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Noblesse & Féodalité

 
 
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Au Blason des Armoiries : héraldique, féodalité, noblesse, armoiries
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Sacre du roi

Au Blason des Armoiries
 

SACRE, subst. masc., cérémonie religieuse qui se pratique à l'égard de quelques souverains, surtout des catholiques, et qui répond à celle que, dans d'autres pays, on appelle couronnement ou inauguration.

L'écriture appelle les rois les Oints de Dieu, et l'onction qu'ils reçoivent, lorsqu'on les sacre, est le signe de la puissance que Dieu leur met entre les mains. Les Juifs ont été les premiers qui ont observé cette cérémonie, et nous lisons que Samuel sacra successivement Saül et David. Quelques recherches que j'aie faites, je n'ai pu découvrir en quel temps cette cérémonie a commencé en France. Quelques-uns ont prétendu que Clovis fut baptisé et sacré à Reims ; mais Grégoire de Tours, qui est le père de notre histoire, ne dit pas un mot du Sacre de ce roi. D'autres assurent que Pépin est le premier de nos rois qui a reçu cette onction ; mais leur sentiment est détruit par un passage du continuateur de Fredegaire, qui assure que Pépin fut élu et sacré roi conformément à l'ancienne coutume.

C'est Louis le jeune qui, à l'occasion du Sacre de son fils Philippe, en 1179, prescrivit l'ordre qu'on a observé depuis dans le Sacre et couronnement de nos rois. Cette cérémonie se fait ordinairement dans l'église cathédrale de Reims, et par l'archevêque de cette ville. Je dis ordinairement, parce qu'on a l'exemple de quelques-uns de nos rois qui ont été sacrés ailleurs.

Ils est arrivé quelquefois que des papes ont fait à Reims le Sacre de nos rois ; mais l'usage ordinaire est qu'au défaut de l'archevêque de cette ville, c'est l'évêque de Soissons, son premier suffragant, qui fait cette cérémonie. Ce fut cet évêque qui fit l'onction et le Sacre de Louis le Grand, le 7 de juin de l'an 1654. L'âge des rois pour leur Sacre n'est pas prescrit, et sans remonter plus haut, Philippe ier n'avait que sept ou huit ans lorsqu'il fut sacré.

La prétention où sont les archevêques de Reims d'être les seuls qui ont droit de sacrer nos rois, n'a paru que dans le douzième siècle. Jusqu'à ce temps-là et même depuis, nos rois se sont fait sacrer tantôt dans une église, tantôt dans une autre, et par tel évêque qui leur a plu.

On voit dans l'ordre pour le Sacre de Louis le Débonnaire, qui est dans les capitulaires de ce roi et empereur, imprimés en 1623, par les soins du Père Sirmond, que les évêques qui assistèrent à ce Sacre, furent Advendus évêque de Metz, Otton de Verdun, Arnould de Toul, François de Liège, tous évêques de la province de Trèves, avec ceux de la province de Reims, qui avaient à leur tête Hincmar leur archevêque. Selon l'ordre ordinaire ç'aurait été à l'évêque de Metz à sacrer le roi, puisque la cérémonie se faisait dans son église (le 9 septembre de l'an 869), ou bien à l'archevêque de Trèves comme métropolitain, s'il y en avait eu un ; cependant ce fut Hincmar, archevêque de Reims, qui fit ce Sacre ; et afin qu'on ne pût pas croire qu'il prétendît être seul en droit de sacrer nos rois, ni qu'il voulût en cela faire aucun préjudice à l'archevêque de Trèves, il déclare qu'il ne le fait que parce qu'il est le plus ancien évêque sacré ; et que les évêques de la Province de Trèves, n'ayant pas alors de métropolitains, l'en avaient sollicité et le lui avaient ordonné.

Philippe ier fut sacré à Reims le 27 mai de l'an 1059, par l'archevêque Gervais de Bellesme, qui après le serment fait par le roi, et avant que de commencer le Sacre, dit que l'élection et la consécration du roi lui appartenaient depuis que saint Remy avait baptisé et sacré Clovis : il dit aussi que par le bâton pastoral qu'il tenait en main, le pape Hormisdas avait accordé au même saint Remy le pouvoir de sacrer les rois, aussi bien que la primatie sur toute la France. Ce discours est bien différent de celui qu'Hincmar avait tenu environ deux cents ans auparavant. (L'abbé de Camp).

Louis vi, dit le Gros, fut sacré à Orléans par d'Aimbert archevêque de Sens, le 3 d'août de l'an 1106. L'archevêque de Reims prétendit pour la seconde fois être seul en droit de sacrer nos rois. Yves de Chartres réfuta ces prétentions par une savante lettre, qui est la 189. Voyez le Grand Cérémonial, tome 1, page 130.

Philippe Auguste fut sacré et couronné à Reims le jour de la Toussaint de l'an 1179, par le cardinal de Champagne, archevêque de Reims, son oncle maternel. Marlot observe que ce cardinal fit tous les frais de cette cérémonie, qui furent si grands qu'il fut obligé d'emprunter des sommes considérables, qu'il pria son chapitre de l'aider à payer, ce qu'il obtint, en déclarant néanmoins que cette subvention lui avait été accordée libéralement, et qu'elle ne pourrait être d'aucune conséquence ni préjudice à son chapitre.

Louis viii fut sacré à Reims le 6 août de l'an 1223, par l'archevêque Guillaume de Joinville, qui fit les frais du couronnement et ceux du festin royal, qui montèrent à 4000 l. parisis, c'est-à-dire à 47 750 liv. 6. sols 6 den., de la monnaie d'aujourd'hui, à ne compter l'écu que sur le pied de trois livres, comme on l'apprend des lettres patentes de ce monarque, et de celles qu'il donna à Sens au mois d'août 1223, par lesquelles il ordonna aux bourgeois de Reims, du ban et seigneurie de l'archevêque, de contribuer pour leur part à cette dépense. L'archevêque faisait donc dresser ce qui était nécessaire dans l'église, et payait le repas : le roi faisait le reste de la dépense, qui était considérable.

