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Île de l’OcĂ©an Indien d’une superficie d’environ 590 000 km

2

- soit un peu plus que la France, la Belgique, les Pays-Bas 
et le Luxembourg rĂ©unis -
QuatriĂšme plus grande Ăźle du monde aprĂšs le Groenland, 
la Nouvelle Guinée et Bornéo.

FĂ©odalitĂ©s puis colonisation française. 
Indépendance octroyée et impérialisme


RĂ©alitĂ©s complexes et rĂ©sistances lĂ©gitimes :
un pays et un peuple entre continuitĂ©s 
et ruptures


Paradoxe d'aujourd'hui : l’üle, Ă  fortes 
potentialitĂ©s Ă©conomiques, sociales 
et culturelles, est cantonnée
par la mondialisation capitaliste 
dans le groupe des pays 
Ă  faible revenu et Ă  faible 
développement humain.

Une dĂ©centralisation 
effective est nécessaire
pour rĂ©soudre 
les dĂ©sĂ©quilibres 
régionaux.

REALITES

et

RESISTANCES




Madagascar

AFASPA

Ecriture : 

Jean-Claude Rabeherifara 

Conception graphique : 

RĂ©gine Fleury, Eric Grevoz

CrĂ©dit photographique : 
Fond Charles Ravoajanahary, ComitĂ© de SolidaritĂ© 
de Madagascar,

Réalités malgaches

L’Express de Madagascar

E. LogiĂ©, L. Allorge, R. Lejeune, J. Boiteau, H. Rasolo,
Ratrimoarivony, M. Cosquer, 


RĂ©alisation : 

Association Française d'Amitié et de Solidarité avec les Peuples d'Afrique

e-mai : afaspa@wanadoo.fr - site Internet : www.afaspa.com 

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2

Un « sanctuaire Â» 

de la

NATURE

DĂšs la pĂ©riode quaternaire, Madagascar se trouvait Ă  peu prĂšs Ă  l'endroit oĂč elle se
situe actuellement. Au PliocĂšne, quand elle s’est formĂ©e, l’üle Ă©tait encore couverte
d’immenses forĂȘts oĂč Ă©voluaient une faune et une flore toutes endĂ©miques consti-
tuant de fait une rĂ©serve naturelle prĂ©servĂ©e avant que l’homme n’y survienne.
Madagascar fait partie des 17 pays de méga-biodiversité qui totalisent à eux seuls
80% de la biodiversitĂ© mondiale avec notamment un taux d’endĂ©misme floristique 
de 85% et d’environ 90% pour la faune.

Le super-continent 

Gondwana

au triassic 

(200 millions d’annĂ©es).
Madagascar au centre, en
vert.

Un passé géologique original

Madagascar n’a pas toujours Ă©tĂ© une Ăźle. 
Selon la « thĂ©orie de la dĂ©rive des continents Â»,
l’Australie, l’Antarctique, Madagascar, le Sud 
de l’Afrique et de l’AmĂ©rique Ă©taient rĂ©unis 
en un super-continent appelĂ© 

Gondwana

.

A la fin de l’ùre tertiaire, il y a 160 millions

d’annĂ©es, ce bloc s'est disloquĂ© en plusieurs
continents.

Une faune et une flore endémiques

Le passĂ© gĂ©ologique permet d’expliquer l’existence d’une faune et d’une flore 
communes à Madagascar et au Sud des continents africain et américain ainsi que
des profils géologiques trÚs proches. Néanmoins, l'isolement de Madagascar au
cours des temps géologiques a fait évoluer la faune et la flore de façon unique. On
trouve donc sur la Grande ßle des espÚces particuliÚres endémiques, qui n'existent
nulle part ailleurs : lĂ©muriens et autres. 

Du point de vue gĂ©ologique, on retrouve dans la structure de Madagascar toutes 
les pĂ©riodes de l’histoire de la planĂšte. Du fait de son relief, l’üle rĂ©unit une vĂ©ritable
mosaĂŻque de paysages. Elle est faite de contrastes entre le bush du Grand Sud, les
forĂȘts humides de l’Est, les Hauts-plateaux granitiques du Centre, parfois surmontĂ©s
de massifs volcaniques et les savanes des collines sĂ©dimentaires de l’Ouest.

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3

Un 

MĂ©tissage

RÉCURRENT

Les outils de fer, vases de cĂ©ramique, outils de pĂȘche etc. trouvĂ©s au cours 
des recherches archĂ©ologiques attestent, d’une prĂ©sence humaine dĂšs l’an 1000
de notre Ăšre. D’anciens rĂ©cits de voyage, trĂšs imprĂ©cis, pourraient suggĂ©rer une
occupation primitive bien antérieure. Les mythes et traditions orales de nombreux
groupes ethnico-rĂ©gionaux de l’üle font rĂ©fĂ©rence aux 

Vazimba,

« populations 

primitives Â» dont il est soutenu qu'elles sont lĂ  depuis des temps immĂ©moriaux.

En toute hypothĂšse, les ancĂȘtres des Malgaches sont venus de l’espace austronĂ©sien
(Nord-Est de l’OcĂ©an Indien) par vagues :

- soit par voie de terre dans des périples de longue durée transitant par la

ThaĂŻlande, l'Inde, puis les cĂŽtes persanes, arabiques et pour finir africaines – 
Ă©tapes migratoires ayant forcĂ©ment favorisĂ© les mĂ©tissages avec les peuples 
rencontrĂ©s ;

- soit directement en se laissant porter par les grands courants marins de façon

spontanée et fortuite ou de façon plus volontaire et plus organisée pour les
migrations plus récentes.

