfsmitteln ist
ein notwendiger Bestandteil der Gesamtphysik.
2.
Die in der speziellen Relativit¨
atstheorie zusammengefassten Erfah-
rungstatsachen geh¨
oren zum festen Bestand der Physik. Die Si-
cherheit der Anwendung der speziellen Relativit¨
atstheorie in kos-
mischen Verh¨
altnissen ist jedoch nicht so gross, dass eine weitere
Nachpr¨
ufung unn¨
otig w¨
are.
28
CHAPITRE 6. GUERRE ET D ´
ECLIN DE LA PHYSIQUE ARYENNE
29
3.
Die vierdimensionale Darstellung von Naturvorg¨
angen ist ein brauch-
bares mathematisches Hilfsmittel ; sie bedeutet aber nicht die Ein-
f¨
uhrung einer neuen Raum- und Zeitanschauung.
4.
Jede Verkn¨
upfung der Relativit¨
atstheorie mit einem allgemeinen
Relativismus wird abgelehnt.
5.
Die Quanten- und Wellenmechanik ist das einzige z. Z. bekannte
Hilfsmittel zur quantitativen Erfassung der Atomvorg¨
ange. Es ist
erw¨
unscht, ¨
uber den Formalismus und seine Deutungsvorschriften
hinaus zu einem tieferen Verst¨
andnis der Atome vorzudringen.
La
ÂŤ
Deutsche Physikalische Gesellschaft
Âť
est toujours rest´
ee sous la direction des
opposants `
a la physique aryenne. Jusquâen 1940, la soci´
et´
e a pu garder la possibi-
lit´
e dâune aďŹliation juive. Pendant cette ann´
ee ses membres ´
elirent Carl Ramsauer
comme nouveau pr´
esident. Ramsauer
(1)
sâest battu pour faire cesser le d´
eclin de la
physique en Allemagne [48]. Avec dâautres il r´
edigea, en 1941, une requË
ete d´
epos´
ee
au REM et `
a la Wehrmacht [49]. Dedans ils comparaient la physique allemande et la
physique anglo-saxonne pour d´
emontrer la d´
ecadence de la premi`
ere. Pour faire la
comparaison, ils ont compt´
e le nombre de citations des travaux des parties adverses
dans les publications : En 1897, 64 % des citations citaient des revues allemandes
et 3 % des revues am´
ericaines. En 1933, ce rapport ´
etait de 36 % `
a 33 %. Pendant
ce temps, la
ÂŤ
Physical Review
Âť
am´
ericaine ´
etait devenue le leader des revues en
physique.
Ils ont aussi compt´
e le nombre dâarticles traitant la physique nucl´
eaire, qui ´
etait le
num´
ero un de la recherche en physique durant ces ann´
ees. En 1931, 77 articles ont
´
et´
e publi´
e par des physiciens allemands, de mË
eme pour les am´
ericains. En 1939, la
proportion ´
etait de 166 `
a 471.
En Allemagne, on avait un acc´
el´
erateur de particules, alors que les am´
ericains en
avaient trente.
Ramsauer et ses collaborateurs rendirent lâabandon de la physique th´
eorique res-
ponsable de ce triste ´
etat. Ils d´
efendirent la th´
eorie comme ´
etant une conquË
ete
v´
eritablement allemande, et constat`
erent quâil nây avait pas dâalternative `
a la th´
eorie.
Le REM nâas pas estim´
e n´
ecessaire de r´
epondre `
a cette p´
etition, mais Hermann
G¨
oring (le chef de lâarm´
ee de lâair) sâest particuli`
erement inqui´
et´
e de la regression en
physique nucl´
eaire. G¨
oring convint avec Ramsauer de le soutenir dans la lutte contre
lâing´
erence politique en physique. Joseph Goebbels, le ministre de la Propagande, en
entendit parler en 1943, et il accusa par la suite le REM dâavoir n´
eglig´
e la recherche
en physique. Il a aussi rendu la situation dans les sciences responsable des lourdes
pertes allemandes de la guerre a´
erienne et sous-marine [50].
