Revue française de psychanalyse 2002/2
Revue française de psychanalyse
2002/2 (Volume 66)
328 pages
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I.S.B.N. 2130526497
DOI 10.3917/rfp.662.0371
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Dossier

Vous consultezFreud et la cocaïne

AuteurFrançoise Coblence du même auteur

236, rue de Tolbiac,
75013 Paris

1 * Allotrion : en grec, qui est autre, étranger.

2 De ce que Jones nomme l’ « épisode de la coca ïne », on retient souvent les éléments mentionnés par Freud lui-même après cette période : la découverte manquée des propriétés anesthésiques de la coca ïne, l’imprudence à avoir considéré la coca ïne comme substitut de la morphine et à avoir négligé l’accoutumance à cette substance, l’espoir déçu que la coca ïne pourrait guérir son ami Ernst von Fleischl. Trop de précipitation, dira en substance Freud en 1925, dans son Autoprésentation, trop de hâte à terminer son étude et à partir retrouver Martha dont il était séparé depuis deux années (en réalité, un peu plus d’un an) : « Ce fut la faute de ma fiancée si je ne suis pas devenu célèbre dès ces années de jeunesse. » Freud conclut cependant : « je n’ai pas gardé rancune à ma fiancée de cette occasion manquée »[1] [1]Sigmund Freud présenté par lui-même (1925),...
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. À l’approximation des dates, s’ajoute l’imputation – même humoristique – à Martha, et la conclusion qui sonne comme une dénégation. Il est donc difficile de se satisfaire de l’explication donnée à Fritz Wittels en 1924 : « je sais fort bien comment la chose m’est arrivée. L’étude de la coca constitua pour moi un allotrion* que j’eus hâte d’abandonner ». L’Autoprésentation revient sur la coca ïne en évoquant « un intérêt marginal, mais profond ». L’usage du mot grec pourrait renforcer la suspicion : et si l’étude de la coca renvoyait moins à un allotrion qu’à un Unheimliche ?

3 « L’épisode », qui finit par recouvrir l’étude même du produit, se déroule entre 1884 et 1887. Freud avait fait la connaissance de Martha en avril 1882 et avait quitté en juillet 1882 le laboratoire de Brücke, où il n’avait pas d’avenir, puisque Brücke avait déjà deux assistants (Exner et Fleischl). En 1884, Freud est médecin à l’hôpital général de Vienne. Le 1er juillet 1884 paraît « Über Coca » (Sur la coca ïne). Le texte ne mentionne qu’à la fin la propriété de la coca ïne d’anesthésier la peau et les muqueuses aux endroits où le produit est appliqué. Il conclut rapidement que cette propriété « devrait donner bien d’autres résultats encore »[2] [2] S. Freud, De la coca (1884), in De la coca...
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. Freud quitte Vienne en chargeant Königstein d’expérimenter le produit, mais c’est Carl Koller qui, au cours du même été, découvre les propriétés anesthésiantes de la coca ïne sur la cornée et fait part de son expérience, le 15 septembre au colloque de la Société ophtalmologique d’Heidelberg, puis le 17 octobre à Vienne. En janvier 1885, Freud publie « Contribution à la connaissance de la coca ïne », qui mentionne la découverte de Koller ; en février 1885, il republie son texte de 1884 augmenté d’addenda puis fait en mars 1885, devant la Société psychiatrique de Vienne, un exposé « À propos de l’action générale de la coca ïne. »

4 Entre 1884 et 1886, les lettres de Freud à Martha témoignent de son enthousiasme pour la coca ïne : elle est le « remède miracle » qui permet de lutter contre la fatigue et la dépression, elle pourrait lui assurer célébrité et fortune, légitimant son choix de la science, tout en lui permettant d’épouser Martha[3] [3] Lettres du 21 avril et du 19 juin 1884, notamment....
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. Elle est aussi un principe de puissance et de virilité. Le 2 juin 1884, tout à l’excitation de la découverte, Freud écrit à sa fiancée : « Prends garde ma Princesse ! Quand je viendrai, je t’embrasserai à t’en rendre toute rouge (...) Et si tu te montres indocile, tu verras bien qui de nous deux est le plus fort : la douce petite fille qui ne mange pas suffisamment ou le grand monsieur fougueux qui a de la coca ïne dans le corps. Lors de ma dernière grave crise de dépression, j’ai repris de la coca et une faible dose m’a magnifiquement remonté. » À ces attentes, s’ajoute l’espoir d’améliorer l’état de Fleischl et de le désaccoutumer de la morphine (lettre du 7 janvier 1885). En juin 1885, effrayé des doses de coca ïne que Fleischl s’injecte, Freud continue cependant à en envoyer à Martha (voir lettre du 8 juin 1885). Les lettres écrites à Martha lors du séjour à Paris, en janvier et février 1886, sont un vibrant hommage à la coca ïne qui lui « délie la langue », même en français, et lui permet d’envisager sans trop d’appréhension les soirées mondaines chez Charcot. En juillet 1887, Freud défend une dernière fois publiquement la coca ïne contre ses accusateurs, et notamment contre l’inquiétude du neuropsychiatre Erlenmeyer[4] [4] Erlenmeyer, considérant la coca ïne comme...
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.

