Ăle de lâOcĂ©an Indien dâune superficie dâenviron 590 000 km
2
- soit un peu plus que la France, la Belgique, les Pays-Bas
et le Luxembourg réunis -
QuatriĂšme plus grande Ăźle du monde aprĂšs le Groenland,
la Nouvelle Guinée et Bornéo.
Féodalités puis colonisation française.
IndĂ©pendance octroyĂ©e et impĂ©rialismeâŠ
Réalités complexes et résistances légitimes :
un pays et un peuple entre continuités
et rupturesâŠ
Paradoxe d'aujourd'hui : lâĂźle, Ă fortes
potentialités économiques, sociales
et culturelles, est cantonnée
par la mondialisation capitaliste
dans le groupe des pays
Ă faible revenu et Ă faible
développement humain.
Une décentralisation
effective est nécessaire
pour résoudre
les déséquilibres
régionaux.
REALITES
et
RESISTANCES
âŠ
Madagascar
AFASPA
Ecriture :
Jean-Claude Rabeherifara
Conception graphique :
RĂ©gine Fleury, Eric Grevoz
Crédit photographique :
Fond Charles Ravoajanahary, Comité de Solidarité
de Madagascar,
Réalités malgaches
,
LâExpress de Madagascar
,
E. Logié, L. Allorge, R. Lejeune, J. Boiteau, H. Rasolo,
Ratrimoarivony, M. Cosquer, âŠ
RĂ©alisation :
Association Française d'Amitié et de Solidarité avec les Peuples d'Afrique
e-mai : afaspa@wanadoo.fr - site Internet : www.afaspa.com
2
Un « sanctuaire »
de la
NATURE
DĂšs la pĂ©riode quaternaire, Madagascar se trouvait Ă peu prĂšs Ă l'endroit oĂč elle se
situe actuellement. Au PliocĂšne, quand elle sâest formĂ©e, lâĂźle Ă©tait encore couverte
dâimmenses forĂȘts oĂč Ă©voluaient une faune et une flore toutes endĂ©miques consti-
tuant de fait une rĂ©serve naturelle prĂ©servĂ©e avant que lâhomme nây survienne.
Madagascar fait partie des 17 pays de méga-biodiversité qui totalisent à eux seuls
80% de la biodiversitĂ© mondiale avec notamment un taux dâendĂ©misme floristique
de 85% et dâenviron 90% pour la faune.
Le super-continent
Gondwana
au triassic
(200 millions dâannĂ©es).
Madagascar au centre, en
vert.
Un passé géologique original
Madagascar nâa pas toujours Ă©tĂ© une Ăźle.
Selon la « théorie de la dérive des continents »,
lâAustralie, lâAntarctique, Madagascar, le Sud
de lâAfrique et de lâAmĂ©rique Ă©taient rĂ©unis
en un super-continent appelé
Gondwana
.
A la fin de lâĂšre tertiaire, il y a 160 millions
dâannĂ©es, ce bloc s'est disloquĂ© en plusieurs
continents.
Une faune et une flore endémiques
Le passĂ© gĂ©ologique permet dâexpliquer lâexistence dâune faune et dâune flore
communes à Madagascar et au Sud des continents africain et américain ainsi que
des profils géologiques trÚs proches. Néanmoins, l'isolement de Madagascar au
cours des temps géologiques a fait évoluer la faune et la flore de façon unique. On
trouve donc sur la Grande ßle des espÚces particuliÚres endémiques, qui n'existent
nulle part ailleurs : lémuriens et autres.
Du point de vue géologique, on retrouve dans la structure de Madagascar toutes
les pĂ©riodes de lâhistoire de la planĂšte. Du fait de son relief, lâĂźle rĂ©unit une vĂ©ritable
mosaĂŻque de paysages. Elle est faite de contrastes entre le bush du Grand Sud, les
forĂȘts humides de lâEst, les Hauts-plateaux granitiques du Centre, parfois surmontĂ©s
de massifs volcaniques et les savanes des collines sĂ©dimentaires de lâOuest.
3
Un
MĂ©tissage
RĂCURRENT
Les outils de fer, vases de cĂ©ramique, outils de pĂȘche etc. trouvĂ©s au cours
des recherches archĂ©ologiques attestent, dâune prĂ©sence humaine dĂšs lâan 1000
de notre Ăšre. Dâanciens rĂ©cits de voyage, trĂšs imprĂ©cis, pourraient suggĂ©rer une
occupation primitive bien antérieure. Les mythes et traditions orales de nombreux
groupes ethnico-rĂ©gionaux de lâĂźle font rĂ©fĂ©rence aux
Vazimba,
« populations
primitives » dont il est soutenu qu'elles sont là depuis des temps immémoriaux.
En toute hypothĂšse, les ancĂȘtres des Malgaches sont venus de lâespace austronĂ©sien
(Nord-Est de lâOcĂ©an Indien) par vagues :
- soit par voie de terre dans des périples de longue durée transitant par la
ThaĂŻlande, l'Inde, puis les cĂŽtes persanes, arabiques et pour finir africaines â
étapes migratoires ayant forcément favorisé les métissages avec les peuples
rencontrés ;
- soit directement en se laissant porter par les grands courants marins de façon
spontanée et fortuite ou de façon plus volontaire et plus organisée pour les
migrations plus récentes.