Un rôle tiré du registre cotté noster, de la chambre des comptes, et imprimé par du Cange, nous apprend que la dépense du couronnement de Philippe le Bel s'était monté à 24560 liv. 10 sols tournois, qui faisaient 237 457 l. 3 sols 4 den., de la monnaie de notre temps, lorsque l'écu était à trois livres pièce.

Ce titre est remarquable en ce qu'il nous apprend que le revenu du roi était alors de deux millions trois cent trente-quatre mille livres tournois de la monnaie de ce temps, qui ferait aujourd'hui vingt-deux millions huit cent soixante-deux mille livres, à ne compter l'écu qu'à trois livres ; revenu plus fort que celui d'à présent, car le duché de Bourgogne, le Dauphiné, la Provence, la Bretagne, l'Artois et la Flandre n'étaient pas encore réunis au domaine de la couronne.

Le Sacre et couronnement du roi, Louis xv, se fit à Reims le 25 d'octobre 1722. Ce prince arriva dans cette ville le vingt-deux précédent, et alla descendre à la porte de l'église métropolitaine, où il fut reçu par l'archevêque duc de Reims, à la tête du chapitre, et assisté des évêques de Soissons, de Châlons, de Laon, de Beauvais, d'Amiens et de Noyon, ses suffragants, tous en chape et en mitre, et les chanoines en chape. Le roi se mit à genoux, et après avoir baisé le livre des évangiles, Sa Majesté fut complimentée par l'archevêque de Reims. Tout ce clergé retourna processionnellement dans le chœur, où le roi étant entré après les évêques, il alla se placer sur un prie-Dieu mis au milieu du chœur sous un dais magnifique. Sa Majesté y assista au Te Deum, qui fut chanté au bruit de plusieurs salves d'artillerie de la ville, et pendant lequel on apporta, de la sacristie, un magnifique soleil d'argent doré, du poids de cent vingt-cinq marcs, dont le roi faisait présent à l'église de Reims. Le duc Régent l'ayant reçu des mains du duc de Villequier premier gentilhomme de la chambre, le présenta à Sa Majesté, qui le posa sur l'autel. Après la bénédiction, le roi se retira dans l'archevêché, qui avait été orné des plus beaux meubles de la couronne. Sa Majesté y reçut aussitôt les respects du chapitre et de l'université.

L'église métropolitaine de Reims était tendue jusqu'à la voûte de tapisseries de la couronne. Le grand autel était paré d'un ornement de drap d'argent galonné d'or, et chargé des armes de France et de Navarre en broderie. Le roi en avait fait présent la veille à l'église de Reims, ainsi que des chapes et des autres ornements qui étaient d'étoffe d'or et d'argent, garnis de points d'Espagne ; les marches de l'autel et le reste du chœur étaient couverts de tapis. À quelques distances et vis-à-vis l'autel, on avait élevé un dais de velours violet, semé de fleurs de lys d'or en broderie, sous lequel était un prie-Dieu. Les sièges ou formes sur lesquels devaient être placées toutes les personnes qui avaient quelque fonction, ou qui avaient été invitées à cette auguste cérémonie, étaient aussi couverts de velours bleu brodé de fleurs de lys d'or. Au milieu du jubé on avait élevé un dais de velours violet, sous lequel était le trône où le roi devait être assis après son Sacre. Sur le bord du trône était un prie-Dieu couvert comme celui du chœur d'un riche tapis de velours violet semé de fleurs de lys d'or, ainsi que les bancs qui étaient aux deux côtés de ce trône, et sur lesquels les pairs ecclésiastiques et les pairs laïcs devaient être placés. Au bas du prie-Dieu deux sièges, l'un à droite pour le grand-chambellan de France, et l'autre à gauche pour le premier gentilhomme de la chambre. Sur une plate-forme avancée entre les deux escaliers par lesquels on montait au trône, on avait placé un siège pour le connétable, et plus avant, après l'appui de la plate-forme, deux sièges, l'un à droite, pour le garde des sceaux représentant le chancelier de France, et l'autre à gauche pour le grand-maître de la maison du roi. Au bout et à la droite du jubé, on avait dressé un autel sous un dais, pour y dire une messe basse pendant la messe du chœur. Vis-à-vis et de l'autre côté du jubé étaient deux sièges, l'un près du ban des pairs laïcs, pour le duc de Charrost, gouverneur du roi, et l'autre plus avancé du côté du chœur pour le prince Charles de Lorraine grand-écuyer de France, qui devait porter la queue du manteau royal. Les deux escaliers qui avaient été élevés aux deux côtés de la porte du chœur pour monter au trône du roi, étaient couverts de tapis semés de fleurs de lys d'or, et le devant du jubé du côté du chœur, était couvert d'un tapis de velours violet, aussi brodé de fleurs de lys d'or. Entre les piliers des deux côtés du chœur et au-dessus des chaises des chanoines, lesquelles étaient couvertes de tapis semés de fleurs de lys d'or, on avait élevé des galeries en amphithéâtre pour placer des personnes de distinction. Dans les amphithéâtres élevés aux deux côtés de l'autel, il y avait deux tribunes ; celle de la droite était destinée pour S. A. Royal Madame, mère du duc d'Orléans, régent du royaume ; et celle de la gauche était destinée pour le nonce du pape et pour les ambassadeurs invités à la cérémonie. L'amphithéâtre élevé derrière l'autel était pour la musique. À la gauche était un pavillon sous lequel le roi, en cas de besoin, devait se réconcilier avant la communion. L'église était éclairée par un nombre infini de lustres et de girandoles.

