Le Conseil d’Etat a confirmé par un arrêt du 4 février 2008 (Association pour la protection des animaux sauvages) la légalité de l’arrêté interministériel du 24 mars 2006 autorisant l’abattage de six loups pour la période 2006-2007 et accessoirement sa jurisprudence relative au “prélèvement de Canis Lupus” (CE, 10 juillet 2006).
Cette dernière décision est en revanche plus lapidaire que la précédente puisque le juge se borne à constater que la population n’est pas mise en péril et ne fait plus aucune référence à la nécessité d’apprécier cette population dans “son aire de répartition naturelle”, laquelle s’étend hors du territoire français…
Le droit illustre les rapports qu’entretiennent l’homme et le loup. Si la figure emblématique du loup l’a fait rentrer dans le bestiaire symbolique du droit de l’environnement via le statut d’espèce protégée, le loup n’existe en droit que sous l’angle de sa destruction : anciennes primes à la destruction, battues, autorisation de capture par arrêté interministériel.
Par un empilement dont le droit de l’environnement a le secret, pas moins de trois catégories juridiques sont applicables au loup : celle d’espèce animale non domestique protégée (arrêté du 10 octobre 1996 modifiant l’arrêté du 17 avril 1981 fixant la liste des mammifères protégés sur l’ensemble du territoire), protection qui subit des dérogations par autorisation ministérielle de destruction pour des motifs tenant à l’intérêt général et à la sauvegarde de l’intérêt public ; celle de gibier, c’est-à-dire l’animal sans maître appartenant à une espèce non domestique (Cass. Crim. 12 octobre 1994, CE, 26 mai 1995, Comité intervalléen pour la sauvegarde de l’ours), qualification compatible avec la précédente (CE, 14 novembre 1984, Syndicat des naturalistes de France) puisqu’elle ne transforme pas automatiquement le loup en animal chassable ; celle de nuisible (jusqu’au décret n° 2001-451du 25 mai 2001), qui autorise sa destruction massive après inscription de l’espèce sur une liste établie par le ministre chargé de la chasse (art. R. 427-6 C. env.). Il convient d’y ajouter la qualification de bête fauve qu’il est possible de repousser ou de détruire (art. L. 427-9 C. env.).
Replacé “dans le champ du négociable” (Rapport du 2 mai 2003 fait au nom de la commission d’enquête sur les conditions de la présence du loup en France et l’exercice du pastoralisme dans les zones de montagne, doc. AN, n° 825) en exploitant au maximum la marge de souplesse ouverte par les textes internationaux (Convention de Berne, directive Habitats), l’orchestration juridique de la chasse au loup semble parachevée, les juges et le pouvoir réglementaire ayant décrit la marche à suivre pour pourchasser en toute légalité cet animal dont la description de Buffon trahit l’aversion (G. L. BUFFON, Leclerc (de), Histoire naturelle , t. VII, p. 39 et 53).