Un programme de r´
eforme fut d´
ecid´
e par la
ÂŤ
Deutsche Physikalische Gesellschaft
Âť
peu apr`
es pour le r´
etablissement de lâind´
ependance de la discipline. Elle a ´
egalement
d´
ecid´
e de licencier les professeurs qui nâavaient pas pris part `
a la recherche [51]. Un
nouveau p´
eriodique, les
ÂŤ
Physikalischen Bl¨
atter
Âť
fut mis sur pied pour avoir un
organe ind´
ependant.
(1)
Curieusement Ramsauer ´
etait un ancien assistant de Lenard `
a Heidelberg en 1907, cf page
10.
CHAPITRE 6. GUERRE ET D ´
ECLIN DE LA PHYSIQUE ARYENNE
30
6.1
La physique nucl´
eaire
Apr`
es la d´
ecouverte de la ďŹssion nucl´
eaire, les th´
eoriciens entourant Werner Heisen-
berg `
a Berlin ´
etaient en tË
ete de la recherche atomique. Mais ce groupe nâa jamais
´
et´
e int´
eress´
e `
a industrialiser la ďŹssion. Leurs exp´
eriences utilisaient de lâeau lourde
comme mod´
erateur, et lâusine qui le produisait fut bombard´
ee par les Alli´
es. En plus,
la strat´
egie de guerre ´
eclaire de Hitler lâempË
echait, au d´
ebut, de donner naissance `
a
un programme pour la construction de la bombe atomique.
En 1944, apr`
es que la guerre sâest transform´
ee en une guerre de position et que
G¨
oring et Goebbels eurent r´
ealis´
e la sup´
eriorit´
e des Alli´
es, on retira les scientiďŹques
du front. Mais il ´
etait d´
ej`
a trop tard : uniquement 2000 des 6000 scientiďŹques alle-
mands ont retourn`
erent aux laboratoires [52].
Lâaide aux scientiďŹques par le minist`
ere de la guerre avait un eďŹet secondaire agr´
eable.
Les physiciens devaient simplement d´
eclarer leurs projets utiles pour la guerre et se
voyaient ainsi attribu´
e moyens et collaborateurs. Max von Laue
(2)
´
ecrivait 1946 `
a ce
sujet [9] :
Die eigentlich einzige Tatsachenfeststellung in Goudsmits Brief ist, dass
in amtlichen Akten die Uranarbeiten als
â
kriegsentscheidendâ bezeichnet
sind. Das stimmt. Aber was wirst Du sagen, wenn ich Dir nun schreibe,
dass auch meine B¨
ucher ¨
uber R¨
ontgenstrahl- und Elektroneninterferen-
zen unter der Marke
â
kriegsentscheidendâ gedruckt wurden? Dass ich
selbst einmal ¨
uber Heisenbergs H¨
ohenstrahlungsbuch ein Urteil nieder-
schrieb, in dem es als
â
kriegsentscheidendâ hingestellt wurde? Andern-
falls w¨
are der Druck dieser B¨
ucher n¨
amlich unm¨
oglich gewesen. Und
wenn jemand die Akten aus den letzten Kriegsjahren konsequent durch-
forschen wollte, w¨
urde er bemerken, dass ¨
uberhaupt alles, was damals in
der Wissenschaft gemacht wurde,
â
kriegsentscheidendâ war. Sonst h¨
atten
n¨
amlich die staatlichen und die Parteiinstanzen weder Mittel noch Mitar-
beiter daf¨
ur freigegeben. Viele, viele junge Leute verdanken es nur dieser
Bezeichnung ihrer T¨
atigkeit, dass sie nicht an die Front zu gehen brauch-
ten und so am Leben blieben. Das ist die einzige Bedeutung, welche das
omin¨
ose Wort
â
kriegsentscheidendâ in den Jahren von 1942 - 1945 hatte.