UnitĂ© dans la diversitĂ© 

MalgrĂ© les provenances diverses de ses composantes, l’unitĂ© 
fondamentale des mƓurs, celle des modes d'organisation sociale 
traditionnelle et, surtout, celle de la langue dĂšs une Ă©poque trĂšs
ancienne sont des traits frappants du peuple malgache
 Unités qui
s’opposent Ă  la diversitĂ© des types anthropologiques. 

Le substrat culturel malgache

semble se rattacher aux traits 

caractéristiques de la civilisation pré-aryenne de l'Inde, de l'Indonésie
et des Ăźles diverses et Ă©parses de l'espace austronĂ©sien :

- culture des riziĂšres irriguĂ©es, domestication du bƓuf, usage 

rudimentaire des mĂ©taux, habiletĂ© Ă  la navigation, 

- importance du rĂŽle de la femme et de la filiation en ligne maternelle,

organisation rĂ©sultant des nĂ©cessitĂ©s de la culture irriguĂ©e, 

- animisme, culte des ancĂȘtres etc.

Vazimba 
un 

Homo floresiensis

?

Les Vazimba que les lĂ©gendes
Ă©voquent comme Ă©tant des
humains de petite taille seraient-ils
des parents d’Homo floresiensis ?
La dĂ©couverte de cet hominidĂ© 
en septembre 2003 dans une
caverne de l’Île de Flores (à l’Est
de Java en IndonĂ©sie) a fait l’objet
d’une  prĂ©sentation dans 

Nature

en octobre 2004. Ses restes trou-
vĂ©s sont datĂ©s entre -95 000 et
-12 000 ans. Sa taille est estimĂ©e 
Ă  un mĂštre. Son volume crĂąnien
de 380 cm

est petit, ce qui le 

différencie radicalement du pygmée
d’Afrique centrale. Les capacitĂ©s
cognitives de son cerveau sont,
quant Ă  elles, rĂ©putĂ©es « normales Â».

Affaire à suivre


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4

Souverains malgaches du 19

Ăšme

siĂšcle

Andrianampoinimerina, Radama 1

er

, Ranavalona 1

Ăšre

,

Radama II, Rasoherina, Rainilaiarivony 

(Premier ministre)

,

Ranavalona II, Ranavalona III

De la SOCIÉTÉ

VAZIMBA

aux féodalités

La sociĂ©tĂ© vazimba 

(jusqu’au 11

Ăšme

siĂšcle)

Les premiers groupes de peuplement de l’üle 
développent des organisations sociales à base de
parentĂ© :

- Le 

raza

correspondant à la lignée qui rassemble

des individus issus d’un ancĂȘtre commun rĂ©el,
vivant ou mort. Ses membres habitent un mĂȘme
quartier, cultivent un terrain collectif dans lequel
chaque foyer reçoit annuellement une parcelle,
Ă©lĂšvent un troupeau collectif et disposent d’un
tombeau commun.

- Le 

foko

correspond au clan : il rassemble plu-

sieurs raza. Les unions matrimoniales ne 
peuvent se faire dans le mĂȘme foko. L’esclavage
y est inconnu, les différenciations sociales sont
minimes. Tout ce qui concerne la vie dans 
la communauté est collectivement discuté et
dĂ©libĂ©rĂ© au sein du 

fokonolona

(le clan).

Les gens « du mĂȘme sang Â» ont des droits et
obligations mutuelles qui induisent une grande
solidarité.

Ebauches fĂ©odales 

Influence de l’Islam

L’arrivĂ©e de scribes malais islamisĂ©s au 14

Ăšme

siĂšcle

introduit la monnaie d’argent, l’usage de la balance,
les transactions commerciales, les noms des mois
lunaires, le travail du fer. C’est l’époque de la crĂ©ation
des plus importants royaumes fĂ©odaux. Au 18

Ăšme

siĂšcle,

Andriamandisoarivo

, roi des Zafiraminia, contrĂŽle

un tiers de l’üle. 

Ratsimilaho

fédÚre toutes les tribus

de la forĂȘt tropicale de la cĂŽte Est. D’autres royau-
mes se dĂ©veloppent Ă  l’intĂ©rieur de l'Ăźle : les plus
importants sont, dans le Sud, les royaumes Betsileo
et, au centre, ceux des Merina.

Ebranlement  de la sociĂ©tĂ© vazimba

Le passage de la cueillette Ă  une production de
biens conduit Ă  la division du travail suivant le sexe
et l’ñge, ce qui engendre la domination et l’exploita-
tion des femmes par les hommes et des cadets 
par les aßnés. Des contradictions surviennent au
moment de la transmission des biens parentaux.
Les richesses de la mĂšre (maison, objets mobiliers)
restent dans son foko et vont aux enfants. Ceux du
pÚre vont à son clan. Pendant des millénaires, ce
sont des outils rĂ©duits au minimum. Avec l’élevage,
le troupeau appartient au pĂšre ainsi que les esclaves
capturés lors des guerres de clans.
Cette évolution entraßne la disparition de la société
vazimba. 
Le droit paternel devient prĂ©pondĂ©rant : Ă  la dĂ©libĂ©-
ration en commun de tous les membres du foko se
substitue l’autoritĂ© d’un chef hĂ©rĂ©ditaire, l'

Andriana,

le seigneur.

Unification merina 
et prégnance du christianisme

AprÚs avoir unifié les royaumes merina en 1803,

Andrianampoinimerina

(

le seigneur au cƓur de

l'Imerina

) s’attelle Ă  la conquĂȘte du reste de l'Ăźle ; 

il instaure un gouvernement centralisateur et 
développe la culture du riz en paliers. Son fils

Radama 1

er

ouvre le pays Ă  l’influence europĂ©enne

des missions. GrĂące au soutien des Britanniques, 
il est reconnu comme roi de Madagascar.

