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COUR DES COMPTES 

________ 

 

 

Le maintien en condition opérationnelle 

des matériels des armées 

_________ 

 

 

RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE 

SUIVI DE LA RÉPONSE DU MINISTRE DE LA DÉFENSE 

 

DÉCEMBRE 2004 

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OUR DES COMPTES

 

 

 

 

 

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Sommaire 

 

Pages 

Délibéré………………………………………………………………. 5 

 

 

Introduction……………………………………………………………. 7 

 

 

Chapitre I – La dégradation de la disponibilité des matériels militaires…... 

11 

I – La complexité de la fonction « maintien en condition opérationnelle »… 

13 

A – Les moyens consacrés au maintien en condition opérationnelle……….

 

13 

B – La complexité du maintien en condition opérationnelle des matériels 

militaires……………………………………………………………… 

 

15 

C – L’organisation de la fonction au sein du ministère……………. …….... 

18 

D – La difficile définition de la disponibilité……………………………….. 

21 

II – La dégradation de la disponibilité des principaux matériels............... 

23 

A – Le constat……………………………………………………………… 

23 

B – Les causes de la dégradation…………………………………………… 

26 

 

 

Chapitre II – Les mesures visant à restaurer la disponibilité des matériels.. 

35 

I – L’effort financier………………………………………………………....... 37 

II – La réorganisation des structures………………………………………… 

39 

A – Une structure interarmées : la SIMMAD…..…………………………... 

39 

B – Une structure duale : le service de soutien de la flotte………………… 

42 

C – L’organisation retenue par les matériels terrestres……...……………… 46 

III – Les résultats déjà obtenus………………………………………………. 

47 

A – Une disponibilité encore limitée………………………………………. 

47 

B – Des indices d’amélioration……………………………………………... 

51 

 

 

Chapitre III – Des progrès à confirmer……………………………………… 

55 

I – L’achèvement des réformes de structure………………………………… 

57 

A – La poursuite de la clarification des rôles………………………………. 

57 

B – La consolidation des structures existantes……………………............... 64 

II – Les relations clients-fournisseurs………………………………………… 70 

A – L’évolution des modes de contractualisation………………….............. 70 
B – Les relations entre l’Etat actionnaire et l’Etat client…………………… 

73 

III – Les moyens financiers…………………………………………………… 

76 

 

 

Conclusion………………………………………………………… 83 

Glossaire……………………………………………………………….. 87 

 

 

Réponse du Ministre de la défense…………………………………. 

89 

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OUR DES COMPTES

 

 

 

 

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 5 

 

 

DÉLIBÉRÉ 

 

La Cour des comptes publie, sous la forme d’un fascicule séparé, 

un rapport concernant le maintien en condition opérationnelle des 
matériels des armées. 

Conformément aux dispositions législatives et réglementaires du 

code des juridictions financières, la Cour des comptes, délibérant en 
chambre du conseil, a adopté le présent rapport public. 

Ce texte a été arrêté au vu du projet qui avait été communiqué au 

préalable, aux administrations concernées, et après qu’il a été tenu 
compte, quand il y avait lieu, des réponses fournies par celles-ci. En 
application des dispositions précitées, ces réponses sont publiées ; elles 
engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. 

Etaient présents : M. Séguin, premier président, MM. Delafosse, 

Fragonard, Cieutat, Carrez, Pichon, Picq, présidents de chambre, 
MM. Ménasseyre, Gastinel, présidents de chambre maintenus en activité, 
MM. Chartier, Capdeboscq, Murret-Labarthe, Vianes, Giquel, Bonacossa, 
Bady, Billaud, Berthet, Malingre, Hespel, Richard, Devaux, Rossignol, 
Arnaud, Bayle, Bouquet, Adhémar, Rémond, Mme Boutin, MM. Chabrol, 
Ganser, X-H Martin, Schneider, Mme Cornette, MM. Lefoulon, Mirabeau, 
Hernandez, Beaud de Brive, Thérond, Pallot, Cazanave, Mme Bellon, 
MM. Gasse, Moreau, Freches, Duchadeuil, Steyer, Lesouhaitier, Lefas, 
Banquey, Levy, Brochier, Braunstein, Auger, Delin, Mme Saliou, 
MM. Coudreau, Gautier Jean, Courtois, Mmes Seyvet, Moati, MM. Mollard, 
Diricq, conseillers maîtres, MM. Audouin, Pascal, Lemasson, Cultiaux, 
Schaefer, conseillers maîtres en service extraordinaire, Mme Bazy-Malaurie, 
conseiller maître, rapporteur général. 

Etait présente et a participé aux débats : Mme Gisserot, procureur 

général de la République, assisté de M. Vaissette, chargé de mission.  

MM. Meddah et Perrin, secrétaires généraux adjoints, assuraient le 

secrétariat de la chambre du conseil. 

N’a pas pris part aux délibérations : M. Tournier, conseiller maître. 

 

Fait à la Cour, le 15 décembre 2004. 

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Introduction 

Premier budget de l’Etat en termes de crédits d’investissement et 

deuxième en termes de dépenses ordinaires, le ministère de la défense 
dispose de ressources considérables (plus de 40 milliards d’euros en 
2004). 

Confronté depuis plus de quinze ans à des bouleversements des 

données stratégiques comme à de rapides et intenses évolutions 
technologiques, il a été amené à plusieurs reprises à définir et à réaliser 
des mutations structurelles et fonctionnelles. 

La Cour a traité des questions budgétaires, comptables et de 

programmation de la défense dans un rapport public particulier publié en 
juin 1997. Dans son rapport public annuel de 1999, elle a analysé les 
conditions de réalisation des dix plus importants programmes 
d’armement. A l’automne 2001, elle avait publié un nouveau rapport 
public particulier consacré à l’examen de la situation des industries 
d’armement. Enfin, dernière grande enquête thématique réalisée, 
l’appréciation des conditions de réalisation et des perspectives 
d’évolution de la professionnalisation des armées a fait l’objet d’une 
insertion au rapport public annuel 2003. 

*    * 

Avec ce nouveau rapport, la Cour s’attache à étudier les différentes 

composantes de l’« entretien des matériels militaires » durant leur vie 
opérationnelle, fonction essentielle de la vie des armées connue sous le 
terme de « maintien en condition opérationnelle ». 

En 1999 et 2001, à des dates différentes suivant les armées, s’est 

produit une forte crise de la disponibilité des matériels militaires. Résultat 
d’un processus remontant au début des années 1990, la réduction 
significative du taux de disponibilité des matériels s’est encore accentuée 
au cours des années d’exécution de la loi de programmation militaire 
1997-2002. Pressentie par les autorités du ministère avant les années 

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1999-2000, son ampleur est apparue lors des débats parlementaires sur le 
projet de loi de finances initiale pour 2001. Plusieurs rapports 
parlementaires ont alors été établis dans le but de faire le point sur l’état 
des matériels par secteur

1

 et proposer les mesures de redressement 

nécessaires. 

Les autorités militaires n’étaient néanmoins pas restées inertes et 

elles ont proposé au ministre de la défense dès 1999 des réorganisations 
permettant de pallier la défaillance des processus. Ainsi, a été créée une 
structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels 
aéronautiques du ministère de la Défense (SIMMAD) dont l’objet était de 
faire assurer la maintenance de l’ensemble du parc aérien, quelle que soit 
l’armée utilisatrice du matériel. De même, un service de soutien de la 
flotte (SSF) fut organisé, regroupant les grands acteurs de l’entretien des 
matériels navals que sont la délégation générale pour l’armement (DGA) 
et la marine nationale, utilisatrice pratiquement exclusive de ces 
matériels.  

Le maintien en condition opérationnelle des matériels a souffert 

également, au cours de cette même période, d’une diminution importante 
des ressources affectées à son financement. Les moyens ont été en 
continuelle diminution au cours de la période, jusqu’à la prise de 
conscience, en 2001, de la dégradation de la situation. A compter de la loi 
de finances initiale pour 2002, et plus encore dans les années qui ont 
suivi, les moyens financiers affectés au rétablissement de cette fonction 
vitale ont crû régulièrement, sans toutefois que des améliorations 
proportionnelles soient enregistrées. 

Enfin, la crise observée en matière de maintenance des matériels 

militaires a correspondu à une période de restructuration majeure de 
l’outil industriel étatique avec le changement de statut de la direction des 
constructions navales (DCN), devenue service à compétence nationale en 
2000, puis société de plein exercice en juin 2003, et la difficile 
consolidation de la situation de GIAT industries. 

*    * 

L’objet du présent rapport est d’analyser les causes de cette crise et  

les résultats des mesures prises ces deux dernières années et enfin, 
d’appréhender les incertitudes grevant, aujourd’hui encore, le 
redressement de la disponibilité des matériels militaires en service dans 

                                                      

1) Rapport n° 3302-2001 de l’AN « L’entretien de la flotte : défis et perspectives » 
    Rapport n° 328-2002 de l’AN « L’entretien des matériels : un sursaut 

nécessaire » 

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I

NTRODUCTION

 9 

 

 

les forces armées. Le périmètre d’étude de la Cour s’est volontairement 
borné à l’analyse du maintien en condition opérationnelle des matériels 
des armées de terre, de l’air et de la marine nationale. Le cas particulier 
de la gendarmerie n’a pas été traité car les modalités de déploiement de 
ses unités sur l’ensemble du territoire national, comme le fait que ses 
matériels sont pour la plupart comparables à ceux des services civils, ont 
conduit à lui appliquer des règles qui diffèrent significativement de celles  
qui ont été retenues pour les armées. Il en va de même pour des matériels 
utilisés dans les domaines nucléaire ou spatial, compte tenu de leur 
spécificité. 

Afin de disposer d’éléments de comparaison pertinents, le présent 

rapport a retenu comme période d’étude le déroulement de la loi de 
programmation militaire 1997-2002 et le début de l’entrée en vigueur de 
la loi de programmation 2003-2008.  

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Chapitre I 

 

La dégradation de la disponibilité des 

matériels militaires  

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12 C

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 13 

 

 

I  –  La complexité de la fonction « maintien en 

condition opérationnelle »  

Pour être en mesure de remplir chacune « 

leur contrat 

opérationnel », les armées doivent avoir au bon moment, et pour la durée 
souhaitée, des personnels compétents disposant des matériels nécessaires 
et en état de fonctionnement.  

La complexité croissante des matériels mis en œuvre par les 

armées fait de leur maintien en condition opérationnelle une dimension 
majeure de leur disponibilité. Si, historiquement, le combattant et son 
arme restent relativement autonomes jusqu’à la fin du XIX

ème

 siècle dans 

l’armée de terre, l’imbrication entre chaînes opérationnelles et chaînes de 
soutien technique, traditionnelle dans la marine et obligée pour la jeune 
armée de l’air, se révèle de plus en plus nécessaire avec l’émergence de 
conflits modernes où sont utilisés des matériels de très haute technologie. 

La notion même d’arme tend à disparaître, remplacée 

progressivement par celle de système d’armes qui différencie un vecteur 
(naviguant, volant ou roulant) et un ensemble de composants très 
complexes intégrant des systèmes électroniques (avionique, systèmes de 
conduite des vecteurs ou des tirs, contre-mesures permettant de sécuriser 
le matériel et son environnement, etc…). L’apparition de nouveaux 
modes de propulsion, tels que les réacteurs nucléaires pour les bâtiments 
de surface ou les sous-marins, a également entraîné le développement de 
chaînes et de procédures de maintenance spécifiques. 

A  –  Les moyens consacrés au maintien en condition 

opérationnelle 

1  –  Les effectifs  

La fonction d’entretien des matériels emploie des effectifs 

significatifs, tant militaires que civils. 

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Tableau n° 1 : 

Effectif des armées employé dans la fonction maintien en condition 

opérationnelle 

Armée de terre 

Marine nationale 

Armée de l’air 

 

Militaires Civils Militaires Civils Militaires

Civils 

Effectif 

16 507 

8 542 

9 627 

2 084 

12 924 

262 

Equivalent 
Temps plein 

10 599 

8 225 

9 624 

2 074 

9 047 

262 

Total Equivalent 
Temps Plein 

18 824 

11 699 

9 309 

(Source : Cour des comptes) 

Au total, près de 40 000 personnes en équivalent temps plein 

oeuvrent dans la fonction de maintien en condition opérationnelle, soit 
13 % des effectifs. A ces personnels, il faut ajouter les agents civils et 
militaires de la délégation générale pour l’armement qui apportent leur 
concours à cette fonction tant sur le plan de l’expertise technique que sur 
celui des achats publics ou de la qualité des méthodes et processus. 

2  –  Les crédits  

Les crédits consacrés au maintien en condition opérationnelle des 

matériels sont pour l’essentiel regroupés au sein des crédits d’entretien 
programmé des matériels répartis entre le titre III « moyens des services » 
et le titre V « opérations en capital » du budget de la défense. Au total, 
dans la loi de finances initiale, 2,66 Md€ de crédits de paiement étaient 
consacrés en 2003 au financement de l’entretien programmé des matériels 
(soit 6,4 % du budget de la défense), dont 1,8 Md€ pour les matériels 
classiques. Rapporté aux seules dépenses en capital, l’entretien 
programmé des matériels représente en fait 19,6 % de l’effort 
d’investissement militaire français qui se montait à 13,6 Md€ en 2003. 

3  –  Une approche des coûts de la fonction  

A la demande de la Cour, le ministère a établi un chiffrage du coût 

du maintien en condition opérationnelle des matériels en intégrant les 
crédits consacrés aux tâches réalisées directement par les ateliers des 
armées, ceux qui sont versés à des prestataires extérieurs, ainsi que les 
dépenses de fonctionnement courant des organismes responsables de cette  
fonction. 

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 15 

 

 

Tableau n° 2 : 

Evaluation du coût de la fonction dans chaque armée 

(en M€) 

 

Armée de terre 

Marine nationale 

Armée de l’air 

RCS

2

 

533,8 387,4  278,3 

Fonctionnement 

40,5 32,4  56,12 

Activité de maintien en 
condition opérationnelle 

499,2 

742,8

814 

Coût approché de la 
fonction 

1 073,5 

1 162,6 

1 148,4 

Budget de l’armée 
considérée 

7 643,7 

5 430,3 

5 567,3 

(Source : Cour des comptes) 

Les armées consacrent 3,38 Md€ au maintien en condition 

opérationnelle des matériels classiques, pour un budget total (titres III et 
V, hors pensions) de 31 Md€, soit près de 11 % des ressources globales 
du ministère. 

Par armée, l’importance de ces dépenses est encore plus 

significative. En effet, l’armée de terre affecte 14 % de son budget à cette 
fonction , la marine 21 % et l’armée de l’air 20,6 %. 

B  –  La complexité du maintien en condition 

opérationnelle des matériels militaires 

Le maintien en condition opérationnelle des matériels militaires est 

fort compliqué à concevoir et à mettre en oeuvre. 

1  –  La complexité technique croissante des matériels 

Dans toutes les armées, l’apparition de nouvelles technologies a 

fait naître de nouvelles menaces auxquelles la seule riposte possible 
consiste à suivre le progrès des performances. Cette lutte entre l’arme et 
la cuirasse, aussi ancienne que les armées elles-mêmes, se trouve 
exacerbée à notre époque par la rapidité des progrès technologiques 
ouvrant aux concepteurs d’armements des champs immenses, auxquels 

                                                      

2) Rémunérations et charges sociales, non comprises les charges de retraites qui ne 
sont pas comptabilisées de manière exploitable dans le budget militaire 

3) Les crédits « marine » incluent ceux de la flotte nucléaire 

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16 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

nul n’aurait songé il y a quelques décennies seulement. Ainsi, par 
exemple, le char 

Leclerc

, qui équipe actuellement l’armée de terre, est un 

véritable système d’armes intégré, capable, pour la première fois, de tirer 
en roulant, tout en restant en permanence relié à sa formation et, en tant 
que de besoin, à tout le reste de l’armée de terre par un réseau complexe 
de collecte, de traitement et de transmission de l’information. Cette 
technicité est encore plus sensible pour le matériel aérien. 

2  –  La durée de vie des équipements 

 Malgré la rapidité des évolutions technologiques, la durée de vie 

des équipements reste longue parce que le passage d’une génération à 
l’autre implique un effort financier important, mais aussi parce que les 
durées de développement des programmes d’armements nouveaux ont 
tendance à s’allonger.  

Tableau n° 3 : 

Age moyen de certains matériels en 2004 

Matériels Nombre 

Age 

moyen 

Mirage IV P 

39 ans 

Mirage F1 CT 

50 

24,5 ans 

Chars AMX 10 RC 

337 

20 ans 

Hélicoptères Gazelle 

265 

27 ans 

Frégates anti-sous-marines F-67 

29 ans 

Frégates anti-sous-marines F-70 

20 ans 

Frégates lance-missiles 

35 ans 

Porte-hélicoptères « Jeanne d’Arc » 

41 ans 

TCD type Ouragan 

39 ans 

Bâtiment de soutien mobile 

38 ans 

(source : ministère de la défense) 

Cette durée de vie très longue des plates-formes militaires a des 

conséquences directes sur le maintien en condition opérationnelle des 
matériels considérés. Le vieillissement des matériels se traduit, en effet, 
par une augmentation du nombre de pannes.  

Quels que soient les matériels, le vieillissement est toujours 

générateur d’indisponibilités plus fréquentes et plus longues ainsi que de 
grandes difficultés à s’approvisionner en rechanges. Les pièces ne sont 

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 17 

 

 

généralement plus fabriquées par le constructeur et, compte tenu des 
coûts considérables qu’entraînent l’entretien et la conservation d’un stock 
semi-dormant, le secteur industriel n’est prêt à remplir cette fonction qu’à 
des tarifs très élevés. Ceci a souvent conduit les armées à internaliser les 
stocks impliquant des coûts de structure complémentaires. 

Dans le cas des rechanges de la marine, par exemple, cette 

préoccupation avait été négligée par la direction des constructions navales 
(DCN) depuis le début des années 1990. Le réassortiment des lots de 
rechange a nécessité la recherche de fournisseurs susceptibles de 
fabriquer les pièces manquantes, même en courtes séries, et en acceptant 
de faire fonctionner des ateliers sans garantie de pérennité. 

3  –  La spécificité  des courtes séries 

En outre, les matériels militaires sont très différents de leurs 

« équivalents » civils et beaucoup plus complexes en raison notamment 
des contraintes de fiabilité et d’emploi. De ce fait, la recherche 
technologique militaire s’est orientée depuis assez longtemps vers des 
domaines très novateurs en n’offrant que peu de possibilités de réemploi 
de techniques civiles.  

Le cas des matériels de courte série participe de la même 

problématique. La plupart des différents modèles de bâtiments de surface 
de la marine existent en moins de cinq exemplaires et plusieurs sont des 
prototypes uniques (le porte-avions 

Charles de Gaulle

, le porte-

hélicoptères 

Jeanne d’Arc

le Monge

, etc). Pour ces matériels, une 

logistique et des compétences spécifiques doivent être entretenues, ce qui 
complique considérablement le maintien en condition opérationnelle et 
entraîne des coûts importants. 

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OUR DES COMPTES

 

 

 

C  –  L’organisation de la fonction au sein du 

ministère  

Le maintien en condition opérationnelle 

Le maintien en condition opérationnelle peut être défini comme 

l’ensemble des moyens et procédures nécessaires pour qu’un matériel 
reste, au long de sa durée d’utilisation, apte à l’emploi qui lui est assigné.  

La notion de maintien en condition opérationnelle des matériels 

recouvre deux types de fonctions. 

La première est le 

soutien technique

 qui regroupe trois grandes 

catégories d’opérations : 

- la maintenance proprement dite, comprenant les actions visant à 

maintenir (ou rétablir) un équipement dans un état spécifié (telles que les 
carénages pour l’entretien des coques des bateaux, la reconstitution du 
potentiel d’heures de vol d’un aéronef ou le changement de moteur d’un 
char) ; 

- la gestion de configuration des équipements qui permet de suivre 

l’évolution de la définition technique des matériels au long de leur vie 
opérationnelle ; 

- la tenue à jour des référentiels techniques, mais aussi l’analyse du 

retour d’expérience issue de l’exploitation des faits techniques. 

La deuxième fonction est 

le soutien logistique

. Elle comprend les 

opérations d’approvisionnement des rechanges, la maintenance de ceux-ci, 
leur magasinage (stockage) et le ravitaillement en pièces de rechange des 
unités, des structures de soutien (ateliers industriels) voire, dans certains 
cas, des industriels. 