Unité dans la diversité
MalgrĂ© les provenances diverses de ses composantes, lâunitĂ©
fondamentale des mĆurs, celle des modes d'organisation sociale
traditionnelle et, surtout, celle de la langue dĂšs une Ă©poque trĂšs
ancienne sont des traits frappants du peuple malgache⊠Unités qui
sâopposent Ă la diversitĂ© des types anthropologiques.
Le substrat culturel malgache
semble se rattacher aux traits
caractéristiques de la civilisation pré-aryenne de l'Inde, de l'Indonésie
et des ßles diverses et éparses de l'espace austronésien :
- culture des riziĂšres irriguĂ©es, domestication du bĆuf, usage
rudimentaire des métaux, habileté à la navigation,
- importance du rĂŽle de la femme et de la filiation en ligne maternelle,
organisation résultant des nécessités de la culture irriguée,
- animisme, culte des ancĂȘtres etc.
Vazimba
un
Homo floresiensis
?
Les Vazimba que les légendes
Ă©voquent comme Ă©tant des
humains de petite taille seraient-ils
des parents dâHomo floresiensis ?
La découverte de cet hominidé
en septembre 2003 dans une
caverne de lâĂle de Flores (Ă lâEst
de Java en IndonĂ©sie) a fait lâobjet
dâune prĂ©sentation dans
Nature
en octobre 2004. Ses restes trou-
vés sont datés entre -95 000 et
-12 000 ans. Sa taille est estimée
Ă un mĂštre. Son volume crĂąnien
de 380 cm
3
est petit, ce qui le
différencie radicalement du pygmée
dâAfrique centrale. Les capacitĂ©s
cognitives de son cerveau sont,
quant à elles, réputées « normales ».
Affaire Ă suivreâŠ
4
Souverains malgaches du 19
Ăšme
siĂšcle
Andrianampoinimerina, Radama 1
er
, Ranavalona 1
Ăšre
,
Radama II, Rasoherina, Rainilaiarivony
(Premier ministre)
,
Ranavalona II, Ranavalona III
De la SOCIĂTĂ
VAZIMBA
aux féodalités
La société vazimba
(jusquâau 11
Ăšme
siĂšcle)
Les premiers groupes de peuplement de lâĂźle
développent des organisations sociales à base de
parenté :
- Le
raza
correspondant à la lignée qui rassemble
des individus issus dâun ancĂȘtre commun rĂ©el,
vivant ou mort. Ses membres habitent un mĂȘme
quartier, cultivent un terrain collectif dans lequel
chaque foyer reçoit annuellement une parcelle,
Ă©lĂšvent un troupeau collectif et disposent dâun
tombeau commun.
- Le
foko
correspond au clan : il rassemble plu-
sieurs raza. Les unions matrimoniales ne
peuvent se faire dans le mĂȘme foko. Lâesclavage
y est inconnu, les différenciations sociales sont
minimes. Tout ce qui concerne la vie dans
la communauté est collectivement discuté et
délibéré au sein du
fokonolona
(le clan).
Les gens « du mĂȘme sang » ont des droits et
obligations mutuelles qui induisent une grande
solidarité.
Ebauches féodales
:
Influence de lâIslam
LâarrivĂ©e de scribes malais islamisĂ©s au 14
Ăšme
siĂšcle
introduit la monnaie dâargent, lâusage de la balance,
les transactions commerciales, les noms des mois
lunaires, le travail du fer. Câest lâĂ©poque de la crĂ©ation
des plus importants royaumes féodaux. Au 18
Ăšme
siĂšcle,
Andriamandisoarivo
, roi des Zafiraminia, contrĂŽle
un tiers de lâĂźle.
Ratsimilaho
fédÚre toutes les tribus
de la forĂȘt tropicale de la cĂŽte Est. Dâautres royau-
mes se dĂ©veloppent Ă lâintĂ©rieur de l'Ăźle : les plus
importants sont, dans le Sud, les royaumes Betsileo
et, au centre, ceux des Merina.
Ebranlement de la société vazimba
Le passage de la cueillette Ă une production de
biens conduit Ă la division du travail suivant le sexe
et lâĂąge, ce qui engendre la domination et lâexploita-
tion des femmes par les hommes et des cadets
par les aßnés. Des contradictions surviennent au
moment de la transmission des biens parentaux.
Les richesses de la mĂšre (maison, objets mobiliers)
restent dans son foko et vont aux enfants. Ceux du
pÚre vont à son clan. Pendant des millénaires, ce
sont des outils rĂ©duits au minimum. Avec lâĂ©levage,
le troupeau appartient au pĂšre ainsi que les esclaves
capturés lors des guerres de clans.
Cette évolution entraßne la disparition de la société
vazimba.
Le droit paternel devient prépondérant : à la délibé-
ration en commun de tous les membres du foko se
substitue lâautoritĂ© dâun chef hĂ©rĂ©ditaire, l'
Andriana,
le seigneur.
Unification merina
et prégnance du christianisme
AprÚs avoir unifié les royaumes merina en 1803,
Andrianampoinimerina
(
le seigneur au cĆur de
l'Imerina
) sâattelle Ă la conquĂȘte du reste de l'Ăźle ;
il instaure un gouvernement centralisateur et
développe la culture du riz en paliers. Son fils
Radama 1
er
ouvre le pays Ă lâinfluence europĂ©enne
des missions. GrĂące au soutien des Britanniques,
il est reconnu comme roi de Madagascar.