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5

La 

NATION 

MALGACHE

au dĂ©fi de l’impĂ©rialisme

La premiĂšre guerre franco-malgache de 1883-1885 se termine par un
traité inique, avalisé par de la Conférence de Berlin de 1885 qui partage
les colonies entre les puissances européennes. Madagascar passe sous
la tutelle de la France.

Armée Royale

L’Illustration.
L’internement 
de Rainilaiarivony

Jean Laborde

Joseph 

Lambert

La charte Lambert 

SignĂ©e en 1855 par le futur Radama II, elle
accorde Ă  l’« ami Â» Lambert le droit d'exploiter
des mines et des terrains cultivés, en contra-
diction avec la loi qui interdit le droit de 
propriété aux étrangers. Menacé par les
milieux « nationalistes Â», Radama II reniera
sa signature en 1862 ce qui provoquera la
fureur des Français.

Ranavalona 1

Ăšre 

lutta farouchement pour 

prĂ©server son pays de l’intervention Ă©tran-
gĂšre. Mais sa lutte impitoyable contre 
les chrĂ©tiens et son ambition dĂ©mesurĂ©e 
à satisfaire ses besoins de défense et de

prestige, au détriment des biens de consom-

mation, ont entraßné une

dégradation sévÚre de la
situation sociale et son
impopularité.
Cette ambition la pousse Ă 
accorder toute confiance
au Français Jean Laborde

pour qu’il construise des

industries et forme 5000

ouvriers malgaches aux métiers

de tailleur de pierre, de la métallur-

gie, du textile
 Mais simultanément,

elle impose Ă  tout homme valide 

le 

fanompoana

(travail forcĂ©, non 

rĂ©munĂ©rĂ©) pour la rĂ©alisation des grands

travaux et les services royaux

.

Au 19

Ăšme

siÚcle, la politique menée par

Rainilaiarivony, Premier ministre et Ă©poux
des trois derniĂšres reines, atteint des 
sommets d’impopularitĂ©, en recherchant 
dĂ©sespĂ©rĂ©ment le compromis avec les 
intĂ©rĂȘts des grandes puissances et ceux 
des classes dirigeantes.

Le traitĂ© de 1817, avec les Anglais

Sous couvert de Â« libĂ©ration des esclavages Â» ce traitĂ© vise Ă  procurer
une main-d’Ɠuvre Ă  bon marchĂ©, Ă  Ă©couler les productions et Ă  rendre
Madagascar Ă©conomiquement dĂ©pendante de l’Angleterre.
Cela ne va pas sans heurts entre les trafiquants d’esclaves et les 
marchands qui dĂ©sirent monopoliser le commerce extĂ©rieur Ă  leur 
profit et la haute hiĂ©rarchie militaire de mĂ©tier chargĂ©e de l’ordre et de
l’expansion du royaume.
L’annexion s’amorce Ă  la mort de Radama 1

er

en 1828 par une

pĂ©riode de 60 ans caractĂ©risĂ©e par :
- l’incapacitĂ© des classes dirigeantes Ă  s’unifier 

durablement et Ă  prendre en charge 
le développement national,

- l’accentuation des pressions de

la France et de L’Angleterre à faire de
l’üle un dĂ©bouchĂ© pour leurs marchandi-
ses et un rĂ©servoir de main-d’Ɠuvre
pour leurs plantations des Ăźles
Bourbon et Maurice.

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En mĂȘme temps s’instaurent la rĂ©quisition
de la force de travail, l'impĂŽt pour obliger
les paysans Ă  se salarier, la formation
des travailleurs suivant les demandes
des colons et le travail forcé pour les
infrastructures nécessaires au dévelop-
pement du capital marchand.

Au total, 2 035 763 ha sont immatriculĂ©s
entre 1902 et 1944 pour 56 333 titres.
Une partie des terres est attribuée aux
chefferies locales pour les récompenser
de leur loyalisme. Cette redistribution
aboutit Ă  la rĂ©duction des cultures 
vivriĂšres (riz et autres) conduisant Ă  des
hausses excessives et Ă  la pĂ©nurie. 

6

« Sans condition de mise en valeur», plus de 150 000 hectares sont
concĂ©dĂ©s Ă  des petits colons, surtout rĂ©unionnais, dont 60 000 sur la CĂŽte
Est et 45 000 dans le Nord-Ouest. D’énormes concessions miniĂšres et
forestiĂšres, du style des grandes compagnies congolaises, sont accor-
dĂ©es Ă  de grosses sociĂ©tĂ©s. Ainsi, Suberbie fait main basse sur l’or dans
la rĂ©gion de Maevatanana, entre Antananarivo et Mahajanga.

CONQUÊTE

COLONIALE

et

RÉSISTANCE

Chefs 

menalamba

: Rainibetsimisaraka, Rabozaka Ramasoandromahamay, Rabezavana

1883-1885

: premiĂšre guerre franco-malgache. Echec de la France. Un traitĂ© inique oblige 

le gouvernement malgache à emprunter auprùs du Comptoir National d’Escompte de Paris pour
payer une indemnitĂ© de guerre de 10 millions de francs, il lui retire le monopole du commerce
et lui impose de distribuer de vastes concessions Ă  des Ă©trangers.
La seconde guerre permet aux troupes françaises d’entrer dans la capitale malgache 
le 27 novembre 1895.
Le 28 septembre 1896, le Gouverneur gĂ©nĂ©ral Gallieni condamne Ă  l’exil la reine Ranavalona III
et son Premier ministre. Il s’attelle Ă  la « pacification Â» de l’üle, dĂ©cide le maintien de l’esclavage,
la fermeture de toutes les Ă©coles existantes, l’obligation pour les indigĂšnes de parler le français


La conquĂȘte militaire 

LA Â« PACIFICATION Â» DURE PLUS DE 15 ANS CAR LA RÉSISTANCE PREND
VITE LA FORME DE GUÉRILLAS RURALES ÉCLATÉES EN PLUSIEURS
FOYERS :

- Le mouvement 

Menalamba

(littĂ©ralement, 

toges rouges

, parce que rougies par la

terre, permettant aux combattants de se fondre dans le paysage) trouve son apogée
en 1896-1897 sur l’ensemble des Hautes-terres à travers une multitude de foyers.