La maintenance peut s’exercer suivant deux modes distincts :  

- la 

maintenance préventive

 qui correspond à l'ensemble des 

opérations à caractère systématique ou conditionnel, définies pour chaque 
type de matériel et destinées à prévenir les altérations ou à limiter leur 
développement, de façon à maintenir les matériels aptes à l'emploi ; 

- la 

maintenance corrective

 qui concerne les opérations ayant pour 

but de remédier aux avaries survenues en fonctionnement ou aux 
altérations décelées au cours de la maintenance. 

La fonction maintenance est organisée dans les armées suivant trois 

niveaux techniques d'intervention

 (NTI). Un NTI représente un 

ensemble de moyens en personnels et en matériels permettant de faire face 
à des charges de maintenance qualitativement et quantitativement définies. 

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A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 19 

 

 

 

Le NTI 1 assure la mise en œuvre et la maintenance en ligne du 

matériel (traitement en piste avant et après vols pour les aéronefs, entretien 
courant des bâtiments de la marine). Les opérations sont effectuées avec 
des moyens limités, par les utilisateurs des matériels eux mêmes ou par 
des structures légères de proximité (ateliers de piste pour les aéronefs). 
Ainsi, par exemple, le NTI 1 des bateaux est assuré par les équipages eux-
mêmes, parfois en mer. Pour le matériel roulant, ce NTI 1 s’apparente aux 
opérations qu’un utilisateur de voiture averti peut réaliser lui-même sur 
son véhicule. 

Le NTI 2 correspond aux opérations de maintenance préventive 

programmée ou curative visant soit à restaurer le potentiel de "vie" des 
équipements, soit à réaliser des réparations lourdes, exécutées par un 
organisme de soutien dédié, situé ou non sur le site des utilisateurs. Il 
s’agit, par exemple, des opérations réalisées par les escadrons de soutien 
spécialisé des bases aériennes ou les ateliers militaires de la flotte des 
bases navales. Les équipements nécessaires au NTI 2 sont adaptés à ce 
niveau d'intervention, plus poussé que le NTI 1. 

Le NTI 3 correspond aux opérations "lourdes" de maintenance 

programmée préventive de reconstitution de potentiel ("grandes visites") 
ou de réparations à caractère industriel exécutées chez les industriels ou 
dans des établissements spécialisés  nécessitant des moyens véritablement 
industriels. Ces opérations sont souvent l’occasion de remises à niveau et 
de modernisation des matériels ou de leurs équipements. 

1  –  Des structures différentes selon les armées 

Pour des raisons liées à la fois à leurs caractéristiques propres et à 

l’histoire de chaque armée, les structures dédiées à la maintenance ainsi 
que les rapports que les trois armées entretiennent avec la DGA et les 
industries d’armement sont fort différents d’une armée à l’autre. 

a)  Le poids de l’histoire 

L’histoire de la maintenance diffère sensiblement d’une armée à 

l’autre, à raison notamment de l’évolution technique des matériels 
concernés. 

La marine royale, puis nationale, est sans doute l’armée dans 

laquelle le concept d’entretien des matériels, au sens moderne du terme, a 
pris sa source.  

Historiquement, les arsenaux de la marine ont toujours assuré le 

support industriel et courant des bateaux de la marine. Ces arsenaux 
appartenant directement à l’Etat jusqu’en 2003, il en a résulté que la 

background image

20 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

marine n’a jamais eu à développer de structures propres dédiées à 
l’entretien de ses matériels. 

La situation est tout autre pour l’armée de terre, qui n’a été 

réellement confrontée à la question de l’entretien des matériels qu’entre 
les deux guerres mondiales avec la mécanisation croissante de ses unités, 
et 

a fortiori

 pour l’armée de l’air, créée en 1936. 

L’armée de terre se différencie sur plusieurs points des autres 

armées. Ses effectifs sont très supérieurs (165 000 hommes contre 70 000 
pour l’armée de l’air et 55 000 pour la marine). Ses unités sont réparties 
sur la quasi-totalité du territoire métropolitain, alors que l’armée de l’air 
n’entretient qu’un nombre limité de bases aériennes et que la marine se 
trouve pour l’essentiel concentrée dans deux ports. Elle entretient en outre 
des détachements permanents dans les DOM-TOM et dans certains pays, 
notamment africains, liés à la France par des accords de défense. Elle 
contribue à l’ensemble des opérations extérieures dans lesquelles les 
armées françaises sont impliquées. Jusqu’à une date récente, les matériels 
d’armement terrestre se caractérisaient par une nécessaire simplicité 
d’emploi et une robustesse qui les différenciaient nettement des bâtiments 
de la marine nationale, construits presque à l’unité, et des matériels 
aériens, soumis à la contrainte de la sécurité des vols. 

Concernant l’armée de l’air, la question se présente fort 

différemment, dans la mesure où, compte tenu de la technicité des 
matériels mis en œuvre dès l’origine, son organisation a été conçue en 
prenant en compte l’existence d’acteurs industriels préexistants. Elle a 
défini ses structures de maintenance par complémentarité avec les 
potentiels de ces fabricants. Ainsi l’armée de l’air a-t-elle développé des 
ateliers de maintenance de proximité, héritiers des mécaniciens de piste 
du temps des premiers aéronefs, sans chercher à développer en interne 
des capacités de maintenance dépassant un certain niveau de complexité 
(NTI 1 et NTI 2), à l’exception de deux ateliers de réparation (ARAA) 
qui disposent de moyens de niveau NTI 3. 

b)  La différenciation des matériels 

La nature des matériels militaires entretenus, et donc des 

opérations de maintenance associées reste, aujourd’hui encore, un 
élément justifiant des organisations différentes. 

Le matériel de l’armée de terre présente par nature des contraintes 

de maintien en condition opérationnelle extrêmement diverses. En effet, 
rien n’est plus dissemblable, en termes de maintenance, que des camions 
ou des véhicules de transport terrestre non spécifiquement équipés ou 

background image

L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 21 

 

 

armés, tels les camions ou les « Jeep » de type 

P4

, dont la maintenance 

s’apparente à celle d’un véhicule de la gamme civile, et des matériels tels 
que les canons de 155 mm autotractés qui, du fait de leur composante 
technique électronique (pour la conduite de tir, les contre-mesures, etc.), 
s’apparentent aux matériels des autres armées. 

Les particularités des matériels navals entraînent des contraintes 

différentes

4

. Leur utilisation suppose des périodes en mer longues, et 

donc un équipage susceptible de pouvoir intervenir sur les matériels et 
équipements, ce qui  conditionne en grande partie les procédures de 
maintenance et les structures afférentes. Les comparaisons avec le 
matériel civil sont plus délicates, tant sont importantes les différences, le 
matériel commercial étant en outre plus récent. 

Le domaine aérien est celui où l’organisation militaire est la plus 

semblable à l’organisation civile correspondante : les tâches de maintien 
en condition opérationnelle sont confiées à des structures légères 

in situ

et le relais est passé à une structure industrielle au-delà d’un niveau de 
technicité défini très précisément.  

En revanche, les remarques qui précèdent valent, 

mutatis mutandis,

 

par type de matériel, quelle que soit l’armée à laquelle il appartient (par 
exemple avion ou véhicules non spécifiques). 

D  –  La difficile définition de la disponibilité 

La disponibilité d’un matériel est difficile à définir car elle est 

relative et spécifique à l’emploi du matériel concerné. 

La disponibilité des matériels 

Suivant la définition retenue, depuis une date récente, par le 

ministère de la défense, c’est « 

l'aptitude d'un produit à être en état 

d'accomplir une fonction requise, à un instant donné, dans des conditions 
données et pendant un intervalle de temps donné, compte tenu du système 
de soutien mis en place.  

Cette aptitude est fonction de la fiabilité, de la maintenabilité et du 

système de soutien de l'entité.  

La mesure de la disponibilité est spécifique à chaque armée

. » 

                                                      

4) Le cas des sous-marins est à distinguer des autres matériels de la marine car les 
critères de sécurité qui s’y attachent, du fait de leur condition de navigation et de leurs 
modalités de propulsion, ont conduit à un rapprochement de leurs procédures de 
maintenance de celles des aéronefs. 

background image

22 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

 

Ainsi, même si un matériel est réputé disponible lorsqu’il est en 

mesure de remplir les missions pour lesquelles il a été conçu, se pose de 
toute façon la question de la définition précise des missions qui lui sont 
dévolues. Or la complexité et le coût des matériels militaires interdisent 
de réaliser des matériels mono-missions. A titre d’exemple, un avion de 
chasse de type 

Mirage 2000 N

, dont la mission première est d’emporter 

l’armement nucléaire air-sol moyenne portée (ASMP), a été aussi conçu 
pour accomplir, le cas échéant, des missions d’appui feu tactique avec des 
armements conventionnels ; il est par ailleurs doté d’une capacité de 
délivrance de divers types d’armement (missiles, bombes, etc). Dès lors, 
la disponibilité technique d’un tel avion peut être évaluée sur une échelle 
graduée qui s’étend d’un niveau zéro (aucune capacité à délivrer un 
armement) à un niveau 100 (possibilité de remplir toutes les missions 
primaires et secondaires). 

Jusqu’au début des années 2000, rechercher une définition précise 

et commune aux armées de la disponibilité de leurs matériels n’était pas 
une vraie priorité. Avec la découverte de sa dégradation, la connaissance 
de l’état de disponibilité (ou d’indisponibilité) des matériels est devenue 
un paramètre prioritaire pour l’état-major des armées. Depuis 2003, les 
éléments d’information concernant notamment la disponibilité des 
matériels prennent la forme d’un tableau de bord trimestriel dont la 
réalisation repose sur une définition désormais commune des divers 
éléments composant la fonction de maintien en condition opérationnelle. 
La notion même d’indisponibilité a fait l’objet à cette occasion de travaux 
permettant d’en affiner la définition. 

background image

L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 23 

 

 

 

II  –  La dégradation de la disponibilité des 

principaux matériels 

Quels que soient les modes d’évaluation et les indicateurs utilisés, 

la dégradation de la disponibilité des matériels de la défense sur la 
période couverte par la dernière loi de programmation militaire est un fait 
avéré. Dans les développements de ce rapport, la Cour s’est référée aux 
taux de disponibilité calculé par le ministère de la défense. 

Les armées ont su répondre aux besoins des nombreuses opérations 

extérieures. Mais, en contrepartie, on a constaté une réduction des 
moyens consacrés aux matériels restant sur le territoire dont les causes 
sont à la fois communes aux armées et spécifiques à chacune d’entre 
elles. 

A  –  Le constat 

1  –  Les matériels de l’armée de terre 

Les objectifs globaux de disponibilité que les armées s’étaient 

fixés, soit 80% pour les matériels terrestres, 70% pour les matériels 
aériens et 75% pour les matériels navigants, n’ont été que rarement 
atteints au cours de la période examinée. 

Tableau n° 4 : 

Disponibilité des véhicules blindés (1997-2000) 

(en %) 

 

1997 1998 1999 2000 

VAB 

82 84 83 72 

ERC 

90  83 77 60 61 

AMX 

10 

RC 

84 74 68 57 

AMX 

30 

B2 

78 81 70 65 

(Source : Etat-major de l’armée de terre) 

Les conséquences pratiques de cette situation ne sont pas faciles à 

déterminer. Il n’est pas facile de répondre à cette question. Les opérations 

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24 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

extérieures ont été nombreuses pendant cette période, mais heureusement 
elles ont été de volume limité.  L’armée de terre a ainsi pu remplir ses 
missions avec un matériel suffisant.  

Les activités d’entraînement ont néanmoins été réduites au 

minimum. Ainsi, en 2000, l’armée de terre n’a effectué que 81 jours de 
sortie sur le terrain contre plus de 110 pour l’armée britannique. 

En outre, les défaillances constatées en matière de maintien en 

condition opérationnelle, sont venues s’ajouter aux autres difficultés liées 
à la « refondation de l’armée de terre ». 

2  –  Les bâtiments de la marine 

La faible disponibilité s’est traduite par des potentiels de 

déploiement faibles, des retards lors des sorties de périodes d’entretien ou 
dans l’approvisionnement des pièces, des insatisfactions des utilisateurs 
de ces matériels. L’association de ces facteurs a eu des effets qui ont 
encore aggravé le phénomène. 

Si l’on prend en compte l’aptitude au déploiement des bâtiments et 

non la disponibilité de l’ensemble de leurs équipements, la dégradation 
apparaît particulièrement sensible entre 1997 et 2000. Pour certains types 
de bateaux, le taux de disponibilité diminue d’un tiers sur la période 
(sous-marins nucléaires d’attaque notamment). 

Tableau n° 5 : 

Disponibilité des matériels de la marine entre 1997 et 2000 

 

1997 1998 1999 2000 

TCD

5

 

85,1 % 

94,2 % 

50,0 % 

37,8 % 

Frégates antiaériennes 

78,9 % 

47,6 % 

34,1 % 

53,0 % 

Frégates anti-sous-marines 

74,1 % 

81,8 % 

64,2 % 

56,3 % 

Frégates Lafayette 

87,2 % 

89,1 % 

57,8 % 

68,8 % 

SNA

6

 

69,9 % 

68,9 % 

49,0 % 

42,7 % 

(Source : ministère de la défense) 

Cette évolution a été d’autant plus inquiétante qu’elle a porté sur 

une flotte en nette réduction quantitative. Le volume de la flotte, 
d’environ 110 bateaux en 1990, est descendu à 82 unités en 2000 (dont 66 

                                                      

5) Bâtiment de transport de chalands de débarquement. 
6) Sous-marin nucléaire d’attaque. 

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 25 

 

 

pour la flotte de combat)

7

. Comme la réduction a porté sur les matériels 

les plus anciens, on aurait dû constater une amélioration de la 
disponibilité d’ensemble de cette flotte, allégée des matériels les plus 
vétustes. Cela n’a pas été le cas. 

Le nombre moyen des jours de mer effectivement réalisé se situait, 

en 2000, à 85 jours, pour un objectif de 110 pour la flotte sous-marine, et 
à 92 jours pour la flotte de surface pour un objectif de 100 jours. 

Les effets de ce faible taux de disponibilité ne se sont pas fait 

sentir de manière trop forte à cette époque, dans la mesure où il a 
correspondu à une période de grande mutation de la marine avec la 
diminution rapide du format de la flotte et la suspension du service 
national. 

3  –  Les matériels aériens 

La flotte de l'armée de l'air a été, elle aussi, l'objet d'une grave crise 

de disponibilité à la fin des années 1990. 

Cette crise s'est traduite par une très sensible dégradation du taux 

moyen de disponibilité des appareils de l'armée de l’air française à partir 
de 1998

8

 : il a baissé de plus de 10 points entre 1996 et 2001, passant de 

77 % en 1996 à 66 % en 1998, puis en se stabilisant autour de 67 % en 
2001

9

.  

Cette forte dégradation est encore plus sensible pour les matériels 

majeurs de l'armée de l'air, c'est à dire les principales flottes de combat, 
de transport et d'avions-école. 

La disponibilité globale de ces matériels majeurs, déjà faible, a, en 

effet, chuté de 14 points entre 1997 et 2001, année la plus critique, 
passant ainsi de 70 % à 56,4 %. 

                                                      

7) Sur la même période, le tonnage de la flotte passe de 300 000 à 250 000 tonnes. 
8) L'indicateur de disponibilité globale de la flotte est un indicateur de l’efficacité des 
services d’entretien mais ne permet pas d’apprécier le maintien de la capacité 
opérationnelle de chacune des flottes. Il est donc plus pertinent de suivre des 
indicateurs par type de flottes (combat, transport, écoles, etc..) et, mieux encore, par 
type d’appareils. 

9) Source EMAA: contribution au rapport d'information sur l'entretien des matériels 
des armées présenté par M. Meyer, député - août 2002.  
 

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26 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

Tableau n° 6 : 

Disponibilité globale des matériels aériens majeurs de l'armée de l'air 

(1997-2001) 

(en %) 

1997 1998 1999 2000 2001 

70,01 64,48 65,82 60,73 56,40 

(Source : état-major de l’armée de l’air) 

De même, l'indisponibilité logistique a dépassé 18 % en 2000 et le 

taux d'indisponibilité technique était supérieur à 27 % fin 2000. 

Par ailleurs, cette chute de disponibilité a entraîné une diminution 

importante de l’activité aérienne et, par voie de conséquence, de 
l’entraînement des pilotes. Cette baisse continuelle de l’activité aérienne a 
été observée au cours des années couvertes par la loi de programmation 
qui, du fait de l’effet de latence propre aux commandes à flux, s’est 
accentuée jusqu’en 2002. Au cours de cette année, le nombre d’heures de 
vol total réalisé par l’armée de l’air a chuté de 15 % par rapport à 1997 et 
l’activité des pilotes de chasse a été réduite de près de 10 %, celle des 
pilotes de transport de 20 %. 

B  –  Les causes de la dégradation 

Les unes sont communes aux trois armées, les autres résultent de 

problèmes structurels propres à l’organisation des chaînes de maintenance 
ou à la place des différents acteurs dans le processus. 

1  –  Les causes communes aux trois armées 

L’âge des matériels en service dans chaque armée est à l’origine 

des difficultés importantes de certains parcs (exemple des 

Gazelle

 et des 

AMX 10 P

, ou des réacteurs de 

Mirage 2000

). Mais d’autres facteurs ont 

joué, compliquant le maintien en condition opérationnelle des matériels. 

Au premier chef, il importe de noter que le rythme des opérations 

extérieures au cours de la décennie 1990-2000 a été un facteur important 
de vieillissement des matériels. Depuis la première guerre du Golfe, une 
succession ininterrompue d’opérations a mobilisé des dispositifs 
importants (ex-Yougoslavie, Rwanda, Congo-Brazaville, Timor oriental, 
Afghanistan, etc.). Ces opérations, menées dans des conditions 
climatiques variées, ont largement sollicité les matériels (notamment 
aériens, mais aussi les matériels terrestres légers), souvent employés dans 

background image

L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 27 

 

 

des conditions d’utilisation non prévues. De plus, non seulement la 
priorité d’affectation en rechanges et en opérations de maintenance a été 
donnée à ces matériels, mais au moment de la plus forte pénurie, les 
matériels non affectés aux opérations extérieures ont été ponctionnés des 
pièces nécessaires aux autres suivant une pratique connue dans les armées 
sous le vocable de « cannibalisation ». 

Au cours de cette période 1997-2000, la montée en puissance de la 

professionnalisation des armées, à la suite de la suspension de la 
conscription en 1996, a produit, elle aussi, des effets en matière de 
maintien en condition opérationnelle. S’agissant des personnels tout 
d’abord, la disparition d’appelés parfois très qualifiés, a été fortement 
ressentie dans les chaînes de maintenance (ateliers, établissements 
techniques) comme dans les chaînes logistiques, du fait de la réduction 
significative des personnels administratifs en charge des passations de 
marchés ou des magasiniers chargés des entrepôts de stockage. De plus, 
la professionnalisation s’étant, à juste titre, traduite par une recherche 
d’optimisation des chaînes et de modification de processus (par recours à 
l’externalisation de certaines tâches par exemple), des solutions de 
continuité ont pu être observées. 

Au plan financier, les dépenses de maintien en condition 

opérationnelle relevant du titre V « investissements de l’Etat » ont pâti 
d’une baisse significative de crédits. En effet, c’est d’ailleurs l’élément le 
plus déterminant, les crédits consacrés au maintien en condition 
opérationnelle des matériels des armées ont chuté. 

Tableau n° 7 : 

Montant des crédits d’investissement alloués et consommés au maintien 

en condition opérationnelle entre 1997 et 2000 

(en M€ constants 2003) 

 

1997 1998 1999 2000 

Crédits de paiement 

2 695 

2 546 

2 671 

2 497 

Consommation 

2 695 

2 546 

2 328 

2 319 

N.B. : y compris nucléaire et espace. 

(Source : ministère de la défense) 

Sur la période, la baisse qui a concerné les crédits de paiement, très 

significative en euros constants (-7,3 %), est encore plus sensible si l’on 
considère les dépenses (-14 %). 

Sous la pression simultanée de l’accroissement des dépenses du 

titre III (« 

Moyen des armées et des services 

»), résultant de 

l’augmentation mécanique du coût des rémunérations et des charges 

background image

28 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

sociales du ministère du fait de la professionnalisation des armées, et de 
celui des programmes d’armement constituant l’essentiel des dépenses du 
titre V, les crédits d’entretien programmé des matériels ont joué, comme 
les autres dépenses dites « à flux » du budget d’équipement, le rôle de 
variable d’ajustement.  

La faible attractivité de la fonction « entretien des matériels » a 

conduit à privilégier le financement des programmes d’armement au 
détriment de l’entretien des matériels en service. D’autre part, la 
coexistence au sein des armées de matériels de type classique et de 
matériels affectés à la dissuasion ou à propulsion nucléaire (

Charles de 

Gaulle, SNLE, SNA, Mirage 2000 N, missiles M51 et ASMP

), s’est 

traduite, pour des raisons de sécurité et de crédibilité de la France au plan 
international, par une affectation prioritaire des crédits d’entretien au 
profit de ces derniers.  