Le dimanche (vingt-cinq), les chanoines se rendirent en chapes à l'église vers les six heures du matin, et se placèrent dans les hautes chaires, à l'exception des quatre premières de chaque côté, qu'ils laissèrent vides. Les ornements de la royauté qui avaient été apportés du trésor de Saint Denis, par le grand-prieur de l'abbaye, le trésorier, et l'un des anciens religieux, furent transportés de l'abbaye de Saint-Rémy à l'église métropolitaine, par les trois religieux bénédictins, qui se placèrent du côté de l'autel, tendant qu'on chantait Prime l'archevêque de Reims revêtu de ses habits pontificaux, s'assit le visage tourné vers le chœur dans la chaise qui lui avait été préparée vis-à-vis le prie-Dieu du roi. Les évêques de Soissons et d'Amiens se placèrent à ses côtés, et ceux de Senlis, de Verdun, de Nantes et de Saint-Papoul prirent leurs places au côté droit de l'autel. Les cardinaux en rochet et revêtus de leurs chapes de cardinal, étaient assis sur une forme placée au-dessus et un peu moins avancée que le banc des pairs ecclésiastiques Les archevêques et évêques invités, en rochet et en camail violet, étaient sur des formes derrière le banc des pairs ecclésiastiques. Les agents du clergé étaient assis après les évêques. Les aumôniers du roi, en rochet et en manteau noir, étaient derrière les archevêques et évêques. Les formes qui étaient au-dessous de ces derniers étaient occupées par les conseillers d'état, les maîtres des requêtes et les secrétaires du roi. Les pairs ecclésiastiques, en chapes et en mitre, se placèrent sur leur banc du côté de l'épître. Les maréchaux d'Estrées, de Tessé, et d'Huxelles, se mirent sur un banc, derrière celui des pairs laïcs. Les secrétaires d'état occupèrent celui qui était au dessous. Les maréchaux de Matignon et Bezons prirent leur place derrière le banc des honneurs. D'autres seigneurs se mirent auprès d'eux sur la même ligne ; et sur les autres formes étaient les principaux officiers de Sa Majesté, et les seigneurs de la cour. Le nonce du pape et les ambassadeurs furent conduits à leur tribune par les introducteurs, qui se placèrent auprès d'eux sur la même ligne ; le reste de la tribune fut occupé par un grand nombre de princes et seigneurs étrangers. Son Altesse Royale Madame se rendit dans une autre avec la duchesse de Lorraine sa fille, l'infant dom Emmanuel frère du roi de Portugal, et les princes et princesses de Lorraine.

Vers les sept heures les pairs laïcs arrivèrent dans l'église et se rangèrent sur la forme qui leur était destinée du côte de l'évangile. Ils étaient vêtus d'une veste d'étoffe d'or, qui leur descendait jusqu'à demi-jambe. Ils avaient une ceinture d'or, et pardessus leur longue veste un manteau ducal de drap violet, doublé et bordé d'hermine ouvert sur l'épaule droite, leur collet rond était aussi d'hermine. Ils avaient tous une couronne sur un bonnet de satin violet. Le duc régent représentant le duc de Bourgogne, le duc de Chartres représentant le duc de Normandie, et le duc de Bourbon représentant le duc d'Aquitaine avaient la couronne ducal, et le comte de Charolais représentant le comte de Toulouse, le comte de Clermont représentant le comte de Flandre, et le prince de Conti représentant le comte de Champagne, avaient des couronnes de comte. Le régent, le duc de Bourbon et le prince de Conti avaient sur leurs manteaux le collier de l'ordre du Saint-Esprit.

Un moment après que les pairs laïcs eurent pris leurs places, ils s'approchèrent, ainsi que les pairs ecclésiastiques, de l'archevêque de Reims, et ils convinrent de députer l'évêque duc de Laon, et l'évêque comte de Beauvais, pour aller quérir le roi. Ces deux prélats partirent en procession, étant précédés de tous les chanoines de l'église de Reims, entre lesquels était la musique. Le chantre et le sous-chantre marchaient après le clergé, et devant le marquis de Dreux, grand-maître des cérémonies, qui précédait immédiatement les évêques de Laon et de Beauvais.

Ils passèrent par une galerie découverte qu'on avait construite depuis le portail de l'église jusqu'à la grande salle de l'archevêché ; et étant arrivés à la porte de la chambre du roi, le chantre y frappa de son bâton. L'évêque de Laon dit qu'il demandait Louis xv, et le prince de Turenne, grand-chambellan de France, répondit que le Roi dormait ; le chantre frappa pour la seconde fois, et le grand-chambellan de France lui fit la même réponse  : mais le chantre ayant frappé à la porte une troisième fois, et l'évêque de Laon ayant dit, Nous demandons Louis xv, que Dieu nous a donné pour roi. Les portes de la chambre furent ouvertes, et le marquis de Dreux, grand-maître des cérémonies de France, conduisit l'évêque de Laon et l'évêque de Beauvais auprès de Sa Majesté, qu'ils saluèrent profondément. Le roi était couché sur un lit magnifique, et était vêtu d'une longue camisole de satin cramoisi, garnie de galons d'or, et ouverte, ainsi que sa chemise, aux endroits où Sa Majesté devait recevoir les saintes onctions. Pardessus cette camisole, le roi avait une robe longue de toile d'argent, et sur la tête une toque de velours noir, garnie d'un cordon de diamants, d'un bouquet de plumes et d'une double aigrette blanche. L'évêque de Laon présenta de l'eau bénite au roi, et après les prières ordinaires, il prit Sa Majesté par le bras droit, l'évêque de Beauvais la prit, par le bras gauche, et l'ayant soulevée de son lit, ces deux prélats le conduisirent à l'église processionellement, et dans l'ordre qui suit :