La coop´
eration au nom de la guerre leur procurait ďŹnalement une ind´
ependance face
au syst`
eme politique.
Par lâimportance de la recherche atomique, les opposants de Heisenberg ont dË
u com-
pl`
etement arrË
eter leurs attaques contre celui-ci pour ne pas tomber en discr´
edit en
donnant lâimpression de travailler contre la guerre. MË
eme le REM r´
evisa son attitude
et permit ainsi la nomination de Heisenberg `
a la chaire de professeur de physique
th´
eorique au
â
Kaiser-Wilhelm-Institutâ `
a lâuniversit´
e de Berlin en 1942 [9] :
(2)
1879 - 1960. prix Nobel en 1914 pour la d´
ecouverte de la diďŹraction des rayons X dans les
solides. von Laue ´
etait une des rares personnes qui a d´
eclin´
e toute collaboration avec les nazi.
`
A cause de son attitude il a ´
et´
e pr´
ematur´
ement mis `
a la retraite en 1943, c.f. par exemple
dans [53].
CHAPITRE 6. GUERRE ET D ´
ECLIN DE LA PHYSIQUE ARYENNE
31
Es kann nicht das Ziel der Partei sein, in dem Streit der Meinungen zwi-
schen der Lenardschen und der Heisenbergschen Richtung in der theore-
tischen Physik f¨
ur eine der beiden Richtungen Partei zu ergreifen; es muĂ
auf alle F¨
alle verhindert werden, dass die atomphysikalische Forschung
in Deutschland gegen¨
uber dem Ausland zur¨
uckbleibt. Prof. Heisenbergs
Leistungen auf diesem Gebiet rechtfertigen zweifellos seine Berufung an
das Kaiser-Wilhelm-Institut; es muss der freien fachlichen Auseinander-
setzung ¨
uberlassen bleiben, einen Ausgleich zwischen den verschiedenen
Richtungen in der theoretischen Physik herbeizuf¨
uhren.
Sous cet ´
etat de choses les adh´
erents `
a la physique aryenne nâavaient plus aucune
chance de se faire entendre. D´
ej`
a au congr`
es `
a Seefeld en 1942, ils nâavaient plus rien
`
a opposer aux d´
ebats concernant la relativit´
e et la m´
ecanique quantique. Lenard
fË
etait son 80
e
anniversaire cette mË
eme ann´
ee et constatait en 1943 [30] :
Viel Sch¨
ones, Gutes ist hier gesagt und eindringlich verst¨
andlich ge-
macht. - Aber kein Wissenschaftsministerium des 3. Reiches hat im Min-
desten danach gehandelt. Ja sogar meistens gegenteilig wurde regiert im
Bereich der Physik oder der Naturforschung ¨
uberhaupt! Mich hat man
wiederholt sehr geehrt; mein Denken hat man nicht die Spur befolgt! 6
Jahre lang habe ich gegen solchen Unfug mich aufgelehnt. Jetzt, mit 80
Jahren bin ich zu alt geworden um noch weiter einzugreifen als es in
meinen Schriften schon geschehen ist.
Fig. 6.1: Le 80
e
anniversaire de Philipp Lenard le 7. juin 1942
. Lenard re¸coit le titre dâun
docteur honoris causa `
a lâuniversit´
e de Bratislava. AIP Emilio Segr`
e Visual Archives,
American Institute of Physics.
La physique aryenne avait d´
eďŹnitivement ´
echou´
e. Apr`
es la victoire des Alli´
es en
1945, on laissa Lenard tranquille, en consid´
eration de ses contributions scientiďŹques
dâavant la guerre. Il mourut le 20 mai 1947 `
a Messelhausen. Stark par contre fut
condamn´
e aux travaux forc´
es pour quatre ann´
ees. Il mourut 1957.