5 Dix ans après les premiers textes sur la coca ïne, à l’apogée de la passion pour Fliess (rencontré en novembre 1887), la migraine, le syndrome de catarrhe oto-rhino-laryngal mentionnés à Martha en janvier 1885, les périodes d’abattement ou de dépression sont toujours là. Le recours à la coca ïne reste d’actualité, puisque Freud continue à en prendre lui-même et à en prescrire en applications nasales à ses patients et à ses proches (au moins jusqu’en 1895)[5] [5] Voir les Lettres à Fliess du 30 mai 1893,...
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. Mais c’est le tabac et la nicotine qui occupent le devant de la scène. C’est de la privation de tabac, imposée par Fliess, dont Freud se plaint à longueur de lettres ; ce sont les cigares qu’il comptabilise en relation avec ses variations d’humeur et d’énergie[6] [6] Voir, en particulier, la lettre du 22 juin 1894...
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. Fliess, l’ « unique autre », « le Messie », est censé le guérir, Fliess qui va opérer Emma Eckstein en février 1895, et oublier dans son nez 50 cm de gaze. La coca ïne fait retour dans les rêves : en particulier ceux de l’injection faite à Irma (juillet 1895) et de la monographie botanique (mars 1898). Les histoires de nez, de culpabilité médicale et d’amitié masculine condensées dans le premier de ces rêves invitent à rapprocher la configuration formée par Freud, Fleischl et Martha autour de la coca ïne, à celle formée par Freud, Emma et Fliess autour de l’hystérie et de la neurotica. Loin d’avoir été un simple « épisode », insignifiant, marginal ou regrettable, un « allotrion » ensuite complètement abandonné, la coca ïne prendrait alors valeur d’un « avant-coup », dans l’après-coup révélé par le tabac, la correspondance avec Fliess et l’auto-analyse. Mais avant de mesurer ce qui se répète, sur un mode tragi-comique, des événements dramatiques vécus avec Fleischl, il faut revenir sur ce qui s’engage théoriquement et cliniquement pour Freud dans les textes sur la coca ïne publiés entre 1884 et 1887. L’articulation de la psychanalyse et de la psychopharmacologie s’y avère double. Elle tient, d’une part, à ce que Freud attend de la coca ïne dans le traitement de la neurasthénie et comme stimulant du fonctionnement mental, et, d’autre part, au rôle qu’a joué la coca ïne dans les débuts de l’histoire de la psychanalyse – ou dans sa protohistoire. Il n’est peut-être pas exclu que l’occultation de la seconde dimension ait entraîné l’abandon de la première.

« ÜBER COCA » (1884) : UNE MONOGRAPHIE BOTANIQUE ET SES SOURCES

6 L’alcalo ïde coca ïne (erythroxylon) est extrait pour la première fois des feuilles de coca en 1855. Lorsque Freud s’intéresse à cette substance, elle est peu connue en Europe, mais a fait l’objet de nombreux articles aux États-Unis. En 1883, Theodor Aschenbrandt, médecin allemand, a expérimenté la coca ïne sur des soldats, au cours de manœuvres militaires. Il s’est montré assez enthousiaste des résultats, de la capacité de la coca ïne à stimuler l’organisme, à contrer la fatigue, la faim et la douleur, avec un effet moins nocif que les alcools ou le café froid. C’est en lisant ces contributions que Freud « caresse le projet et l’espoir » dont il fait part à Martha le 21 avril 1884 : essayer ce produit dans des cas d’affections cardiaques et de dépression nerveuse, « particulièrement dans les états si pitoyables, consécutifs au sevrage de la morphine (comme chez le Dr Fleischl) ».

7 La monographie de 1884 commence par la description de la plante de coca, puis de son usage en Amérique du Sud lors de sa découverte par les Espagnols. Elle se poursuit par la recension des études et des expériences faites en Europe au XIXe siècle, l’effet stimulant de la coca sur les animaux. Freud présente « l’action de la coca sur les personnes en bonne santé », c’est.à-dire les expérimentations qu’il a menées sur lui-même, malgré le prix élevé du produit, en notant les sensations et les impressions ressenties (chaleur, froid, modifications de la respiration). Auto-observations et auto-expérimentations confirment, selon Freud, les observations d’Aschenbrandt ou la littérature américaine consacrée à ce sujet, en montrant l’endurcissement que la coca ïne permet pour le travail mental, la protection contre la faim et le sommeil, son effet stimulant. « On dirait qu’avec de telles doses (0,05 à 0,1 g), l’humeur où nous plonge la coca ïne ne résulte pas autant d’une excitation directe que de la disparition des éléments déprimants de l’état d’esprit général. Il conviendrait peut-être aussi d’admettre que l’euphorie chez une personne en bonne santé n’est autre que l’état normal d’un cortex cérébral bien nourri qui “ne sait rien” sur les organes de son propre corps. »[7] [7] De la coca (1884), DC,op. cit. p. 87....
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8 Considérant, enfin, l’usage thérapeutique de la coca, Freud mentionne sa valeur de stimulant et l’espoir qu’on peut mettre en elle : « Pour de nombreux médecins, la coca ïne semble appelée à combler une lacune dans l’arsenal des médicaments dont dispose la psychiatrie. On sait que celle-ci dispose de moyens suffisants pour réduire une excitation trop grande des centres nerveux, mais elle ne sait comment élever l’activité réduite de ces centres. »[8] [8]Ibid., p. 90. ...
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La coca ïne pourrait donc combattre la neurasthénie, ce que sait bien Sherlock Holmes, autre consommateur fervent de coca ïne (comme Conan Doyle). Dans Le signe des quatre, au bon docteur Watson qui s’émeut et s’irrite au spectacle des injections, trois fois par jour, Holmes répond : « Peut-être cette drogue a-t-elle un effet néfaste sur mon corps. Mais je la trouve si stimulante pour la clarification de mon esprit, que les effets secondaires me paraissent d’une importance négligeable. (...) Mon esprit refuse la stagnation. Donnez-moi des problèmes, du travail ! Donnez-moi le cryptogramme le plus abstrait ou l’analyse la plus complexe, et me voilà dans l’atmosphère qui me convient. Alors je puis me passer de stimulants artificiels. Mais je déteste trop la morne routine de l’existence ! Il me faut une exaltation mentale : c’est d’ailleurs pourquoi j’ai choisi cette singulière profession ; ou plutôt pourquoi je l’ai créée, puisque je suis le seul au monde de mon espèce. »[9] [9] Sir Arthur Conan Doyle, Le signe des quatre...
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La psychanalyse permettra-t-elle ainsi à Freud de se passer de coca ïne ?