5
La
NATION
MALGACHE
au dĂ©fi de lâimpĂ©rialisme
La premiĂšre guerre franco-malgache de 1883-1885 se termine par un
traité inique, avalisé par de la Conférence de Berlin de 1885 qui partage
les colonies entre les puissances européennes. Madagascar passe sous
la tutelle de la France.
Armée Royale
LâIllustration.
Lâinternement
de Rainilaiarivony
Jean Laborde
Joseph
Lambert
La charte Lambert
Signée en 1855 par le futur Radama II, elle
accorde Ă lâ« ami » Lambert le droit d'exploiter
des mines et des terrains cultivés, en contra-
diction avec la loi qui interdit le droit de
propriété aux étrangers. Menacé par les
milieux « nationalistes », Radama II reniera
sa signature en 1862 ce qui provoquera la
fureur des Français.
Ranavalona 1
Ăšre
lutta farouchement pour
prĂ©server son pays de lâintervention Ă©tran-
gĂšre. Mais sa lutte impitoyable contre
les chrétiens et son ambition démesurée
à satisfaire ses besoins de défense et de
prestige, au détriment des biens de consom-
mation, ont entraßné une
dégradation sévÚre de la
situation sociale et son
impopularité.
Cette ambition la pousse Ă
accorder toute confiance
au Français Jean Laborde
pour quâil construise des
industries et forme 5000
ouvriers malgaches aux métiers
de tailleur de pierre, de la métallur-
gie, du textile⊠Mais simultanément,
elle impose Ă tout homme valide
le
fanompoana
(travail forcé, non
rémunéré) pour la réalisation des grands
travaux et les services royaux
.
Au 19
Ăšme
siÚcle, la politique menée par
Rainilaiarivony, Premier ministre et Ă©poux
des trois derniĂšres reines, atteint des
sommets dâimpopularitĂ©, en recherchant
désespérément le compromis avec les
intĂ©rĂȘts des grandes puissances et ceux
des classes dirigeantes.
Le traité de 1817, avec les Anglais
Sous couvert de « libération des esclavages » ce traité vise à procurer
une main-dâĆuvre Ă bon marchĂ©, Ă Ă©couler les productions et Ă rendre
Madagascar Ă©conomiquement dĂ©pendante de lâAngleterre.
Cela ne va pas sans heurts entre les trafiquants dâesclaves et les
marchands qui désirent monopoliser le commerce extérieur à leur
profit et la haute hiĂ©rarchie militaire de mĂ©tier chargĂ©e de lâordre et de
lâexpansion du royaume.
Lâannexion sâamorce Ă la mort de Radama 1
er
en 1828 par une
période de 60 ans caractérisée par :
- lâincapacitĂ© des classes dirigeantes Ă sâunifier
durablement et Ă prendre en charge
le développement national,
- lâaccentuation des pressions de
la France et de LâAngleterre Ă faire de
lâĂźle un dĂ©bouchĂ© pour leurs marchandi-
ses et un rĂ©servoir de main-dâĆuvre
pour leurs plantations des Ăźles
Bourbon et Maurice.
En mĂȘme temps sâinstaurent la rĂ©quisition
de la force de travail, l'impĂŽt pour obliger
les paysans Ă se salarier, la formation
des travailleurs suivant les demandes
des colons et le travail forcé pour les
infrastructures nécessaires au dévelop-
pement du capital marchand.
Au total, 2 035 763 ha sont immatriculés
entre 1902 et 1944 pour 56 333 titres.
Une partie des terres est attribuée aux
chefferies locales pour les récompenser
de leur loyalisme. Cette redistribution
aboutit à la réduction des cultures
vivriĂšres (riz et autres) conduisant Ă des
hausses excessives et à la pénurie.
6
« Sans condition de mise en valeur», plus de 150 000 hectares sont
concédés à des petits colons, surtout réunionnais, dont 60 000 sur la CÎte
Est et 45 000 dans le Nord-Ouest. DâĂ©normes concessions miniĂšres et
forestiĂšres, du style des grandes compagnies congolaises, sont accor-
dĂ©es Ă de grosses sociĂ©tĂ©s. Ainsi, Suberbie fait main basse sur lâor dans
la région de Maevatanana, entre Antananarivo et Mahajanga.
CONQUĂTE
COLONIALE
et
RĂSISTANCE
Chefs
menalamba
: Rainibetsimisaraka, Rabozaka Ramasoandromahamay, Rabezavana
1883-1885
: premiÚre guerre franco-malgache. Echec de la France. Un traité inique oblige
le gouvernement malgache Ă emprunter auprĂšs du Comptoir National dâEscompte de Paris pour
payer une indemnité de guerre de 10 millions de francs, il lui retire le monopole du commerce
et lui impose de distribuer de vastes concessions Ă des Ă©trangers.
La seconde guerre permet aux troupes françaises dâentrer dans la capitale malgache
le 27 novembre 1895.
Le 28 septembre 1896, le Gouverneur gĂ©nĂ©ral Gallieni condamne Ă lâexil la reine Ranavalona III
et son Premier ministre. Il sâattelle Ă la « pacification » de lâĂźle, dĂ©cide le maintien de lâesclavage,
la fermeture de toutes les Ă©coles existantes, lâobligation pour les indigĂšnes de parler le françaisâŠ
La conquĂȘte militaire
LA « PACIFICATION » DURE PLUS DE 15 ANS CAR LA RĂSISTANCE PREND
VITE LA FORME DE GUĂRILLAS RURALES ĂCLATĂES EN PLUSIEURS
FOYERS :
- Le mouvement
Menalamba
(littéralement,
toges rouges
, parce que rougies par la
terre, permettant aux combattants de se fondre dans le paysage) trouve son apogée
en 1896-1897 sur lâensemble des Hautes-terres Ă travers une multitude de foyers.