Les gardes de la prévôté de l'hôtel, le comte de Montsoreau, grand-prévôt à leur tête, commençaient la marche, et précédaient le clergé de l'église de Reims qui avait accompagné les évêques de Laon et de Beauvais. Après le clergé, marchaient les cent-suisses de la garde du roi dans leurs habits de cérémonie, ayant à leur tête le marquis de Courtenvaux, qui était habillé de drap d'argent avec un baudrier de pareille étoffe brodée, un manteau noir doublé de drap d'argent, et garni de dentelles, ainsi que les chausses retroussées, et une toque de velours noir garnie d'un bouquet de plumes. Le lieutenant des cent-suisses était vêtu d'un pourpoint et d'un manteau de drap d'argent, et d'une toque de pareille étoffe. Les hautbois, les tambours et les trompettes de la chambre venaient après les cent-suisses, et ils étaient suivis de six hérauts d'armes en habit de velours blanc, les chausses troussées garnies de rubans, et leur toque de velours blanc. Ils avaient par-dessus leurs pourpoints et leurs manteaux la cotte d'armes de velours violet, chargée des armes de France en broderie, et le caducée à la main. Le marquis de Dreux, grand-maître des cérémonies, et le sieur des Granges, reçu en survivance du sieur des Granges son père, dans la charge de maître des cérémonies, marchaient après. Ils étaient vêtus de pourpoints de toile d'argent, de chausses retroussées de velours raz noir coupé par bandes, ayant aussi des capots de velours raz noir, garnis de dentelles d'argent, avec une toque de velours noir rehaussée de plumes blanches. Ils précédaient le maréchal duc de Tallard, le comte de Matignon, le comte de Médavi, et le marquis de Goesbriant, chevaliers de l'ordre du Saint-Esprit, qui étaient, vêtus du grand manteau de l'ordre. Le maréchal duc de Villars représentant le connétable, vêtu comme les pairs laïcs avec la couronne de comte, marchait après, et il avait à ses côtés les sieurs Millet et de Varennes, huissiers de la chambre du roi, vêtus de blanc et portant leurs masses. Le roi paraissait ensuite, ayant à sa droite l'évêque de Laon, et à sa gauche l'évêque de Beauvais. Le prince Charles de Lorraine grand-écuyer de France, qui devait recevoir la toque du roi lorsqu'il la quitterait pendant la cérémonie, et qui était destiné à porter la queue du manteau royal, marchait après Sa Majesté, derrière laquelle étaient à droite le duc de Villeroi, capitaine des Gardes-du-Corps, commandant les Gardes-Écossais, et à gauche le duc d'Harcourt capitaine des Gardes en quartier. Ils étaient vêtus d'habits ordinaires très-magnifiques, ainsi que leurs manteaux. Le roi était environné de six gardes écossais vêtus de satin blanc et ayant leurs cottes d'armes en broderie par dessus leurs habits, et la pertuisane à la main. Le sieur d'Armenonville, garde des sceaux de France, faisant dans cette cérémonie les fonctions de chancelier de France, marchait après le roi. Il était vêtu d'une soutane de satin cramoisi par-dessus un grand manteau d'écarlate, avec l'épitoge retroussée et fourrée d'hermine, et il avait sur la tête le mortier de chancelier, de drap d'or bordé d'hermine. Le prince de Rohan faisant la charge de grand-maître de la maison du roi, portant son bâton à la main, venait ensuite, ayant à sa droite, et sur la même ligne, le prince de Turenne, grand-chambellan de France, et à sa gauche le duc de Villequier premier gentilhomme de la chambre de Sa Majesté. Ils étaient vêtus tous trois comme les pairs laïcs, et ils avaient une couronne de comte sur la tête. Les Gardes-du-Corps fermaient cette marche.

Le roi étant arrivé à l'église par la grande galerie découverte qui avait été tapissée, les gardes de la prévôté de l'hôtel restèrent à la porte. Les Cent-Suisses formèrent une double haie entre les barrières par lesquelles on traversait la nef, et les tambours, les hautbois et les trompettes se mirent entre les deux escaliers par lesquels on montait au jubé. Lorsque le roi fut entré dans le chœur, il fut conduit par les évêques de Laon et de Beauvais au pied de l'autel, où s'étant mis à genoux, l'archevêque de Reims dit une oraison, après laquelle Sa Majesté fut conduite par les mêmes évêques, au fauteuil qui était sous le dais au milieu du chœur. Le duc de Villeroi et le duc d'Harcourt, capitaines des Gardes, prirent leur place à la droite et à la gauche du fauteuil du roi. Le marquis de Courtenvaux, capitaine des Cent-Suisses, qui avait suivi le roi dans le chœur, prit la sienne au côté droit de l'estrade sur laquelle était Sa Majesté, et les six gardes Écossais se mirent plus bas aux deux côtés du chœur. Le maréchal de Villars, représentant le connétable, et ayant à ses côtés les deux huissiers de la chambre portant leurs masses, se plaça sur le siège qui lui était destiné derrière le roi et à quelques distances. Le garde des sceaux, faisant dans cette cérémonie les fonctions de chancelier de France, prit place derrière le connétable et à trois pieds de distance. Le prince de Rohan, faisant la charge du grand-maître de la maison du roi, et ayant son bâton de commandement à la main, se plaça sur un banc qui était derrière le chancelier, et sur lequel le prince de Turenne, grand-chambellan de France, se mit à la droite, et le duc de Villequier, premier gentilhomme de la chambre, à la gauche. Le prince Charles de Lorraine, grand-écuyer de France, demeura auprès à la droite du roi. Le duc de Charrost, gouverneur de Sa Majesté, qui avait aussi accompagné le roi pendant sa marche, alla se placer sur un siège qui lui avait été destiné devant le banc des secrétaires d'état ; et les quatre chevaliers de l'ordre du Saint-Esprit, nommés pour porter les offrandes, se placèrent dans les quatre premières hautes chaires du chœur du côté de l'épitre.