9 Selon Robert Byck, la mise en évidence des propriétés stimulantes de la coca ïne, ses expérimentations sur lui-même, représentent une contribution de Freud à la future psychopharmacologie (le terme apparaît en 1920) dans les deux directions qui vont la constituer : la recherche sur les substances capables de modifier la pensée et le comportement normal, la recherche sur des substances capables de soulager la maladie mentale[10] [10] R. Byck, DC,op. cit., p. 12. ...
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. Mais si les expérimentations de Freud inaugurent la tradition des rapports sur les substances psycho-actives (LSD, mescaline), elles se situent aussi dans la double tradition littéraire et médicale, bien ancrée au XIXe siècle, des récits et auto-expérimentations des effets de drogues et d’excitants.

10 On peut penser que Freud n’ignorait ni les Confessions d’un mangeur d’opium anglais (1821) de Thomas de Quincey, ni Les paradis artificiels (1860) de Baudelaire. Peut-être connaissait-il les écrits du Dr Moreau de Tours (Du hachisch et de l’aliénation mentale, 1845), sous la surveillance duquel s’effectuaient les « fantasias » de l’hôtel Pimodan, organisées par le peintre Boissard de Boisdenier, fréquentées par Théophile Gautier, et auxquelles Baudelaire fit quelques apparitions. Quels sont les effets de ces drogues ? Engendrent-elles une extension de l’âme, du sens de l’espace et du temps, mais avec, en contrepartie, une diminution de la volonté (ce que pense Balzac) ou une « vaporisation du Moi », selon la formule de Baudelaire ? Des écrivains romantiques aux artistes du XXe siècle (Michaux, en particulier), l’expérimentation des drogues tend à apprécier les modifications psychiques qu’elles entraînent, les modifications du langage et, comme l’écrit Walter Benjamin, « les bénéfices de connaissance » qu’on peut éventuellement en tirer. Du même coup, Max Milner note ce paradoxe : même si Baudelaire, par exemple, condamne l’usage de l’opium et du haschisch, la postérité associera Les Paradis artificiels à une apologie de substances qui accroissent les pouvoirs de l’imagination et donnent des visions rhapsodiques et colorées qui ressemblent tant à celles que la poésie baudelairienne atteint par un travail acharné[11] [11] M. Milner, L’imaginaire des drogues. De Thomas...
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.