- Dans les régions cÎtiÚres : la résistance implique successivement les populations
des diffĂ©rentes rĂ©gions de 1898 jusquâau mouvement antandroy des
Sadiavahy
en
1915.
La « pacification » a fait entre 100 000 et 700 000 victimes.
« Pacification » et résistances
Une logique de pillage et de spéculation
Colons
achetant lâor
Gallieni
7
Le
12 décembre 1943
, Ă
la libĂ©ration de lâĂźle, lâUnion
des syndicats CGT de
Madagascar se reconstitue
sur des bases unitaires avec
comme secrétaires généraux
Joseph Ravoahangy et
Pierre Boiteau.
DĂ©but 1947
, lâUnion compte
4 unions locales, 7 sections
fédérales, 89 syndicats et
14 000 adhérents à jour de
leur cotisation.
SOCIĂTĂS
SECRĂTES
et mouvement syndical
1915
- Le
VVS
(Vy Vato Sakelika, Fer-Pierre-Section) entre en
scÚne aprÚs la défaite des
Menalamba
. Cette
société secrÚte
dâintellectuels subit aussitĂŽt une violente rĂ©pression.
Ralaimongo mÚne campagne pour la libération des emprisonnés
VVS et contre les spoliations des paysans éliminés de leurs
terres. Le VVS se dĂ©veloppe sous lâimpulsion du pasteur
Ravelojaona et des docteurs Raseta et Ravoahangy. Avec
le soutien des Français Vittori et Dussac, il inspire la
ligue
malgache pour l'accession des indigĂšnes de Madagascar Ă
la citoyenneté française
. En France, Charles Gide et Anatole
France fondent la
ligue française pour l'accession des indigÚnes
de Madagascar aux droits de citoyens français
.
1938
: le droit syndical est reconnu. Le premier syn-
dicat malgache est constitué : dirigé par Ravoahangy,
il adhĂšre Ă la CGT et y rejoint des syndicats mixtes
(français et malgaches) de fonctionnaires, de
lâImprimerie officielle, de lâAssistance mĂ©dicale et
des services de santĂ©, de lâAgriculture, de lâElevage,
et des Eaux et ForĂȘts etc. MalgrĂ© les dissensions,
des acquis sont arrachés : relÚvement notable des
salaires, suppression du SMOTIG (travail forcé),
abrogation des amendes et des emprisonnements
pour absence au travail et reconnaissance du droit
syndical sans discrimination. Toutes les organisa-
tions sont dissoutes en 1939 par lâadministration de
la colonie qui opte pour le régime de Vichy.
19 mai 1929
: manifestation Ă
Antananarivo pour lâ«
accession de
tous à la citoyenneté française
» ;
le mot dâordre d'«
indépendance
»
y surgit pour la premiĂšre fois.
Ralaimongo, Ravoahangy, Raseta
et Dussac sont condamnĂ©s Ă
des peines de prison ou d'exil.
De cette dynamique de lutte naĂźt
en 1936 le
parti communiste
de la région de Madagascar
â section française de l'Internationale communiste
(« sabordé » deux ans aprÚs sa constitution).
1936
: le
syndicalisme malgache
voit le jour dans la clan-
destinitĂ© lors de la grĂšve des ouvriers dâune conserverie
dâAntananarivo. AnimĂ©e par des militants aguerris comme
Razafinjohany, celle-ci va tenir deux ans, revendiquant aug-
mentations salariales, suppression des amendes, droit de se
syndiquer... Les syndicats illĂ©gaux dâouvriers et de paysans
sont alors systématiquement poursuivis en justice.
Jean Ralaimongo
le crime colonial français
22 février 1946 : Création du Mouvement Démocratique de la Rénovation
Malgache (MDRM),
qui sâimpose rapidement comme le principal parti politique
malgache.
Fort de 300 000 membres, il Ă©mane d'une large base politique provenant de l'Ăźle
entiÚre et dépasse les clivages ethniques et sociaux.
8
Lâinsurrection malgache
de
1947
,
22 juillet â 4 octobre 1948 :
ProcĂšs des dirigeants du MDRM, accusĂ©s dâĂȘtre
les responsables du déclenchement de la rébellion.
Six condamnations à mort sont prononcées, dont
celles de Ravoahangy et de Raseta. Les condam-
nĂ©s seront graciĂ©s ultĂ©rieurement et lâamnistie
interviendra Ă partir de 1954.
29 mars 1947 :
Le SoulĂšvement nationaliste
gagne rapidement un tiers de
l'ßle. Malgré sa direction qui clame son innocence, le MDRM est
dissout. Les jeunes des sociétés secrÚtes (JINA, pour
Jeunesse nationaliste, devenue JINY, et PANAMA ou Parti
nationaliste malgache) ont débordé le MDRM dont ils étaient
membres.
L'ordre
ne sera rétabli que des années plus tard. La
répression fait environ 100 000 victimes. Les cours militaires
françaises jugent les chefs militaires de la révolte et en font
exécuter des dizaines.
janvier 1947 :
Ălections gĂ©nĂ©rales, triomphe du MDRM.