2  –  Les causes propres à chaque armée 

Des causes structurelles, propres à chaque armée, ont aussi joué un 

rôle important dans cette dégradation.  

a)  Les réorganisations successives de l’armée de terre 

L’organisation définie au moment de la refondation de l’armée de 

terre emportait de nombreux dysfonctionnements. Le « format

10

 »  du 

matériel avait sans doute été calculé au plus juste ; de plus, les 
réorganisations incessantes des chaînes de commandement et de services 
ont compliqué la tâche. 

L’armée de terre a, en effet, cherché à adapter son organisation aux 

nouvelles missions de projection qui lui étaient dorénavant assignées, en 
prenant en compte la réduction de son « format » d’ensemble résultant de 
la professionnalisation. Elle a donc cherché à découpler organiquement 
les fonctions à dominante opérationnelle de celles liées à la vie 
quotidienne des unités et du soutien, en concentrant chacune d’entre elles 
au lieu de les répartir comme dans l’organisation précédente. Ainsi, les 
fonctions de soutien furent confiées à des chaînes transversales (génie, 
commissariat, matériel) constituant avec les précédentes une organisation 
matricielle croisée. 

                                                      

10) Le format des armées au sens de la loi de programmation militaire recouvre 
l’ensemble des moyens permettant à l’armée de remplir ses missions, tant au plan des 
effectifs qu’au plan des matériels opérationnels servis et des structures de soutien et 
de commandement associées. 

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 29 

 

 

Par ailleurs, le maintien de l’échelon de commandement territorial 

que constituent les régions « terre » est un facteur de complication. 
Certes, elles sont en nombre un peu plus restreint qu’avant la 
réorganisation, mais elles disposent de pouvoirs plus étendus 
qu’auparavant, l’Etat-major de l’armée de terre (EMAT) ayant vu en 
même temps ses prérogatives limitées à la conception et au contrôle. 
L’organisation de l’armée de terre est ainsi à la fois fonctionnelle et 
géographique, ce qui introduit un facteur de complexité incontestable. En 
fait, ce pilotage croisé est non pas bidirectionnel, mais multidirectionnel. 
L’armée de terre considère qu’il n’est pas possible d’échapper à cette 
complexité, sa dispersion géographique imposant la solution retenue ; elle 
souligne que celle-ci lui a permis de faire face aux nombreuses opérations 
extérieures de ces dernières années, dans un contexte pourtant difficile de 
mise en place d’une armée professionnalisée.  

b)  Le désengagement progressif de la DCN  

Si la Cour avait précédemment pointé les dysfonctionnements de la 

DCN dans ses fonctions de construction navale

11

, un constat similaire 

pouvait être établi quant à son rôle dans l’entretien des matériels de la 
flotte. 

Lorsque la nécessité de repenser l’organisation de la maintenance 

dans la marine s’est imposée, dans la deuxième partie de la décennie 
1990, le service des programmes navals (SPN) de la DGA assurait tant le 
suivi des programmes d’armement nouveaux que celui de l’entretien des 
bateaux. Au plan local, la DCN réalisait les opérations industrielles de 
construction comme le suivi de l’entretien des matériels navals. 

La DGA dans son ensemble s’était relativement désintéressée de 

l’entretien des matériels de la marine. Cela se traduisait par la faible 
présence des ingénieurs de l’armement dans les structures de suivi de 
l’entretien. Au plan local, l’essentiel de l’énergie de la DCN était 
consacré à la construction neuve. Dans la pratique, les trois volets de 
l’entretien des matériels étaient touchés par cette désaffection. Le suivi de 
la configuration technique des bateaux n’étant plus effectué correctement, 
l’approvisionnement des rechanges était insuffisamment assuré, 
occasionnant des retards dans le ravitaillement des bateaux. Le sous-
encadrement des équipes  intervenant à bord des bateaux a conduit les 
commandants à affecter aux opérations de maintenance des membres de 
leurs équipages pour pallier le déficit d’encadrement par les équipes de la 
DCN. Ces pratiques se sont instaurées progressivement, ce que rendait 

                                                      

11) Cf. le rapport public particulier : « les industries d’armement de l’Etat ». 

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30 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

possible l’étroite imbrication des travaux relevant de l’équipage ou des 
moyens de la marine avec ceux incombant à l’acteur industriel. 

A Toulon, le délabrement des infrastructures dédiées aux 

pyrotechnies est révélateur du manque d’intérêt de la DCN pour cette 
fonction. Les mêmes constats peuvent être dressés pour l’entretien des 
installations portuaires qui relevaient de sa compétence (grues, portes de 
bassins…) 

A ces difficultés communes à l’ensemble des structures de la DCN, 

s’ajoutait le cas particulier de l’établissement des constructions navales de 
Toulon. La problématique générale de la DCN y a pris un caractère 
exacerbé du fait d’une situation locale extrêmement dégradée. Ainsi, à 
titre d’exemple, les insuffisances dans le suivi des rechanges ont pris une 
ampleur considérable, comme l’a montré le récolement des inventaires 
réalisé lors du transfert de cette fonction à la marine. Les écarts 
d’inventaires et le volume des pièces en stock frappées d’obsolescence 
justifient le terme employé par certains rapports d’inspections internes au 
ministère de la défense qui stigmatisaient la « déshérence » de la fonction 
d’entretien des matériels de la marine à Toulon. 

A cette situation s’est ajouté l’effet d’instructions judiciaires dont 

l’impact a été déterminant sur la fonction des achats. Ainsi l’année 2001 a 
été pratiquement une année « blanche » en termes de passation de 
marchés d’approvisionnement de rechanges. 

A partir de 2000, enfin, l’évolution du régime juridique de la DCN, 

transformée en service à compétence nationale le 12 avril, puis l’annonce 
de son changement de statut, la conduisant à quitter à terme le secteur 
public, ont eu un effet très négatif sur l’attitude des personnels, relevée 
par l’inspection générale des armées début 2002 qui évoque pudiquement 
« 

l’enthousiasme qui…a paru localement émoussé

 ». 

c)  Les handicaps  de l’armée de l’air  

La dispersion au sein de chaque armée des aéronefs a entraîné  une 

dispersion similaire de "l'exploitation des faits techniques" (c'est à dire 
l'analyse de l'origine et de l'occurrence des avaries ou des altérations des 
matériels), qui a réduit les capacités de maintenance préventive de 
l’armée de l’air.  

La pénurie de pièces était plutôt subie que maîtrisée et les unités 

faisaient face aux urgences en prélevant massivement les pièces et les 
équipements sur des avions en service, réduisant la disponibilité globale 
et mobilisant également des équipes d'entretien dans des tâches 
redondantes coûteuses (prélèvements puis rééquipements). En 1999, 

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 31 

 

 

celles-ci consacraient 2 

000 heures par mois pour assurer ces 

prélèvements. 

Enfin, les réorganisations intervenues au sein de la DGA à la fin 

des années 1990 ont aussi contribué à perturber l'efficacité globale de 
cette chaîne. 

Même si la question dépasse le cadre de la seule armée de l’air, 

pour s’étendre à l’ensemble des matériels aériens, on doit souligner que 
jusqu’en 2000 les flottes d'appareils des trois armées et de la gendarmerie 
étaient gérées séparément. Il en résultait une perte globale d'efficacité sur 
les travaux de maintenance. En outre les actions d’entraide entre armées 
sur la même flotte (prélèvements de pièces, fournitures de stocks, 
formation des personnels) étaient difficiles, voire inexistantes. Chaque 
armée dialoguait séparément avec la DGA sur ses programmes de 
maintenance et l'expression des besoins était éclatée entre armées. 
L'analyse des "faits techniques" n'était pas ou peu partagée, ce qui pouvait 
amener une armée à refaire le "chemin d'expérience" sur le même type de 
matériel et d'incident déjà réalisé par une autre armée. Ce cloisonnement 
a amplifié les effets négatifs, organisationnels, techniques et financiers, 
caractérisant les flottes de petite taille. 

Au plan économique, l’incidence du vieillissement des matériels a 

été particulièrement sensible pour l’armée de l’air. En effet, le coût de 
maintenance à l'heure de vol croît nettement avec l’âge de la flotte. 
L'armée de l'air estime que la charge facturée pour la maintenance des 

DC8

, très anciens, et des 

A 310

 est quatre fois supérieure à celle 

applicable à un appareil récent. Par ailleurs la sous-activité entraînée par 
l’indisponibilité représente des frais fixes non évalués mais sans doute 
considérables, puisque les effectifs et les moyens structurels ne sont pas 
réduits lors des baisses d’activité de l’armée de l’air ou des acteurs 
industriels. La Cour n’a pas pu en mesurer l’ampleur, en l’absence 
d’instruments comptables analytiques pertinents. 

Enfin, la diminution de crédits a entraîné un double effet 

préjudiciable à la qualité de la maintenance : dès 1994, la baisse des prix 
d'acquisition imposée aux industriels sur l'ensemble des matériels et des 
prestations a accru la durée de négociation des nouveaux contrats et des 
avenants aux contrats antérieurs. Certaines commandes ont été ainsi 
suspendues à plusieurs reprises entre 1996 et 1998. Cette situation de 
tension s'est traduite par un retard d'approvisionnement en pièces et un 
décalage des calendriers de reconstitution des potentiels.  

L’effet sur la flotte aérienne s’est fait progressivement sentir. La 

baisse des moyens affectés au maintien en condition opérationnelle a été 
considérée pendant une certaine période comme "indolore", parce que les 

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32 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

effets négatifs initiaux étaient limités. En se prolongeant, le manque de 
pièces a entraîné des conséquences techniques : les prélèvements sur les 
appareils immobilisés se sont multipliés, ce qui a engendré un temps 
d'immobilisation plus long des avions concernés ; le caractère prioritaire 
des approvisionnements a été établi non en fonction de critères techniques 
(analyses coordonnées du vieillissement et des faits techniques), mais en 
fonction de l'urgence à régler les pénuries apparues. Cette insuffisance de 
moyens a donc été très largement à l'origine des phénomènes de 
désorganisation constatés au long de cette période. 

3  –  Une perception tardive de la situation 

La perception de cette dégradation de l’entretien des 

matériels s’est faite de manière tardive. 

Les cycles d’entretien des matériels sont des cycles longs se 

déroulant sur plusieurs années. En effet, au-delà de l’entretien courant, les 
opérations de niveau technique 3 (grandes visites en usine, 
indisponibilités périodiques pour entretien et réparation

12

 des bâtiments 

de la marine) sont espacées dans le temps et de durée longue. Ainsi le 
décalage de quelques mois d’une entrée en visite et la prolongation de 
quelques semaines de la sortie de visite n’entraîne des dérives temporelles 
significatives (par effet domino) qu’après deux ou trois ans de ce 
processus. 

Par ailleurs, la désorganisation progressive des chaînes 

d’approvisionnement logistique, pour des raisons structurelles (comme 
dans le cas de la DCN Toulon) et financières ne produit ses effets 
qu’après plusieurs mois, voire plus encore, dans la mesure où les cycles 
d’approvisionnement en pièces de rechange s’étendent sur deux ans en 
moyenne. Dans l’intervalle, les ateliers peuvent continuer à opérer en 
prélevant les pièces sur les stocks ou sur d’autres matériels, masquant 
assez longtemps la carence d’approvisionnement qui s’installe. 

Pour l'état-major de l’armée de l’air, par exemple, l'effet de la 

baisse des crédits de maintenance a commencé à se faire sentir avec un 
décalage de 24 mois. Ainsi, les réductions de crédits opérées entre 1995 
et 1997 se sont traduites en 1998 : sur 220 

Mirage

 en service, 35 appareils 

étaient immobilisés pour attente de pièces. 

Pour l’ensemble des armées, certes de manière moins visible mais 

tout aussi grave à moyen terme, la désorganisation des chaînes 
logistiques, les carences d’inventaires, la perte d’expérience par manque 
de suivi des faits techniques ou la disparition de la connaissance du 

                                                      

12) IPER. 

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L

A DEGRADATION DE LA DISPONIBILITE DES MATERIELS MILITAIRES

 33 

 

 

matériel du fait de l’absence de tenue à jour des configurations techniques 
a produit des effets très négatifs. Ils ont été amplifiés par le départ des 
personnels techniques qui conservaient une connaissance empirique du 
système et des matériels atteints par la limite d’âge ou, comme cela a été 
le cas pour la marine et l’armée de terre, par les bouleversements de 
structures ayant entraîné des rotations importantes de personnels. 

En outre, le morcellement des organisations n’a pas permis la 

constitution de systèmes d’information normalisés favorisant une 
remontée rapide des données. 

Chaque armée disposait de ses propres systèmes d’information, 

hétérogènes et ne permettant pas le rapprochement des données portant 
sur un même type de matériel en service. 

Au plan de l’approvisionnement en rechanges, la même 

hétérogénéité des chaînes peut être observée. De plus, le suivi des stocks 
et des marchés demeurait un paramètre technique détenu au niveau des 
services logistiques et n’apparaissait pas encore comme une priorité 
justifiant la mise en place de tableaux de bord au niveau ministériel. 

Dès lors, la dégradation rapide de la disponibilité des matériels 

militaires n’a pas été officiellement reconnue avant l’année 2001 où 
plusieurs rapports sont venus éclairer le Parlement

13

, notamment à la 

suite des renseignements préoccupants recueillis par le rapporteur du 
projet de loi de finances initiale pour 2001

14

. Dès l’année 1998, le chef 

d’état-major de l’armée de l’air avait souligné l’état préoccupant de 
l’entretien de ses matériels, précisant toutefois qu’il était tout autant dû à 
des problèmes d’organisation qu’à une insuffisance de crédits. La 
question de l’insuffisance des crédits avait, quant à elle, été soulignée à 
l’occasion de la discussion préparatoire à l’élaboration du budget de 1999 
ainsi que lors de la préparation du budget de 2000. 

                                                      

13) 

Rapport AN n°3302-2001 de MM. Charles Cova et Jean-Noël Kerdraon 

« L’entretien de la flotte : défis et perspectives ». 
Rapport AN n°328-2002 de M. Gilbert Meyer « L’entretien des matériels : un sursaut 
nécessaire ». 

14) Rapport de M. François Trucy, sénateur, commission des finances du Sénat (n°92 
tome III, p.5 et suiv.). 

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34 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

 

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Chapitre II 

 

Les mesures visant à restaurer la 

disponibilité des matériels 

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36 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

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L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 37 

 

 

 

I  –  L’effort financier  

La baisse continue des dotations de la fonction de maintien en 

condition opérationnelle des matériels depuis le début de l’entrée en 
vigueur de la loi de programmation militaire a été interrompue en 2002, 
notamment à la suite des rapports parlementaires relatifs à la disponibilité 
des matériels, cédant la place à une hausse significative des moyens mis à 
la disposition des armées.  

1  –  Les crédits votés 

Analysée en catégorie de coût

15

 relevant de l’entretien programmé 

des matériels, l’évolution de la période 1999 à 2004 fait apparaître la 
chute des crédits jusqu’en 2001 et leur croissance en LFI à compter de 
2002. 

Tableau n° 8 :  

Montant des catégories de coûts « EPM » du titre V  

en loi de finances initiale 

(en M€ courants) 

 

1999 2000 2001 2002 2003 2004 

Classique 

1 651,4 

1 612,7 

1 599,5 

1 731,2 

1 914,0 

2 127,0 

Espace 63,6 33,5 32,2 22,8 26,0 11,1 

Nucléaire 787,8 716,0 637,5 648,6 669,4 761,4 

Total 

2 502,8 

2 362,2 

2 269,2 

2 402,6 

2 609,4 

2 899,5 

(Source : Direction des affaires financières du ministère de la défense) 

L’augmentation des crédits votés au titre V a été de 6 % en 2002. 

Cependant cet accroissement correspond, à hauteur de 60 M€ à une 
poursuite de la diminution des crédits d’entretien programmé du matériel   
inscrits au titre III, au chapitre 34-20, évolution à laquelle le ministère 
s’était engagé pour rétablir la régularité de la répartition des crédits 

                                                      

15) La notion de catégorie de coût donne une vue globale de l’évolution des crédits 
associés à une opération budgétaire d’investissement. Le périmètre n’étant pas le 
même que celui des crédits budgétaires, les totaux par année ne sont pas 
superposables à ceux du tableau n°9. 

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38 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

affectés au maintien en condition opérationnelle des matériels. En 2003, 
l’effort financier s’est poursuivi sur le titre V, bien qu’atténué de manière 
marginale par l’achèvement de la suppression des crédits de 
fonctionnement affectés à l’entretien des matériels.  

2  –  Les dépenses  

Si l’exécution des dépenses en matière d’entretien programmé des 

matériels avait été marquée jusqu’en 2002 par des annulations et des 
transferts minorant les crédits disponibles, la tendance s’est inversée dès 
la mi-2002 où une loi de finances rectificative a abondé les crédits 
disponibles de 100 M€. En 2003, 211,7 M€ ont été également apportés 
par la loi de finances rectificative afin d’obtenir un rétablissement rapide 
de la disponibilité des matériels. 

En outre, les modifications des crédits votés pour l’entretien 

programmé des matériels ont été plus favorables ces dernières années, les 
transferts, virements et rattachements de fonds de concours ayant permis 
une augmentation importante des crédits disponibles. 

Tableau n° 9 : 

Dépenses d’entretien  programmé des matériels classiques du titre V 

(M€) 

Chapitre 55-21 

2000 

2001 

2002 

2003 

LFI 

1 596,15 

1 579,77 

1 683,78 

1 880,04 

Disponible 

1 733,83 

1 677,97 

1 940,03 

2 266,76 

Exécuté 

1 647,46 

1 524,12 

1 835,38 

1 754,57 

(Source : Cour des comptes) 

La situation est pourtant moins satisfaisante lorsque l’on considère 

les dépenses réellement exécutées. En effet, si le volume des crédits 
disponibles du chapitre 55-21 « entretien programmé des matériels » a crû 
de près de 35 % entre 2001 et 2003, les dépenses réelles n’ont augmenté 
que de 15 %. Les raisons en sont multiples, en partie imputables à la 
réorganisation du système de passation des marchés d’entretien ou de 
commandes de rechanges. 

En 2003, l’indisponibilité des crédits imposée par la régulation 

budgétaire (la mise en réserve ayant été levée tard dans l’année) et 
l’ouverture tardive des crédits par la loi de finances rectificative ont eu un 

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L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 39 

 

 

impact important sur la consommation des crédits, limitant, de fait, l’effet 
recherché sur le redressement de la disponibilité des matériels. 

II  –  La réorganisation des structures  

La crise de disponibilité a conduit les autorités du ministère de la 

défense, à partir du diagnostic de ses causes structurelles, à engager des 
réformes mettant fin à la dispersion des responsabilités, au manque de 
dialogue entre les différents acteurs concernés, au cloisonnement entre les 
armées et à l'insuffisante prise en compte des besoins des utilisateurs. Les 
solutions ont été différentes pour chacune des trois armées. 

A  –  Une structure interarmées : la SIMMAD 

Pour tout ce qui concerne les matériels aériens, le principe arrêté 

en 1999 fut celui d'un double regroupement des responsabilités et d'une 
clarification des rôles de maîtrise d'ouvrage et de maîtrise d'œuvre au sein 
de la chaîne du maintien en condition opérationnelle. 

Un regroupement "vertical" des responsabilités de l'ensemble du 

processus au sein d’une même structure, allant de la passation des 
contrats à la livraison des matériels aux armées, ainsi qu’un regroupement 
"transversal" du maintien en condition opérationnelle de l'ensemble des 
matériels aéronautiques des trois armées et de la gendarmerie au sein de 
cette nouvelle entité : la structure intégrée du maintien en condition 
opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense 
(SIMMAD). Ce nouvel organisme devait assurer la maîtrise d'ouvrage et 
confier à d'autres entités dépendant des armées la maîtrise d'œuvre de la 
réalisation de certaines fonctions d'approvisionnement et de maintenance. 

Il s'agissait, d'une part, "d'optimiser la disponibilité des aéronefs et 

des matériels associés, à l'aide d'une réactivité accrue des fonctions 
d'exécution

16

," et, d'autre part, " de maîtriser le coût de possession des 

matériels". 

La structure envisagée a été créée par décret du 4 décembre 2000. 

                                                      

16) Relevé de décisions du ministre de la défense du 16 juillet 1999 

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40 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

1  –  La SIMMAD : une structure novatrice au sein des armées 

La création de la SIMMAD constitue à plusieurs égards une 

véritable novation au sein des armées, novation qui a entraîné une très 
profonde réorganisation de la fonction. 