Lorsque chacun eut pris sa place, l'archevêque de Reims présenta de l'eau bénite au roi et à tous ceux qui avaient leur séance à la cérémonie. On chanta ensuite le Veni Creator, après lequel les chanoines commencèrent Tierce, et peu de temps après qu'elles furent finies, la Sainte Ampoule arriva à la porte de l'église. C'est une petite bouteille qu'une pieuse tradition et des auteurs assez anciens, tels qu'Hincmiar, archevêque de Reims, qui vivait du temps de Charlemagne, assurent avoir été apportée du ciel par une colombe blanche, pour le sacre de Clovis. La garde de ce saint dépôt est confiée à l'abbaye de Saint-Rémy de Reims, d'où on la transporte en l'église métropolitaine pour le Sacre de nos rois, mais cette translation se fait avec beaucoup de cérémonie. Voici celle, qu'on observa au Sacre cie Louis xv, en 1722. La Sainte Ampoule fut apportée processionnellement de l'abbaye de Saint-Rémy, par le P. Gaudart, grand-prieur de cette abbaye, en chape d'or, et monté sur un cheval blanc de l'écurie du roi, que deux maîtres palefreniers de cette écurie conduisaient par les rennes, et qui était couvert d'une housse de moire d'argent sous un dais de pareille étoffe, qui était porté par les sieurs de Romaine, Godart et de Sainte Catherine, chevaliers de la Sainte Ampoule, vêtus de satin blanc et d'un manteau de soie noire, et par le sieur Clignet, baillif de l'abbaye de Saint-Rémy. Les religieux minimes, les chanoines de l'église collégiale de Saint-Timothée et les religieux de l'abbaye, tous en aubes, précédaient le dais aux quatre coins duquel marchaient à cheval le marquis de Prie, le comte d'Estaing, le marquis d'Alègre, et le marquis de Beauveau, nommés par Sa Majesté pour conduire la Sainte Ampoule, et dont le rang avait été réglé par le sort. Ils étaient précédés chacun de leur écuyer, portant un guidon chargé d'un coté des armes de France et de Navarre, et de l'autre de celles de leurs maisons. Cette cavalcade était précédée par soixante ou quatre-vingts habitants du village de Chesne, sous les armes, tambour battant, enseigne déployée. Ils ont le privilège d'escorter la Sainte Ampoule, pour l'avoir, dit-on, autrefois, retirée des mains des Anglais qui l'enlevaient.

L'archevêque de Reims ayant été averti, par le maître des cérémonies, de l'arrivée de la Sainte Ampoule, alla à la porte de l'église, avec les cérémonies accoutumées la recevoir des mains du grand-prieur de l'abbaye de Saint Rémy, qui la lui remit, après que ce prélat eut fait solennellement la promesse ordinaire de la rendre. L'archevêque de Reims, précédé de tons les chanoines, rentra ensuite dans le chœur, et posa la Sainte Ampoule sur l'autel, à côté duquel le grand-prieur et le trésorier de l'abbaye prirent place, et les quatre barons allèrent se placer dans les quatre premières chaires des chanoines, du côté de l'évangile ; leurs écuyers, placés dans les basses chaires, tenant toujours leurs guidons devant eux.

L'archevêque de Reims alla se revêtir, derrière l'autel, des ornements nécessaires pour dire la messe. Il en revint précédé de douze chanoines, procédants et assistants, dont les six diacres étaient vêtus de dalmatiques, et les six sous-diacres, de tuniques. L'archevêque de Reims, après avoir fait les révérences ordinaires à l'autel et au roi, s'approcha du fauteuil de Sa Majesté, et, étant assisté des évêques de Laon et de Beauvais, il reçut du roi, pour toutes les églises qui sont sujettes de la couronne, les promesses de protection que Sa Majesté prononça, s'étant assise et couverte. Ensuite, les évêques de Laon et de Beauvais soulevèrent le roi de son fauteuil, et ils se conformèrent aux anciennes formalités, demandèrent aux seigneurs assistants et au peuple, s'ils acceptaient Louis xv pour leur roi ; et leur consentement reçu par un respectueux silence, l'archevêque de Reims reçut du Roi le serment du royaume, et ceux de l'ordre du Saint-Esprit, de celui de Saint-Louis, et de l'observation de l'édit contre les duels, que Sa Majesté prononça, étant assise, tête couverte, et tenant les mains sur l'évangile qu'elle baisa à la fin.

L'archevêque de Reims retourna à l'autel, au pied duquel le roi fut conduit par les évêques de Laon et de Beauvais. Le duc de Villequier, premier gentilhomme de la chambre, lui ôta sa robe longue de toile d'argent, qu'il remit entre les mains du premier valet de chambre, et le prince Charles de Lorraine, ayant reçu la toque, la remit au premier valet de garde-robe. L'archevêque de Reims récita ensuite quelques oraisons, pendant lesquelles le roi se tint debout, la tête découverte, et vêtu seulement de sa camisole de satin. Sa Majesté s'étant remise dans son fauteuil, qui avait été apporté entre l'officiant et le prie-dieu, le prince de Turenne, grand-chambellan de France, vint chausser au roi des bottines ou sandales de velours violet, semé de fleurs de lys d'or en broderies, et le duc-régent, représentant le duc de Bourgogne, mit à Sa Majesté, les éperons d'or qui avaient été apportés de l'abbaye de Saint-Denis, et il les lui ôta dans le même instant. L'archevêque de Reims fit alors la bénédiction de l'épée de Charlemagne, qui était sur l'autel avec les autres ornements de la royauté. Il la ceignit au roi, et l'ôta aussi en même temps ; puis, l'ayant tirée du fourreau, il dit une oraison, après laquelle il la remit toute nue entre les mains du roi, qui, après l'avoir tenue quelque temps, la baisa et l'offrit à Dieu, la posant sur l'autel. L'archevêque officiant la reprit pour la rendre au roi. Sa Majesté la reçut à genoux, et la déposa entre les mains du maréchal duc du Villars, faisant la fonction de connétable, qui la tint, la pointe levée, pendant toute la cérémonie du sacre et du couronnement, et pendant le festin royal.