Les principaux co-fonda-
teurs du MDRM :
Dr Joseph Ravoahangy,
Dr Joseph Raseta,
Raymond William
Rabemananjara,
Jacques Rabemananjara
Aujourdâhui,
vérité et justice
doivent ĂȘtre rendues
au peuple malgache
- Ouverture de toutes
les archives,
- Reconnaissance
des responsabilités
coloniales
-Refus de banaliser
« 1947 »
Henri Douzon, un des avocats des militants et Ă©lus nationalistes,
aprĂšs son agression par des forces coloniales
Le Comité de Solidarité de Madagascar
Insurgés en tenues
d'apparat
DĂ©parts et extensions
de l'insurrection
Photos dâarchives de la rĂ©pression de 1947
9
De lâ
INDĂPENDANCE
formelle
Ă la
CRISE
NĂO-COLONIALE
Chefs dâEtat malgaches depuis lâIndĂ©pendance :
Philibert Tsiranana [1960-1972], Gal. Gabriel Ramanantsoa [1972-1975],
Col. Richard Ratsimandrava [1975], Gal. Gilles Andriamahazo [1975],
Amiral Didier Ratsiraka [1975-1993 ; 1997-2002],
Pr. Albert Zafy [1993-1995], Norbert Ratsirahonana [1996-1997],
Marc Ravalomanana [2002-...]
De Gaulle et Tsiranana, le pacte
néo-colonial
26 juin 1960 :
La France octroie une indĂ©pendance formelleâŠ
Par le biais des accords de coopération franco-malgaches de 1960, la domination
politique et économique de l'ancienne métropole est intégralement maintenue :
- assujettissement financier et monétaire à la zone franc,
- contrÎle des secteurs décisifs de l'économie (mines, plantations),
- quasi-monopole du commerce intérieur concédé à des sociétés françaises,
- intégration de Madagascar dans le systÚme de défense français dans l'Océan
Indien (présence effective de bases militaires et de « conseillers » militaires français
jusquâau sommet de lâEtat malgache),
- assimilation de l'enseignement supérieur au systÚme universitaire français.
PremiÚre république,
Une Ă©conomie sous contrĂŽle
-
Des firmes et des capitaux Ă©trangers, essentiellement
français : on les trouve dans le pĂ©trole, la pĂȘche, la viande,
la navigation, les assurances, la pĂąte Ă papier, les chaus-
sures. Le capitalisme indo-pakistanais, créé sur place
par des familles d'anciens immigrants enrichis dans
le commerce et la spĂ©culation fonciĂšre, sâinvestit dans
des entreprises industrielles, le commerce moderne,
l'hĂŽtellerie.
- Des capitalistes nationaux peu nombreux occupent
quelques positions dans la pharmacie, le petit commerce,
les plantations et Ă©levage,
- Des firmes internationales puissantes (Pechiney, Esso),
- Des firmes internationales de moindre importance
(Bata, la société américaine qui contrÎle les papeteries
malgaches),
- Des filiales puissantes à l'échelle française [Kuhlmann,
Ugine, Raffinerie Saint-Louis, Cimelta (Schneider),
groupe contrÎlant l'EEM (Electricité et Eaux de
Madagascar), Société du commerce de l'Ouest africain
qui vient d'absorber la Compagnie Lyonnaise de
Madagascar, la Compagnie marseillaise, le groupe
MĂ©lia],
- Des firmes locales importantes : CotonniĂšre d'Antsirabe,
Rochefortaise, Emyrne, COROI, De Heaulme, entreprises
contrÎlées par Ramarosaona,
- Des entrepreneurs individuels ou constitués en petits
groupes (Prochimad, Socobis, Farmad, planteurs de tabac
reconvertis en planteurs de coton, transports routiers et
urbains)âŠ
Le
MOUVEMENT POPULAIRE
,
de la campagne Ă la ville
Avril 1971 et mai 1972
L'intégration de l'économie malgache des années soixante dans le marché mondial
se fait surtout Ă travers le renforcement de l'import-export, par l'Ă©tablissement de
liaisons entre la production et le commerce. Le poids des firmes Ă©trangĂšres sur cette
économie en transition capitaliste conduit à une dégradation incessante des termes
de l'échange, de l'ordre de 30%, ce qui limite la création d'emplois.
RĂ©gis Rakotonirina
Avril 1971 : Exhibition de
«prisonniers»
Monja
Jaona
Marche des Ă©tudiants,
lycéens et collégiens
Les manifestants Ă lâassaut de
lâhĂŽtel de ville dâAntananarivo
Les manifestants prennent le
contrĂŽle de lâhĂŽtel de ville
MĂ©contentement paysan
Dans le mĂȘme temps, la pression fiscale provoque une dĂ©gradation du
pouvoir d'achat de la majorité des salariés et des paysans dont les plus
vulnĂ©rables sont poussĂ©s Ă lâexode rural consĂ©cutif Ă la monĂ©tarisation de
la production familiale et de la paupérisation des campagnes.
Le mécontentement de la paysannerie culmine avec l'insurrection
paysanne d'avril 1971, engagée par le parti MONIMA de Monja Jaona,
dans le Sud de l'ßle. Elle est sauvagement réprimée.
SoulĂšvement de la jeunesse
La grogne sâexprime aussi dans la petite bourgeoisie urbaine. Ses aspira-
tions ne sont pas satisfaites dans le cadre de lâĂ©conomie stagnante du
régime néo-colonial de Philibert Tsiranana. Elle se voit redistribuer des
miettes de profit sous forme d'un élargissement du marché, le pouvoir lui
échappe, accaparé essentiellement par la classe dirigeante.