Chapitre 7
Conclusion
Le souci principal des scientiďŹques pendant la dictature nazie en Allemagne fut
la pr´
eservation de leur autonomie. Cette autonomie ´
etait menac´
ee de deux cË
ot´
es :
Dâune part les nazis ´
etaient arriv´
es `
a sâapproprier le contrË
ole des aďŹaires des hautes
´
ecoles, et dâautre part les partisans de la physique aryenne avaient voulu r´
eformer
les sciences de fa¸con fondamentale. Comme tant la prise du pouvoir des nazi, tant
les interventions politiques en physique arriv`
erent pas `
a pas, il nâ´
etait pas vraiment
possible de sây opposer.
Au d´
ebut. les cons´
equences de la loi du 7. avril 1933 nâ´
etaient pas pr´
evisibles et les
renvois se sont ´
etal´
es sur plusieurs ann´
ees. Les protestations sous forme de d´
emissions
ont servi ďŹnalement aux nazis. Souvent la croyance dâune courte souverainet´
e nazie
a pouss´
e les scientiďŹques `
a pers´
ev´
erer `
a leurs postes. Inutile. Finalement un nombre
incroyable de scientiďŹques furent expuls´
es dâAllemagne en laissant un grand nombre
de places vacantes.
Les physiciens qui avaient gard´
e leur objectivit´
e nâont jamais fait cause commune
avec les nazi, ils avaient compris quel dommage cette politique signiďŹait pour leur
discipline, et câest ce qui a men´
e `
a leur ali´
enation de lâ´
etat.
Le programme
ÂŤ
Manhattan project
Âť
pour la construction de la bombe atomique
am´
ericaine a ´
enorm´
ement proďŹt´
e de lâexpulsion des scientiďŹques dâAllemagne. Ces
scientiďŹques, et la conviction que si quelquâun pouvait construire la bombe cela se-
raient les allemands, amena ďŹnalement au succ`
es du programme am´
ericain.
Le programme correspondant en Allemagne fut d´
estabilis´
e par les attaques contre la
physique th´
eorique et par un soutien plein de lacunes du r´
egime. En plus il manquait
de bons physiciens exp´
erimentateurs pour lâindustrialisation de la physique nucl´
eaire.
La courte r´
eussite de la physique aryenne est due `
a la caract´
eristique nazie de faire
primer les consid´
eration politiques sur les qualiďŹcation professionnelles dans les no-
minations. Lenard et compagnie nâont gu`
ere apport´
e de performances valables en
physique pendant ces ann´
ees et le mouvement nâa ainsi jamais eu vraiment de sou-
tien du cË
ot´
e des physiciens, mais par contre temporairement du cË
ot´
e de la politique.
32
CHAPITRE 7. CONCLUSION
33
La physique aryenne ´
etait plutË
ot un mouvement politique que physique. Lorsque
la guerre ďŹnit de traËÄąner en longueur, les nazi eurent besoin de physiciens capables
pour le programme nucl´
eaire et ont support`
erent ainsi les physiciens th´
eoriciens qui
´
etaient autour de Heisenberg. Lenard et Stark ont mis´
e sur les fausses personnes :
les bureaucrates du REM ne furent jamais int´
eress´
es `
a se donner `
a fond pour la
physique aryenne et ils disparurent ďŹnalement dans les bas-fonds du syst`
eme. Si les
d´
efenseurs de la physique aryenne avaient ´
et´
e de meilleurs hommes politiques, ils
auraient peut-Ë
etre pu gagner Himmler `
a leur cause.
Les exp´
eriences v´
ecues en Angleterre et la d´
ecouverte de Thompson rendit Lenard
amer et consolida sa conviction que les anglais avaient la responsabilit´
e de la premi`
ere
guerre mondiale. En outre, il ne sâ´
etait jamais senti assez reconnu parmi ses confr`
eres.
Dans lâid´
eologie national-socialiste, il avait ďŹnalement trouv´
e un accueil favorable.
