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L'extension du XXe siècle
La population d'Avignon est passée de 20.000 habitants environ, en 1801, à 48.312 en 1906, pour atteindre 93.000, en 1975. Depuis cette date la ville perd de l'importance au profit des communes environnantes, qui forment ce qu'il est convenu de nommer " le Grand Avignon ". Pour loger le surcroît de population, des quartiers nouveaux ont été créés à l'extérieur des remparts. En l'absence d'un plan d'ensemble, ils ont été mal tracés et médiocrement bâtis. Avignon est donc sortie de ses remparts, une ville nouvelle s'est construite, au cours du vingtième siècle, qui n'a absolument rien à voir avec la vieille ville, isolée ou presque, derrière sa ligne de remparts. Après une période de frénésie de constructions, il a bien fallu jeter un regard nouveau sur la ville. On s'est aperçu alors des erreurs passées, tout d'abord dans le centre ville, puis dans les quartiers extra-muros.
Viaduc du chemin de fer. Au sud de la ville, le chemin de fer traverse le Rhône pour relier les lignes Paris-Marseille et Lyon-Nîmes (1905).
Pendant longtemps, on a continué selon la même logique de la table rase. Intra-muros, on déplore la destruction partielle, en 1955, des magnifiques bâtiments de Saint-Charles construits par Franque. Dans les années soixante-dix, on remplaça les anciennes halles place Pie, pour d'autres en béton, avec en guise de toiture, un parking aérien. On abat sans vergogne " le Grand Bar ", place de l'Horloge, on déplace en 1974, le monument du Centenaire aux allées de l'Oulle... Dans le quartier de la Balance enfin réhabilité, on distingue nettement deux ensembles : l'un rénové, sans âme - on ne peut pas dire que la place Campana soit une réussite - tandis que l'autre partie, à proximité du Palais des Papes, a été heureusement préservée. Mais, qui se souvient encore des polémiques interminables autour de ce quartier longtemps à l'abandon ? L'affaire de la Balance, restera dans les annales de la ville, au même titre que la percée de la République. Née du plan d'assainissement et d'embellissement de 1921, la question de la Balance traînera en longueur. Les premiers projets veulent faire table rase du vieux quartier. Ceux des années cinquante (projet de Pouillon) ne s'embarrassent pas plus de considérations d'ordre historique ou esthétique. On se contente d'appliquer des théories urbaines modernes à un espace sensible, chargé d'histoire. Le compromis adopté en 1963 grâce à une campagne nationale et l'intervention d'André Malraux, permettent le sauvetage de certains immeubles, des façades les plus intéressantes ainsi que le maintien d'un glacis ancien face au Palais des Papes. On détruira par contre l'unité et l'harmonie architecturale du nord de la place de l'Horloge en rasant totalement les immeubles anciens de la rue Molière.
Les Rotondes. Les anciennes rotondes de la compagnie de chemin de fer P.L.M. route de Marseille. Elles seront détruites par les bombardements de 1944.
Parallèlement à ces grands projets de destruction-reconstruction, dont le dernier en date fut celui de la percée Favart, des opérations ont été menées, ici et là, pour rendre à la ville sa dignité. A partir des années soixante, de nombreuses constructions parasites ont été démolies, autour des remparts, particulièrement au bord du Rhône. Mais, pourquoi avoir rasé l'octroi, de la porte de l'Oulle ? L'intra-muros a été revisité, lui-aussi. De nombreuses verrues, ou constructions vétustes ont été heureusement supprimées, il n'est pas nécessaire d'en faire l'inventaire ! Dans le cadre de l'opération " Avignon-ville moyenne " en partenariat avec l'Etat, une zone piétonne est élaborée à la fin des années soixante-dix, entre la rue des Marchands, la place Saint-Didier et les Halles. Dans le même temps, le charmant théâtre de la place Crillon, est restitué dans son état d'origine. La rénovation, en cours, du quartier de la Philonarde est exécutée avec plus de discernement, au cas par cas, le bâti ancien étant préservé au maximum. Trente ans plus tôt, on aurait sûrement tout rasé, ou presque !
Plan d'Avignon de 1945. On distingue bien les deux villes, à peu près égales, de part et d'autre des remparts et de la voie de chemin de fer.