Tout d’abord, il s’agit d’un organisme à vocation interarmées 

regroupant les fonctions relatives au maintien en condition opérationnelle 
de tous les avions et hélicoptères  auparavant dispersées au sein des trois 
armées, de la gendarmerie et de la DGA. Le pilotage de la SIMMAD 
repose sur une forte volonté d'intégration inter-armées et sur l'utilisation 
des compétences particulières de l'armée de l'air. Elle relève du chef 
d’état-major de l’armée de l’air mais, au plan opérationnel, elle repose sur 
la collégialité interarmées. Ainsi, c’est un comité directeur 

composé du 

délégué général pour l'armement, des chefs d'état-major de l'armée de 
terre, de la marine, de l'armée de l'air et du directeur général de la 
gendarmerie nationale qui

 propose au ministre la politique générale de 

maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du 
ministère de la défense. Il organise aussi la mise en œuvre de cette 
fonction. 

En effet, la SIMMAD se voit déléguer la responsabilité intégrale 

du maintien en condition opérationnelle. Elle assume l'intégralité de la 
responsabilité de la maintenance des matériels aéronautiques en fonction 
des objectifs fixés par les armées et des moyens attribués. Elle est 
notamment responsable de l'expression des besoins et de 
l’approvisionnement en rechanges aéronautiques. Elle est ainsi 
compétente, depuis le 1

er

 janvier 2003, pour la passation de l'ensemble 

des marchés d'acquisition de prestations et de matériels de maintien en 
condition opérationnelle comme du suivi des contrats, de la gestion des 
crédits qui lui sont alloués, de la participation à l'élaboration des marchés 
d'acquisition des matériels d'armement comportant des prestations et des 
matériels de maintien en condition opérationnelle. Pour les matériels 
nouveaux, la SIMMAD participe aussi 

"au sein des équipes de 

programme à la définition et à la mise en œuvre du maintien en condition 
opérationnelle. Elle exécute le processus d'approvisionnement nécessaire 
à leur mise en service."

 

Pour qu’elle puisse assumer cette responsabilité, la SIMMAD a été 

organisée suivant un schéma matriciel. La gestion est structurée par 
flotte : l'ensemble des matériels aéronautiques est réparti au sein de 
12 catégories de flottes comportant les différents types d'aéronefs et de 
matériels associés. Le département des flottes qui regroupe les 12 flottes 
est assisté par deux services fonctionnels transversaux (regroupant les 
fonctions techniques, logistiques, achats, finances). 

background image

L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 41 

 

 

Lors de son installation, en septembre 2000, sur le site de 

Brétigny-sur-Orge, la SIMMAD disposait d'un effectif provisoire de 
244 

emplois. Conformément aux prévisions, elle employait 

571 

personnes en mars 2003 et ses effectifs comptaient près de 

900 personnes à fin septembre 2003. 

2  –  Une réelle clarification des responsabilités 

Cette nouvelle organisation a renforcé l'efficacité du dispositif du 

fait de la double clarification des responsabilités qu’elle a permise. 

Tout d’abord, le regroupement des compétences et des processus 

de maîtrise d'ouvrage déléguée sous une même autorité a mis fin à la 
dichotomie existante entre l'expression des besoins et leur prise en 
compte. 

Cette réorganisation a également clarifié le rôle de chaque 

organisme dans la mise en œuvre du maintien en condition 
opérationnelle : la séparation est dorénavant nette entre la maîtrise 
d'ouvrage et la maîtrise d'œuvre et chacun des contributeurs doit atteindre 
des objectifs dont la réalisation relève de sa seule responsabilité. 

Une même clarification a aussi modifié les rapports de la DGA 

avec la SIMMAD, puisque celle-ci assure désormais la passation des 
marchés. Cette séparation des responsabilités crée, en revanche, une très 
grande exigence de coordination et de cohésion entre les deux directions 
pour éviter une perte de capacité de négociation avec les industriels. Ce 
dernier point est particulièrement crucial pour le succès de la nouvelle 
organisation. 

Particularité dans le système militaire, l'organisation collégiale du 

comité directeur de la SIMMAD semble plutôt appréciée par ses 
membres (notamment, par le chef d’état-major de l’armée de l’air qui 
joue un rôle très important dans son pilotage, compte tenu du poids de 
l'armée de l'air dans l'acquisition de matériels et de prestations auprès de 
la SIMMAD), les états-majors paraissant s’être appropriés la nouvelle 
structure comme une entité à leur service. 

Incontestablement, l'absence de responsable hiérarchique du 

comité directeur a obligé ses membres à rechercher des solutions 
communes, sans recourir systématiquement à l'arbitrage du ministre. En 
outre, la présence auprès du directeur d'officiers, adjoints, venant des 
différents organismes constitutifs de la SIMMAD renforce le caractère 
collégial de son fonctionnement. 

background image

42 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

Enfin, la répartition relativement équilibrée des contributions des 

armées aux effectifs de la SIMMAD a provoqué, selon son directeur, 
"

une forte adhésion de son personnel à la mission… La troisième 

dimension est puissamment fédératrice."

  

Cette formule de "GIE" interne au secteur de la défense crée ainsi 

une exigence de décisions collectives dont les effets devraient être 
bénéfiques à moyen terme tant techniquement qu'économiquement. 

Ce type de groupement de moyens devrait aussi entraîner des 

économies d’échelle. Pour l’instant, les transferts de moyens se sont 
réalisés dans le cadre d’un bilan à peu près nul pour l’armée de l’air et la 
marine, mais laissent subsister des doublons avec les structures de 
l’armée de terre. 

B  –  Une structure duale : le service de soutien de la 

flotte  

Sur recommandation conjointe du DGA et du chef d’état major de 

la marine, en date du 25 juin 1999, le ministre de la défense décidait la 
création du service de soutien de la flotte (SSF). 

Le nouveau service, dont les textes fondateurs

juin 2000, a été institué sous forme d’un service de la marine aux 
compétences recouvrant « 

la fixation, l’approbation et la mise en œuvre 

des règles générales de maintien en condition opérationnelle du matériel 
naval et des munitions en service

Les principes ayant présidé à l’élaboration de la structure sont les 

mêmes que ceux qui avaient sous-tendu la création de la SIMMAD. 

L’une des préoccupations auxquelles doit répondre le SSF est, pour 

les matériels navals, de constituer un interlocuteur unique en matière de 
maîtrise d’ouvrage du maintien en condition opérationnelle des matériels 
navals et de munitions en service. La compétence de la conception des 
matériels nouveaux (y compris les munitions) reste de la compétence du 
service des programmes navals (SPN) de la DGA. 

                                                      

17) Décret n°2000-585 du 28 juin 2000 fixant les attributions du service de soutien de 
la flotte 
Arrêté du 28 juin 2000 portant organisation du service de soutien de la flotte 
Arrêté du 28 juin 2000 portant organisation des sous-directions de la direction 
centrale du service de soutien de la flotte 

18) Décret n°2000-585 du 28 juin 2000 fixant les attributions du service de soutien de 
la flotte (art.2). 

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L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 43 

 

 

1  –  Un rôle de coordination 

La réglementation confie au SSF un rôle de coordination et de 

pilotage des opérations d’entretien des matériels de la flotte. Il s’agit d’un 
service « qui fait faire » mais ne fait pas lui-même. Cette approche est 
centrale pour appréhender la place du SSF dans l’architecture de 
l’entretien des matériels puisqu’il doit se créer une place originale entre 
l’état major de la marine, qui reste le donneur d’ordre, et les acteurs de la 
maintenance, qu’il s’agisse de l’industriel (éventuellement les industriels) 
ou des moyens propres de la marine (ateliers militaires de la flotte, 
équipages). 

Le décret du 28 juin 2000

19

 confirme clairement la compétence de 

la DGA sur tous les matériels nouveaux, mais confie au SSF le rôle de 
prise en compte 

ab initio

 par les équipes de programme intégrées (EDPI), 

des préoccupations liées au maintien en condition opérationnelle des 
matériels. A ce titre, le SSF doit veiller à ce que les matériels nouveaux 
prennent en compte l’objectif de « maintenabilité » par les équipages eux 
mêmes, notamment à bord (la critique de la difficulté à maintenir les 
matériels à bord étant récurrente dans le discours des marins). Il s’assure 
que les équipes de développement de programme intégrées (EDPI) ne 
sacrifient pas l’approvisionnement des lots initiaux de rechanges à 
l’occasion des passations de contrats. Enfin, sa participation permet de 
garantir que la marine disposera bien des éléments nécessaires 
(documentation technique notamment) pour contractualiser les tâches 
correspondantes et évaluer le coût futur du maintien des matériels 
commandés en condition opérationnelle.  

A la différence de la SIMMAD, le SSF, service de la marine, n’est 

pas un organisme à vocation interarmées. Cependant, ses personnels 
proviennent tout autant de la DGA que de la marine. L’arrêté portant 
organisation du SSF, en date du 28 juin 2000, précise même, en son 
article 2, que le directeur du SSF et son adjoint sont l’un de la marine, 
l’autre de la DGA. 

2  –  Une organisation interne adaptée 

L’organisation interne du SSF regroupe, quant à elle, au sein 

d’équipes de travail intégrées et par types de matériels, des spécialistes 
des différents métiers devant intervenir dans le processus de maintenance. 

                                                      

19) Pour les matériels nouveaux, le SSF « 

participe à la définition et à la mise en 

place du maintien en condition opérationnelle 

». (art.3) 

background image

44 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

A la direction centrale du service de soutien de la flotte, aux côtés 

de sous-directions fonctionnelles (sous-directions plans et méthodes, 
technique, logistique, administration générale et bureau des munitions) 
œuvrent des équipes dédiées (surnommées « pirogues ») ayant chacune 
en charge une catégorie de bâtiments (de surface, sous-marins, systèmes 
d’information, bâtiments non en service). La même organisation se 
retrouve à l’échelon local, où des équipes responsables de bâtiments 
(ERB) sont dédiées au suivi « personnalisé » des différents types de 
bateaux (SNLE, SNA, avisos, frégates, etc.) 

Indépendamment du fait que les structures matricielles sont 

fréquemment adoptées dans les organismes au sein desquelles la DGA est 
partie prenante, cette organisation particulière des compétences est, par 
certains aspects, comparable à celle adoptée dans la marine marchande où 
à chaque bateau est attaché un « 

ship manager

 » chargé de son suivi 

individualisé.  

Suivant les responsables de la marine, cette organisation est 

particulièrement adaptée à l’objectif de meilleure connaissance de l’état et 
de l’entretien des bateaux. L’organisation de la maintenance des bateaux 
civils commerciaux a, d’ailleurs, adopté un dispositif comparable. 

3  –  Des compétences étendues 

A l’inverse des autres armées, la marine ne dispose pas d’un 

service du matériel. 

Ainsi la modification de statut de la DCN a conduit la marine et la 

DGA à s’interroger sur le devenir d’un certain nombre de fonctions qui, 
manifestement, ne pouvaient plus relever d’un secteur industriel dont les 
préoccupations seraient différentes de celles de l’Etat. 

La première question qu’a dû trancher la marine a été celle du sort 

à faire aux rechanges. Il en existe deux sortes qui n’étaient pas 
distinguées avant le changement de statut de la DCN. 

Le stock industriel, tout d’abord, permet à l’industriel de détenir 

(ou d’approvisionner) les pièces nécessaires à l’accomplissement de ses 
travaux. Ce stock relève pleinement de sa compétence industrielle et doit 
être intégralement géré par lui. 

Le stock courant dit « militaire », au contraire, permet à la marine 

de tenir à la disposition de ses équipages les pièces de rechange ou les 
sous-ensembles nécessaires à l’accomplissement des travaux relevant de 
sa compétence. Il peut être à terre dans un entrepôt ou prépositionné sur 
les bateaux, directement à la disposition des équipages, ou encore dans un 

background image

L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 45 

 

 

bateau dédié au soutien (

La Loire, le Jules Verne

, etc). En principe, ces 

stocks sont destinés à la maintenance de niveau intermédiaire (NTI 1 et 
2), mais en réalité la distinction n’est pas aussi claire et il arrive que, 
suivant les besoins, des travaux d’entretien de niveau 3 soient accomplis 
avec les moyens « industriels » de la marine (bâtiments de soutien et 
ateliers militaires de la flotte) ou avec le concours des équipages dans un 
atelier industriel étranger (en escale par exemple). Dans ce cas, et à cause 
de l’ancienneté des bâtiments, il est parfois nécessaire de disposer 
directement des pièces nécessaires à l’entretien de niveau 3. 

Compte tenu de la dégradation de la fonction « rechanges » 

remplie par la DCN, il fut décidé de transférer à la marine l’ensemble du 
stock dit « militaire ». Ce transfert comportait trois types de difficultés. 
Tout d’abord, les deux stocks étant confondus chez l’industriel, un travail 
de définition a dû être conduit. Dans un deuxième temps, un 
rapprochement des inventaires respectifs de la marine et de la DCN a dû 
être effectué dans des conditions difficiles, liées notamment à la faible 
qualité des outils informatiques dont disposait la DCN

20

 et, conséquence 

logique du point précédent, aux nombreux écarts entre les chiffres 
théoriques et les stocks physiques comptés. Enfin, la mutation dont le 
principe avait été arrêté dès les textes fondateurs du SSF en juin 2000 a 
dû être réalisée dans l’urgence, du fait de l’annonce du changement de 
statut de la DCN qui imposait que l’ensemble du transfert soit accompli 
avant l’échéance de ce changement soit juin 2003

21

En l’absence déjà signalée de service du matériel dans la marine, la 

responsabilité de la fonction rechanges de la marine a été fort 
logiquement confiée au SSF qui assure la définition de la politique de 
gestion, le ravitaillement, le magasinage et l’approvisionnement des 
bateaux. Par délégation, les deux dernières fonctions ont été confiées au 
service du commissariat de la marine

22

A ces attributions, qui s’éloignent de plus en plus du rôle initial de 

maîtrise d’ouvrage  dévolu à l’origine au SSF, se sont ajoutées d’autres 
fonctions marginales. Le SSF, défini initialement comme une structure 
chargée de la maîtrise d’ouvrage en matière de maintien en condition 
opérationnelle de la marine, est ainsi devenu, en peu de temps et du fait 
de l’évolution de statut de la DCN, la structure de rattachement de 
l’ensemble des fonctions que la marine a dû ou souhaité reprendre à son 

                                                      

20) Elément qui avait été signalé en son temps par le rapport public de la Cour sur les 
industries d’armement. 

21) Le changement de statut de DCN est intervenu au 1

er

 juin 2003. 

22) La problématique des rechanges exposée ci-avant peut-être appliquée 

mutatis 

mutandis

 aux munitions de la marine.  

background image

46 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

compte et qu’elle n’a pas su attribuer à un autre de ses services. Il en 
résulte une certaine altération de la vocation initiale du SSF.  

C  –  L’organisation retenue pour les matériels 

terrestres 

Après celles de la SIMMAD et du SSF en 2000, la création de la 

structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels 
terrestres de la défense (SIMMT) fut décidée à l’été 2001. C’est à cette 
date que furent signés l’arrêté ministériel créant un ‘‘état-major de 
montée en puissance’’ et une lettre de mission adressée à son chef, fixant 
à l’été 2002 la création de la SIMMT. 

La SIMMT devait être un organisme à vocation interarmées 

recevant ses directives d’un comité directeur comprenant les quatre chefs 
d’état-major, le DGA et les directeurs de la gendarmerie, du service des 
essences et du service de santé des armées. Les mêmes principes que ceux 
retenus pour la SIMMAD étaient adoptés : séparation de la maîtrise 
d’ouvrage et de la maîtrise d’oeuvre, prise en compte du maintien en 
condition opérationnelle en phase amont des programmes, vocation 
interarmées, organisation matricielle du travail des spécialistes au profit 
d’un responsable de chaque parc. 

En juin 2002, cette réforme était fortement engagée 

: les 

calendriers de changement de bureaux des personnels destinés à renforcer 
l’état-major de montée en puissance étaient même fixés. Toutefois, en 
juillet 2002, une réflexion sur l’opportunité de cette création était confiée 
au seul chef d’état-major de l’armée de terre qui a conclu à l’abandon du 
projet de SIMMT. Le 24 décembre 2002, il a été décidé de 

« surseoir 

définitivement au projet de SIMMT »

Parallèlement, l’armée de terre avait poursuivi la réflexion sur les 

voies et moyens d’une réorganisation de la maintenance de ses matériels 
susceptible de pallier les nombreux dysfonctionnement constatés jusque 
là. 

C’est dans ce contexte que fut décidée, le 7 février 2003, une 

nouvelle et profonde réorganisation de la maintenance de l’armée de 
terre. Elle s’est traduite, non par un regroupement organisationnel mais 
par une répartition des compétences entre les structures préexistantes de 
l’armée de terre, au profit exclusif des matériels terrestres de cette armée.  

Ces diverses mesures, tout en allant sans doute  dans le sens d’une 

efficacité accrue de la chaîne du matériel de l’armée de terre, confortent 
son autarcie, et ne concourent pas à la recherche d’une meilleure 

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L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 47 

 

 

coordination entre les trois armées, qui devrait être pourtant un objectif 
prioritaire compte tenu de l’augmentation du nombre d’opérations 
interarmées et de la limitation persistante des moyens budgétaires. 

III  –  Les résultats déjà obtenus 

La création des nouveaux organismes chargés de coordonner la 

maîtrise d’ouvrage du maintien en condition opérationnelle des matériels 
s’est opérée entre 1999 et 2000. Pour l’armée de terre, les réorganisations 
successives se sont enchaînées depuis 1999. Les crédits d’entretien 
programmé des matériels ont connu depuis 2002 une augmentation 
significative, de l’ordre de 20 % entre la LFI 2000 et la LFI 2004. Si la 
disponibilité des matériels reste assez médiocre, des indices 
d’amélioration sont d’ores et déjà perceptibles. 

A  –  Une disponibilité encore limitée 

1  –  Les matériels terrestres 

Si une légère amélioration peut être enregistrée concernant les 

chars de combat lourds (

AMX 30

 et 

Leclerc

) qui retrouvent, voire 

dépassent le taux de disponibilité enregistré en 2000, la situation reste 
dégradée pour les véhicules de l’avant blindé et se dégrade encore pour 
les chars de reconnaissance 

AMX 10 RC

Tableau n° 10 : 

Disponibilités des véhicules blindés (2000-2004) 

(en %) 

 

2000 2001 2002 2003 2004 

VAB 

72 76 72 73 68 

ERC 

90 

61 68 69 73 65 

AMX 

10 

RC 

57 46 61 52 46 

AMX 

30 

B2 

65 60 65 70 71 

Leclerc (tranches 3 à 5) 

S.O. 

35 

45 

52 

56 

Leclerc  (tranches 6 et 7) 

S.O. 

31 

55 

52 

56 

(Source : DCMAT) 

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48 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

2  –  Les matériels aériens 

La disponibilité globale des flottes était descendue au-dessous de 

60 % dans le courant de l'année 2000 pour l'armée de l'air et la marine et 
avait atteint, avec un taux de 56,4 % en 2001, le niveau de performance le 
plus faible enregistré ces dernières années. 

La disponibilité globale s'est nettement redressée depuis décembre 

2000 puisqu’elle a gagné 10,2 points. Pour des raisons conjoncturelles, 
elle s'est dégradée dans le courant de l'année 2003 (60,3 % en juillet 
contre près de 65 % en mai) et s’est finalement établie à près de 62 % en 
décembre 2003. 

Tableau n° 11 : 

Disponibilité globale de la flotte gérée par la SIMMAD (2000-2004) 

(en %) 

 

12/2000 12/2001 07/2002 12/2002 07/2003 12/2003 

Disponibilité 
globale 

51,7 56,5 56,8 58,3 60,3 61,9 

(Source: SIMMAD) 

Cette dégradation en cours d’année est liée pour partie à 

l'augmentation du nombre d'appareils en maintenance curative ou 
préventive dans les forces provoquée par des incidents techniques 
conjoncturels. En particulier, les flottes de 

Mirage 2000

 et d'hélicoptères 

ont été victimes d'une série de défaillances des moteurs, obligeant l'armée 
de l'air à procéder à des immobilisations et à des "démontages" 
préventifs, dans l'attente des réparations effectuées par l'industriel.  

Tableau n° 12 : 

Disponibilité des hélicoptères de l’armée de terre (2000-2004) 

(en %) 

 

2000 2001 2002 2003 2004 

Gazelle 

66,6 66,6 47,3 60,7 62,7 

Puma 

61,5 60,4 40,2 53,5 53,2 

Cougar 54 

62 

62,7 

58,5 

59,4 

(Source : DCMAT) 

background image

L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 49 

 

 

S’agissant des hélicoptères de l’armée de terre, la situation est 

dégradée depuis 2001 pour les 

Gazelle

 et les 

Cougar,

 mais s’avère 

préoccupante pour la flotte des 

Puma,

 dont seulement 53,5 % étaient 

disponibles fin décembre 2003. 