11 Dans la monographie de 1884, on retrouve, selon Siegfried Bernfeld, le meilleur style de Freud, absent des écrits de la même époque sur l’anatomie du cerveau par exemple, avec, en plus, « une qualité qu’il n’atteindra plus, ou n’essayera plus d’atteindre, dans ses écrits ultérieurs : une attitude subtilement protectrice – voire tendre – à l’égard de son sujet, la coca ïne[12] [12] S. Bernfeld, Les études de Freud sur la coca...
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 ». Les qualités artistiques de ce texte, la vivacité de son style ont été souvent soulignées et contribuèrent peut-être à son succès. Dans cette mesure, le texte de 1884 serait le premier à inscrire les recherches freudiennes sur la psyché à l’articulation de la science et de la poésie. L’auto-expérimentation conduite avec cette détermination, et la volonté de chercher dans le particulier ce qui peut prendre valeur universelle se retrouveront dans l’auto-analyse. Mais le vocabulaire employé par Freud pour saluer les effets « éclatants » ou « prodigieux » de cette substance magique témoigne de son intérêt passionné ; à aucun moment il ne paraît s’interroger sur la toxicité de la coca. Il recommande, sans hésiter, d’en prendre à chaque fois qu’il importe d’augmenter, pour un temps limité certes, l’efficacité physique du corps, ainsi que pour traiter les troubles digestifs, les états de fatigue, l’asthme, l’accoutumance à la morphine ou à l’alcool, et aussi comme aphrodisiaque[13] [13] De la coca, DC,op. cit., p. 90 et s....
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12 Dans la « Contribution à la connaissance de l’action de la coca ïne », parue en janvier 1885, Freud reprend le bilan des expériences menées sur lui-même, mais en tentant, cette fois, « de l’exprimer par des signes objectifs et de mesurer quantitativement l’effet général étonnant de cet alcalo ïde »[14] [14] Contribution à la connaissance de l’action...
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. Pourquoi ce souci d’objectivité ? Parce que, dit-il, les symptômes subjectifs varient tellement d’une personne à une autre que certains parlent d’une euphorie plus grande encore, quand d’autres se sentent mal à l’aise après la prise de coca ïne. À l’aide d’un dynamomètre, Freud mesure donc l’augmentation de la force motrice de son bras sous l’action de la coca ïne, à différentes heures de la journée. Il souligne que l’action de la coca ïne est d’autant plus importante que l’état général est mauvais ou la force motrice faible, argument pour en faire un remède contre la neurasthénie. Mais si la coca ïne améliore notablement les résultats, c’est, conclut-il, « non comme un effet direct (sur la substance nerveuse motrice ou sur les muscles par exemple), mais plutôt comme un effet indirect dû à un meilleur état général »[15] [15]Ibid., p. 119. ...
suite
. La tentative d’objectivation, conforme aux préceptes de la physiologie de Brücke et peut-être provoquée par les inquiétudes qui commencent à se manifester et à lézarder l’enthousiasme de Freud, ne s’en révèle pas moins (pour le lecteur) plus sûre mais moins riche que la monographie de 1884. Dans l’exposé fait en mars 1885 devant la Société psychiatrique de Vienne, Freud réunit les deux points de vue, les expérimentations subjectives et objectives – synthèse méthodologique qu’il continuera toujours de rechercher –, et conclut, une fois encore à partir des fluctuations de la force musculaire, que la coca ïne n’agit pas sur l’appareil moteur, « mais qu’elle améliore les dispositions centrales au travail »[16] [16] À propos de l’action générale de la coca...
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. Elle a bien, en ce sens, une fonction de « psychotrope », et son étude constitue un des premiers révélateurs de l’intérêt de Freud pour le fonctionnement mental. Les erreurs de datation[17] [17] Dans L’interprétation des rêves, Freud date...
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, les oublis et l’effacement ultérieur de la coca ïne n’en prennent que plus d’importance.

LA DÉCOUVERTE DE KOLLER ET LA QUESTION DE LA PRIORITÉ

13 La découverte manquée par Freud, la question de la priorité, sont des aspects bien connus de l’épisode, en particulier parce qu’ils reviennent dans L’interprétation des rêves. Cependant, l’article d’Hortense Koller Becker, fille de Carl Koller, met en évidence plusieurs points[18] [18] H. Koller Becker, Carl Koller et la coca ïne...
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 :

14 Tout d’abord, contrairement à Freud dont les attentes étaient à la fois plus imprécises et plus vastes, Koller était obstinément à la recherche d’un anesthésique. La constatation que la coca ïne endormait la langue le fit immédiatement courir vers son laboratoire, expérimenter la coca ïne sur une grenouille, puis s’installer face au miroir et toucher sa propre cornée avec une épingle. Avec l’exclamation : « je ne sens rien du tout », les propriétés anesthésiques étaient découvertes. Koller avait lu l’article de Freud paru au début du mois de juillet 1884 ; il avait commencé avec lui les expériences au dynamomètre, ce qu’il mentionne dans ses communications de l’automne 1884. Mais, ensuite, il lui arrivera d’antidater sa découverte par rapport aux études de Freud, voire de prétendre n’avoir nullement été influencé par Freud[19] [19] Voir S. Bernfeld, in DC,op. cit., p. 289....
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.

15 À partir de janvier 1885, comme Freud l’écrit à Martha, son intimité avec Koller devient plus grande. Le 6 janvier 1885, Freud lui propose d’user du tutoiement « comme signe extérieur de mon amitié sincère, de ma sympathie et de la volonté que j’ai de vous aider ». Mais cette proposition n’est pas directement liée à la coca ïne. Elle est consécutive à un duel au sabre que Koller avait dû accepter avec un médecin qui l’avait traité de « sale Juif » et que Koller avait giflé en retour. La solidarité de Freud est entière. « Nous aurions tous réagi comme lui », écrit-il à Martha le même jour. Et il ajoute : « Je suis dans un état d’agitation qui m’empêche de t’écrire plus longuement, mais je n’expédierai pas ma lettre avant de pouvoir te donner le résultat du duel. » Par la suite, malgré le prestige de la découverte des propriétés anesthésiques, malgré l’issue favorable du duel pour Koller et son acquittement, il semble que sa carrière universitaire à Vienne ait été freinée. Il émigrera à New York en mai 1888. Mais on voit que les relations entre Freud et Koller ne se limitent pas à la coca ïne, qu’elles engagent tout le milieu médical viennois, dans son rapport au juda ïsme et à l’antisémitisme, notamment. En 1885, l’affaire du duel semble occulter la question de la priorité.

16 Dès son retour à Vienne en 1884 en tout cas, Freud avait pris acte de la découverte de Koller. Ses articles sur la coca ïne écrits en 1885, la réédition de la monographie de 1884 comportent tous la mention de la découverte de Koller. Il semble en revanche que Königstein, que Freud avait chargé en partant de poursuivre les recherches, ait eu plus de mal à accepter l’antériorité de la découverte de Koller[20] [20] C’est le point de vue de Freud. Voir lettre...
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. Mais même si la priorité de Koller ne fut pas discutée par Freud, elle fait retour sur un mode humoristique. En janvier 1886, il écrit à Koller de Paris : « Le travailler sans raisonner m’appartient, et non pas à Lustgarten. Je l’ai trouvé dans Voltaire et j’ai obtenu de ma Martha qu’elle m’en fasse un panneau brodé. Cette priorité-là je ne la céderai pas ». Et c’est autour de la priorité concernant la découverte de la bisexualité que Freud et Fliess se brouilleront en 1901.