- Dans les rĂ©gions cĂŽtiĂšres : la rĂ©sistance implique successivement les populations
des diffĂ©rentes rĂ©gions de 1898 jusqu’au mouvement antandroy des 

Sadiavahy

en

1915.

La « pacification Â» a fait entre 100 000 et 700 000 victimes.

« Pacification Â» et rĂ©sistances

Une logique de pillage et de spéculation

Colons 

achetant l’or

Gallieni

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7

Le 

12 décembre 1943

, Ă  

la libĂ©ration de l’üle, l’Union

des syndicats CGT de
Madagascar se reconstitue
sur des bases unitaires avec
comme secrétaires généraux
Joseph Ravoahangy et
Pierre Boiteau. 

DĂ©but 1947

, l’Union compte

4 unions locales, 7 sections
fĂ©dĂ©rales, 89 syndicats et
14 000 adhĂ©rents Ă  jour de
leur cotisation.

SOCIÉTÉS 

SECRÈTES

et mouvement syndical

1915

- Le 

VVS

(Vy Vato Sakelika, Fer-Pierre-Section) entre en

scĂšne aprĂšs la dĂ©faite des 

Menalamba

. Cette 

société secrÚte

d’intellectuels subit aussitĂŽt une violente rĂ©pression.
Ralaimongo mÚne campagne pour la libération des emprisonnés
VVS et contre les spoliations des paysans Ă©liminĂ©s de leurs 
terres. Le VVS se dĂ©veloppe sous l’impulsion du pasteur
Ravelojaona et des docteurs Raseta et Ravoahangy. Avec 
le soutien des Français Vittori et Dussac, il inspire la 

ligue 

malgache pour l'accession des indigĂšnes de Madagascar Ă  
la citoyenneté française

. En France, Charles Gide et Anatole

France fondent la 

ligue française pour l'accession des indigÚnes

de Madagascar aux droits de citoyens français

.

1938

: le droit syndical est reconnu. Le premier syn-

dicat malgache est constituĂ© : dirigĂ© par Ravoahangy,
il adhĂšre Ă  la CGT et y rejoint des syndicats mixtes
(français et malgaches) de fonctionnaires, de
l’Imprimerie officielle, de l’Assistance mĂ©dicale et
des services de santĂ©, de l’Agriculture, de l’Elevage,
et des Eaux et ForĂȘts etc. MalgrĂ© les dissensions,
des acquis sont arrachĂ©s : relĂšvement notable des
salaires, suppression du SMOTIG (travail forcé),
abrogation des amendes et des emprisonnements
pour absence au travail et reconnaissance du droit
syndical sans discrimination. Toutes les organisa-
tions sont dissoutes en 1939 par l’administration de
la colonie qui opte pour le régime de Vichy.

19 mai 1929

: manifestation Ă 

Antananarivo pour l’«

accession de

tous à la citoyenneté française

» ;

le mot d’ordre d'«

indépendance

»

y surgit pour la premiĂšre fois.
Ralaimongo, Ravoahangy, Raseta
et Dussac sont condamnĂ©s Ă  
des peines de prison ou d'exil. 
De cette dynamique de lutte naĂźt
en 1936 le 

parti communiste 

de la région de Madagascar
– section française de l'Internationale communiste

(« sabordĂ© Â» deux ans aprĂšs sa constitution).

1936

: le 

syndicalisme malgache

voit le jour dans la clan-

destinitĂ© lors de la grĂšve des ouvriers d’une conserverie
d’Antananarivo. AnimĂ©e par des militants aguerris comme
Razafinjohany, celle-ci va tenir deux ans, revendiquant aug-
mentations salariales, suppression des amendes, droit de se
syndiquer... Les syndicats illĂ©gaux d’ouvriers et de paysans
sont alors systématiquement poursuivis en justice.

Jean Ralaimongo

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le crime colonial français

22 fĂ©vrier 1946 : CrĂ©ation du Mouvement DĂ©mocratique de la RĂ©novation
Malgache (MDRM), 

qui s’impose rapidement comme le principal parti politique

malgache. 
Fort de 300 000 membres, il Ă©mane d'une large base politique provenant de l'Ăźle
entiĂšre et dĂ©passe les clivages ethniques et sociaux. 

8

L’insurrection malgache 
de

1947

,

22 juillet – 4 octobre 1948 : 

ProcĂšs des dirigeants du MDRM, accusĂ©s d’ĂȘtre
les responsables du déclenchement de la rébellion.
Six condamnations à mort sont prononcées, dont
celles de Ravoahangy et de Raseta. Les condam-
nĂ©s seront graciĂ©s ultĂ©rieurement et l’amnistie
interviendra Ă  partir de 1954.

29 mars 1947 : 
Le SoulĂšvement nationaliste

gagne rapidement un tiers de

l'ßle. Malgré sa direction qui clame son innocence, le MDRM est
dissout. Les jeunes des sociétés secrÚtes (JINA, pour
Jeunesse nationaliste, devenue JINY, et PANAMA ou Parti
nationaliste malgache) ont débordé le MDRM dont ils étaient
membres. 