L'archevêque de Reims étant retourné à l'autel, le grand-prieur de l'abbaye de Saint-Rémy et le trésorier ayant ouvert la Sainte-Ampoule, ce prélat prit la patène du calice de Saint-Rémy, sur laquelle il mit, avec une aiguille d'or que lui présenta le grand-prieur, du baume céleste de la Sainte- Ampoule, environ la grosseur d'un grain de froment ; puis il prit du saint chrême, avec une aiguille d'argent, qu'il mêla avec ses doigts sur ladite patène. Ensuite, les évêques de Senlis, de Verdun, de Nantes et de Saint-Papoul s'étant avancés devant l'autel, chantèrent les litanies, pendant lesquelles, le roi demeura prosterné, devant l'autel, sur un grand carreau de velours violet, semé de fleurs de lys d'or, ayant l'archevêque de Reims, aussi prosterné, à sa droite. Le roi et cet archevêque se levèrent lorsqu'on chanta le verset des litanies, ùt obsequium, et l'archevêque de Reims, ayant sa mitre sur la tête et la crosse à la main, dit les trois versets qui suivaient. Les évêques de Laon et de Beauvais se tinrent debout aux côtés du roi, pendant tout le temps qu'on chanta les litanies. Les prières qui les suivent étant faites, l'archevêque officiant se plaça dans la chaise, et le roi s'étant allé mettre à genoux devant lui, Sa Majesté reçut les onctions sur le sommet de la tête, sur la poitrine, entre les deux épaules, sur l'épaule droite, sur la gauche, à la jointure du bras droit, et à celle du gauche. L'archevêque de Reims, aidé des évêques de Laon et de Beauvais, referma les ouvertures de la camisole et de la chemise du roi, qui, s'étant levé, reçut des mains du prince de Turenne, grand chambellan de France, la tunique, la dalmatique et le manteau royal de velours violet, brodé de fleurs de lys d'or, fourré et bordé d'hermine. Le roi se mit ensuite à genoux devant l'archevêque de Reims, qui lui fit la huitième onction sur la paume de sa main droite, et la dernière sur celle de la main gauche. Ensuite, ce prélat donna à Sa Majesté les gants qu'il avait bénis, ainsi que l'anneau qu'il lui mit au quatrième doigt de la main droite ; après quoi, il lui mit le sceptre royal dans la main droite, et la main de justice dans la gauche.

Ces cérémonies finies, le garde des sceaux, faisant les fonctions du chancelier de France, monta à l'autel, du côté de l'évangile, et, le visage tourné vers le chœur, il appela les pairs selon leur rang, en commençant par les laïcs, en la manière suivante : Monsieur le duc d'Orléans, qui représentez le duc de Bourgogne, présentez-vous à cet acte, formule qu'il répéta pour appeler les autres pairs. Ces seigneurs s'étant approchés du roi, l'archevêque de Reims prit sur l'autel la grande couronne de Charlemagne, la bénit, et la mit sur la tête du roi. Les pairs laïcs et les ecclésiastiques y portèrent la main, pendant que le premier pair ecclésiastique officiant récitait les oraisons du couronnement. L'archevêque de Reims conduisit ensuite Sa Majesté au trône élevé sur le jubé, et la fit asseoir, récita les prières de l'intronisation, quitta la mitre, fit une profonde révérence au roi, et le baisa en disant : Vivat rex in æternum. Les autres pairs ecclésiastiques et laïcs firent ensuite la même chose. En même temps, on ouvrit les portes de l'église, et le peuple, qui entra en foule, fit retentir l'air d'acclamations et de cris de joie, qui furent accompagnés des fanfares, des trompettes et des hautbois. Les oiseleurs lâchèrent une grande quantité d'oiseaux. Les régiments des gardes françaises et suisses, rangés en bataille sur la place et aux environs de l'église, répondirent aux instruments par une triple salve de leur mousqueterie, et les hérauts d'armes distribuèrent les médailles d'or et d'argent qui avaient été frappées pour celle cérémonie. Le Te Deum fut ensuite chanté en plain-chant par la musique du roi, au son de toutes les cloches de la ville, après quoi, l'archevêque de Reims commença la messe.