17 Les retours du personnage de Koller dans les rêves de « L’injection faite à Irma » ou de la « Monographie botanique » montrent bien que la priorité n’est nullement, pour Freud, une question purement factuelle. Si la découverte de l’anesthésie locale n’avait été suivie d’aucune querelle, « chose rare et exemplaire dans l’histoire de la pharmacologie »[21] [21] S. Bernfeld, DC,op. cit., p. 289....
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, c’est peut-être aussi que les résonances psychiques de l’événement furent tout autres, et autrement importantes pour Freud. Elles concernaient ses relations avec son père, la confiance que celui-ci pouvait lui témoigner, le souvenir récurrent de la malédiction de l’enfance : « on ne fera jamais rien de ce garçon »[22] [22]L’interprétation des rêves,op. cit., p. 191...
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. Et, dans L’interprétation des rêves, elles s’associent à sa culpabilité à l’égard de Fleischl.

LE CAS FLEISCHL

18 Quoiqu’il en soit, en effet, de l’importance de la priorité, l’intérêt de Freud pour la coca ïne dépassait largement ses propriétés anesthésiques. La coca ïne, on l’a vu, fut d’abord pour Freud la première occasion d’une (auto-) expérimentation de la psyché. Mais il en attendait aussi directement un soulagement des douleurs de Fleischl et la fin de l’assujettissement de ce dernier à la morphine. Sur ce point aussi, beaucoup a été dit : Freud n’avait pas prévu que Fleischl, de morphinomane, deviendrait coca ïnomane, et ignorait la dépendance à la coca ïne. Ce dernier phénomène n’était pas mentionné dans les études qu’il avait lues, alors que l’accoutumance à la morphine était bien connue.

19 Pourtant, dès 1885, convaincu que la coca ne pouvait servir de substitut à la morphine, Louis Lewin avait souligné le risque d’une « intoxication double »[23] [23] Cité par R. Byck, DC,op. cit., p. 26....
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. Les critiques faites à Freud s’étaient focalisées sur cet aspect, et, plus particulièrement, sur le mode d’administration de la coca ïne.

20 En 1887, dans le dernier texte qu’il devait consacrer à la coca ïne, Freud tente de répondre aux objections de Lewin et d’Erlenmeyer. Il le fait d’abord en critiquant les expériences de ses contradicteurs et la prise de coca ïne par injections. Si l’efficacité de la désintoxication du morphinomane par la coca ïne est jugée douteuse, c’est que la coca ïne a été injectée, et non prise par voie orale comme Freud affirme l’avoir préconisé[24] [24] Coca ïnomane et coca ïnophobe (juillet 1887),...
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. Par ailleurs, accusé d’avoir répandu « le troisième fléau de l’humanité », Freud estime que les détériorations observées sous coca ïne se rapportent toutes à des morphinomanes, « c’est-à-dire à des personnes qui étaient déjà tombées sous la griffe du démon. La faiblesse de leur volonté et leur besoin d’excitants étaient à l’origine de l’abus qu’elles commettaient de tous les stimulants qu’on leur proposait »[25] [25]Ibid., p. 171. ...
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. Or ces deux arguments sont aussi peu conciliables que ceux de l’histoire du chaudron : si le coca ïnomane est déjà morphinomane (ce qui était le cas de Fleischl), l’injection ne constitue pas le problème. En outre, s’il est vrai que Freud a toujours lui-même pris de la coca ïne par voie orale, il est tout à fait inexact qu’il se soit toujours opposé aux injections, comme il l’affirmera pourtant à partir de 1887[26] [26] Dans le texte de 1887 (DC,op. cit., p. 170),...
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. D’emblée, en effet, Fleischl s’injecta la coca ïne. Or, même dans les addenda de 1885 à « De la coca », Freud avait estimé « inoffensives » les injections sous-cutanées[27] [27] Addenda à De la coca (février 1885), in DC,op. cit.,...
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. Il avait tenu les mêmes propos en mars 1885, dans son exposé devant la Société de psychiatrie de Vienne : « J’ai pu moi-même observer comment un morphinomane était rapidement désintoxiqué par un traitement à la coca ïne. (...) Je conseillerais sans hésiter pour ce type de désintoxication d’administrer la coca ïne en injections sous-cutanées et par doses de 0,03 g à 0,05 g sans craindre d’augmenter les doses. »[28] [28] À propos de l’action générale de la coca...
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En réalité, dès cette époque, Fleischl s’injectait des doses d’un gramme[29] [29] Selon E. Jones, La vie et l’œuvre de Sigmund...
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. Et, dans une lettre à Martha du 7 mai 1884, Freud avait écrit que Fleischl « s’accroche à la coca ïne comme un homme qui se noie ». L’état de Fleischl ne devait cesser d’empirer. Les doses massives de coca ïne avaient entraîné des crises de delirium tremens et des épisodes psychotiques.