L'ordre

ne sera rétabli que des années plus tard. La

rĂ©pression fait environ 100 000 victimes. Les cours militaires
françaises jugent les chefs militaires de la révolte et en font
exécuter des dizaines.

janvier 1947 : 
Élections gĂ©nĂ©rales, triomphe du MDRM.

Les principaux co-fonda-
teurs du MDRM :
Dr Joseph Ravoahangy, 
Dr Joseph Raseta,
Raymond William
Rabemananjara, 
Jacques Rabemananjara

Aujourd’hui, 
vĂ©ritĂ© et justice 
doivent ĂȘtre rendues 
au peuple malgache 
- Ouverture de toutes
les archives, 
- Reconnaissance 
des responsabilités
coloniales 
-Refus de banaliser
« 1947 Â»

Henri Douzon, un des avocats des militants et Ă©lus nationalistes,
aprĂšs son agression par des forces coloniales

Le Comité de Solidarité de Madagascar

Insurgés en tenues

d'apparat 

DĂ©parts et extensions
de l'insurrection

Photos d’archives de la rĂ©pression de 1947

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9

De l’

INDÉPENDANCE

formelle

Ă  la 

CRISE

NÉO-COLONIALE

Chefs d’Etat malgaches depuis l’IndĂ©pendance :

Philibert Tsiranana [1960-1972], Gal. Gabriel Ramanantsoa [1972-1975],
Col. Richard Ratsimandrava [1975], Gal. Gilles Andriamahazo [1975],
Amiral Didier Ratsiraka [1975-1993 ; 1997-2002], 
Pr. Albert Zafy [1993-1995], Norbert Ratsirahonana [1996-1997], 
Marc Ravalomanana [2002-...]

De Gaulle et Tsiranana, le pacte

néo-colonial

26 juin 1960 :

La France octroie une indĂ©pendance formelle
 

Par le biais des accords de coopération franco-malgaches de 1960, la domination
politique et économique de l'ancienne métropole est intégralement maintenue :

- assujettissement financier et monétaire à la zone franc,
- contrÎle des secteurs décisifs de l'économie (mines, plantations),
- quasi-monopole du commerce intérieur concédé à des sociétés françaises,
- intégration de Madagascar dans le systÚme de défense français dans l'Océan
Indien (prĂ©sence effective de bases militaires et de « conseillers Â» militaires français
jusqu’au sommet de l’Etat malgache),
- assimilation de l'enseignement supérieur au systÚme universitaire français.

PremiÚre république,

Une Ă©conomie sous contrĂŽle

-

Des firmes et des capitaux Ă©trangers, essentiellement

français : on les trouve dans le pĂ©trole, la pĂȘche, la viande,
la navigation, les assurances, la pĂąte Ă  papier, les chaus-
sures. Le capitalisme indo-pakistanais, crĂ©Ă© sur place 
par des familles d'anciens immigrants enrichis dans 
le commerce et la spĂ©culation fonciĂšre, s’investit dans
des entreprises industrielles, le commerce moderne, 
l'hĂŽtellerie.
- Des capitalistes nationaux peu nombreux occupent
quelques positions dans la pharmacie, le petit commerce,
les plantations et Ă©levage,
- Des firmes internationales puissantes (Pechiney, Esso),
- Des firmes internationales de moindre importance
(Bata, la société américaine qui contrÎle les papeteries
malgaches),
- Des filiales puissantes Ă  l'Ă©chelle française [Kuhlmann,
Ugine, Raffinerie Saint-Louis, Cimelta (Schneider),
groupe contrÎlant l'EEM (Electricité et Eaux de
Madagascar), Société du commerce de l'Ouest africain

qui vient d'absorber la Compagnie Lyonnaise de
Madagascar, la Compagnie marseillaise, le groupe
MĂ©lia],
- Des firmes locales importantes : CotonniĂšre d'Antsirabe,
Rochefortaise, Emyrne, COROI, De Heaulme, entreprises
contrÎlées par Ramarosaona,
- Des entrepreneurs individuels ou constitués en petits
groupes (Prochimad, Socobis, Farmad, planteurs de tabac
reconvertis en planteurs de coton, transports routiers et
urbains)


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Le 

MOUVEMENT POPULAIRE

de la campagne Ă  la ville

Avril 1971 et mai 1972

L'intégration de l'économie malgache des années soixante dans le marché mondial
se fait surtout Ă  travers le renforcement de l'import-export, par l'Ă©tablissement de 
liaisons entre la production et le commerce. Le poids des firmes Ă©trangĂšres sur cette
économie en transition capitaliste conduit à une dégradation incessante des termes
de l'échange, de l'ordre de 30%, ce qui limite la création d'emplois.

RĂ©gis Rakotonirina

Avril 1971 : Exhibition de

«prisonniers»

Monja

Jaona

Marche des Ă©tudiants, 

lycéens et collégiens

Les manifestants à l’assaut de

l’hîtel de ville d’Antananarivo

Les manifestants prennent le
contrîle de l’hîtel de ville

MĂ©contentement paysan

Dans le mĂȘme temps, la pression fiscale provoque une dĂ©gradation du
pouvoir d'achat de la majorité des salariés et des paysans dont les plus
vulnĂ©rables sont poussĂ©s Ă  l’exode rural consĂ©cutif Ă  la monĂ©tarisation de
la production familiale et de la paupérisation des campagnes.
Le mĂ©contentement de la paysannerie culmine avec l'insurrection 
paysanne d'avril 1971, engagĂ©e par le parti MONIMA de Monja Jaona,
dans le Sud de l'ßle. Elle est sauvagement réprimée.