En mai 1972, la jeunesse des villes (scolaires, chĂŽmeurs et ouvriers) se
mobilise pour la malgachisation de l'enseignement et contre les accords
de coopération franco-malgaches, «
accords d'esclavage »
, et pour la
fermeture des bases militaires étrangÚres. Le régime de Philibert
Tsiranana tombe, les militaires prennent le pouvoir avec la bienveillance
des impérialismes français et américain.
10
Charles Ravoajanahary
Rakotonirina Manandafy
La PrĂ©sidentielle de dĂ©cembre 2001 est une sorte dâexutoire contre un systĂšme
autocratique et corrompu.
Le conflit autour du rĂ©sultat de lâĂ©lection donne lieu Ă une surenchĂšre d'initiatives
illĂ©gales voire anticonstitutionnelles. Le dĂ©ferlement des forces armĂ©es acquises Ă
lâentrepreneur Marc Ravalomanana sur les principales villes et zones de la confron-
tation, fait « cesser la partie », au grand soulagement de la population qui a payé au
prix fort les consĂ©quences de cette crise : fermetures dâentreprises, chĂŽmage massif
(plus de 70 000 dans les zones franches), pénurie de produits de premiÚre nécessité
et de mĂ©dicaments, marchĂ© noir et hausse des prix, montĂ©e de lâinsĂ©curitĂ©, dĂ©grada-
tion de lâĂ©tat sanitaire avec une hausse de la mortalitĂ© infantile.
11
Du socialisme administratif
au
LIBĂRALISME ABSOLU
Sous la pression du mouvement populaire, plusieurs grandes entreprises
sont nationalisées : en 1980, la FITIM (fabrication de sacs de jute) de
Mahajanga devient une entreprise socialiste, cogérée avec les travilleurs.
Lâoption « rĂ©volutionnaire » dĂ©gĂ©nĂšre ensuite en gestion « socialiste »
administrative qui engendre une corruption généralisée et une paupérisa-
tion sévÚre due au tournant libéral engagé dans les années quatre-vingt
sous les auspices du Fonds Monétaire International et de la Banque
Mondiale Ă coups dâajustements structurels.
Les gouvernants malgaches successifs Ă©quilibreront les intĂ©rĂȘts de la
bourgeoisie en ravageant tout le reste du tissu social.
Ny Boky mena
, le « Livre rouge » :
Charte de la révolution socialiste malgache
(26 août 1975)
2002 : Du libéralisme au libéralisme
1981 : les paysans coopérateurs d'Analamanatrika
(région du Lac Alaotra) réclamant la réforme agraire.
Didier Ratsiraka
arrive au pouvoir
en 1975 sur des bases progressistes,
nationalistes et anti-impérialistes. La
rĂ©publique dĂ©mocratique quâil installe
est soutenue par une grande partie
des forces progressistes de lâĂ©poque.
1991
:
Le
mouvement des Forces
vives pour la démocratie
rĂ©ussit Ă
Ă©branler le pouvoir « rĂ©volutionnaire » Ă
bout de souffle. Le processus ouvre la
voie Ă la III
Ăšme
RĂ©publique. Câest le dĂ©but
dâune compĂ©tition et de tiraillements
entre les fractions dirigeantes pour la
maĂźtrise de la rente Ă©tatique, des forces
armées et des miettes générées par les
privatisations.
En 1981 le « Madagascar révolutionariste » entre en cessation de paiement. Les
institutions financiĂšres internationales imposent alors un Programme dâAjustement
Structurel qui laminera le pays.
Didier Ratsiraka entame un tournant libéral poursuivi par les
gouvernements suivants ce qui leur vaudra les félicitations de
la Banque Mondiale pour appliquer les « bonnes » recettes
libérales pour attirer les capitaux étrangers et trouver les res-
sources pour rembourser la dette : abandon des subventions
aux produits de premiÚre nécessité, réduction drastique
des dépenses publiques, notamment des budgets sociaux
(éducation, santé, logement, infrastructures), dévaluation de
la monnaie, taux dâintĂ©rĂȘts Ă©levĂ©s⊠Les financements de
la Banque Mondiale augmentent alors annuellement de 30%
en moyenne entre 1970 et 1980, puis de 15% les dix années
suivantes. Ils bénéficient aux finances et au développement
du secteur privé.
AJUSTEMENTS
structurels
et
ENDETTEMENT
12
Page de couverture de la brochure de
propagande du « Madagascar Action Plan »
Le
Madagascar Action Plan
adopté pour la période 2007-2012 est
analysé « positivement » par la Banque Mondiale et le FMI. Le « train des
privatisations
» exigĂ© court toujours avec plus ou moins dâeffectivitĂ©,
il concerne Air Madagascar, Solima (produits pétroliers), Telma (Télécom),
Jirama (électricité), Sirama (sucre), Hasyma (coton), Secren (chantier
naval), Somacodis (distribution de détail). Les institutions financiÚres
vont pouvoir mettre en forme leur
StratĂ©gie dâAssistance Pays
avec
un financement de 140 millions de dollars par an. Ces fonds sont destinés
à « réduire la pauvreté et améliorer la qualité de vie des Malgaches ».
Le MAP sâengage sur 8 points : gouvernance responsable, infrastructure
reliĂ©e, transformation de lâĂ©ducation, dĂ©veloppement rural, santĂ©, planning
familial et lutte contre le SIDA, Ă©conomie Ă forte croissance, environne-
ment, solidarité nationale.
