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Les transformations du XIXe siècle
Durant le siècle, on s'attacha à transformer, à moderniser la vieille ville, trop souvent sans égard pour un patrimoine historique prestigieux, alors négligé. Le docteur Guérin, qui devait être conservateur du musée Calvet n'écrivait-il pas, en 1807, dans une notice sur Avignon : " La nature seule attire nos regards ; on voit à la vérité quelques monuments anciens, tels que les ruines du pont Saint-Bénézet, l'archevêché, les tours du Palais des Papes, les remparts ; mais ces ouvrages qui n'ont que cinq ou six siècles d'ancienneté n'ont point cette grandeur, cette majesté et cette noblesse que nous admirons dans les monuments romains. " (Cité par J. Girard).
Plan d'Avignon de1837. Ce plan, très précis, permet de voir Avignon avant les grands travaux d'urbanisme du XIXe siècle. De larges zones libres de constructions apparaissent encore à l'intérieur des remparts. A l'extérieur, c'est vraiment la campagne

Plan d'Avignon de1857. C'est sous la municipalité de Paul Pamard que la ville changea de physionomie, avec notamment la percée de la rue de la République.

Plan d'Avignon de 1910. La ville s'étend timidement hors des remparts. Intra-muros, on voit de nouvelles rues, comme la rue Thiers, Guillaume Puy, le boulevard Raspail...

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Sous la municipalité de Guillaume Puy, le souci essentiel fut celui de la propreté et de l'hygiène. Mais, sa grande réalisation sera la construction d'un pont sur le Rhône, face à la porte de l'Oulle. Un autre sera entrepris, à Bonpas, sur la Durance. Commencé en 1806, le pont en bois sur le Rhône ne sera terminé qu'en 1819. Détruit à plusieurs reprises par les crues, l'ouvrage fut remplacé en 1843, sur la branche d'Avignon, par un pont suspendu, tandis que le pont sur chevalet fut maintenu sur la branche de Villeneuve jusqu'en 1910.
Une photographie extrêmement rare : la gare d'Avignon peu après la fin de sa construction.
Par une politique d'agrandissement et d'élargissement des rues et des places, on continua à aérer la vieille ville. En 1823, on démolit le couvent des Dames de Saint-Laurent qui remontait à l'époque romane, pour y construire un premier théâtre. Brûlé par un incendie, en 1846, il fut rapidement remplacé par un deuxième, sur le même emplacement. Ce théâtre, considéré comme une réussite, sera fréquemment imité dans la région. A deux pas, le vieil Hôtel de Ville gothique fut abattu, en 1845, pour laisser la place à un nouvel édifice achevé sous le second Empire. André Hallays, d'habitude si sévère, écrivait à son propos " ... On bâtit à la même place un vaste monument, sans laideur ni beauté, dont l'intérieur n'est que colonnades. On eut du moins l'heureuse pensée de conserver l'ancien beffroi qui dresse si joliment son aigrette de pierre au-dessus des tuiles d'Avignon ".
Hôtel de Ville. Détruit en 1845, l'ancien hôtel gothique, fit place à l'Hôtel de Ville actuel
L'Hôtel de Ville fut inauguré en 1852 par Louis-Napoléon, président de la République. La place de l'Horloge devait prendre la physionomie générale que nous lui connaissons aujourd'hui, sauf pour la partie nord, complètement remaniée avec le programme de la Balance, dans les années 1970.
Vue sur la prison Sainte-Anne et le Rhône.

L'ancien couvent des Dominicains fut démoli en 1840. On devait bâtir, sur l'espace ainsi libéré, tout un nouveau quartier avec les rues Saint-Thomas d'Aquin, Saint-André et Victor Hugo. Cette partie de la ville compte de grosses maisons bourgeoises érigées sous le second Empire, dans l'une d'elles se trouve le musée Louis Vouland. L'arrivée du chemin de fer, dans la décennie suivante, allait changer l'équilibre de la ville. Le projet primitif du célèbre ingénieur Talabot plaçait la voie de chemin de fer au bord du Rhône, entre le fleuve et la ville, à la place du rempart ; la gare aurait été à la porte de l'Oulle ; un tunnel aurait traversé le Rocher des Doms.
Place Pie. Inaugurées en 1898, les anciennes Halles centrales furent détruites en 1974 et remplacées par de plus modernes, couronnées d'un parking.
Ce plan avait enthousiasmé le Conseil municipal ; il n'échoua que grâce à l'obstination de Prosper Mérimée et localement de son ami Esprit Requien. Une violente campagne de presse fut menée contre ce projet insensé. Pour la Municipalité, il s'agissait de " faire perdre à Avignon cet air de vieille ville... En détruisant le dédale de nos rues et en les harmonisant avec les besoins d'élégance et de bon goût qui sont contractés dans toutes les grandes villes " (délibération du Conseil Municipal du 4 février 1853). D'où l'idée d'une percée qui relierait le centre d'Avignon à la gare. Cette nouvelle rue sera, de 1856 à 1867, la grande affaire du maire Paul Pamard. Elle fut conçue selon un schéma rectiligne et large, mais de nombreuses constructions de qualité furent abattues.
Rue Victor Hugo. Tout ce nouveau quartier a été constuit sur l'emplacement du couvent des Dominicains détruit en 1840.
L'arrivée du rail et l'installation d'une gare au sud de la cité va totalement inverser le processus de développement d'Avignon. Le vieux pôle d'attraction de la cité, le plus pittoresque, le plus chargé d'histoire, celui des bords du Rhône, s'efface désormais presque complètement, pour laisser la place à un quartier neuf dans lequel on ouvre bientôt une voie triomphale, la principale artère du centre ville actuel. La ligne a épousé le tracé sud des remparts, ceinturant étroitement d'une deuxième muraille la vieille ville, l'empêchant de s'étendre dans la continuité et l'harmonie, alors qu'une conception de croissance eût conduit à bâtir le remblai à deux kilomètres au sud. Le terme de banlieue donnée à la ville jumelle qui grandit dans le désordre et la laideur le long des voies ferrées est révélateur de cette erreur...
L'ancien abattoir municipal. En 1821, ce dernier fut déplacé de la rue Calade (rue Joseph-Vernet) près de la porte Saint-Roch. Il sera démoli, dans les années 1970, pour faire place à des logements.