SoulĂšvement de la jeunesse

La grogne s’exprime aussi dans la petite bourgeoisie urbaine. Ses aspira-
tions ne sont pas satisfaites dans le cadre de l’économie stagnante du
rĂ©gime nĂ©o-colonial de Philibert Tsiranana. Elle se voit redistribuer des
miettes de profit sous forme d'un élargissement du marché, le pouvoir lui
échappe, accaparé essentiellement par la classe dirigeante.
En mai 1972, la jeunesse des villes (scolaires, chĂŽmeurs et ouvriers) se
mobilise pour la malgachisation de l'enseignement et contre les accords
de coopération franco-malgaches, «

accords d'esclavage Â»

, et pour la 

fermeture des bases militaires étrangÚres. Le régime de Philibert
Tsiranana tombe, les militaires prennent le pouvoir avec la bienveillance
des impérialismes français et américain.

10

Charles Ravoajanahary

Rakotonirina Manandafy

background image

La PrĂ©sidentielle de dĂ©cembre 2001 est une sorte d’exutoire contre un systĂšme 
autocratique et corrompu.
Le conflit autour du rĂ©sultat de l’élection donne lieu Ă  une surenchĂšre d'initiatives 
illégales voire anticonstitutionnelles. Le déferlement des forces armées acquises à
l’entrepreneur Marc Ravalomanana sur les principales villes et zones de la confron-
tation, fait « cesser la partie Â», au grand soulagement de la population qui a payĂ© au
prix fort les consĂ©quences de cette crise : fermetures d’entreprises, chĂŽmage massif
(plus de 70 000 dans les zones franches), pĂ©nurie de produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©
et de mĂ©dicaments, marchĂ© noir et hausse des prix, montĂ©e de l’insĂ©curitĂ©, dĂ©grada-
tion de l’état sanitaire avec une hausse de la mortalitĂ© infantile.

11

Du socialisme administratif 

au 

LIBÉRALISME ABSOLU

Sous la pression du mouvement populaire, plusieurs grandes entreprises
sont nationalisées : en 1980, la FITIM (fabrication de sacs de jute) de
Mahajanga devient une entreprise socialiste, cogĂ©rĂ©e avec les travilleurs. 

L’option « rĂ©volutionnaire Â» dĂ©gĂ©nĂšre ensuite en gestion « socialiste Â»
administrative qui engendre une corruption généralisée et une paupérisa-
tion sévÚre due au tournant libéral engagé dans les années quatre-vingt
sous les auspices du Fonds Monétaire International et de la Banque
Mondiale à coups d’ajustements structurels.

Les gouvernants malgaches successifs Ă©quilibreront les intĂ©rĂȘts de la 
bourgeoisie en ravageant tout le reste du tissu social.

Ny Boky mena

, le « Livre rouge Â» : 

Charte de la révolution socialiste malgache

(26 août 1975)

2002 : Du libĂ©ralisme au libĂ©ralisme

1981 : les paysans coopĂ©rateurs d'Analamanatrika 
(rĂ©gion du Lac Alaotra) rĂ©clamant la rĂ©forme agraire.

Didier Ratsiraka

arrive au pouvoir

en 1975 sur des bases progressistes,
nationalistes et anti-impérialistes. La
rĂ©publique dĂ©mocratique qu’il installe
est soutenue par une grande partie
des forces progressistes de l’époque.

1991

Le

mouvement des Forces

vives pour la démocratie

réussit à

Ă©branler le pouvoir « rĂ©volutionnaire Â» Ă 
bout de souffle. Le processus ouvre la
voie Ă  la III

Ăšme

RĂ©publique. C’est le dĂ©but

d’une compĂ©tition et de tiraillements
entre les fractions dirigeantes pour la
maĂźtrise de la rente Ă©tatique, des forces
armées et des miettes générées par les
privatisations.

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En 1981 le « Madagascar rĂ©volutionariste Â» entre en cessation de paiement. Les 
institutions financiùres internationales imposent alors un Programme d’Ajustement
Structurel qui laminera le pays.

Didier Ratsiraka entame un tournant libéral poursuivi par les
gouvernements suivants ce qui leur vaudra les félicitations de
la Banque Mondiale pour appliquer les « bonnes Â» recettes
libĂ©rales pour attirer les capitaux Ă©trangers et trouver les res-
sources pour rembourser la dette : abandon des subventions
aux produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©, rĂ©duction drastique 
des dépenses publiques, notamment des budgets sociaux
(Ă©ducation, santĂ©, logement, infrastructures), dĂ©valuation de 
la monnaie, taux d’intĂ©rĂȘts Ă©levĂ©s
 Les financements de 
la Banque Mondiale augmentent alors annuellement de 30%
en moyenne entre 1970 et 1980, puis de 15% les dix années
suivantes. Ils bĂ©nĂ©ficient aux finances et au dĂ©veloppement 
du secteur privé.

AJUSTEMENTS

structurels 

et 

ENDETTEMENT

12

Page de couverture de la brochure de 
propagande du « Madagascar Action Plan Â»

Le 

Madagascar Action Plan 

adoptĂ© pour la pĂ©riode 2007-2012 est 

analysĂ© « positivement Â» par la Banque Mondiale et le FMI. Le « train des

privatisations

» exigĂ© court toujours avec plus ou moins d’effectivitĂ©, 

il concerne Air Madagascar, Solima (produits pĂ©troliers), Telma (TĂ©lĂ©com),
Jirama (électricité), Sirama (sucre), Hasyma (coton), Secren (chantier
naval), Somacodis (distribution de dĂ©tail). Les institutions financiĂšres 
vont pouvoir mettre en forme leur 

StratĂ©gie d’Assistance Pays 

avec 

un financement de 140 millions de dollars par an. Ces fonds sont destinĂ©s
Ă  « rĂ©duire la pauvretĂ© et amĂ©liorer la qualitĂ© de vie des Malgaches Â».

