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L'ASSASSINAT DE ALI MECILI

Hichem Aboud rompt la loi du silence

Dans une interview publiée dans le Nouvel Observateur le 14 juin 2001, l’ancien chef de cabinet du patron de la toute-puissante Sécurité militaire algérienne affirmait qu'Ali Mecili avait été assassiné sur ordre de la présidence de la République.

LE 7 AVRIL 1987, l’avocat Ali Mecili, proche de l’opposant Aït Ahmed, est assassiné à Paris dans le hall de son immeuble du boulevard Saint-Michel. Deux mois plus tard, la police judiciaire arrête Abdelmalek Amellou, un proxénète parisien d’origine algérienne, qui détient un ordre de mission qui porte la signature du « capitaine Hassani ». Ce nom est celui d’un officier de la Sécurité militaire algérienne. Déféré devant la justice, Amellou est expulsé en procédure d’urgence vers l’Algérie, sur ordre du ministre de l’Intérieur, Charles Pasqua.

 

Le Nouvel Observateur. – Que savez-vous de l’affaire Ali Meceli ?

 

Hichem Aboud. A l’époque j’étais chargé du dossier du Moyen-Orient au cabinet du général Lakhal Ayat, le directeur central de la Sécurité militaire (la DCSM). Je sais que les ordres sont venus de la présidence de la République. Le général Ayat a eu une réunion à la présidence avec Larbi Belkheir, qui était à l’époque directeur de cabinet président Chadli (et qui était aujourd’hui directeur de cabinet du président Bouteflika, NDLR). Des instructions lui ont alors été données pour monter une opération contre Mecili.

 

N.O. – Pourquoi Meceli, qui était un avocat inconnu de la majorité de la population et même de la classe politique algérienne ?

 

H. Aboud. – A l’époque, il avait rapproché Aït Ahmed et Ben Bella, deux figures de la révolution algérienne. Aït Ahmed venait de reprendre le Front des Forces socialistes, le FFS, et Ben Bella avait monté le MDA qui était devenu le mouvement d’opposition numéro un. Ces deux hommes gênaient, il faillait les neutraliser. Mais si l’on avait touché à l’un deux, le scandale aurait été immense. Donc ils s’en sont pris à celui qui les avait rapprochés. C’était un avertissement pour les deux : « Comme on a pu tuer Mecili, vous aussi – vous n’êtes pas loin – on peut vous atteindre ». C’est le capitaine Rachid Hassani qui a pris en charge cette mission. Il venait d’arriver de la gendarmerie.

 
N.O – Comment l’avez-vous appris ?

H. Aboud. – C’est le capitaine Hassani qui m’en a parlé. C’était mon ami. Il est de mon patelin, pratiquement de la même tribu que moi, dans les Aurès. Hassani a pris en main l’affaire Mecili parce qu’aucun officier ne l’avait acceptée.

 
N.O.- C’est ce qu’il vous a dit ?

H. Aboud. – Oui. Ceux qui devaient traiter l’affaire, ceux qui avaient le dossier de l’opposition et ceux qui étaient dans l’opérationnel avaient refusé.

 
N.O.- Pourquoi ?

H. Aboud. – Parce que les gens refusent de faire des sales coups. N’oubliez pas que dans l’armée algérienne – si on bloque ces gens, si on ne les laisse pas apparaître – il y a une élite universitaire recrutée dans les années 70 pour apporter du sang neuf. Ces officiers ont des convictions, des scrupules. La culture qu’on nous a donnée, c’est le patriotisme. Nous sommes là pour servir le pays, pas pour commettre des assassinats ou servir des hommes des clans. On n’entre pas à la Sécurité militaire, dans la police ou dans la gendarmerie pour commettre des assassinats. Et là, c’était clair, il s’agissait de commettre un assassinat.

 

N. O. – C’est pour cette raison qu’on a fait appel à un proxénète ?

H. Aboud.- Oui, ils ne trouvent personne d’autre. Dans les services, il y a des tireurs d’élite, des professionnels. Personne ne s’est aventuré à prendre cette affaire. Hassani, qui a piloté l’opération, arrivait de la gendarmerie. Il n’avait suivi aucune formation d’officier de renseignement. En prenant le dossier, il avait ses raisons. D’après ce qu’il m’a raconté, Mecili, à l’époque où il était l’un des hauts responsables de la Sécurité militaire, avait fait du mal à sa famille, en particulier à son oncle, Moussa Hassani, un ancien ministre des PTT du temps de Ben Bella. A Paris, Hassani a embauché Abdelmalek Amellou, le proxénète qui a assassiné Mecili. Celui-ci a obtenu un appartement à Alger et une prime de 800 000 francs. Quand Amellou a été arrêté après l’assassinat, le gouvernement français (Jacques Chirac était alors Premier ministre et Charles Pasqua ministre de l’Intérieur, NDLR) a donné un sacré coup de main aux Algériens en l’aidant à fuir la justice française…

 
Propos recueillis par Farid Aïchoune et Jean-Baptiste Naudet

(Entretien paru dans le Nouvel Observateur du 14 juin 2001)

 

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