L'échec de l'industrialisation amena la ville à lier son sort à l'agriculture, et à s'affirmer comme la capitale de la plaine agricole du Comtat. A plusieurs reprises la place Pie (siège du marché) fut modifiée par démolitions et agrandissements successifs. La rue Thiers, seconde grande percée rectiligne d'Avignon, fut conçue pour donner un accès direct à la place du marché. Elle fut terminée en 1876, tandis que la rue Viala (Préfecture) le sera en 1879.
Porte Limbert. Vue avant sa destruction en 1896.
Le maire Gaston Pourquery de Boisserin inaugure, à partir de 1888, une politique de grandes travaux : création de la rue Guillaume Puy (1893-1894), prolongement de la rue des Marchands à la place Jérusalem (1895-1898), alignement de la rue Saunerie (actuelle rue Carnot), élargissement de la place Costebelle, commencement du boulevard Raspail.
Porte Limbert. Après sa destruction, la vieille ville s'ouvre sur sa banlieue.
L'agrandissement de la place Pie, par la démolition, aussi regrettable qu'inutile, de la Commanderie de Saint-Jean-le-Vieux (1898-1899), fut vivement critiqué par André Hallays : " On a saccagé un ancien quartier et l'on a détruit des rues tortueuses, abritées du mistral et du soleil, pour créer des tronçons d'avenues qui ne conduisent nulle part et des places biscornues, désertes et mornes, véritables terrains vagues ".
La percée Magnanen en 1902

A l'actif du maire, on relève la construction des halles centrales, dont on vient de fêter le centenaire, la création d'un réseau de tramways, l'abandon par l'Armée du Palais des Papes. Quelques opérations extra-muros, comme l'ouverture du Boulevard des Villas, l'amorce du boulevard Sixte-Isnard, l'ouverture de la rue de Provence et de l'avenue Stuart Mill, marquèrent le début d'une extension extra-muros de la ville, à laquelle le vingtième siècle donnera toute son ampleur. Si Pourquery de Boisserin fit abattre " à la hussarde " les portes de l'Oulle et Limbert, en arguant des raisons de sécurité, son projet de destruction des remparts au sud de la ville ne devait heureusement pas aboutir.
Caserne Chabran. Avec l'abandon du Palais des Papes par l'Armée, une nouvelle caserne fut construite par la ville en dehors des remparts (1906).
Entrer en Avignon, par la porte de la République, peut sembler trop beau pour être réel. Comme presque tout le rempart, cette porte, avec ces deux tours jumelles trop bien conservées, a été réalisée par Viollet-le-Duc. Comme à Carcassonne, elle est un bon exemple des initiatives architecturales qui réparèrent les ravages du temps et des hommes. Sur ce point, le célèbre architecte écrivait : "Restaurer un édifice, ce n'est pas l'entretenir, le réparer ou le rebâtir, c'est le rétablir dans un état complet qui peut n'avoir jamais existé, à aucun moment donné".
Rue de la République. Avant la construction des Nouvelles Galeries, vers 1900. On devine au fond la façade de l'église Saint-Didier.
Il est facile, aujourd'hui, de critiquer son action, mais sans cette restauration du dix-neuvième siècle, il est probable qu'Avignon, à l'instar d'autres villes, n'aurait plus de remparts, ou n'en posséderait que quelques vestiges. C'est avec une fidélité absolue à ses principes qu'il dirigea la restauration des murs croulants d'Avignon, rehaussant, consolidant, rénovant les machicoulis, perçant de nouvelles portes, ou plutôt de nouvelles brèches, et remettant à neuf, de manière générale l'immense système de défense entouré de douves, bâti autour de la ville, par les papes.
Les Nouvelles Galeries, construction achevée en 1904, rue de la République.