L'analyse de la disponibilité sur l’année 2003 fait ainsi apparaître 

le non-respect des objectifs fixés par le comité directeur de la SIMMAD 
tenu à la fin de l'année 2002. A la fin de 2003, devait être assurée une 
disponibilité globale des trois quarts de la flotte. Or, fin décembre, l’écart 
entre le taux réalisé et l'objectif initial était de près de 13 points pour 
l'ensemble des flottes. 

Cet écart est principalement dû à la contre-performance des 

opérateurs de maintenance, puisque, pour un objectif initial pour 2003 
d'indisponibilité technique de 20 %, le résultat à fin décembre dépassait, 
en cumul annuel, 30 %. 

Tableau n° 13 : 

Objectifs et résultats de décembre 2003  

Flottes 

Objectif de disponibilité 

Disponibilité observée (12/03) 

Mirage 2000  

75 % 

70,1 % 

Mirage F1 

75 % 

68,79% 

C 130 

9 avions 

5 avions 

C 160 

65 % 

54,54 % 

Epsilon 

65 avions 

53 avions 

Globale 

75 % 

63,5 % 

(Source : SIMMAD) 

Cette contre-performance affecte particulièrement les avions de 

combat, dont le taux d'indisponibilité dû à la maintenance dépasse 30 %, 
les hélicoptères, avec une indisponibilité supérieure à 40 %, et les avions 
école, avec une indisponibilité proche ou supérieure à 30 %. 

3  –  Les matériels maritimes 

L’amélioration de l’entretien des bateaux peine à se manifester. 

Certes, dans ce domaine comme dans celui des munitions et des 

rechanges, des signes encourageants sont perceptibles. Depuis la création 
du SSF, le nombre d’opérations achevées avec retard tend à diminuer. 

Si le taux de disponibilité s’améliore progressivement, le retour à 

un taux de disponibilité objectif de l’ordre de 80 % prendra encore sans 

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50 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

doute quelques années. Il est vrai qu’il ne figure dans la loi de 
programmation qu’à titre d’objectif 2015. 

Les résultats détaillés montrent que la disponibilité des bateaux a 

enregistré une amélioration de 10 % entre l’été 2002 et le printemps 2003. 
La baisse de l’été 2003 est attribuée par le SSF à un taux d’avaries 
accidentelles supérieur à la moyenne et conjugué à l’effet de la réduction 
du temps de travail des mois de juillet et d’août qui a obligé à différer le 
traitement des indisponibilités. A la fin de l’année 2003, le taux était 
effectivement remonté à 60 %, permettant d’envisager une évolution 
favorable sur le moyen terme. 

 

Tableau n° 14 : 

Evolution du taux de disponibilité pondérée des bâtiments 

(Source : tableau de bord du SSF) 

Au-delà de ces données, on peut observer dans les unités de la 

marine les effets du rétablissement de la confiance dans les structures 
chargées du maintien en condition opérationnelle. Ce sentiment est 
ressenti de manière différenciée suivant les flottes ; si les responsables de 
la flotte nucléaire, moins touchée que la flotte de surface par la 
dégradation du maintien en condition opérationnelle, semblent dans 
l’expectative, les commandants de bateaux plus anciens, qui ont senti un 
changement de comportement des responsables, fondent de grands 

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ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 51 

 

 

espoirs dans cette nouvelle organisation. De fait, indépendamment des 
actions de fond, le SSF et la DCN, dès les premiers mois de 
fonctionnement du nouveau dispositif, ont souhaité localement donner 
des signes forts du changement de pratiques, faisant procéder, par 
exemple, à des achats en urgence pour satisfaire les besoins des équipages 
en petits équipements sans caractéristiques techniques particulières, mais 
dont l’absence pesait lourdement sur la vie quotidienne. 

L’action du SSF commence donc à se faire sentir sur la 

disponibilité des bateaux, mais dans une mesure bien moindre que celle 
qu’a pu faire espérer sa création. Cependant, l’importance des 
bouleversements auxquels il a dû faire face et l’ampleur de la tâche en 
termes de réorganisation de la fonction entretien des matériels justifient 
probablement les délais observés dans le rétablissement d’un taux de 
disponibilité correct. 

B  –  Des indices d’amélioration  

La croissance des crédits consacrés à l’entretien des matériels, a 

donné des marges de manœuvre plus larges aux services chargés de les 
mettre en œuvre. Néanmoins, les modalités de passation des commandes 
et des marchés d’entretien entraînent des délais qui retardent les effets de 
l’augmentation des crédits sur la disponibilité des matériels. Par ailleurs, 
une solution de continuité dans les passations de contrats conduit 
nécessairement à un désengagement de certains fournisseurs industriels. 
Cela entraîne, pour les services d’approvisionnement, la nécessité de 
rechercher des fournisseurs susceptibles de répondre aux appels d’offres, 
voire de susciter la reprise par d’autres industriels de certaines activités. 
Ces opérations prennent nécessairement du temps et diffèrent d’autant 
l’amélioration de la disponibilité des matériels. Cependant des indices de 
redémarrage sont perceptibles dans les structures nouvelles. 

1  –  Le service de soutien de la flotte 

Les deux chantiers majeurs que devait faire aboutir le SSF, 

préalablement à toute autre action, étaient le transfert des rechanges et des 
munitions. Ces tâches sont à ce jour presque achevées. 

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52 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

a)  Le transfert des rechanges 

La gestion des rechanges suppose la réalisation de 

l’approvisionnement, de l’entretien du magasinage et du ravitaillement 
des unités. 

La fonction « rechanges » est répartie sur deux sites, à Toulon et à 

Brest, à raison de 40 % du stock sur Brest et 55 % sur Toulon. Le reste est 
détenu dans deux bâtiments ateliers que compte encore la marine et dans 
les magasins outre-mer. 

La prise en compte du stock de la DCN était un enjeu considérable 

compte tenu de sa variété et du nombre de nomenclatures recensées, 
obligeant, préalablement à tout transfert, à un récolement précis des 
inventaires, à une identification des pièces et à une analyse de leur état. 

A titre indicatif, les rechanges consommables (dits RP1) 

concernent 18 millions d’articles pour un montant de 450 M€ répartis en 
290 000 références de nomenclature ; les rechanges réparables, 250 000 
articles (45 000 numéros de nomenclature) pour un montant de 1,2 Md€. 

L’objectif de taux de service était fixé à 80 % pour la fin 2003. Il 

était de l’ordre de 40 % au début de l’été mais a atteint 65 % en 
septembre, en hausse continue. L’objectif n’a finalement pas été atteint en 
matière de matériels réparables (dits RP2) dans la mesure où le secteur 
semble peu réactif aux appels d’offres. Fin 2003, le taux de service des 
rechanges réparables stagnait aux alentours de 60 %, résultat reflétant la 
difficulté à redresser un flux dont l’approvisionnement dépend de 
partenaires industriels délaissés pendant de nombreuses années. Le SSF a, 
de fait, décidé de faire appel aux moyens internes de la marine pour 
traiter les cas d’urgence. En matière de rechanges non réparables, le taux 
de service n’était que de 40 %, fin 2003. Ce taux correspond à une 
incapacité de la maîtrise d’œuvre industrielle à répondre aux besoins et 
non à une incapacité à contractualiser du service de maîtrise d’ouvrage. 

Ce secteur des rechanges reste donc encore sinistré. Dans la 

mesure où les délais d’approvisionnement sont longs et la connaissance 
des besoins encore à améliorer, le niveau recherché ne sera véritablement 
atteint que lorsque l’ensemble du système aura atteint son rythme de 
croisière. 

b)  Les munitions 

Le transfert des munitions a présenté des caractéristiques 

semblables à celui des rechanges, mais un certain nombre de difficultés 
supplémentaires se sont présentées. 

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L

ES MESURES VISANT A RESTAURER LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

 53 

 

 

La décision de transfert des munitions au SSF n’est intervenue 

qu’en avril 2002 avec prise d’effet au 1

er

 janvier 2003. Le service a donc 

dû faire face tout à la fois aux difficultés propres au transfert d’une telle 
fonction et aux problèmes liés à l’intégration d’un effectif appréciable, 
puisque le basculement emportait le rattachement au SSF de près de 300 
personnes issues de la DCN. 

Nonobstant ces difficultés, l’activité du SSF a été satisfaisante et 

les taux de délivrance en progression régulière. Pour les munitions 
classiques, le taux de service à 24 h approchait les 100 % en avril 2003 et 
celui des torpilles était légèrement supérieur à 95 %. 

Le SSF a pu reprendre en peu de temps les fonctions rechanges et 

munitions qu’assurait antérieurement la DCN. De nombreuses actions ont 
été entreprises pour assainir ces fonctions et reconstituer les stocks. Si des 
résultats positifs commencent à être enregistrés, ils restent encore assez 
éloignés des objectifs fixés, dans l’attente notamment de l’arrivée des 
outils informatiques permettant de créer un référentiel et d’obtenir une 
meilleure connaissance de l’historique de gestion des besoins et de leur 
satisfaction. 

2  –  Les résultats de la SIMMAD 

La particularité de l’évolution de la disponibilité des matériels 

aériens consiste en un déplacement des causes d’indisponibilité de la 
structure de maîtrise d’ouvrage déléguée (SIMMAD) vers les opérateurs 
techniques. 

L'indisponibilité globale due au maître d'ouvrage, par manque de 

pièces, a en effet très sensiblement baissé depuis 2000. Alors qu'elle 
dépassait 18 % sur les deux années 2000 et 2001, elle n’a été que de 11 % 
en 2002 et s'est encore contractée ultérieurement pour ne représenter que 
7,4 % fin 2003. Cette amélioration résulte incontestablement de la mise 
en place de la SIMMAD, qui permet notamment une meilleure 
planification des approvisionnements et une meilleure gestion des crises 
grâce à la mutualisation des flottes des armées au sein de la même entité. 
De plus, le rétablissement des crédits à un niveau plus conforme aux 
besoins a permis de rétablir une gestion normale des commandes avec les 
industriels. 

En revanche, l'indisponibilité liée à la maintenance elle-même, 

c'est à dire aux interventions d'entretien courant et aux immobilisations 
pour réparations importantes ou rénovations, reste élevée.  

Cette stagnation de la performance provient sans doute d'un "trou" 

dans la chaîne du maintien en condition opérationnelle : les services de 

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54 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

maintenance étaient placés sous la responsabilité fonctionnelle des 
commandements organiques, la SIMMAD n'ayant ni autorité ni 
responsabilité sur ces services et, par voie de conséquence, sur leurs 
performances. Depuis le 1er septembre 2003, la SIMMAD assure la 
maîtrise d'ouvrage déléguée de la maintenance (ainsi que la maîtrise 
d'ouvrage déléguée de la distribution des pièces de rechange 
aéronautiques). A ce titre, elle dispose désormais de tous les leviers de 
pilotage de la fonction et tout particulièrement de la capacité d'intervenir, 
en qualité de maître d'ouvrage, auprès des services chargés de la 
maintenance opérationnelle. La cohérence ainsi obtenue devrait permettre 
d'améliorer les performances à l'avenir. 

Ainsi, la réforme engagée a déjà produit ses premiers effets : un 

redressement très sensible de la performance globale. Mais, celui-ci est 
principalement dû à l'amélioration de l'efficacité des achats et des 
approvisionnements, l’indisponibilité liée à la maintenance elle-même 
restant élevée. La faiblesse des performances enregistrées en matière de 
disponibilité technique des matériels trouve, pour l’essentiel, son origine 
dans les processus de maîtrise d’œuvre.  

 

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Chapitre III 

 

Des progrès à confirmer 

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OUR DES COMPTES

 

 

 

 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 57 

 

 

I  –  L’achèvement des réformes de structure 

Depuis 1999 a été entreprise une réforme des structures dont on est 

en droit d’attendre une efficacité accrue dans des délais désormais 
relativement brefs. Toutefois, la réorganisation intervenue en ce qui 
concerne les matériels terrestres a obéi à une ambition limitée. De plus, 
des difficultés subsistent après les réformes intervenues. Ce double 
constat conduit à explorer les voies et les moyens d’une accélération du 
progrès déjà enregistré. 

A  –  La poursuite de la clarification des rôles 

1  –  Le rôle de l’état-major des armées 

Le rôle de l’état-major des armées dans le maintien en condition 

opérationnelle des matériels est limité : le décret du 8 février 1982 
circonscrit ses interventions à la coordination des aspects interarmées de 
cette fonction. Les travaux engagés à la demande du ministre de la 
défense en vue de l’amélioration du maintien en condition opérationnelle 
dans le cadre de la réforme du ministère de la défense ont été l’occasion, 
pour l’état-major des armées, de réunir les quatre états-majors. En outre, 
les travaux conduits pour préparer l’entrée en vigueur de la loi 
d’organique sur les lois de finances (LOLF) ont permis de faire ressortir 
la nécessité d’accroître les prérogatives de l’état-major des armées, 
notamment pour ce qui concerne la préparation et la conduite des 
programmes d’armement et pour l’entraînement des forces. 

Dans le domaine du maintien en condition opérationnelle, des 

considérations du même ordre permettent d’aboutir à la même 
conclusion. 

Puisqu’il est responsable de l’emploi des forces, le chef d’état-

major des armées devrait fixer les contrats opérationnels des diverses 
armées, et ceci de façon beaucoup plus précise que cela n’a été fait 
jusqu’à maintenant. Par exemple, dans le cas de l’armée de terre, la loi de 
programmation militaire couvrant la période 2003-2008 spécifie que cette 
dernière doit être en mesure de projeter 20 000 hommes dans certaines 
conditions, sans assortir cette prescription d’aucune condition relative aux 
équipements nécessaires. L’armée de l’air doit pouvoir déployer 
100 avions de combat, contrat vague, qui ne donne aucune indication sur 
les disponibilités à atteindre pour chaque type d’appareil. Une 

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OUR DES COMPTES

 

 

 

spécification plus fine permettrait de fixer avec davantage de précision les 
objectifs à obtenir pour chaque parc de matériel en termes de 
disponibilité, soit immédiate, soit différée. L’EMA est en mesure de 
remplir ce rôle difficile, compte tenu du grand nombre de scénarios 
envisageables, mais fondamental, pour asseoir sur des bases indiscutables 
la gestion des différents parcs de matériels et le travail quotidien 
d’entretien des matériels. 

Il paraît de même important que l’état-major des armées soit 

davantage impliqué dans les organismes des armées responsables du 
maintien en condition opérationnelle des matériels. Il est frappant de 
constater que les nouveaux organismes créés pour assurer la maîtrise 
d’ouvrage déléguée de cette fonction, la SIMMAD et le SSF, ne comptent 
pas de représentant de l’état-major des armées dans leur comité directeur 
ou conseil de gestion qui fixent pourtant les politiques et les objectifs 
pour les divers parcs de matériels, examinent les moyens (notamment 
financiers) nécessaires et, de façon plus générale, dirigent les activités et 
analysent les résultats des structures et des intervenants chargés de 
l’entretien des matériels. 

La définition même du maintien en condition opérationnelle a le 

mérite de mettre en lumière clairement l’étroite corrélation qui devrait 
exister entre l’entretien des matériels et leur utilisation. A ce jour, toutes 
les conséquences qui doivent découler de ce principe pour l’organisation 
des relations entre l’état-major des armées et les trois armées n’ont pas 
été tirées et en particulier pour ce qui concerne le maintien en condition 
opérationnelle.  

2  –  La place de la DGA  

La DGA est concernée à un double titre par le maintien en 

condition opérationnelle des matériels des armées. D’une part, lors de la 
phase de développement/production, elle est responsable de la conception 
et de la réalisation du soutien logistique intégré (SLI) qui doit permettre 
le maintien en condition opérationnelle durant toute la durée d’utilisation 
des matériels. D’autre part, après la mise en service opérationnelle, elle 
joue un rôle qui a varié au cours du temps, suivant qu’il s’agissait de 
matériels de l’armée de l’air, de l’armée de terre ou de la marine. 

 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 59 

 

 

a)  Lors de la préparation des programmes 

L’instruction générale sur la conduite des programmes d’armement 

précise notamment qu’en ce qui concerne le maintien en condition 
opérationnelle, il convient de : 

« - prendre en compte dès le début du programme le souci 

d’optimisation du coût global défini comme l’ensemble des coûts 
générés par le système durant la totalité de son cycle de vie. Il 
comprend par conséquent les coûts relatifs à l’acquisition du 
matériel, de son système de soutien et une estimation des coûts 
d’utilisation (exploitation et soutien) induits jusqu’au retrait du 
service y compris les coûts de démantèlement ; ceci implique en 
particulier d’appliquer  la méthodologie du soutien logistique 
intégré (SLI), qui consiste à préparer, concevoir et réaliser 
simultanément le « 

système principal 

» et le « 

système de 

soutien » afin d’éviter toute discontinuité lors de la première 
mise en service opérationnel ; 

s’assurer du soutien logistique des premiers modules 

opérationnels engageables ou projetables et faciliter la mise en 
place de l’ensemble des éléments du soutien en incluant selon le 
cas dans le périmètre du programme, au-delà des 
approvisionnements initiaux, une partie de maintien en condition 
opérationnelle correspondant à une durée significative ; 

- réduire les délais de réalisation, pour éviter l’obsolescence des 

choix techniques et rendre possible la négociation de contrats 
globaux pouvant couvrir à la fois les travaux d’industrialisation, 
une tranche significative de la production et une partie du 
soutien en utilisation, ce qui permet ainsi d’optimiser 
l’organisation industrielle et de réduire les coûts. » 

Ces principes, visant à inclure l’étude du soutien dans celle des 

matériels eux-mêmes, de façon à l’optimiser, puis à réduire le plus 
possible la discontinuité entre la phase de développement/fabrication et 
celle du soutien opérationnel, doivent dorénavant être strictement 
appliqués par les équipes de programme intégrées (EDPI) qui conduisent 
les programmes d’armement.  

b)  Lors de l’utilisation opérationnelle 

Le rôle de la DGA en matière de maintien en condition 

opérationnelle des matériels aériens et navals a diminué à la suite de la 
création du SSF, puis de la SIMMAD. Ce n’est pas pour autant que la 

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60 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

DGA se désintéresse de la question. Elle considère, en effet, que, entre 
1995 et 2002, elle a accompli des progrès dans la conduite des actions 
dont elle était chargée dans le domaine du maintien en condition 
opérationnelle des matériels aériens, et que les principes qui guidaient 
cette démarche demeurent valables pour l’avenir, même dans un contexte 
d’organisation différent. 

Au plan de l’expertise technique, la DGA détient une compétence 

incontournable. Le rôle de maîtrise d’ouvrage que doivent assumer les 
structures mixtes chargées du maintien en condition opérationnelle 
implique en effet de leur part une compétence technique à un niveau 
suffisant pour pouvoir correctement spécifier les prestations à demander 
aux divers maîtres d’œuvre ou analyser correctement les conséquences à 
tirer d’un incident survenu. La DGA est sans conteste la mieux placée 
pour fournir cette compétence technique, soit par la mise à disposition 
d’ingénieurs et de techniciens, soit par les avis ponctuels donnés par ses 
services de programmes ou ses centres techniques. 

En matière d’achats et de contractualisation, la DGA est aussi 

mieux placée que les armées pour développer les formules contractuelles 
les plus adaptées à chaque cas, dans le respect des contraintes 
réglementaires françaises et européennes. Elle est mieux placée 
également pour former des acheteurs spécialisés et elle devrait être 
chargée d’assurer cette fonction pour l’ensemble des acheteurs de 
matériels techniques du ministère de la défense. 

La prise en compte des contraintes industrielles exige des 

compétences dont elle est particulièrement dotée. Même si la notion de 
politique industrielle a beaucoup perdu de sa pertinence, il n’en reste pas 
moins que certaines données peuvent orienter le choix d’un industriel 
pour assurer une prestation : la pérennité de la filière industrielle et des 
compétences correspondantes, la confidentialité de certaines prestations, 
etc.  

Pour toutes ces raisons, la création des structures mixtes ne doit 

pas conduire à un désengagement de la DGA pour le maintien en 
condition opérationnelle des matériels, mais elle doit, bien au contraire, 
s’y impliquer toujours davantage. A ce titre, et de manière à permettre un 
accroissement des échanges entre services concepteurs et services 
utilisateurs, la participation de la DGA aux nouvelles structures en charge 
de la maîtrise d’ouvrage du maintien en condition opérationnelle devrait 
être systématique. Ainsi, le principe de la coprésidence du comité 
directeur de la SIMMAD par la DGA et les services utilisateurs, qui est 
mis actuellement en pratique au SSF de  manière non formalisée, pour 
son conseil de gestion, devrait être étendu aux autres structures de ce 
type. 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 61 

 

 

3  –  L’organisation pour ce qui concerne les matériels terrestres 

La nouvelle organisation mise en place comporte certes certains 

progrès par rapport à la situation antérieure. 