Pendant que la musique du roi chantait l'offertoire, et que l'archevêque de Reims faisait l'oblation, le roi d'armes et les hérauts allèrent prendre sur les crédances de l'autel, les offrandes qui y avaient été mises, et qui consistaient en un grand vase d'argent doré, un pain d'argent, un pain d'or, et une bourse de velours rouge brodée d'or, dans laquelle il y avait treize médailles d'or. Ils les portèrent sur des tavaïoles de satin rouge, brodées de franges d'or, et furent les présenter aux quatre chevaliers de l'ordre qui devaient les porter. Ces seigneurs montèrent sur-le-champ au trône du roi, et l'invitèrent à aller à l'offrande. Sa Majesté descendit et y alla dans l'ordre suivant. Le roi d'armes et les hérauts d'armes, le grand-maître, le maître et l'aide des cérémonies, les quatre chevaliers de l'ordre, le grand-maître de la maison du roi, le garde des sceaux faisant la fonction de chancelier, le connétable tenant l'épée nue, et ayant à ses côtés les deux huissiers de la chambre, portant leurs masses. Le roi marchait ensuite, ayant les pairs ecclésiastiques à sa droite, et les laïcs à sa gauche, et accompagné de deux de ses capital nés des gardes et de six gardes écossais. Le grand-écuyer de France portait la queue du manteau royal, et le gouverneur de Sa Majesté marchait après le roi, dont le trône était gardé par le grand-chambellan et par le premier gentilhomme de la chambre. Le roi étant arrivé à l'autel, où l'archevêque de Reims était assis, le visage tourné vers le chœur, Sa Majesté se mit à genoux, et remit le sceptre au maréchal de Tessé, et la main de justice au maréchal d'Huxelles. Alors il reçut la bourse, le pain d'or, le pain d'argent et le vase rempli de vin, des mains des chevaliers qui les avaient portés et les présenta à l'archevêque de Reims.

Nous passons sous silence beaucoup d'autres cérémonies, comme celle de l'essai du pain, qui devait être consacré pour la communion du roi, et celle du baiser de paix, que le cardinal de Rohan vint donner à Sa Majesté, et que Sa Majesté donna ensuite aux pairs ecclésiastiques et laïcs. Nous ne dirons rien non plus de la communion que le roi reçut sous les deux espèces. Après la communion le roi ayant pris la couronne de Charlemagne, l'archevêque de Reims la lui ôta, et lui en mit une autre moins pesante, qui était enrichie des principales pierreries de la couronne.

Le retour du roi dans le palais archiépiscopal se fit avec de pareilles cérémonies, et dans le même ordre qu'on avait observé lorsqu'il était venu à l'église.

Nous voici parvenu au festin royal. Il y avait cinq tables. Celle du roi était placée devant la cheminée, vis-à-vis la porte, sur une estrade élevée de quatre marches, et sous un dais de velours violet semé de fleurs de lys d'or. Les tables des pairs ecclésiastiques et des laïcs étaient dressées à la droite et à la gauche de celle du roi. Sur la même ligne, en bout de ces deux tables, l'on en mit deux autres, l'une à droite pour le nonce et les ambassadeurs, et l'autre à gauche pour le grand chambellan et les autres seigneurs. À la gauche de la table de Sa Majesté, on avait élevé une tribune d'où la duchesse de Lorraine vit la cérémonie, ainsi que plusieurs princes étrangers qui y étaient incognito. Tout étant prêt, le duc de Brissac, grand panetier de France, fit mettre le couvert du roi et apporta le cadenas de Sa Majesté, accompagné du grand-échanson, qui portait la soucoupe, les verres et les carafes, et du grand-écuyer tranchant, portant la grande cuiller, la fourchette et le grand couteau. Ils étaient vêtus d'habits et de manteaux de velours noir et de drap d'or. Le grand-maître des cérémonies alla ensuite avertir le grand-maître de la maison du roi que la viande du roi était prête, et le roi ordonna de faire servir. Le premier service fut apporté dans l'ordre suivant. Les hautbois, les trompettes et les flûtes de la chambre jouant des fanfares, marchaient à la tête. Ils étaient suivis des hérauts d'armes, du grand-maître des cérémonies, des douze maîtres-d'hôtel du roi, marchant deux à deux et tenant leurs bâtons, et du premier maître d'hôtel du Roi. Le prince de Rohan, faisant fonction de grand-maître, son bâton à la main, venait ensuite, et précédait ce service, dont le premier plat était porté par le duc de Brissac, et les autres par les gentilshommes servants de Sa Majesté. Le marquis de la Chesnaye, grand-écuyer tranchant, rangea les plats sur la table du roi, les découvrit, en fit l'essai, et les recouvrit en attendant que Sa Majesté fut arrivée, ensuite le prince de Rohan, faisant fonction de grand-maître, précédé du même cortège, alla avertir le roi, qui se rendit à la salle du festin dans cet ordre.

Les hautbois, les trompettes et les flûtes de la chambre du roi marchaient à la tête. Ensuite les six hérauts d'armes, le grand-maître, le maître et l'aide des cérémonies, et les douze maîtres d'hôtel. Puis le maréchal de Tallard, le comte de Matignon, le comte de Medavi, et le marquis de Goeshriant, chevaliers de l'ordre du Saint-Esprit, qui avaient porté les offrandes. Ils étaient suivis du maréchal d'Estrées, portant la couronne de Charlemagne sur un carreau de velours violet, et marchant au milieu des maréchaux de Tessé et d'Huxelles, du prince de Rohan, faisant les fonctions de grand-maître, qui marchait pour lors entre le prince de Turenne, grand-chambellan de France, et le duc de Villesquier, premier gentilhomme de la chambre, et du maréchal duc de Villars, représentant le connétable de France, tenant l'épée nue, et ayant les deux huissiers; de la chambre portant leurs masses, à ses côtés. Les pairs ecclésiastiques et les pairs laïcs marchaient ensuite aux deux côtés de Sa Majesté, auprès de laquelle étaient les ducs de Villeroi et d'Harcourt, ses capitaines des Gardes, et le duc de Charrost, son gouverneur ; les six Gardes-Écossais marchant sur les ailes. Le roi avait la couronne de diamants sur la tête, le sceptre et la main de justice dans les mains. L'archevêque de Reims le conduisait par le bras droit, le prince Charles de Lorraine, grand-écuyer de France, portait la queue du manteau royal, et le garde des sceaux de France, faisant fonction de chancelier, était derrière Sa Majesté et fermait cette marche.