Appliquant avec rigueur « le principe de la carotte et du bùton »
Madagascar passe ainsi avec succÚs les différentes étapes imposées par
les institutions financiĂšres internationales, mais les problĂšmes de dette et
de pauvretĂ© sâamplifient et ne se rĂ©solvent pas le moins du mondeâŠ
13
Données
ĂCONOMIQUES
et
SOCIALES
Ressources humaines du domaine de la santé
publique :
1 médecin pour 10 000 habitants
1 pharmacien pour 480 000 habitants
1 chirurgien-dentiste pour 96 000 habitants
1 ingénieur sanitaire pour 3 millions d'habitants
(source : CongrÚs du Fifanampiana malagasy / Comité de
solidarité de Madagascar, 5-6-7 mai 2005 à Antananarivo)
Irresponsabilités politiciennes
Ajoutant aux dégùts inhérents au socialisme
administratif, déclamatoire et corrompu de la
Seconde République et aux dérégulations libérales
qui ont suivi, lâirresponsable et longue « guerre des
prĂ©sidents » de lâĂ©lection contestĂ©e de dĂ©cembre
2001 a indiscutablement paralysé le pays le condui-
sant au bord de la
faillite Ă©conomique et sociale
.
Les incessantes surenchĂšres dâaccĂšs au pouvoir
entre les fractions dirigeantes construisent des
animosités ethnicistes artificielles. Une diversion sur
les rĂ©alitĂ©s dâoppression et de prĂ©dation qui parasite
les luttes sociales. Les rapacités affairistes liées aux
confusions entre sphÚres publiques et privées et
aux spéculations sur une mobilisation des investis-
sements Ă©trangers ont fait initier des mesures
Ă©conomiques aberrantes, sources de catastrophes
monétaires et de spirales inflationnistes qui aggra-
vent la précarisation des populations et induisent
une baisse gĂ©nĂ©ralisĂ©e du pouvoir dâachat Ă lâimage
de la chute mécanique du SMIG mensuel qui passe
de 22 Ă 20 euros entre 2005 et 2006.
Un sous-développement profond
.
44,4% des Malgaches ont moins de 15 ans ; lâindice de fĂ©conditĂ© atteint
5,2 enfants/femme ; la croissance de la population malgache est de 2,74% pour
une densité de 30 habitants/km
2
; le taux de natalité est de 40Ⱐquand celui de
mortalitĂ© est de 12â°.
.
MalgrĂ© une nette montĂ©e en puissance de lâurbanisation, les 75% de la population
active sont des ruraux ; lâindice de production agricole ne dĂ©colle pas, les cultures
de rente Ă©clipsant lâagriculture vivriĂšre.
.
Lâindustrialisation reste rĂ©siduelle et le capital national est marginalisĂ© par les
multinationales (mines, agriculture et Ă©levage intensifs, services etc.) et leurs
alliĂ©s locaux. Lâinformel est surdimensionnĂ©. Le travail dĂ©cent reste Ă conquĂ©rir.
.
Les déséquilibres et inégalités villes/campagnes et capitale/périphéries restent
prégnants ; les moyens et réseaux de circulation existants sont insuffisants pour
dĂ©senclaver rĂ©ellement les nombreuses rĂ©gions appauvriesâŠ
Madagascar, lâun des pays les plus pauvres du monde
En 2004, le PNB (produit national brut) par habitant Ă©tait officiellement de 270 dollars.
La mĂȘme annĂ©e, une enquĂȘte-mĂ©nages indiquait que 72% des Malgaches vivaient
au-dessous du seuil de pauvreté, fixé à 0,42 dollar par jour pour Madagascar. La
dette extérieure brute est passée de 4,102 milliards de dollars en 2001 à 4,6 mil-
liards en 2004, prouesse que le mĂ©canisme de lâendettement rĂ©ussit malgrĂ© les remi-
ses et/ou annulations : impasse totale quand la balance des paiements est largement
et désespérément déficitaire.
14
8eme congrĂšs FISEMA, 1993
1
er
Mai 1998
1998 : Manifestation des travailleurs
des entreprises franches
Nouveaux MOUVEMENTS
SOCIAUX
Au début du 20
Ăšme
siĂšcle, lâimmatriculation des terres au profit
des colons et de leurs alliés malgaches, spolie les paysans
contraints Ă lâesclavage salarial, parfois sur leurs propres
terrains coutumiers.
Depuis lâIndĂ©pendance, lâexigence dâune vraie rĂ©forme agraire
au profit des masses paysannes nâa jamais Ă©tĂ© satisfaite. En
août 2003 le régime Ravalomanana impose une loi fonciÚre au
profit des investisseurs, étrangers notamment. Les modalités
de succession condamnent les enfants dâagriculteurs pauvres
et moyens Ă devenir des
sans-terre
.
Dans les annĂ©es 90 apparaĂźt une vague dâassociations basĂ©es sur le volontariat,
autonomes vis Ă vis de lâEtat, des partis et de lâarmĂ©e. Elles sâinvestissent dans la
santĂ©, lâĂ©ducation, lâenvironnement, les micro-entreprises, la gestion des ressources
naturelles... Elles rencontrent des bailleurs de fonds qui cherchent Ă assurer les
services sociaux et Ă©conomiques de base en dehors de lâEtat dĂ©faillant et dĂ©crĂ©dibi-
lisé aux yeux des populations.