Ainsi la création à la direction centrale du matériel de l’armée de 

terre (DCMAT) d’une cellule de suivi et d’animation de la maintenance 
en temps réel pour l’ensemble de l’armée de terre est de nature à 
améliorer la réactivité de la structure. L’organisation de l’administration 
centrale sous une forme davantage matricielle par regroupement, à 
l’image de la SIMMAD, des officiers de maintenance par parcs de 
matériels devrait permettre une optimisation des compétences. De 
meilleures relations avec la DGA devraient être établies grâce au 
rapprochement opéré entre l’armée de terre et la DGA, concrétisé par une 
convention de mise à disposition de personnels de celle-ci à la DCMAT. 
Le décloisonnement entre la chaîne de maintenance et les unités devrait 
progresser grâce à l’instauration du droit de regard des directeurs 
régionaux du matériel sur l’activité des structures de maintenance 
incluses dans les forces. 

L’armée de terre a mis en place une organisation qui intègre 

certains des principes adoptés par la SIMMAD mais ne lui a donné 
aucune vocation interarmées. Certes, la situation des matériels terrestres 
et celle des matériels aériens ne sont pas identiques : l’armée de terre met 
en œuvre un pourcentage élevé du total des premiers (80 à 85 %), les 
seconds sont davantage répartis entre les trois armées et la gendarmerie. 
Dans ces conditions, la formule, originale au sein du ministère de la 
défense, d’un service qui dépend d’un comité directeur et non pas d’une 
autorité unique a sans doute moins de raisons de s’imposer. Mais, à 
l’inverse, au-delà des avantages de la formule, reconnus par l’armée de 
terre elle-même 

(cohérence accrue du maintien en condition 

opérationnelle des équipements pendant leur durée de vie, participation 
assurée de la DGA, accueil favorable des autres armées), la création de la 
SIMMT telle que prévue initialement aurait ouvert bien d’autres 
gisements d’efficience et d’efficacité. 

Elle aurait notamment permis d’assurer enfin une séparation claire 

entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre pour le maintien en 
condition opérationnelle de l’armée de terre. Tant que la DCMAT  
disposera d’un potentiel interne lui permettant d’assurer des tâches dont 
l’industrie pourrait également se charger, elle continuera à se les attribuer 
en priorité, puisqu’elle dispose des personnels pour ce faire. Mais 
l’absence totale de flexibilité de ses effectifs civils fait peser un risque sur 
la continuité des réponses qu’elle peut apporter. Elle ne peut, en effet, 
moduler son potentiel, qui varie seulement du fait des départs en retraite, 

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62 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

des transferts en provenance d’autres établissements de l’Etat ou de 
sociétés nationales, ou enfin des embauches dont elle bénéficie. Cette 
situation génère un comportement erratique dans la politique d’entretien. 
Par exemple, un marché avec la société Panhard comportait trois tranches 
annuelles de 50 véhicules 

VBL

 à rénover : la première fut notifiée 

normalement 

; la deuxième et plus encore la troisième sont plus 

qu’incertaines, leur notification n’étant plus une priorité. De même, la 
DCMAT commence-t-elle à s’interroger sur l’opération de rénovation des 

AMX 10 RC

, dont elle voit maintenant les risques liés à l’organisation 

industrielle choisie, mais pour laquelle elle n’a pas retenu à ce jour de 
véritable maître d’œuvre. 

La création de la SIMMT avait ouvert la possibilité de promouvoir 

plus aisément les formules nouvelles de contractualisation du maintien en 
condition opérationnelle, domaine où la DGA a acquis une expérience 
supérieure à celle des armées et, comme le fait la SIMMAD, de permettre 
une « externalisation » des problèmes de matériels terrestres en dehors de 
la seule armée de terre. La transparence à laquelle oblige une telle 
formule aurait pesé aussi sur les arbitrages financiers, créant ainsi 
probablement des conditions plus favorables à ces arbitrages.  

La création de cette structure aurait aussi permis d’achever 

certaines réformes souhaitées dans les autres armées. Ainsi, l’armée de 
l’air voudrait fusionner plusieurs de ses directions actuelles, dont la 
direction centrale des matériels de l’armée de l’air (DCMAA), en une 
direction unique du soutien. L’absence de la SIMMT la contraint à la 
conserver, en contradiction avec les engagements pris lors de la création 
de la SIMMAD de ne pas dupliquer les postes de directeur central de la 
SIMMAD et de directeur central du matériel. L’armée de l’air travaille 
donc sur l’hypothèse de confier à la DCMAT l’entretien de ses matériels 
terrestres de manière à pouvoir parachever la réorganisation de ses 
structures de soutien. 

Pour toutes ces raisons, la Cour estime éminemment souhaitable 

que le 

« sursis  définitif

 

»

 à la création de la SIMMT, ordonné par le 

ministre soit mis à profit pour relancer un projet de réforme débouchant 
sur la création d’une structure intégrée de maintien en condition 
opérationnelle des matériels terrestres de toute les armées. 

De ce point de vue, le ministère de la défense britannique offre un 

exemple intéressant de regroupement de l’ensemble des missions en 
matière de logistique à une seule structure responsable. 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 63 

 

 

 

Les principes généraux d’organisation du maintien en condition 

opérationnelle de l’armée britannique. 

Depuis le milieu des années 1990, le ministère de la défense 

britannique s’est réorganisé en privilégiant une approche compacte (en 
réduisant le format humain et matériel des forces armées), intégrée (par 
un mixage très étendu des personnels civils et militaires) et interarmées.  

En matière de maintien en condition opérationnelle, cette approche 

s’est traduite par une prise en compte des contraintes propres à la 
maintenance des matériels, dès le stade de leur conception, et par une 
prise en charge totalement transversale aux armées du soutien. 

Le choix de réalisation ou d’acquisition d’un équipement est de la 

compétence du ministre de la défense sur proposition d’un comité 
consultatif (

Investment Approval Board

) composé du chef d’état-major 

opérationnel (représentant l’utilisateur futur quelle que soit l’armée 
concernée) et des quatre directeurs intéressés dont le directeur des achats 
(

Defence Procurement Agency

) et celui de la logistique (

Defence 

Logistics Organisation - DLO

) qui assurera par la suite le maintien en 

condition opérationnelle des matériels. Le critère de choix entre les 
différents vecteurs (terrestres, maritimes ou navals) est fondé sur l’effet 
de frappe recherché. 

La réalisation de l’équipement est confiée à une équipe de 

développement intégrée23  (

Integrated Project Team

) regroupant des 

représentants des utilisateurs (de l’armée concernée) mais aussi ceux des 
agences chargées des achats, du maintien en condition opérationnelle 
futur et des industriels. Cette équipe a vocation à suivre le matériel de sa 
conception jusqu’à son retrait de service. Les représentants de l’agence en 
charge du maintien en condition opérationnelle sont membres de l’équipe 
correspondant au comité directeur de programme ce qui implique leur 
accord à tous les stades de réalisation du programme. 

                                                      

23) Certaines de ces IPT ont une double subordination à la Defence Procurement 
Agency (direction des achats) et à la Defence Logistics Organisation (chargée de toute 
la logistique tant de l’homme que des matériels). 

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64 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

La responsabilité du maintien en condition opérationnelle des 

matériels en service incombe à la direction de l’organisation logistique 
(DLO) qui l’exerce par le biais de services (

Equipment support)

 

regroupant les matériels par milieu d’évolution (air, mer et terre) sur un 
modèle comparable à celui qui a présidé à la création de la SIMMAD et 
du SSF en France.  

L’ensemble du dispositif est régi par une culture d’entreprise 

passant par la nécessité d’obtenir un effet au niveau de l’utilisateur 
opérationnel (

Customer

) et les indicateurs de performance portent sur les 

résultats obtenus et non sur les moyens. Le responsable de la chaîne 
logistique (

Chief DLO

) est responsable de l’emploi de son budget et rend 

compte à ses « clients » envers lesquels il s’est engagé par contrat à 
fournir un certain niveau de prestation. 

B  –  La consolidation des structures existantes 

1  –  La SIMMAD 

a)  L’organisation des approvisionnements  

L’évolution des taux d’indisponibilité résultant respectivement de 

la maîtrise d’ouvrage déléguée de la SIMMAD et de la maîtrise d’œuvre 
fait apparaître la nécessité de conforter la chaîne d’approvisionnement en 
rechanges. La SIMMAD estime que le niveau excessif des taux 
d'indisponibilité technique provient notamment de l'attente de pièces pour 
les opérations de maintenance courante et de problèmes liés aux équipes 
de maintenance. 

Ce constat a d'ailleurs été à l'origine du contrat expérimental passé 

entre la DCMAA et la SIMMAD, qui, selon le directeur de la première, a 
commencé à porter ses fruits. Le délai d'acheminement et de distribution 
des matériels "essentiels" ou "critiques" (qui bénéficient à ce titre d'une 
priorité), mesuré entre le moment où est passé l'ordre de mouvement et la 
remise au destinataire, a été sensiblement réduit, passant d'une semaine à 
3 jours en 2003. 

Néanmoins, il apparaît indispensable de sécuriser ces délais. 

L'externalisation des processus de transport est étudiée à cette fin. En 
particulier la DCMAA envisage de sous-traiter le transport des pièces en 
le confiant à des sociétés spécialisées pour régulariser les 
approvisionnements. Cette voie paraît devoir être encouragée. 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 65 

 

 

b)  Le dimensionnement des équipes de maintenance 

La SIMMAD considère que les faiblesses constatées quant aux 

délais de maintenance sont dues à la fois à des attentes de main d'œuvre 
pour certaines flottes, liées à un dimensionnement insuffisant des effectifs 
et à un étalement insuffisant de la capacité de travail sur l'année qui 
dégrade les performances, en particulier pendant les périodes de 
vacances. 

Cette argumentation mériterait d'être affinée, car si les effectifs des 

niveaux NTI 1 et NTI 2 ont baissé de 19 % entre 1997 et 2003 (hors 
activités sur les flottes d'avions écoles), le nombre d'appareils a été 
également nettement réduit. Le parc total des appareils de l'armée de l'air 
est passé de 1 278 unités fin 1996 à 1 096 unités début 2003 (-17 %). 
Globalement, les effectifs affectés à la maintenance n'ont donc pas 
"divergé" significativement par rapport au nombre d'appareils. 

Tableau n° 15 : 

Evolution des effectifs globaux affectés à la maintenance NTI 1 et NTI 2 

de l'armée de l'air 

 

1999 2000 2001 2002 2003 

CFAC24 

1 979 

1 873 

1 739 

1 733 

1 667 

CFAS 

618 608 603 538 527 

CFAP 

1 186 

1 180 

1 179 

1 077 

1 075 

CEAA 

974 979 977 965 945 

TOTAL 

4 757 

4 640 

4 498 

4 313 

4 214 

(Source : EMAA) 

Surtout, la corrélation entre la variation globale des effectifs et la 

dégradation de la disponibilité pour cause technique n'est pas établie : la 
disponibilité technique ne s'est pas dégradée proportionnellement à la 
baisse des effectifs sur cette période ; au contraire, elle s'est globalement 
améliorée en 2002 et sur de nombreuses flottes, alors même que la baisse 
des effectifs se poursuivait. 

Néanmoins, il est incontestable que la qualité de la maintenance 

dépend de la disponibilité des ressources humaines "au bon moment et au 

                                                      

24) CFAC : commandement de la force aérienne de combat. 
CFAS : commandement de la force aérienne stratégique. 
CFAP : commandement de la force aérienne de projection 
CEAA : commandement des écoles de l’armée de l’air

 

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66 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

bon endroit". A cet égard, l'optimisation des effectifs suivant les types de 
maintenance et suivant les besoins des différentes flottes est une absolue 
nécessité pour assurer la qualité du service. Elle suppose que l'état-major 
dispose d'une réelle connaissance de la productivité et de l'efficacité 
technique comparées des équipes de maintenance au sein de l'armée de 
l'air. 

c)  La consolidation de la SIMMAD 

Les objectifs fixés en matière de structures ou de moyens pour 

l’organisation et le fonctionnement de la SIMMAD ont été atteints  en 
septembre 2003 avec le transfert complémentaire des attributions 
d’ordonnateur-répartiteur des pièces de rechange aéronautiques, de 
maîtrise d'ouvrage déléguée de la maintenance et de la distribution des 
pièces de rechange ainsi que de l’acquisition des matériels aéronautiques. 
Les effectifs devraient atteindre 902 personnes par transferts 
complémentaires des différentes armées. 

Depuis septembre 2003, la SIMMAD détient vraiment la 

responsabilité du maintien en condition opérationnelle en qualité de 
maître d'ouvrage et d'ordonnateur. Il paraît donc indispensable de laisser 
cette organisation produire ses effets pour pouvoir mesurer sur la durée 
son efficacité. 

Compte tenu des transferts d'attributions du SMAA vers la 

SIMMAD et de la nouvelle responsabilité de maître d'ouvrage de celle-ci 
vis-à-vis des commandements organiques pour l'entretien, une évolution à 
moyen terme devrait cependant être envisagée. 

Une telle réforme viserait à simplifier encore la structure de 

l'armée de l'air et à disposer d'une chaîne de maintenance structurée 
autour de deux pôles, la SIMMAD en qualité d'ordonnateur et de maître 
d'ouvrage de l'ensemble du maintien en condition opérationnelle des 
matériels aéronautiques et le commandement du soutien, maître d'œuvre 
de toute la maintenance réalisée au sein de l'armée de l'air intégrant donc 
la direction centrale du matériel de l’armée de l’air. 

Une autre option pourrait être de décharger la DCMAA de ses 

responsabilités en matière de matériels terrestres au profit d’une structure 
de maîtrise d’ouvrage du maintien en condition opérationnelle des 
matériels terrestres. En l’absence d’une structure interarmée, l’armée de 
l’air envisage de confier le suivi de ces matériels à la DCMAT. 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 67 

 

 

2  –  Le service de soutien de la flotte  

a)  La place du SSF dans la marine 

L’évolution du périmètre des compétences du SSF, service conçu à 

l’origine comme maître d’ouvrage du maintien en condition 
opérationnelle qui s’est vu greffer peu à peu des fonctions 
complémentaires, pose la question plus large de son rôle au sein de la 
marine. 

La répartition des tâches en matière de maintien en condition 

opérationnelle de la marine montre que, même après la constitution du 
SSF, elles restent largement dispersées entre plusieurs  acteurs. 

L’organisation de la maîtrise d’ouvrage, au sens strict du terme, 

comprise comme le pilotage stratégique des choix et des grandes options 
de la marine en matière de maintien en condition opérationnelle, reste 
clairement de la compétence de l’état-major de la marine dont le bureau 
« 

soutien des bâtiments et formations à terre 

» de la division 

« opérations/logistique » a la charge de la fixation des objectifs, des 
ressources et de la conception générale. 

Si le SSF est bien maître d’ouvrage du maintien en condition 

opérationnelle de la flotte en service, il n’est pas l’unique intervenant sur 
les bateaux. On constate sur les chantiers que d’autres maîtres d’ouvrage 
peuvent être amenés à faire travailler leurs équipes, tels le service des 
systèmes d’information de la marine (SERSIM), le service de santé des 
armées (SSA), mais aussi des services de la DGA intervenant 
simultanément au titre de leurs compétences sur certains équipements ou 
programmes. 

Dans les faits, le coordinateur de l’ensemble de ces chaînes n’est 

pas le SSF, ce qui est pourtant sa vocation, mais l’échelon de maîtrise 
d’œuvre d’ensemble que constitue le commandant du bâtiment

25

 pour 

toutes les opérations ne relevant pas du domaine de l’indisponibilité 
périodique (IPER). Le SSF tente de se faire reconnaître comme 
coordinateur des maîtres d’ouvrage afin de garantir aux bateaux la 
cohérence de leurs interventions. A ce titre, il a passé un protocole avec le 
service des programmes d’observation de la terre et de l’informatique de 
la DGA, qu’il se propose de soumettre aux autre maîtres d’ouvrage de la 
marine de la DGA.  

                                                      

25) IM n°602/DEF/EMM/OPL/STN du 9 août 2000 

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68 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

Il est également en mesure de le faire dans le domaine de la 

maîtrise d’œuvre. En effet, en matière de pyrotechnie, ses attributions le 
conduisent à exercer les fonctions de stockage, d’entretien et de 
délivrance. Il en est de même en matière de rechange où, même si le 
magasinage et le ravitaillement sont assurés par le commissariat, le SSF 
est amené à intervenir au niveau le plus élémentaire. Le SSF intervient 
aussi en matière de combustibles et de lubrifiants par l’intermédiaire du 
SECLEF, qui accomplit des tâches techniques. 

De même, en matière d’entretien des bateaux, sa compétence 

technique, sans équivalent dans la marine conduit souvent les cadres du 
SSF à assurer des missions d’expertise lors des opérations théoriquement 
conduites par les équipages ou les ateliers militaires de la flotte (AMF). 

Le rôle des ateliers militaires de la flotte est de mettre à la 

disposition du commandement des moyens industriels autonomes pour 
pouvoir reconstituer dans les cas d’urgence la disponibilité d’un matériel 
dans les plus brefs délais. Dans ce cadre, leur compétence s’exerce sans 
aucune exclusivité de niveau d’intervention.  

Ces ateliers remplissent un rôle important dans la marine, 

garantissant, particulièrement depuis le changement de statut de la DCN, 
l’autonomie de la marine en matière d’entretien. Incidemment, ils 
regroupent des métiers très spécialisés qu’on ne trouve plus chez les 
industriels, faute de marché. Il en résulte que même si ces ateliers ont 
surtout pour fonction de répondre à des besoins urgents, ils ont des plans 
de charge remplis par des opérations de maintenance ordinaire. Pendant la 
période de montée en puissance du SSF, ils ont été très sollicités pour 
assurer des tâches pour lesquelles il n’existait pas de marché ou plus 
simplement pour participer à l’effort d’ensemble de la marine en vue de 
restaurer la disponibilité de ses matériels. 

Sur le principe, il est de bonne gestion d’attribuer à ces ateliers un 

plan de charge suffisant, d’une part pour optimiser l’utilisation de leurs 
moyens, d’autre part pour maintenir à niveau leurs compétences. On peut 
néanmoins craindre le risque de reconstitution par ce biais des arsenaux 
de taille plus réduite au sein de la marine.  

Ces ateliers sont, avec les équipages, le seul moyen d’intervention 

qui n’est pas sous l’autorité directe du SSF. Ils sont néanmoins sous son 
autorité fonctionnelle. Dans la réalité, le rattachement hiérarchique des 
ateliers militaires de la flotte à la base navale est cependant assez artificiel 
puisque la seule autorité disposant de la capacité de piloter l’activité des 
ateliers dans une base navale est le directeur local du SSF. C’est d’ailleurs 
ce dernier qui établit leur plan de charge. L’imbrication est telle que 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 69 

 

 

l’indicateur de suivi de l’activité des ateliers est présenté au chef d’état-
major de la marine par le SSF parmi ses indicateurs propres. 

b)  Les hypothèses d’évolution  

Historiquement, la marine a toujours mêlé étroitement la maîtrise 

d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre. Cette question a pris une actualité 
nouvelle d’abord avec la création du SSF, puis surtout après la sortie de la 
DCN du périmètre étatique. 

Le retour à l’orthodoxie organisationnelle nécessiterait de 

décharger le SSF de toutes les fonctions de maîtrise d’œuvre qui lui ont 
été confiées depuis sa création. D’après l’inspection des armées, ces 
fonctions risquent d’empêcher le SSF de concentrer son énergie sur ses 
fonctions de maîtrise d’ouvrage et ne doivent pas « 

le distraire de la 

nécessaire réflexion stratégique sur l’amélioration et la pérennisation du 
maintien en condition opérationnelle

 ». Cet argument ne prend pas en 

compte la distinction entre les fonctions étatiques et les fonctions non 
étatiques, introduite par la sortie de la DCN de la sphère de l’Etat qui 
paraît devoir emporter plus de conséquences pour la marine. 

Dès lors, deux solutions s’ouvrent à la marine. 