Reste la question de savoir pourquoi les scientiďŹques nâont pas oppos´
e une r´
esistance
plus forte. Von Laue d´
ecrivait la seul mani`
ere dâagir pour ceux qui restaient en
Allemagne comme cela [9] :
Lerne schweigen ohne zu platzen.
Ce comportement ´
etait en accord avec le principe dâobjectivit´
e des scientiďŹques.
Une r´
esistance active aurait tout aussi bien m´
epris´
e ce principe quâune collaboration
sans condition avec les nazis. Ceci leur interdisait une r´
esistance politique, mais une
r´
esistance professionnelle leur ´
etait possible. Mais du cË
ot´
e professionnel, les physi-
ciens nâavaient aucun moyen coercitif pour accorder de lâimportance aux leurs avis
(1)
.
Mais au moins une r´
esistance passive fut quand-mË
eme possible : les physiciens ont
essay´
e de se servir de lâ´
etat contre le parti et ils ont d´
efendu la mise au pas de la
ÂŤ
Deutschen Physikalischen Gesellschaft
Âť
avec succ`
es. Avec le d´
ebut du programme
pour la construction de la bombe, les physiciens avaient subitement un moyen de
coercition et par la suite la physique aryenne fut ´
elimin´
ee en peu de temps. Mais
ceci fut aussi la preuve que les scientiďŹques ne pouvaient plus aďŹrmer que la science
pure ´
etait s´
eparable du pouvoir politique.
Pour conclure, on pourrait convenir `
a ce que non pas la vigueur des d´
efenseurs dâune
physique ind´
ependante mais la faiblesse des adh´
erents dâune physique aryenne avait
empË
ech´
e les sciences dâune soumission compl`
ete `
a la politique.
7.1
Remerciements
Je d´
esire exprimer mes remerciements `
a Caroline Fragni`
ere pour les remarques et la
correction du manuscrit.
(1)
se rappeler de la citation `
a la page 5 !
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Beobachter, num´
ero 29 du 29 janvier 1936, page 50ďŹ.
Annexe A
Gesetz zum Berufsbeamtentum
Die Reichsregierung hat am 7. April 1933 das folgende Gesetz beschlossen, das hier-
mit verk¨
undet wird :
§
1
(1) Zur Wiederherstellung eines nationalen Berufsbeamtentums und zur Vereinfa-
chung der Verwaltung k¨
onnen Beamte nach MaĂgabe der folgenden Bestimmungen
aus dem Amt entlassen werden, auch wenn die nach dem geltenden Recht hierf¨
ur
erforderlichen Voraussetzungen nicht vorliegen.
(2) Als Beamte im Sinne dieses Gesetzes gelten unmittelbare und mittelbare Beamte
des Reichs, unmittelbare und mittelbare Beamte der L¨
ander und Beamte der Ge-
meinden und Gemeindeverb¨
ande, Beamte von K¨
orperschaften des ¨
oďŹentlichen Rechts
sowie diesen gleichgestellten Einrichtungen und Unternehmungen (Dritte Verord-
nung des Reichspr¨
asidenten zur Sicherung der Wirtschaft und Finanzen vom 6.
Oktober 1931 - Reichsgesetzblatt I S. 537, Dritter Teil Kapitel V Abschnitt I
§
15
Abs. 1). Die Vorschriften ďŹnden auch Anwendung auf Bedienstete der Tr¨
ager der
Sozialversicherung, welche die Rechte und PďŹichten der Beamten haben.
(3) Beamte im Sinne dieses Gesetzes sind auch Beamte im einstweiligen Ruhestand.
(4) Die Reichsbank und die Deutsche Reichsbahn-Gesellschaft werden erm¨
achtigt,
entsprechende Anordnungen zu treďŹen.