Ces
organisations de la société civile
ouvrent le débat sur le développement, la
gouvernance, la démocratie, les droits humains, sociaux, économiques⊠sur le rÎle
et la fonction dâune sociĂ©tĂ© civile organisĂ©e. Elles travaillent sur des plateformes
et se retrouvent pour construire un projet de société dans lequel les populations
pourront mieux se reconnaĂźtre.
Nombre de reven-
dications fonciĂšres
paysannes sont
délaissées par une administration corrompue, des
procédures bureaucratiques interminables et des
coûts de dossier exorbitants.
Les litiges fonciers suscitent des affrontements
comme Ă Ankorondrano-Analavory en aoĂ»t 2006 oĂč
les villageois ont accueilli Ă coups de pierres
les forces de l'ordre venues les déloger.
Multiplication des litiges fonciers
Renouveau syndicalâŠ
Une sociĂ©tĂ© civile organisĂ©e, une veille citoyenneâŠ
Août 2006 : Répression contre
les paysans dâAnkorondrano-Analavory
dans le cadre dâun litige foncier
Le 30 novembre 2005, lors de la Conférence des travailleurs malgaches sur la lutte
contre la pauvretĂ© et la dette, 9 centrales syndicales malgaches sâunissent pour
lutter pour la rĂ©duction de la pauvretĂ© et lâinstauration dâun environnement propice au
développement durable.
Elles exigent :
- le renoncement Ă lâimpĂ©rialisme Ă©conomique et lâinstauration dâun Ă©tat dâesprit
solidaire et responsable,
- lâannulation des dettes du tiers-monde et la rĂ©alisation des engagements pour
porter lâAide Publique au DĂ©veloppement Ă 0,7% du PIB des pays industrialisĂ©s,
- lâarrĂȘt de la dĂ©rĂ©glementation des Ă©changes commerciaux qui nuisent gravement
aux industries et Ă lâagriculture des pays pauvres,
- la promotion du travail décent et des principes et droits fondamentaux au travail.
Concertation paysans-techniciens sur une
action de développement loca
Une pompe fabriquĂ©e par lâONG-Taratra
et installée avec les paysans
Historiquement déterminé, le
legs culturel ancestral malgache
articule, en toute cohérence, des visions du monde, des us et coutumes,
des modĂšles comportementaux et des pratiques, des consignes et des
savoir-faire etc. bien spĂ©cifiques. Le colonialisme nâa eu de cesse de
marginaliser, voire de détruire, ces éléments de culture pour asservir
le peuple de la Grande Ăle en niant son identitĂ© nationale.
15
Sur le
FRONT
CULTUREL
Hira gasy, opéra paysan, 2006
- La malgachisation a logiquement Ă©largi le champ de la langue malgache. Mais elle a aussi largement
stimulé la créativité des arts vivants adossés aux réalités malgaches.
- Malgré des moyens nettement insuffisants, GisÚle Rabesahala, Ministre de la Culture durant dix ans, a
pu faire rĂ©nover le patrimoine national (de nombreux palais, lieux de cultesâŠ), dresser lâinventaire des us
et coutumes des diverses rĂ©gions de lâĂźle, des tombeaux, des chants et danses, des
modes dâhabitation, des instruments de musique etc. ; elle a relancĂ© la publication
dâouvrages en français et en malgache et multipliĂ© les bibliothĂšques et lieux culturels,
avec structure de fonctionnement.
- ĂtouffĂ©e dans le tournant autoritaire dâune « rĂ©volution socialiste », cette malgachi-
sation est devenue, du fait de ses propres faiblesses, un repoussoir idéologique dans
les surenchĂšres politiciennes.
La malgachisation, une revendication permanente
- Dans les annĂ©es 1915-1920, le thĂšme de prĂ©dilection de lâintelligentsia
nationaliste (Ă©crivains, artistes et autres) est
Mitady ny very !,
autrement dit :
à la recherche de ce qui a été perdu !
- Dans les années 1930, les fondateurs et activistes du PCRM-SFIC
(Parti Communiste de la Région de Madagascar/Section Française de
lâInternationale Communiste) construisent leur chemin rĂ©volutionnaire
en valorisant aussi des traditions politiques malgaches précoloniales
comme le fokonolona
.
- LâIndĂ©pendance octroyĂ©e en 1960 ne rĂ©siste pas aux menĂ©es
néo-colonialistes dans les domaines économique, social, politique et
culturel. En sây opposant vigoureusement, les paysans du Sud en avril
1971 et la jeunesse en mai 1972 réclament une malgachisation effec-
tive (de lâenseignement, de lâadministration, de lâĂ©conomieâŠ).
La malgachisation, un bilan contrasté
La malgachisation, une exigence politique renouvelée
face Ă la mondialisation capitaliste
Avec le tournant libéral, depuis les années 1980-1990, les moyens allant à la culture
fondent comme pour le secteur social (santé, enseignement, logement, protection de
lâenfance et de la famille, transport, distribution de lâeau et de lâĂ©lectricitĂ©). NĂ©anmoins,
depuis une dizaine dâannĂ©es, Ă©ducateurs, chercheurs, institutions acadĂ©miques et
sociĂ©tĂ©s civiles sâassocient pour dĂ©finir une
politique de malgachisation au service du
développement
, et notamment une politique culturelle et une politique linguistique.
Des objectifs urgents
et incontournables ?
Une Ă©ducation de base pour
tous, des éditions indépen-
dantes, des droits des créa-
teurs affirmés, une recherche
scientifique décolonisée etc.