La première option consisterait à retirer au SSF les fonctions de  

maître d’œuvre ainsi que les autres ajouts. La réalisation de cette option, 
qui a le mérite de respecter les principes, buterait toutefois sur l’absence 
de structure susceptible de recevoir ces attributions. Dès lors, le risque 
serait grand de voir se créer une nouvelle entité administrative ayant 
vocation à effectuer les opérations de maîtrise d’œuvre de la marine. Une 
duplication, voire une redondance, des compétences (et des moyens) avec 
ceux du SSF serait alors à craindre. La création d’un grand 
commandement logistique regroupant les moyens de la direction des 
travaux maritimes et du commissariat de la marine avec ceux de la 
maîtrise d’œuvre technique ne réglerait pas le problème puisque le même 
besoin en spécialistes se ferait sentir. 

La deuxième option consisterait au contraire à élargir les 

compétences du SSF, en intégrant les ateliers militaires de la flotte dans le 
service et une branche opérationnelle dédiée aux activités de maîtrise 
d’œuvre que le service exerce déjà dans les faits en matière de munitions 
et de rechanges. Les effectifs d’une telle structure devraient être 
strictement limités afin de ne pas recréer une nouvelle DCN.  

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70 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

II  –  Les relations clients-fournisseurs 

A  –  L’évolution des modes de contractualisation 

Toute réforme des structures chargées du maintien en condition 

opérationnelle des armées laisse pendante la question des relations entre 
l’Etat-client et ses fournisseurs quels qu’ils soient, privés ou publics. De 
ce point de vue, si des évolutions importantes sont déjà intervenues, les 
risques particuliers au domaine du maintien en condition opérationnelle 
conduisent à y accorder une attention particulière. 

1  –  Les nouveaux modes de contractualisation 

La recherche de nouveaux modes de contractualisation visait à 

optimiser les achats de rechanges et les opérations d’entretien qui 
deviennent de plus en plus complexes. Elle fut accélérée après la création 
des structures nouvelles. 

Principale innovation, le procédé du contrat global présente les 

avantages suivants : 

- forfaitisation et globalisation des prestations, grâce à la passation 

de contrats au forfait à l’heure de vol ou au jour de mer, ce qui 
permet d’obtenir des industriels titulaires des garanties de 
disponibilité des matériels ; 

- regroupement des commandes ; 

- continuité du service pour l’utilisateur ; 

- rationalisation progressive des formules contractuelles. 

La DGA et l’armée de l’air avaient conclu des contrats à l’heure de 

vol, d’abord pour des appareils proches des gammes civiles (

Falcon 50 et 

900, A 310, DC 8, AWACS

), avec d’excellents résultats de disponibilité, 

puis pour des moteurs (

Tyne

 des 

Transall

 et 

Atlantique

, gamme des 

moteurs 

Turboméca

 pour les hélicoptères). Ces contrats concernaient 

l’ensemble du maintien en condition opérationnelle 

: rechanges, 

réparations, interventions sur sites, formation, traitement des 
obsolescences, etc. 

Depuis, cette pratique des contrats globaux s'est développée. L’un 

d’entre eux, par exemple, intègre un service complet de prestations 
d’entretien, de pièces de rechange, de transport, de formation, d'assistance 
et de veille technique, de documentation, etc.… L'engagement porte sur 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 71 

 

 

une disponibilité minimale et sur des remplacements immédiats en cas de 
défaillance. Ce contrat permet de transférer à l'industriel une grande partie 
des fonctions précédemment assurées soit par la DGA, soit par les unités 
d'entretien de l'armée de l'air. Dans un document de janvier 2002, la DGA 
estimait que l'économie de ce contrat par rapport à un maintien en 
condition opérationnelle classique représente environ 11 % du montant du 
marché. 

Au début de 2004, pour la marine, est entré en vigueur un nouveau 

contrat d’entretien global des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) 
fondé sur la contractualisation du nombre de jours de disponibilité des 
sous-marins assortie d’un régime de sanction du cocontractant suivant le 
niveau des résultats. Les deux objectifs visés par cette contractualisation 
sont de faire réaliser l’entretien à flux financier constant en accroissant le 
taux de la disponibilité  qualitativement comme quantitativement. 

Ce nouveau contrat d’entretien des SNA remplace 8 contrats 

internes, des marchés d’approvisionnement et des marchés de dépannage. 
A ce titre, il participe pleinement à la réalisation de l’objectif 
d’optimisation de la politique contractuelle du SSF. 

Pour les matériels aériens, une autre initiative a consisté à 

commander à un opérateur logistique retenu après compétition la 
fourniture d’un service : « fournir, à la demande des utilisateurs, la bonne 
pièce de rechange, au bon endroit, dans les meilleurs délais, au meilleur 
coût ». Baptisé ORRMA (optimisation du réapprovisionnement des 
rechanges des matériels aéronautiques des forces armées françaises), ce 
projet concerne les pièces de rechange qualifiées de « consommables », 
c’est-à-dire remplacées systématiquement, et non pas réparées, en cas de 
panne ; l’enjeu annuel est d’environ 170 M€.  

Enfin, des efforts tendent à remplacer les stocks « Etat » de pièces 

de rechanges, financés par l’Etat, par des stocks industriels, financés par 
ces derniers, voire à revendre à l’industrie les stocks « Etat » existants. 

2  –  Une formule à surveiller 

Par rapport aux errements antérieurs, la Cour considère que la 

démarche consistant à recourir à des contrats globaux est 
incontestablement novatrice pour les armées françaises, alors qu’elle est 
largement utilisée pour des parcs de matériels civils (cellules et moteurs 

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72 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

des flottes aériennes, flottes de camions, etc.), qu’elle est aussi la règle 
dans certains pays étrangers

26

Les premiers résultats obtenus en termes de disponibilité des 

matériels semblent encourageants. Ces formules permettent notamment 
des économies d’échelle lors de la passation des contrats par suppression 
des charges liées à la conservation et à l’entretien des stocks. Ainsi, pour 
le SSF, le gain envisagé sur le contrat d’entretien des SNA paraît évident 
en termes d’optimisation et de simplification des procédures, au-delà des 
économies attendues à hauteur de 3 et 4 M€ par an dès la deuxième année 
de mise en oeuvre. La DCN y trouve également un intérêt en termes de 
motivation de ses équipes, de simplification des contrats et de garantie du 
financement dans la durée, lui permettant aussi de faire peser une 
contrainte de fidélisation sur ses sous-traitants. 

Néanmoins, il reste à vérifier aussi que ces avantages ne sont pas 

obtenus à un prix trop élevé. En effet, si les contrats globaux impartissent 
au titulaire du marché une obligation de résultat quels que soient les 
éventuels événements, y compris les plus improbables, et si, de plus, le 
titulaire du contrat de maintien en condition opérationnelle est en 
situation de monopole parce qu’il a construit le matériel neuf, sa position 
dans les négociations financières peut être très forte. Le risque est 
d’autant plus réel que, par la force des choses, la globalisation de 
l’entretien entraîne immanquablement une perte d’informations du 
prescripteur étatique. D’ailleurs, la DGA admet que, pour les contrats 
globaux dits « de première génération », cette critique ne manquait pas de 
justification. Elle indique cependant disposer des moyens, au moins 
théoriques, de vérifier, grâce à ses enquêteurs, les marges réellement 
obtenues par les titulaires des contrats. Pour les nouveaux contrats, dits 
« de deuxième génération », le forfait n’inclura pas les événements 
d’importance majeure ou de survenance trop aléatoire, dont les 
conséquences seront financées par une provision incluse dans le contrat et 
mobilisable sur décision de l’Etat (cas du contrat d’entretien des SNA 
négocié par le SSF). Il subsiste également un risque de nombreux 
contentieux au cours de l’exécution de ces contrats, même si des règles 
d’évaluation sont prévues et des arbitres désignés.  

Enfin, les contrats globaux comportent un risque intrinsèque 

résultant de leur durée. En effet, ils sont d’autant plus intéressants pour 
l’Etat, comme pour l’industriel soumissionnaire, que leur durée est 
longue. Se profile le risque de voir sacrifier l’entretien des matériels hors 
contrats globaux, généralement plus anciens et donc en moins bon état, au 

                                                      

26) La Grande Bretagne a confié l’ensemble de la fonction maintien en condition 
opérationnelle à l’organisation Defence Logistics Organisation (DLO) 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 73 

 

 

profit des matériels plus récents dont le maintien en condition 
opérationnelle aura été contractualisé globalement. 

La formule des contrats globaux n’est donc pas une panacée ; ses 

résultats, notamment au plan financier, doivent faire l’objet d’une 
attention toute particulière des autorités de contrôle du ministère. 

Il sera notamment intéressant de vérifier à l’usage si les résultats 

obtenus correspondent aux attentes, compte tenu des particularités des 
parcs de matériels militaires, qui n’ont souvent qu’un seul utilisateur, 
l’Etat français, et dont le volume est limité et le vieillissement moyen, au 
contraire des parc de matériels civils (avions, bateaux ou véhicules 
terrestres et de moteurs), jamais stabilisés dans le temps. 

B  –  Les relations entre l’Etat actionnaire et l’Etat 

client  

1  –  La place des industriels étatiques  

Une des conditions nécessaires au redressement des taux de 

disponibilité des matériels est qu’il existe, pour assurer le maintien en 
condition opérationnelle, des industriels détenant la compétence 
nécessaire. Il apparaît clairement aujourd’hui que, même dans le domaine 
de l’armement terrestre, dont les matériels sont moins complexes ou 
soumis à des contraintes de sécurité moins exigeantes et où la tradition 
autarcique est plus forte, c’est à l’industrie que devra échoir un rôle 
toujours plus grand de maîtrise d’œuvre. La complexité croissante des 
matériels, la limitation des moyens propres des armées maintenant 
professionnalisées, la mise en place de formules innovantes comme les 
contrats globaux basés sur des obligations de résultats, et non plus de 
moyens, vont dans ce sens.  

Encore faut-il que l’industrie soit en mesure de jouer le rôle 

désormais attendu d’elle. Et, sur ce point, la situation est très différente 
suivant les secteurs concernés. 

Fort logiquement, les premiers contrats globaux de maintien en 

condition opérationnelle ont été conclus pour l’entretien des matériels 
aériens (aéronefs, moteurs et équipements). En effet, les industriels 
constructeurs existent en tant que tels depuis de nombreuses décennies ; 
la sécurité des vols impose depuis toujours qu’ils continuent à suivre le 
comportement de leurs matériels en utilisation ; leurs activités civiles les 
ont habitués à prendre les moyens d’assumer des responsabilités toujours 
croissantes dans le domaine du maintien en condition opérationnelle ; 

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74 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

enfin, les armées disposent de peu de moyens propres pour assurer les 
tâches de l’espèce. 

En ce qui concerne les matériels terrestres et navals, la situation 

paraît moins favorable. Ces matériels ont été longtemps construits dans 
les arsenaux des anciennes directions des constructions navales et de 
l’armement terrestre au sein même du ministère de la défense. Certes, ces 
dernières ont été transformées en sociétés nationales, mais ce changement 
de statut a été très long à se concrétiser : GIAT industries n’a été créée 
qu’en 1991, au terme d’un processus amorcé en 1968, la DCN seulement 
en 2003 et ces deux sociétés sont loin d’avoir atteint leur maturité 
industrielle. Pour la DCN, la chose est évidente, étant donné la date fort 
récente de sa création. Elle l’est malheureusement aussi pour GIAT 
industries, malgré les treize ans qui la séparent maintenant de sa création. 
Dans divers rapports successifs

27

, la Cour a eu l’occasion d’analyser les 

raisons de cet état de fait.  

2  –  Les risques pesant sur les relations entre l’Etat et les 

industriels étatiques 

Dans ce contexte, l’Etat se trouve occuper vis-à-vis de ces sociétés 

plusieurs positions distinctes et parfois contradictoires. Il en est d’abord 
l’actionnaire unique et, à ce titre, il doit constituer ou renouveler leur 
capital. Mais il en est également le client principal, voire prépondérant : 
les commandes des armées représentent les trois quarts en moyenne de la 
charge de travail totale. Face  à des problèmes financiers permanents du 
fait de l’ampleur des besoins à satisfaire, les arbitrages financiers 
indispensables conduisent parfois à fixer le volume des commandes 
réelles à un montant éloigné des intentions initiales. Ce fut notamment le 
cas lors des premières années d’existence de GIAT industries, 
concomitantes il est vrai avec l’effondrement du bloc soviétique qui 
conduisit à une réduction des budgets militaires et à une redéfinition des 
matériels nécessaires. Il serait éminemment souhaitable que cette 
situation ne se reproduise pas au moment où la DCN prend son essor dans 
le cadre de son nouveau statut d’entreprise industrielle et où GIAT 
industries tente, une nouvelle fois, de trouver un équilibre grâce à un plan 
de restructuration drastique. La Cour note que, dans les deux cas, un plan 
d’entreprise détaillant les intentions de l’Etat actionnaire, de l’Etat client 
et de l’entreprise elle-même a pu être établi. Le respect de ces plans par 
les deux parties concernées est évidemment une condition nécessaire à la 
survie même de ces sociétés.  

                                                      

27) Notamment dans le rapport public particulier d’octobre 2001 sur les industries 
d’armement  

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DES PROGRES A CONFIRMER

 75 

 

 

Cependant, ces mêmes contrats d’entreprise contredisent la volonté 

affichée par l’Etat client d’ouvrir à la concurrence extérieure ses 
commandes. Ainsi en est-il, par exemple, des bateaux de la marine 
nationale dont le SSF n’exclut pas de confier l’entretien à des chantiers 
civils. Même si, pratiquement, peu de chantiers civils en Europe seraient 
capables de prendre en charge l’entretien des bâtiments les plus fortement 
armés et même s’il  paraît inopportun, par ailleurs, d’envisager de confier 
à des chantiers étrangers, fussent-il étatiques, l’entretien de la marine 
nucléaire, la question de la réelle capacité des services de la défense à 
diversifier leurs prestataires reste posée. 

L’Etat se trouve être également opérateur direct pour certaines 

tâches de maintien en condition opérationnelle relevant de responsabilités 
industrielles. Tel est le cas dans le domaine des matériels aériens, avec les 
ateliers industriels de l’aéronautique. Cela l’est également pour les 
matériels terrestres, pour lesquels, pendant trop longtemps, l’armée de 
terre a consacré des moyens importants afin d’effectuer dans les 
établissements de la direction centrale des matériels des travaux qui, à 
l’évidence, ne relevaient pas d’elle.  

Ces responsabilités de l’État à l’égard de ses structures 

industrielles influent sur les choix en matière de maintien en condition 
opérationnelle. Ainsi, en 2004, malgré l’augmentation globale de ses 
crédits, l’armée de l’air a dû diminuer d’un tiers les crédits de maintien en 
condition opérationnelle affectés aux rechanges aéronautiques. L’État ne 
pouvant ajuster ses structures à ses moyens va devoir répartir les charges 
industrielles de l’année entre les trois ateliers industriels de l’aéronautique 
existants. 

Enfin, l’État est, bien entendu, le prescripteur des commandes qui 

lui sont destinées. Ainsi le service des programmes de la délégation 
générale pour l’armement a parfois du mal à trouver sa juste place vis-à-
vis de sociétés qui lui étaient auparavant en quelque sorte 
consubstantielles. Ces mêmes services doivent également prendre en 
compte l’évolution du code des marchés publics. L’obligation de recourir 
à la concurrence dans un cadre national ou européen peut en effet se 
trouver en contradiction avec le souhait d’assurer une charge de travail 
effective la plus voisine possible des prévisions antérieures. 

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76 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

Les sociétés, de leur côté, auront bien des efforts à accomplir pour 

parvenir à une maturité industrielle suffisante, dans le domaine de 
l’organisation, comme dans celui de la gestion des ressources humaines, 
pour pouvoir attirer les spécialistes qui leur manquent, et assurer la 
productivité nécessaire. 

En définitive, la réussite des industriels étatiques, pour l’instant 

GIAT industries et DCN, est un des facteurs clef du redressement durable 
de la disponibilité des matériels. Elle suppose la conjonction des efforts 
de l’Etat et des entreprises elles-mêmes, mais elle est, aujourd’hui, loin 
d’être acquise. 

III  –  Les moyens financiers 

Après le redressement constaté des moyens alloués au maintien en 

condition opérationnelle des armées, la nouvelle loi de programmation 
militaire pour 2003-2008 a intégré une stabilisation des moyens dévolus à 
cette fonction. Le succès des actions déjà engagées repose sur le réalisme 
des prévisions.  

1  –  Les évaluations de besoins 

Lors de l’élaboration de la loi de programmation 2003-2008, 

chaque armée a procédé à une évaluation de ses besoins à venir en 
matière de maintien en condition opérationnelle. Adoptant des clés de 
calcul propres, les armées ont défini l’enveloppe prévisible de leurs 
besoins à l’échéance de cette loi et parfois jusqu’à la date de réalisation 
complète du modèle d’armée 2015.  

Ces chiffrages prennent en compte les entrées en service de 

nouvelles flottes de matériels, en fonction des échéances retenues à ce 
jour. 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 77 

 

 

Tableau n° 16 : 

Evolution prévue des crédits de maintien en condition opérationnelle en 

LFI sur la durée de la LPM 2003-2008  

(en M€ 2003) 

 

2003 2004 2005 2006 2007 2008 

EPM* Titre V 

2 609 

2 852 

2 862 

2 849 

2 694 

2 620 

EPM 

Titre 

III 

54 

     

Total  EPM 

2 663 

2 852 

2 862 

2 849 

2 694 

2 620 

Titre V total 

13 644 

14 655 

14 720 

14 840 

14 960 

15 080 

% EPM/T V 

19,52 % 

19,46 % 

19,45 % 

19,20 % 

18,01 % 

17,37 % 

* Entretien programmé des matériels 

Source : ministère de la défense 

Les crédits à programmer au titre du maintien en condition 

opérationnelle sont constants sur la période avec une moyenne annuelle 
de 2 760 M€ (hors charges de personnel), soit la moyenne de la dotation 
de la loi de programmation précédente. 

Ces prévisions reposent sur des hypothèses qui apparaissent à la 

Cour sujettes à caution. 

Pour la marine et l’armée de l’air par exemple, l’avion de combat 

Rafale,

 qui a vocation à devenir le chasseur polyvalent commun à ces 

deux armées, et dont le coût de soutien est actuellement de 35 000 € à 
l’heure de vol devrait, selon le ministère, voir son coût de soutien 
diminuer jusqu’à atteindre le niveau de 10 000 € à l’heure de vol pour le 

Rafale

 « Air » et 7 000 € pour le 

Rafale

 « Marine » en 2012. Certes, il est 

logique qu’un tel appareil, dont l’entretien pâtit actuellement du double 
handicap de sa jeunesse et du faible nombre d’exemplaires en service, 
voie ce coût diminuer avec la croissance du nombre d’exemplaires en 
service et l’achèvement de sa mise au point. Par ailleurs, cet appareil a été 
conçu pour permettre une maintenance au moindre coût (contrôle 
automatisé des dysfonctionnements, par exemple). 

Mais l’expérience montre que l’évolution du coût de soutien d’un 

aéronef est en pratique directement proportionnelle à l’évolution du coût 
de soutien de sa motorisation. Or, le 

Rafale

 est équipé de moteurs 

différents de ceux des avions qu’il doit, à terme, remplacer. En outre, 
c’est un aéronef incomparablement plus complexe, en termes d’avionique 
et de système d’armes que tous ses prédécesseurs, ce qui lui confère une 
meilleure fiabilité mais occasionne également des coûts d’entretien plus 
élevés. Il paraît donc illusoire d’envisager que le coût de soutien d’un tel 

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78 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

aéronef puisse, à échéance 2012, être identique au coût actuel du maintien 
en condition opérationnelle du 

Super étendard modernisé

Ce doute est d’ailleurs étayé par le fait que la post-qualification du 

moteur initialement prévue à l’échéance de 50 000 heures de vol a été 
portée à 100 000 heures de vol. Le coût de cette post-qualification se 
monte désormais à 180 M€, dont environ 50 M€ seront pris en charge sur 
des crédits de maintien en condition opérationnelle (le reste étant financé 
sur les ressources du programme). De plus, la durée de réalisation du 
programme, de plus en plus longue, génère des effets d’obsolescence. 
Ainsi, il faut d’ores et déjà modifier certains éléments des 

Rafale

 entrant 

en service. Dans l’avenir, ces questions d’obsolescence des composants 
vont prendre une importance grandissante, non encore chiffrée à ce jour. 
Le même type d’inconnue pèsera sur le maintien en condition 
opérationnelle du futur 

A 400 M

, qui sera équipé de 4 moteurs de plus de 

10 000 cv chacun, défi technique unique jusqu’à présent, dont les 
conséquences sur le dimensionnement des opérations d’entretien 
nécessaires risquent d’être importantes.  