Lorsque le roi fut arrivé à sa table, l'archevêque duc de Reims commença le Benedicite. Alors furent posés sur des carreaux de velours violet, la couronne de Charlemagne à un des coins de la table à droite, le sceptre à l'un des coins de la même table à gauche, et la main de justice à l'autre coin du même côté. Les maréchaux d'Estrées, de Tessé et d'Huxelles se placèrent auprès des honneurs que chacun d'eux avait portés, et s'y tinrent debout pendant tout le dîner. Le maréchal duc de Villars, représentant le connétable tenant l'épée nue, et ayant les deux huissiers portant leurs masses à ses côtés, prit sa place devant la table et vis-à-vis du roi. Le prince Charles de Lorraine, grand-écuyer de France, se mit derrière le fauteuil de Sa Majesté, aux deux côtés duquel se placèrent les ducs de Villeroi et d'Harcourt, capitaines des gardes. Le prince de Rohan, représentant le grand-maître, se tint debout près de la droite du roi, et ce fut lui qui présenta la serviette, à Sa Majesté avant et après le dîner. Le grand-panetier, le grand-échanson, et le grand-écuyer tranchant se placèrent devant la table vis-à-vis de Sa Majesté, pour être à portée de faire les fonctions de leurs charges, le premier changeant les assiettes, les serviettes et le couvert du roi, le second lui donnant à boire toutes les fois que le roi en demandait, allant, pour cet effet, chercher le verre, le vin et l'eau, dont il faisait faire l'essai devant Sa Majesté ; et le troisième servant et desservant les plats, et approchant ceux dont le roi voulait manger. La nef avait été mise au coin le plus éloigné de Sa Majesté, du côté droit de la table, et l'abbé Milon, aumônier du roi, était auprès pour l'ouvrir toutes les fois que le roi voudrait changer de serviette. Tous les services de la table de Sa Majesté furent servis par ses officiers, avec le même cortège que les premiers, et le troisième, qui était celui du fruit, fut servi par le duc de Brissac, grand-panetier de France.

Après que le roi eut pris sa place, les pairs ecclésiastiques, les pairs laïcs, le nonce et les ambassadeurs, le garde des sceaux, le grand-chambellan, le premier gentilhomme de la chambre, les quatre chevaliers de l'ordre du Saint-Esprit, qui avaient porté les offrandes, et les introducteurs des ambassadeurs, se placèrent aux quatre tables qui leur avaient été destinées. Elles furent servies par les notables et les officiers de la ville qui en avaient fait la dépense, ainsi que de celle du roi même.

Après le dîner, l'archevêque de Reims dit les Grâces, et le roi fut reconduit à son appartement dans le même ordre et les mêmes cérémonies qu'il était venu. On servit ensuite deux tables dans les salles de l'Hôtel-de-Ville. Le maréchal duc de Villars, représentant le connétable, tint la première, à laquelle mangèrent le prince de Rohan, représentant le grand-maître, les maréchaux de France qui avaient porté les honneurs, les deux capitaines des Gardes-du-Corps, le capitaine des Cent-Suisses, le grand-panetier, le grand-échanson, le grand-écuyer tranchant, et le premier maître d'hôtel du roi. Les quatre barons qui avaient escorté la Sainte-Ampoule, tinrent une autre table où plusieurs seigneurs de la cour se placèrent. Ces deux tables furent servies par les notables et officiers de la ville de Reims.

Le 26, le roi fut en cavalcade à l'église de Saint-Rémy pour y entendre la messe, et demander à ce glorieux apôtre de la France, la continuation des soins paternels qu'il a toujours pris d'un royaume qui lui est redevable de sa foi et de sa conversion.

Le 27, se fit dans l'église métropolitaine de Notre-Dame de Reims la cérémonie des chevaliers de l'ordre. Le roi étant précédé des officiers de l'ordre, approcha de l'autel, et s'étant mis sur un marche-pied de velours vert, en broderie de flammes d'or, sous un dais de même, reçut le collier de l'ordre du Saint-Esprit, des mains d'Armand-Jules de Rohan Guemené, archevêque de Reims, pair de France ; après avoir fait le serment du chef et souverain grand-maître de l'ordre. Le roi s'étant remis à sa place, sous le dais, fit chevalier dudit ordre Louis d'Orléans duc de Chartres, premier prince du sang, etc., etc., et Charles de Bourbon comte de Charolais, pair de France etc.

Le 28, le roi retourna à l'abbaye de Saint-Rémy, où il entendit la messe, et communia par les mains d'un de ses aumôniers, puis entendit une seconde messe où sa musique chanta. Cette seconde messe finie, Sa Majesté précédée de la compagnie des Cent-Suisses, de celle des archers de la prévôté de l'hôtel et des Gardes-du-Corps, et suivie, par un grand nombre de seigneurs, entra dans le Parc-de-l'Abbé, vis-à-vis de l'église où étaient les malades des écrouelles au nombre de plus de deux mille, qu'elle toucha la tête découverte depuis le premier jusqu'au dernier de ces malades, en prononçant ces paroles, Dieu te guérisse le roi te touche.

Âpres cette action de piété, le roi en fit une autre de bonté et de miséricorde, en donnant abolition générale aux criminels de toute sorte de condition, qui étaient venus se rendre prisonniers à Reims au nombre de plus de six cents.

Au reste, le Sacre du roi ne lui confère aucun nouveau droit ; il est monarque par sa naissance et par succession, et le but de celle pieuse cérémonie n'est sans doute que d'apprendre aux peuples, par un spectacle frappant, que la personne du roi est sacrée, et qu'il n'est pas permis d'attenter à son autorité ni à sa vie, parce que, comme l'écriture dit de Saül, il est l'oint du Seigneur.

d'après le Dictionnaire encyclopédique de la noblesse de France
Nicolas Viton de Saint-Allais (1773-1842)  — Paris, 1816

 

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