21 Dans L’interprétation des rêves, le rêve de l’injection faite à Irma est associé au souvenir du traitement et des injections de Fleischl, et à la culpabilité de Freud. Mais ce rêve renvoie aussi à l’opération d’Emma par Fliess, et à la culpabilité de Freud d’avoir laissé Fliess opérer dans de mauvaises conditions. Les deux configurations ne sont donc pas sans analogie. Et si Fleischl n’a jamais joué pour Freud le rôle joué par Fliess, l’admiration que Freud lui portait paraît avoir suscité la jalousie de Martha, puisque Freud est amené à rassurer sa fiancée : « Je l’admire et je l’aime d’une passion intellectuelle, si tu me permets de m’exprimer ainsi. Sa disparition me touchera comme la destruction d’un temple sacré eût affecté un Grec de l’Antiquité. Ce que j’aime en lui, c’est moins la personne humaine qu’une précieuse réussite de la création. Et tu n’as nul besoin d’être jalouse. »[30] [30] Lettre à Martha, citée par Jones, op. cit.,...
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Des années plus tard, fin octobre 1898, après une cérémonie en hommage à Fleischl, le rêve « Non vixit » met en scène les amis morts (Fleischl, Paneth), et ceux qui vivent encore et avec qui la rivalité croît (notamment Fliess, désigné par les deux premières lettres de son nom « Fl », qui conviennent aussi à Fleischl). De Fleischl, le « revenant », le rêve dit : « Je trouve tout à fait possible qu’une telle personne n’existe qu’aussi longtemps qu’on le veuille, et qu’elle puisse être éliminée par le désir de l’autre. »[31] [31]L’interprétation des rêves,op. cit., p. 360....
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Qu’il s’agisse là de Fliess plutôt que de Fleischl, que l’ambivalence à l’égard de Fliess ait été bien plus vive n’empêche nullement de rapprocher les deux configurations que les associations du rêve tissent étroitement entre elles[32] [32] Sur ce rêve, voir les analyses de M. Schur,...
suite
. Autour de 1895 et du rêve de l’injection faite à Irma, l’abandon par Freud de la coca ïne pourrait être associé à la réactivation par la relation à Fliess (et l’addiction au tabac) de la culpabilité liée à Fleischl. Reste que c’est toute l’expérimentation sur la coca ïne qui fut abandonnée, et l’expérimentation proprement pharmacologique avec elle.

LA NEURASTHÉNIE, LES TOXIQUES, LES NÉVROSES ACTUELLES

22 Car il ne faut pas oublier qu’en 1884 et 1885, et encore en 1887, Freud attendait de la coca ïne un remède à la neurasthénie. Il en avait expérimenté sur lui-même les propriétés stimulantes, et y avait recours périodiquement quand il se sentait déprimé ou fatigué pour retrouver son énergie au travail[33] [33] Coca ïnomane et coca ïnophobe (juillet 1887),...
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. Comme le remarque S. Bernfeld, « il ne lui vint pas à l’esprit que l’on pourrait utiliser ses capacités retrouvées dans d’autres buts que le travail »[34] [34] S. Bernfeld, op. cit., p. 296. ...
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.

23 Mais le débat des années 1885-1887 s’était focalisé sur la question de la coca ïnomanie. Du même coup étaient écartées à la fois la question de l’usage en psychiatrie de substances stimulantes, mais aussi la tentative d’envisager, à partir de la coca ïne, un modèle théorique pour les psychoses, comme Moreau de Tours avait tenté de le faire à partir du haschich et comme, ultérieurement, les expériences faites avec des drogues psychoactives (LSD, amphétamines, mescaline) le tenteront. Robert Byck explique l’absence de recherche sur les effets pharmacologiques de la coca ïne à la fois par des raisons morales de défiance à l’égard des drogues euphorisantes, mais aussi parce que, en plus de l’accoutumance, de fortes doses de coca ïne peuvent provoquer des psychoses similaires à celles produites par les amphétamines ou le LSD. Peut-on, demande-t-il, user de la coca ïne sans en abuser ? Que Freud l’ait pu ne rend pas la substance inoffensive pour autant, et la société a, selon lui, plutôt choisi l’alcool, la caféine et la nicotine[35] [35] R. Byck, op. cit., p. 28-30. ...
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. La coca ïne fut d’ailleurs retirée du Coca-Cola en 1903. Et quand Sherlock Holmes, qui a disparu en 1891 aux chutes Reichenbach en pleine coca ïnomanie, réapparaît à Londres en 1894, la coca ïne ne constitue plus un problème[36] [36] D. Musto, Sherlock Holmes et Sigmund Freud (1968),...
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.