Le MAP s’engage sur 8 points : gouvernance responsable, infrastructure
reliĂ©e, transformation de l’éducation, dĂ©veloppement rural, santĂ©, planning
familial et lutte contre le SIDA, Ă©conomie Ă  forte croissance, environne-
ment, solidarité nationale.

Appliquant avec rigueur « le principe de la carotte et du bĂąton Â»
Madagascar passe ainsi avec succÚs les différentes étapes imposées par
les institutions financiĂšres internationales, mais les problĂšmes de dette et
de pauvretĂ© s’amplifient et ne se rĂ©solvent pas le moins du monde
 

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13

DonnĂ©es 

ÉCONOMIQUES

et 

SOCIALES

Ressources humaines du domaine de la santé
publique :
1 mĂ©decin pour 10 000 habitants
1 pharmacien pour 480 000 habitants
1 chirurgien-dentiste pour 96 000 habitants
1 ingénieur sanitaire pour 3 millions d'habitants

(source : CongrĂšs du Fifanampiana malagasy / ComitĂ© de
solidaritĂ© de Madagascar, 5-6-7 mai 2005 Ă  Antananarivo)

Irresponsabilités politiciennes

Ajoutant aux dĂ©gĂąts inhĂ©rents au socialisme 
administratif, déclamatoire et corrompu de la
Seconde République et aux dérégulations libérales
qui ont suivi, l’irresponsable et longue « guerre des
prĂ©sidents Â» de l’élection contestĂ©e de dĂ©cembre
2001 a indiscutablement paralysé le pays le condui-
sant au bord de la 

faillite Ă©conomique et sociale

.

Les incessantes surenchùres d’accùs au pouvoir
entre les fractions dirigeantes construisent des 
animosités ethnicistes artificielles. Une diversion sur
les rĂ©alitĂ©s d’oppression et de prĂ©dation qui parasite
les luttes sociales. Les rapacités affairistes liées aux
confusions entre sphÚres publiques et privées et
aux spéculations sur une mobilisation des investis-
sements Ă©trangers ont fait initier des mesures 
Ă©conomiques aberrantes, sources de catastrophes
monétaires et de spirales inflationnistes qui aggra-
vent la précarisation des populations et induisent
une baisse gĂ©nĂ©ralisĂ©e du pouvoir d’achat Ă  l’image
de la chute mécanique du SMIG mensuel qui passe
de 22 Ă  20 euros entre 2005 et 2006.

Un sous-développement profond

.

44,4% des Malgaches ont moins de 15 ans ; l’indice de fĂ©conditĂ© atteint 

5,2 enfants/femme ; la croissance de la population malgache est de 2,74% pour 
une densitĂ© de 30 habitants/km

2

; le taux de natalitĂ© est de 40‰ quand celui de 

mortalitĂ© est de 12‰.

.

MalgrĂ© une nette montĂ©e en puissance de l’urbanisation, les 75% de la population

active sont des ruraux ; l’indice de production agricole ne dĂ©colle pas, les cultures
de rente Ă©clipsant l’agriculture vivriĂšre.

.

L’industrialisation reste rĂ©siduelle et le capital national est marginalisĂ© par les 

multinationales (mines, agriculture et Ă©levage intensifs, services etc.) et leurs
alliĂ©s locaux. L’informel est surdimensionnĂ©. Le travail dĂ©cent reste Ă  conquĂ©rir.

.

Les dĂ©sĂ©quilibres et inĂ©galitĂ©s villes/campagnes et capitale/pĂ©riphĂ©ries restent 

prĂ©gnants ; les moyens et rĂ©seaux de circulation existants sont insuffisants pour 
désenclaver réellement les nombreuses régions appauvries


Madagascar, l’un des pays les plus pauvres du monde 

En 2004, le PNB (produit national brut) par habitant Ă©tait officiellement de 270 dollars.
La mĂȘme annĂ©e, une enquĂȘte-mĂ©nages indiquait que 72% des Malgaches vivaient 
au-dessous du seuil de pauvreté, fixé à 0,42 dollar par jour pour Madagascar. La
dette extĂ©rieure brute est passĂ©e de 4,102 milliards de dollars en 2001 Ă  4,6 mil-
liards en 2004, prouesse que le mĂ©canisme de l’endettement rĂ©ussit malgrĂ© les remi-
ses et/ou annulations : impasse totale quand la balance des paiements est largement
et désespérément déficitaire.

background image

14

8eme congrĂšs FISEMA, 1993

1

er

Mai 1998

1998 : Manifestation des travailleurs
des entreprises franches

Nouveaux MOUVEMENTS

SOCIAUX

Au début du 20

Ăšme

siùcle, l’immatriculation des terres au profit

des colons et de leurs alliés malgaches, spolie les paysans
contraints Ă  l’esclavage salarial, parfois sur leurs propres 
terrains coutumiers.
Depuis l’IndĂ©pendance, l’exigence d’une vraie rĂ©forme agraire
au profit des masses paysannes n’a jamais Ă©tĂ© satisfaite. En
août 2003 le régime Ravalomanana impose une loi fonciÚre au
profit des investisseurs, étrangers notamment. Les modalités
de succession condamnent les enfants d’agriculteurs pauvres
et moyens Ă  devenir des 

sans-terre

.

Dans les annĂ©es 90 apparaĂźt une vague d’associations basĂ©es sur le volontariat, 
autonomes vis Ă  vis de l’Etat, des partis et de l’armĂ©e. Elles s’investissent dans la
santĂ©, l’éducation, l’environnement, les micro-entreprises, la gestion des ressources
naturelles... Elles rencontrent des bailleurs de fonds qui cherchent Ă  assurer les 
services sociaux et Ă©conomiques de base en dehors de l’Etat dĂ©faillant et dĂ©crĂ©dibi-
lisé aux yeux des populations.
Ces 

organisations de la société civile

ouvrent le débat sur le développement, la

gouvernance, la démocratie, les droits humains, sociaux, économiques
 sur le rÎle
et la fonction d’une sociĂ©tĂ© civile organisĂ©e. Elles travaillent sur des plateformes 
et se retrouvent pour construire un projet de sociĂ©tĂ© dans lequel les populations 
pourront mieux se reconnaĂźtre. 