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Des opérations de longue haleine ont été menées à bien, comme l'aménagement du Petit Palais (1976), l'installation de la bibliothèque municipale dans la livrée Ceccano (1983), la restauration de l'hospice Saint-Louis (1990), l'ancien hôpital Sainte-Marthe devient le centre de l'université (1998)... Ainsi, la ville restaure peu à peu et réutilise son prestigieux patrimoine architectural. D'autres grands chantiers sont en cours, comme le Palais des Papes qui n'en finit pas d'être restauré, depuis pratiquement 1906 ! Plus modestement, le musée Calvet, est en réfection totale depuis plus de dix ans... En Avignon, rien n'est simple ! On l'a encore vu avec l'aménagement de la place de la Principale, qui vient juste de s'achever, après des années de tergiversations, pour un projet somme toute modeste. Le bâtiment qui abritait l'Ecole d'Art, rue des Lices (ancienne caserne des passagers) va enfin être aménagé en logements de qualité. Il était grand temps, l'édifice, si attachant et si particulier, était au bord de la ruine, faute d'entretien et de solution d'affectation. La récente adoption d'un périmètre sauvegardé sur l'ensemble de la ville intra-muros va donner, souhaitons-le, un véritable cadre de travail pour une politique urbaine, à long terme. Néanmoins, quelques points d'interrogation demeurent, comme l'aménagement de la rue des Teinturiers, une des plus pittoresques de la ville ? Ou celui de la réglementation de la circulation automobile intra-muros, les mentalités ayant du mal à changer.
Devanture de magasin. Bel exemple au croisement des rues Paul Saïn et Portail Matheron.
Avant de s'engager dans la ville extra-muros, disons quelques mots sur la zone dite d'échanges, entre la voie ferrée et les remparts. Cet espace est resté pendant longtemps sans projets précis, quasi à l'abandon. Depuis une bonne dizaine d'années, on voit fleurir des constructions, pour le moins hétéroclites. L'ensemble commence à prendre tournure avec le nouveau palais de justice, les hôtels, la gare routière, coincée entre la route de Tarascon et de Monclar. Tout cela à deux pas des remparts, des pauvres remparts, sans leurs douves, saturés par la circulation et le stationnement automobile. Aucune unité, aucune harmonie, l'injure au temps est décidément une constante avignonnaise ! Paradoxalement, l'austère caserne Chabran, en retrait de la route, n'écrase pas la perspective du boulevard. Ne pouvait-on pas laisser plus d'espace entre les remparts et toutes ces constructions nouvelles, plus hautes les unes que les autres ? Avignon ne méritait-elle pas mieux ? Ainsi, d'où qu'on la regarde, cette zone d'échanges est sans unité, sans inspiration, par trop tapageuse. Encore un " rendez-vous manqué " pour Avignon !
Hôtel Dominion. Exemple de l'occupation de l'espace, boulevard Raspail à la fin des années 1920.