24 En 1895, c’est-à-dire avec les débuts de l’auto-analyse, Freud cesse de prendre de la coca ïne et d’en prescrire. Dans le même temps, confronté dans sa clinique aux névroses actuelles, il replace la neurasthénie parmi elles, et en différencie la névrose d’angoisse[37] [37] S. Freud, Qu’il est justifié de séparer...
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. Il n’est plus question alors de sa propre neurasthénie (qu’il traite plutôt par le tabac) ; il n’est pas question non plus de coca ïne, alors que la psychanalyse lui semble pourtant peu efficace face à ce type de névrose[38] [38] S. Freud, Manuscrit B (Lettre à Fliess du...
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. On peut faire l’hypothèse que l’accent mis par Freud sur le rôle actuel de la sexualité et de sa répression, qui conduirait plutôt à une prescription à la Chrobak (penis normalis dosim repetatur), le conduit à écarter la coca ïne des remèdes possibles. L’étude pharmacologique proprement dite, qui n’avait jamais été vraiment reprise depuis les écrits de 1884-1885, est abandonnée, comme l’est tout recours à un produit chimique, que ce soit comme complément ou substitut à la méthode psychique. Car même si le recours aux substances chimiques est mentionné dans Malaise dans la culture parmi les moyens de lutter contre la souffrance, l’énumération de ces moyens ne constitue pas une étude de leur articulation à la psychanalyse. Par ailleurs, le phénomène de dépendance n’est pas lui-même interrogé, l’étude de l’addiction reste absente de la théorie de Freud, alors que sa propre addiction au tabac est au centre des lettres à Fliess dans ces mêmes années 1894-1895, sans que le tabac soit jamais présenté dans la succession de la coca ïne. Faut-il parler, avec Ali Magoudi, d’une « tache aveugle dans la théorie[39] [39] A. Magoudi, Revue critique de la littérature...
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 » ? En tout cas, la toxicomanie reste hors du champ d’analyse de Freud.

25 Dans ces conditions, Freud pouvait-il être un précurseur de la psychopharmacologie ? Les travaux sur la coca ïne apparaissent bien, rétrospectivement, comme le premier témoignage de l’intérêt passionné de Freud pour le fonctionnement psychique. Dans les années 1884-1885, l’auto-expérimentation de la coca ïne aurait pu le mener vers l’expérimentation de l’action des substances chimiques sur le psychisme. Mais la découverte des propriétés anesthésiques manquée, les accusations dont il avait été l’objet et le cas de Fleischl l’en détournèrent. Par ailleurs, à partir de 1895, l’auto-analyse voit la coca ïne ressurgir dans un contexte personnel dont les enjeux scientifiques sont autres. Non seulement ce décentrement est peu propice à l’étude pharmacologique du produit, mais il lui est même complètement antinomique. Ce n’est plus la substance qui est le centre d’intérêt, mais les complexes associatifs et les strates d’éléments affectifs qui l’accompagnent. L’auto-analyse poursuit l’auto-expérimentation, mais sur une autre scène qui en diffère, comme les scènes freudiennes du rêve et de l’inconscient diffèrent de celles du surréalisme par exemple. En ce sens, on peut penser que l’abandon des travaux sur la coca ïne était nécessaire à l’invention de la psychanalyse, et se réjouir de cet abandon. Parallèlement, le dégagement de l’hypnose, les convictions rationalistes de Freud et sa tentative pour maintenir l’écart entre la science et l’illusion, la méthode même de la libre association, s’opposaient trop à la prise de substance psychotrope pour que Freud pût – dans le temps de l’invention – penser l’alliance des deux, sinon à envisager le rôle de la chimie dans la cessation de la douleur physique. Mais l’hypothèse même de l’inconscient posée par Freud à partir de et avec la neurologie, l’étude des aphasies, celle des névroses actuelles, invite maintenant à repenser ensemble l’ « or pur » de la théorie psychique et ce qui, au même titre que la suggestion, pourrait être désigné comme le « cuivre » de la chimie.

Notes

[ 1] Sigmund Freud présenté par lui-même (1925), Gallimard, 1984, p. 25-26.Retour

[ 2] S. Freud, De la coca (1884), in De la coca ïne, Écrits réunis par Robert Byck, Éd. Complexe, 1976, p. 98. Dans cet ouvrage (désormais abrégé DC), R. Byck a réuni non seulement les textes de Freud sur la coca ïne et certaines lettres à Martha, mais aussi les sources de Freud (notamment les observations de 1883 du Dr Aschenbrandt) et divers éléments concernant la diffusion de la coca ïne, les critiques faites à Freud (notamment le passage des Phantastica de Louis Lewis concernant la coca ïne) ainsi que les études d’Hortense Koller Becker (la fille de Carl Koller), de Siegfried Bernfeld sur Freud et la coca ïne, de David Musto sur Freud et Sherlock Holmes, deux coca ïnomanes. Retour

[ 3] Lettres du 21 avril et du 19 juin 1884, notamment.Retour

[ 4] Erlenmeyer, considérant la coca ïne comme « le troisième fléau de l’humanité », avec l’alcool et la morphine, avait dénoncé, dans un article de mai 1886, la légèreté de Freud à prescrire de la coca ïne aux morphinomanes.Retour

[ 5] Voir les Lettres à Fliess du 30 mai 1893, des 24 janvier, 26 avril et 12 juin 1895. Le 26 octobre 1896, Freud écrit que la coca ïne est complètement laissée de côté (The Complete Letters of Sigmund Freud to Wilhelm Fliess, 1887-1904, éd. J. Masson, The Belknap Press of Harvard University Press, 1985, p. 201). Ensuite, la coca ïne n’est mentionnée qu’en relation avec les expérimentations de Fliess qui l’utilise pendant les accouchements et dans les dysménorrhées. Il en avait d’ailleurs prescrit à Emma Eckstein.Retour

[ 6] Voir, en particulier, la lettre du 22 juin 1894 dans laquelle Freud expose à Fliess, en relation avec le tabac, « l’histoire de (son) cas, la vérité sans fard, dans tous ses détails ». Voir aussi le chapitre de M. Schur consacré à la bataille de Freud contre l’addiction à la nicotine, in La mort dans la vie de Freud, Gallimard, 1975, p. 61-87.Retour