§
2
(1) Beamte, die seit dem 9. November 1918 in das Beamtenverh¨
altnis eingetreten
sind, ohne die f¨
ur ihre Laufbahn vorgeschriebene oder ¨
ubliche Vorbildung oder sons-
tige Eignung zu besitzen, sind aus dem Dienste zu entlassen. Auf die Dauer von drei
Monaten nach der Entlassung werden ihnen ihre bisherigen Bez¨
uge belassen.
(2) Ein Anspruch auf Wartegeld, Ruhegeld oder Hinterbliebenenversorgung und auf
Weiterf¨
uhrung der Amtsbezeichnung, des Titels, der Dienstkleidung und der Diens-
tabzeichen steht ihnen nicht zu.
39
ANNEXE A. GESETZ ZUM BERUFSBEAMTENTUM
40
(3) Im Falle der Bed¨
urftigkeit kann ihnen, besonders wenn sie f¨
ur mittellose An-
geh¨
orige sorgen, eine jederzeit widerruďŹiche Rente bis zu einem Drittel des jeweiligen
Grundgehalts der von ihnen zuletzt bekleideten Stelle bewilligt werden ; eine Nach-
versicherung nach MaĂgabe der reichsgesetzlichen Sozialversicherung ďŹndet nicht
statt.
(4) Die Vorschriften des Abs. 2 und 3 ďŹnden auf Personen der im Abs. 1 bezeichneten
Art, die bereits vor dem Inkrafttreten dieses Gesetzes in den Ruhestand getreten
sind, entsprechende Anwendung.
§
3
(1) Beamte, die nicht arischer Abstammung sind, sind in den Ruhestand (
§§
8 ďŹ.) zu
versetzen ; soweit es sich um Ehrenbeamte handelt, sind sie aus dem Amtsverh¨
altnis
zu entlassen.
(2) Abs. 1 gilt nicht f¨
ur Beamte, die bereits seit dem 1. August 1914 Beamte gewe-
sen sind oder die im Weltkrieg an der Front f¨
ur das Deutsche Reich oder f¨
ur seine
Verb¨
undeten gek¨
ampft haben oder deren Vater oder S¨
ohne im Weltkrieg gefallen
sind. Weitere Ausnahmen k¨
onnen der Reichsminister des Innern im Einvernehmen
mit dem zust¨
andigen Fachminister oder die obersten Landesbeh¨
orden f¨
ur Beamte
im Ausland zulassen.
§
4
(1) Beamte, die nach ihrer bisherigen politischen Bet¨
atigung nicht die Gew¨
ahr daf¨
ur
bieten, daà sie jederzeit r¨
uckhaltlos f¨
ur den nationalen Staat eintreten, k¨
onnen aus
dem Dienst entlassen werden. Auf die Dauer von drei Monaten nach der Entlassung
werden ihnen ihre bisherigen Bez¨
uge belassen. Von dieser Zeit an erhalten sie drei
Viertel des Ruhegeldes (
§
8) und entsprechende Hinterbliebenenversorgung.
§
5
(1) Jeder Beamte muĂ sich die Versetzung in ein anderes Amt derselben oder einer
gleichwertigen Laufbahn, auch in ein solches von geringerem Rang und planm¨
aĂi-
gem Diensteinkommen - unter Verg¨
utung der vorschriftsm¨
aĂigen Umzugskosten -
gefallen lassen, wenn es das dienstliche Bed¨
urfnis erfordert. Bei Versetzung in ein
Amt von geringerem Rang und planm¨
aĂigem Diensteinkommen beh¨
alt der Beamte
seine bisherige Amtsbezeichnung und das Diensteinkommen der bisherigen Stelle.
(2) Der Beamte kann an Stelle der Versetzung in ein Amt von geringerem Rang und
planm¨
aĂigem Diensteinkommen (Abs. 1) innerhalb eines Monats die Versetzung in
den Ruhestand verlangen. [...]
Reichsgesetzblatt I (1933), S. 175
Annexe B
Deutsche Physik und j¨
udische
Physik [60]
41
Annexe C
âWeisse Judenâ in der
Wissenschaft [45]
44