Les premiers boulevards de la Banlieue

Ce n'est pas avant la fin du dix-neuvième siècle que la ville s'étendra timidement hors de ses murs. On a peine à le croire, mais il n'y a qu'à regarder les nombreux plans à notre disposition pour s'en convaincre. Remparts et voie ferrée franchis, l'extension de la ville s'est faite surtout vers le sud, en direction de la Durance, et vers l'est, le Rhône interdisant tout développement ailleurs. Dans ce " développement en doigts de gant ", le dessin parcellaire a commandé l'implantation des habitations et l'organisation de la voirie. Les constructions, à de rares exceptions, se sont rangées le long des chemins existants, sans plans bien établis, ce qui donne cette allure de village, ou à défaut de bourg à tous ces quartiers : Saint-Jean, La Trillade, Les Sources, Saint-Ruf, Monclar, Champfleury... De multiples petites rues et impasses irriguent tant bien que mal cette zone d'habitations. Quelques belles maisons, à l'architecture soignée émergent ça et là, en particulier au début de l'avenue de Saint-Ruf et de Monclar, ou dans les impasses adjacentes. Les grandes artères, comme la route de Lyon, la route de Marseille, ou celle de Tarascon viennent buter contre les remparts, sans transition, ni souci d'aménagements particuliers.
Devanture de magasin. Bel exemple au croisement des rues Paul Saïn et Portail Matheron.
Après la Seconde Guerre mondiale, Avignon ayant beaucoup souffert des bombardements, la reconstruction s'est déroulée sans maîtrise suffisante, si bien que le paysage urbain extra-muros est irrémédiablement saccagé, par une juxtaposition anarchique de pavillons individuels et d'immeubles collectifs. On s'est contenté, bien souvent, de goudronner les anciens chemins ruraux, d'arracher les platanes, ou de couvrir les innombrables canaux ou filioles qui drainaient et arrosaient, de manière si utile et si agréable, la plaine maraîchère d'Avignon. On détruira sans coup férir l'hospice Sixte Isnard, pour élever à la place les trois grands immeubles qui dominent de manière inattendue tout le quartier de la Trillade. De la même manière, on rasera en 1962 le " cottage de Montloisir " où vécut John Stuart Mill, comme on détruira sans états d'âme des dizaines de belles demeures dans la campagne d'Avignon et de Montfavet.
Hôtel Dominion. Exemple de l'occupation de l'espace, boulevard Raspail à la fin des années 1920.

Les premiers boulevards de la Banlieue

Depuis les années cinquante, le centre de gravité démographique d'Avignon s'est déplacé du centre vers l'extérieur des remparts. En 1968, on comptait 21.000 habitants intra-muros contre 68.000 hors les remparts, alors qu'en 1946 la ville intra-muros l'emportait avec 32.000 habitants contre 28.000 pour l'extérieur. Ces quelques chiffres illustrent bien la mutation de la ville, même si le centre conserve toujours le siège des principaux services ou administrations : préfecture, conseil général, Hôtel de Ville, lycées, écoles de musique, de danse et de théâtre, banques... Dans les décennies cinquante et soixante, on construit dans l'urgence de grands ensembles. Trente ans après, il faudra se résoudre à démolir les grandes barres de Champfleury, et tout récemment, celles de la Croix des Oiseaux. D'autres immeubles-tours vont être détruits, comme ceux de Guillaume Apollinaire, parfaite illustration de ce qu'il ne fallait pas faire.
L'Ecole d'Agriculture construite en 1884, dans la campagne, au-delà du boulevard de Saint-Ruf
De louables efforts ont été entrepris, ces derniers temps, pour réhabiliter tous ces quartiers, les exemples sont nombreux, mais les problèmes de fond n'en demeurent pas moins. De cette zone, comprise entre les remparts et la rocade Charles de Gaulle, quelques trop rares édifices publics émergent de la banalité ambiante : l'église Saint-Joseph travailleur à Champfleury, conçue par Guillaume Gillet, les Rotondes SNCF route de Marseille, dont on ne soupçonne pas l'audace et la pureté architecturales... Saluons l'aménagement réalisé autour de la vénérable abbaye de Saint-Ruf, qui semble à nouveau, insuffisamment protégée.
Rue Molière. Le Grand Bar avant sa démolition, en 1970, lors des aménagements du quartier de la Balance
En s'éloignant encore un peu plus du centre, au-delà de la Rocade, l'urbanisation gagne d'anciennes zones agricoles. Il en est de même en Courtine et de part et d'autre de la route de Marseille, jalonnée d'enseignes commerciales géantes, que personne ne lit, mais que tout le monde voit. De grands équipements collectifs ont été réalisés comme en témoignent les différentes zones industrielles et commerciales : Fontcouverte, Courtine, Cap-Sud etc... De grandes réalisations, quelquefois réussies, ont vu le jour : le Palais de la foire, anciennement à Champfleury, depuis à Châteaublanc tel un immense chapiteau, le site d'Agroparc avec son architecture de verre, l'hôpital Henri Duffaut, bientôt la nouvelle gare TGV... Dans un proche avenir, la LEO (liaison est-ouest), au bord de la Durance, trouvera enfin la solution à son tracé et à son financement, qui dépasse largement le cadre de la ville.
Rue Molière. A la place du Grand Bar,. on édifia ces immeubles qui tranchent par leur style avec le reste de la place de l'Horloge.