[ 7] De la coca (1884), DC,op. cit. p. 87.Retour

[ 8] Ibid., p. 90.Retour

[ 9] Sir Arthur Conan Doyle, Le signe des quatre (1888), in Œuvres complètes, I, Robert Laffont, 1956, p. 151-153, cité par R. Byck, op. cit. p. 23.Retour

[ 10] R. Byck, DC,op. cit., p. 12.Retour

[ 11] M. Milner, L’imaginaire des drogues. De Thomas de Quincey à Henri Michaux, Gallimard, 2000, p. 145.Retour

[ 12] S. Bernfeld, Les études de Freud sur la coca ïne (1951), in DC,op. cit., p. 285.Retour

[ 13] De la coca, DC,op. cit., p. 90 et s.Retour

[ 14] Contribution à la connaissance de l’action de la coca ïne (1885), DC,op. cit. p. 114.Retour

[ 15] Ibid., p. 119.Retour

[ 16] À propos de l’action générale de la coca ïne (1885), DC,op. cit., p. 128.Retour

[ 17] Dans L’interprétation des rêves, Freud date de 1885 la monographie de 1884 (PUF, 1967, p. 103). Retour

[ 18] H. Koller Becker, Carl Koller et la coca ïne (1963), in DC,op. cit. p. 227-277.Retour

[ 19] Voir S. Bernfeld, in DC,op. cit., p. 289.Retour

[ 20] C’est le point de vue de Freud. Voir lettre à F. Wittels du 15 août 1924, in DC,op. cit., p. 226. C’est aussi le point de vue de S. Bernfeld, op. cit., p. 288-289.Retour

[ 21] S. Bernfeld, DC,op. cit., p. 289.Retour

[ 22] L’interprétation des rêves,op. cit., p. 191 et le commentaire de D. Anzieu, L’auto-analyse de Freud, PUF, 1988, p. 291.Retour

[ 23] Cité par R. Byck, DC,op. cit., p. 26.Retour

[ 24] Coca ïnomane et coca ïnophobe (juillet 1887), in DC,op. cit., p. 170.Retour

[ 25] Ibid., p. 171.Retour

[ 26] Dans le texte de 1887 (DC,op. cit., p. 170), et dans L’interprétation des rêves,op. cit., p. 107 et 109.Retour

[ 27] Addenda à De la coca (février 1885), in DC,op. cit., p. 124.Retour

[ 28] À propos de l’action générale de la coca ïne (mars 1885), in DC,op. cit., p. 129.Retour

[ 29] Selon E. Jones, La vie et l’œuvre de Sigmund Freud, t. I, PUF, 1970, p. 100.Retour

[ 30] Lettre à Martha, citée par Jones, op. cit., p. 99.Retour

[ 31] L’interprétation des rêves,op. cit., p. 360.Retour

[ 32] Sur ce rêve, voir les analyses de M. Schur, op. cit., p. 192 et s. et de D. Anzieu, L’auto-analyse de Freud,op. cit., p. 325 et s.Retour

[ 33] Coca ïnomane et coca ïnophobe (juillet 1887), in DC,op. cit., p. 169.Retour

[ 34] S. Bernfeld, op. cit., p. 296.Retour

[ 35] R. Byck, op. cit., p. 28-30.Retour

[ 36] D. Musto, Sherlock Holmes et Sigmund Freud (1968), in DC,op. cit., p. 313-314, 320.Retour

[ 37] S. Freud, Qu’il est justifié de séparer de la neurasthénie un certain complexe symptomatique sous le nom de névrose d’angoisse, in Névrose, psychose et perversion, PUF, p. 15-38.Retour

[ 38] S. Freud, Manuscrit B (Lettre à Fliess du 8 février 1893), in La naissance de la psychanalyse, PUF, 1956, p. 65.Retour

[ 39] A. Magoudi, Revue critique de la littérature analytique sur les toxicomanies, La psychiatrie de l’enfant, vol. XXVIII, 1/1985.Retour

Résumé

L’épisode coca ïne des années 1884-1887 fait-il de Freud un précurseur de la psychopharmacologie ? À côté de la découverte manquée des propriétés anesthésiques, les rapports avec Fleischl et le retour de ces événements dans l’auto-analyse de Freud inscrivent la coca ïne dans un champ d’exploration psychique qui ne pouvait pas être celui des psychotropes.

Mots clés

Coca ïne, Dépendance, Neurasthénie, Psychotrope, Tabac, Fleischl, Fliess, Koller



L’episodio della cocaina degli anni 1884-1887 fa di Freud un precursore della psicofarmacologia ? Accanto alla mancata scoperta delle proprietà anestetiche, i rapporti con Fleischl ed il ritorno di questi eventi nell’auto-analisi di Freud, iinseriscono la cocaina in un campo di esplorazione psichica che non poteva essere quello degli psicofarmaci.

Parole chiave

Cocaina, Dipendenza, Neuroanstenia, Psicotropi, Tabacco, Fleischl, Fliess, Koller

PLAN DE L'ARTICLE


POUR CITER CET ARTICLE

Françoise Coblence « Freud et la cocaïne », Revue française de psychanalyse 2/2002 (Volume 66), p. 371-383.