Nombre de reven-
dications fonciĂšres
paysannes sont
délaissées par une administration corrompue, des
procédures bureaucratiques interminables et des
coĂ»ts de dossier exorbitants. 
Les litiges fonciers suscitent des affrontements
comme Ă  Ankorondrano-Analavory en aoĂ»t 2006 oĂč
les villageois ont accueilli Ă  coups de pierres 
les forces de l'ordre venues les déloger.

Multiplication des litiges fonciers 

Renouveau syndical


Une société civile organisée, une veille citoyenne


AoĂ»t 2006 : RĂ©pression contre 

les paysans d’Ankorondrano-Analavory

dans le cadre d’un litige foncier

Le 30 novembre 2005, lors de la ConfĂ©rence des travailleurs malgaches sur la lutte
contre la pauvretĂ© et la dette, 9 centrales syndicales malgaches s’unissent pour 
lutter pour la rĂ©duction de la pauvretĂ© et l’instauration d’un environnement propice au
dĂ©veloppement durable. 
Elles exigent :
- le renoncement Ă  l’impĂ©rialisme Ă©conomique et l’instauration d’un Ă©tat d’esprit 
solidaire et responsable,
- l’annulation des dettes du tiers-monde et la rĂ©alisation des engagements pour 
porter l’Aide Publique au DĂ©veloppement Ă  0,7% du PIB des pays industrialisĂ©s,
- l’arrĂȘt de la dĂ©rĂ©glementation des Ă©changes commerciaux qui nuisent gravement
aux industries et à l’agriculture des pays pauvres,
- la promotion du travail décent et des principes et droits fondamentaux au travail.

Concertation paysans-techniciens sur une
action de développement loca
Une pompe fabriquĂ©e par l’ONG-Taratra
et installée avec les paysans

background image

Historiquement dĂ©terminĂ©, le 

legs culturel ancestral malgache 

articule, en toute cohérence, des visions du monde, des us et coutumes,
des modĂšles comportementaux et des pratiques, des consignes et des
savoir-faire etc. bien spĂ©cifiques. Le colonialisme n’a eu de cesse de
marginaliser, voire de dĂ©truire, ces Ă©lĂ©ments de culture pour asservir 
le peuple de la Grande Île en niant son identitĂ© nationale. 

15

Sur le 

FRONT

CULTUREL

Hira gasy, opéra paysan, 2006

- La malgachisation a logiquement Ă©largi le champ de la langue malgache. Mais elle a aussi largement
stimulĂ© la crĂ©ativitĂ© des arts vivants adossĂ©s aux rĂ©alitĂ©s malgaches. 
- MalgrĂ© des moyens nettement insuffisants, GisĂšle Rabesahala, Ministre de la Culture durant dix ans, a
pu faire rĂ©nover le patrimoine national (de nombreux palais, lieux de cultes
), dresser l’inventaire des us

et coutumes des diverses rĂ©gions de l’üle, des tombeaux, des chants et danses, des
modes d’habitation, des instruments de musique etc. ; elle a relancĂ© la publication
d’ouvrages en français et en malgache et multipliĂ© les bibliothĂšques et lieux culturels,
avec structure de fonctionnement.
- ÉtouffĂ©e dans le tournant autoritaire d’une « rĂ©volution socialiste Â», cette malgachi-
sation est devenue, du fait de ses propres faiblesses, un repoussoir idéologique dans
les surenchĂšres politiciennes.

La malgachisation, une revendication permanente

- Dans les annĂ©es 1915-1920, le thĂšme de prĂ©dilection de l’intelligentsia
nationaliste (Ă©crivains, artistes et autres) est 

Mitady ny very !

autrement dit : 

À la recherche de ce qui a Ă©tĂ© perdu !

- Dans les années 1930, les fondateurs et activistes du PCRM-SFIC
(Parti Communiste de la Région de Madagascar/Section Française de
l’Internationale Communiste) construisent leur chemin rĂ©volutionnaire
en valorisant aussi des traditions politiques malgaches précoloniales
comme le fokonolona

.

- L’IndĂ©pendance octroyĂ©e en 1960 ne rĂ©siste pas aux menĂ©es 
néo-colonialistes dans les domaines économique, social, politique et
culturel. En s’y opposant vigoureusement, les paysans du Sud en avril
1971 et la jeunesse en mai 1972 réclament une malgachisation effec-
tive (de l’enseignement, de l’administration, de l’économie
).

La malgachisation, un bilan contrasté

La malgachisation, une exigence politique renouvelĂ©e 
face Ă  la mondialisation capitaliste

Avec le tournant libéral, depuis les années 1980-1990, les moyens allant à la culture
fondent comme pour le secteur social (santĂ©, enseignement, logement, protection de
l’enfance et de la famille, transport, distribution de l’eau et de l’électricitĂ©). NĂ©anmoins,
depuis une dizaine d’annĂ©es, Ă©ducateurs, chercheurs, institutions acadĂ©miques et
sociĂ©tĂ©s civiles s’associent pour dĂ©finir une 

politique de malgachisation au service du

développement

, et notamment une politique culturelle et une politique linguistique.

Des objectifs urgents 
et incontournables ?

Une Ă©ducation de base pour
tous, des éditions indépen-
dantes, des droits des créa-
teurs affirmés, une recherche
scientifique décolonisée etc.