L’impact des restructurations industrielles est un autre exemple des 

augmentations prévisibles du coût du maintien en condition 
opérationnelle. Ainsi, dans la marine, le changement de statut de la DCN 
a considérablement fait croître les coûts de ses prestations. En effet, avant 
2000, la DCN facturait ses prestations en coût de production, sans marges 
ni provisions. En 1999, la charte de gestion

28

 signée par la DCN, service 

à compétence nationale, prévoyait qu’à partir de 2000, ce service devait 
inclure dans ses prix facturés ces deux éléments. Par ailleurs, les surcoûts 
liés à l’aménagement et la réduction de travail avaient été évalués par le 
contrôle général des armées à près de 11 %. Et parallèlement, les 
négociations salariales ont entraîné une augmentation du coût de la main 
d’œuvre ouvrière de 9,95 % entre 1999 et 2002. Lors de la première 
transformation de la DCN, les coûts d’entretien ont donc déjà subi une 
augmentation significative. 

A compter du 1

er

 juin 2003, les facturations de la DCN ont encore 

augmenté mécaniquement puisque, étant devenue une société de plein 
exercice, elle doit désormais facturer ses prestations en incluant la TVA 
au taux normal de 19,6 % ainsi que la taxe professionnelle. Se sont 
rajoutés à ces charges supplémentaires, seulement partiellement et 
temporairement compensées par des ressources complémentaires allouées 
à la marine, les coûts liés à l’occupation des emprises de la marine qu’elle 
continue à utiliser, mais désormais à titre onéreux. 

                                                      

28) Instruction interministérielle du 5 octobre 1999 portant charte de gestion de la 
DCN. 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 79 

 

 

Ainsi, entre 2000 et 2003, le coût des unités d’œuvre de la DCN a 

progressé, suivant le type de prestation, de 10 % pour les études à 39 % 
pour un chantier de sous-marin. 

Cette augmentation des coûts de la DCN pourrait être maîtrisée si 

la nouvelle société réalisait les gains de productivité espérés, ce qui n’est 
toujours pas le cas. Son plan d’entreprise prévoit, en effet, des gains de 
productivité de l’ordre de 2 % par an. Or, pour que les opérations 
d’entretien des bâtiments de la marine puissent être réalisées dans le cadre 
des prévisions de la LPM, il faudrait que la DCN réalise des gains de 
l’ordre de 3 % par an.  

Ces quelques exemples font apparaître les risques importants 

d’augmentation structurelle des coûts auxquels vont être confrontées les 
autorités chargées du maintien en condition opérationnelle. La Cour 
considère, par conséquent que les prévisions 

a minima

 de financement du 

maintien en condition opérationnelle des armées découlant de la loi de 
programmation militaire 2003-2008, calées au surplus sur les réalités peu 
satisfaisantes de la précédente LPM, sont très fortement sous-évaluées par 
rapport aux évolutions vraisemblables. 

2  –  L’échéance 2005 

Les premiers effets des insuffisances de crédits se font d’ailleurs 

sentir dès à présent, de manière différente suivant les armées. 

Pour l’armée de l’air, le modèle d’armée 2015 résultant des 

hypothèses du Livre blanc de la défense a retenu le volume de 300 avions 
de combat polyvalents en ligne de type 

Rafale

. Lors de la redéfinition de 

ce modèle, préalable à l’élaboration de la loi de programmation 2003-
2008, la notion de flotte polyvalente a disparu au profit de celle de flotte 
composite, intégrant les 

Mirage 2000

Confrontée aux difficultés budgétaires, l’armée de l’air a choisi de 

rallier cet objectif de 300 avions de combat, dès 2008, pour réaliser des 
économies sur le maintien en condition opérationnelle grâce à un retrait 
anticipé d’une partie de sa flotte. Mais, le modèle retenu repose sur 
l’hypothèse que, après 2008, les ressources seront suffisantes pour 
maintenir correctement 300 avions de combat jusqu’en 2015. 

Le risque de dérive des prix de l’industriel est d’ores et déjà une 

réalité pour la marine. Ainsi, en mai 2004, le SSF a dû négocier une 
grande visite (IPER) d’une frégate. Le prix initial établi par la DCN se 
montait à 12 M€ alors qu’un contrat recouvrant strictement le même 
périmètre, passé pour l’IPER d’un navire de même caractéristique avait 
été réalisé en 2002 pour seulement 7,5 M€. La durée de réalisation de 

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80 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

l’IPER est pourtant moins longue qu’en 2002, la DCN ayant réussi à 
optimiser ses processus. Si le contrat a pu être ramené à 9,8 M€, 
l’augmentation en moins de deux ans atteint néanmoins près de 30 % du 
coût de cette opération. 

Pour les matériels terrestres, la hausse des dépenses 

d’investissement et de fonctionnement courant exerce une pression très 
forte sur celles de maintien en condition opérationnelle. L’armée de terre 
a fait le choix de préserver (« sanctuariser ») les dépenses de maintien en 
condition opérationnelle de ses matériels mais craint, avec l’arrivée dans 
ses parcs de matériels de plus en plus rapidement soumis aux risques 
d’obsolescence, de ne pouvoir faire face à ses besoins.  

Les risques de dégradation seront d’autant plus élevés qu’ils 

résultent non pas de choix stratégiques, mais de mesures d’urgence prises 
sous contrainte. L’expérience vécue de l’exécution de la dernière loi de 
programmation militaire montre que les effets à moyen terme de la 
diminution des crédits de maintien en condition opérationnelle se font 
sentir durablement tant au plan industriel qu’au plan de la disponibilité 
des matériels militaires. 

*** 

Plusieurs facteurs expliquent la faiblesse des résultats enregistrés. 

La réorganisation des structures en charge du maintien en 

condition opérationnelle des armées a entraîné un relatif déplacement vers 
les maîtres d’œuvre des causes des indisponibilités. Même lorsque les 
rechanges sont correctement approvisionnés, ils ne se trouvent pas 
forcément au bon endroit et au bon moment. A l’avenir, le fait de confier 
à un organisme unique et interarmées le pilotage des flux logistiques 
devrait apporter une amélioration significative. 

Par ailleurs, les opérateurs techniques ne sont pas toujours en 

mesure de faire face à la fluctuation des  charges qui leur sont confiées 
par la maîtrise d’ouvrage. Face à ce défi, est posée la question du 
dimensionnement du tissu industriel étatique. La possibilité d’avoir 
recours à de nouveaux modes de contractualisation, tels que les contrats 
globaux, est aussi une piste ouverte, même si elle doit être mise en œuvre 
avec prudence, compte tenu de son caractère expérimental et de la rigidité 
budgétaire qu’elle induit. 

De manière générale, les effets conjugués du vieillissement des 

matériels en service et de l’arrivée dans les armées de matériels nouveaux 
pèsent directement sur la disponibilité des matériels. Les matériels en 
service avant les années 90 étaient incontestablement plus simples et 
moins coûteux à entretenir que les matériels actuels. Aujourd’hui, les 

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DES PROGRES A CONFIRMER

 81 

 

 

matériels entrant en service présentent des risques d’obsolescence 
extrêmement rapide qui nécessitent des remises à niveau permanentes et 
coûteuses. La conjonction de ces éléments ne permet donc 
vraisemblablement plus d’espérer rejoindre à l’avenir les taux de 
disponibilité observés dans les années antérieures à la décennie 1990. 

Aussi, face à cette perspective, la Cour estime-t-elle que le 

ministère de la défense doit redéfinir plus précisément les taux de 
disponibilité indispensables en fonction des missions opérationnelles. 

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82 C

OUR DES COMPTES

 

 

 

 

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Conclusion 

Le ministère de la défense s’est trouvé confronté, à la fin des 

années quatre-vingt dix, à une situation très dégradée de l’entretien de ses 
matériels. Pour y remédier, il a choisi de réorganiser les structures 
chargées de cette mission et d’accroître les ressources qui lui sont 
consacrées. Cette réorganisation est cependant restée inachevée et 
d’ampleur insuffisante. 

 

1. Pour réorganiser les structures chargées du maintien en 

condition opérationnelle des matériels aériens et maritimes, le ministère a 
crée deux organismes originaux dans leur conception et leurs modalités 
de fonctionnement.  

Après deux ans de fonctionnement, ces deux structures nouvelles, 

la SIMMAD et le SSF, ont montré que leur création avait été un choix 
pertinent dans la mesure où elle permettait de suivre les matériels par 
famille technique. Ces regroupements ont permis de mieux gérer les 
rechanges et les procédures de passation de marché, ainsi que de donner 
un seul interlocuteur aux contractants de l’Etat.  

Cependant, les conséquences de la création de ces organismes 

n’ont pas encore toutes été tirées. Notamment, l’armée de l’air et la 
marine n’ont pas encore achevé leur réorganisation interne susceptible de 
faire disparaître totalement leurs propres structures de maintien en 
condition opérationnelle. Certes, le service de l’aéronautique navale a 
considérablement diminué et ses fonctions résiduelles sont en phase de 
redistribution entre les autres services de la marine, mais il subsiste 
encore. Concernant l’armée de l’air, lorsque les fonctions liées au 
maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres de l’armée 
de l’air auront été prises en charge par l’armée de terre et ses fonctions 
résiduelles confiées à une direction des services de soutien aux 
compétences élargies, la direction du service du matériel de l’armée de 

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C

OUR DES COMPTES

 

 

 

 

84

l’air devra disparaître. Moyennant la mise en œuvre de ces quelques 
aménagements complémentaires, on peut considérer que ces nouvelles 
structures seront optimisées et que les gains de productivité attendus 
pourront être obtenus. Cette opinion est étayée par le constat de la 
diminution des taux d’indisponibilité due à la maîtrise d’ouvrage. 

La fonction « soutien des matériels terrestres » n’a pu profiter 

d’une dynamique similaire, dans la mesure où le principe d’un service 
interarmées de soutien n’a pas été retenu dans le cadre des réorganisations 
successives de l’armée de terre. Certes, les faibles taux de disponibilité 
des matériels de l’armée de terre observés ne sont pas dus exclusivement 
à l’échec de la construction du projet de service intégré de maintenance 
des matériels terrestres (SIMMT). Mais il est certain que les 
réorganisations successives de cette armée, d’une part, de ses chaînes de 
soutien, d’autre part, ont eu des effets très négatifs sur son action de 
maîtrise d’ouvrage. La dernière réorganisation de la chaîne de 
maintenance de l’armée de terre, résultant de l’abandon du projet 
SIMMT, aurait pu déboucher sur une structure interarmées, qui aurait 
permis de soustraire cette fonction aux complexités organisationnelles de 
cette armée, en faisant profiter les matériels terrestres des gains de toute 
nature liés à la mise en place de structures interarmées rationalisées. 
Ainsi, la Cour préconise que, lors de la prochaine réorganisation de 
l’armée de terre, soit envisagée à nouveau la possibilité d’un 
regroupement interarmées de l’entretien de tous les matériels terrestres. 

Si, dans l’immédiat, il est indispensable de mener rapidement à 

leur terme les réformes structurelles engagées (armée de l’air et marine) 
ou à peine amorcées (armée de terre), la Cour, dans une perspective plus 
ambitieuse et à plus long terme suggère que le ministère de la défense 
examine attentivement les voies et les moyens de transposer en France 
l’exemple britannique ayant abouti à confier l’ensemble de la logistique 
en matière de maintien en condition opérationnelle à une seule entité 
pleinement et clairement responsable de la réalisation des objectifs de 
disponibilité définis par les dirigeants politiques et les états-majors. 

 

2. Malgré ces réorganisations structurelles, force est de constater 

que le redressement de la disponibilité des matériels peine à se faire 
sentir. Des signes encourageants de redressement sont observables pour 
certains matériels comme en matière de régularisation des flux 
d’approvisionnement des rechanges, mis à part le problème financier 
spécifique à l’armée de l’air en 2004. Néanmoins, et malgré 
l’accroissement du montant des crédits consacrés au maintien en 
condition opérationnelle des matériels depuis 2002, venu appuyer les 
réorganisations des chaînes d’entretien, l’espoir d’atteindre les objectifs 

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CONCLUSION

 

 

 

 

85

de disponibilité a été, pour partie, déçu. Et cela alors qu’au cours de la 
même période, la diminution du nombre d’unités à entretenir et l’entrée 
en service de matériels neufs, conjuguées à l’accroissement des crédits, 
auraient dû favoriser une remontée rapide des taux de disponibilité. En 
outre, la complexité des matériels à entretenir et la croissance importante 
des prix du secteur industriel vont certainement entraîner une 
augmentation significative des coûts de maintien en condition 
opérationnelle dans les années à venir. 

 

Face à ce besoin, la loi de programmation militaire 2003-2008, qui 

exprime l’effort financier que la nation a décidé de consentir à son outil 
de défense et à son entretien, affiche des montants prévisionnels de 
crédits qui, bien qu’élevés, risquent d’être insuffisants, eu égard à la 
fragilité des hypothèses retenues par le ministère de la défense pour le 
chiffrage des coûts prévisibles du maintien en condition opérationnelle. 

Le ministère de la défense doit faire face simultanément à 

l’accroissement des dépenses de personnel lié aux conséquences de la 
professionnalisation, à l’acquisition des nouveaux matériels actuellement 
en phase d’industrialisation et à l’entretien de l’ensemble des matériels en 
service. Dans ces conditions, le risque est grand que se reproduise la 
situation des années quatre-vingt dix lorsque les ressources disponibles 
n’ont pas permis d’assurer la condition opérationnelle des matériels à un 
niveau compatible avec les objectifs qui avaient été fixés.  

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OUR DES COMPTES

 

 

 

 

86

 

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GLOSSAIRE

 

 

 

 

87

Glossaire 

AMF 

 

atelier militaire de la flotte 

AP  

autorisation 

de 

programme 

BL  

brigade 

logistique 

BSMAT 

base de soutien du matériel 

CCL 

 

compagnie de commandement logistique 

CEMA   

chef d’état-major des armées 

CEMAA 

chef d’état-major de l’armée de l’air 

CEMAT 

chef d’état-major de l’armée de terre 

CEMM  

chef d’état-major de la marine 

CFAT   

commandement de la force d’action terrestre 

CFLT   

commandement de la force logistique terrestre 

CGA 

 

contrôle général des armées 

CP 

 

crédit de paiement 

COMMAT commandant 

du 

matériel 

CSM 

 

commission spécialisée des marchés 

CMALAT 

compagnie du matériel de l’aviation légère de l’armée de terre 

DAF 

 

direction des affaires financières 

DCMAA 

direction centrale du matériel de l’armée de l’air 

DCMAT 

direction centrale du matériel de l’armée de terre 

DCN 

 

direction des constructions navales 

DCSSF  

direction centrale du service de soutien de la flotte 

DCTEI 

direction centrale des transmissions, de l’électronique et 
de l’informatique 

DGA 

 

délégation générale pour l’armement 

DIRMAT 

direction régional du matériel 

DT  

disponibilité 

technique 

DTO  

disponibilité 

technique 

opérationnelle 

DTON 

 

disponibilité technique opérationnelle négociée (ou 
nécessaire) 

DUO 

 

document unique d’organisation 

EDPI 

 

équipe de programme intégré 

EPM  

entretien 

programmé 

des 

matériels 

EMA 

 

état-major des armées 

EMAA   

état-major de l’armée de l’air 

EMAT   

état-major de l’armée de terre 

EMM  

état-major 

de 

la 

marine 

EMF  

état-major 

de 

forces 

ERB 

 

équipe responsable de bâtiment 

GAN  

groupe 

aéronaval 

GIAT   

groupement industriel des armements terrestres 

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C

OUR DES COMPTES

 

 

 

 

88

I.MOD 

indisponibilité imputable à la maîtrise ouvrage déléguée 
(logistique) 

I.MOE 

indisponibilité imputable à la maîtrise d’œuvre 
(technique) 

IPER 

indisponibilité périodique (grande visite de NTI 3 dans la 
marine) 

IRB 

 

ingénieur responsable de bâtiment 

LFI 

 

loi de finances initiale 

LPM 

 

loi de programmation militaire 

NTI 

 

niveau technique d’intervention 

OPEX  

opération 

extérieure 

ORRMA 

optimisation du réapprovisionnement des rechanges des 
matériels aéronautiques des forces armées françaises 

OVIA   

organisme à vocation interarmées 

RMAT  

régiment du matériel 

RP.1  

rechange 

non 

réparable (consommable) 

RP.2 

 

rechange réparable (non consommable) 

SCMAT 

service central du matériel de l’armée de terre 

SECLEF 

station d’essai des combustibles et lubrifiants de la flotte 

SIGLE   

système informatique de gestion de l’entretien 

SIMAT 

système d’information de la maintenance de l’armée de terre 

SIMMAD 

structure interarmées de maintenance des matériels 
aériens de la défense 

SIMMT 

structure intégrée de maintenance des matériels terrestres 

SGA 

 

secrétariat général de l’administration 

SLI 

 

soutien logistique intégré 

SMAA   

service du matériel de l’armée de l’air 

SNA  

sous-marin 

nucléaire 

d’attaque 

SNLE   

sous-marin nucléaire lanceur d’engins 

SPAé   

service des programmes aéronautiques 

SPN 

 

service des programmes navals 

SPNUC  

service des programmes nucléaires 

SPART  

service des programmes d’armement terrestre 

SPOTI 

service des programmes d’observation de la terre et de 
l’informatique 

SRM 

 

section de réparation mobilité 

SSF 

 

service de soutien de la flotte 

STAT   

section technique de l’armée de terre 

UMCC   

unité de maintenance du camp de Canjuers 

UMR   

unité de maintenance régimentaire 

VAB 

 

véhicule de l’avant blindé 

VBCI     

véhicule blindé de combat d’infanterie 

VBL 

 

véhicule blindé léger 

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REPONSE DU MINISTRE DE LA DEFENSE

 

 

 

 

89

RÉPONSE DU MINISTRE DE LA DÉFENSE 

 

Les préoccupations de la Cour rejoignent celle du ministère de la 

défense. Dans le cadre de la mise en œuvre de la loi organique relative au 
lois de finances (LOLF), le chef d’état-major des armées, comme responsable 
du programme « préparation et emploi des forces », veillera à garantir 
l’effort financier nécessaire à la restauration de la disponibilité des 
matériels, tout en préservant les grands équilibres capacitaires. 

 

*** 

1 - Les préoccupations de la Cour rejoignent celles du ministère de 

la défense

 qui a constaté, dès la mi-2002, la forte dégradation de la 

disponibilité des matériels des armées et a pu obtenir, dès la loi de finances 
rectificative d’août 2002, un abondement des crédits d’entretien programmé 
des matériels (EPM). Les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 
l’EPM au titre V sont passés d’un point bas de 2,27 Md€ en 2001 à 2,90 Md€ 
en 2004, avec des progressions de + 8,6 % et + 11,1 % sur les deux 
dernières années. Cet effort est la marque de l’importance primordiale que le 
ministre de la défense attache personnellement à cette question. Pour 
l’avenir les mesures d’organisation déjà engagées ou prévues (MCO 
aéronautique notamment) ainsi que les discussions engagées avec les 
industriels devraient permettre de maintenir dans des limites raisonnables la 
dérive des coûts qui justifie l’inquiétude de la Cour. 

2 - Les décisions arrêtées en matière d’organisation manifestent 

concrètement l’attention portée par le ministère à l’amélioration de la 
maintenance

Ainsi, dans la perspective de la mise en œuvre de la loi organique 

relative aux lois de finances (LOLF), les pouvoirs d’arbitrage du chef d’Etat-
major des armées (CEMA) ont été et seront encore renforcés. En particulier, 
en tant que responsable du programme « préparation et emploi des forces » 
il lui reviendra de fixer aux armées des objectifs de disponibilité, de leur 
affecter les ressources adaptées et de mesurer le résultat de leur action au 
moyen d’indicateurs.  

Le renforcement des prérogatives du CEMA à travers notamment la 

création du conseil des systèmes de forces qu’il préside, lui donnera de 
nouveaux pouvoirs d’arbitrage et de coordination, nécessaires à la 
restauration de la disponibilité des matériels tout en préservant les grands 
équilibres capacitaires de la loi de programmation militaire. 

 

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OUR DES COMPTES

 

 

 

 

90

La disponibilité des matériels a été placée sous contrôle de gestion et 

chaque trimestre, les chefs d’Etats-majors présentent au ministre les 
indicateurs de disponibilité qui font l’objet d’une analyse détaillée 
conduisant à des décisions de conduite adaptées. 

L'analyse des défaillances dans la maintenance des matériels 

aéronautiques, à la fin des années quatre vingt dix, et le constat, fait par la 
Cour, du bien fondé des réformes engagées, confirment la justesse des choix 
effectués dans ce domaine, en particulier la création de la structure intégrée 
du maintien en condition opérationnelle des aéronefs du ministère de la 
défense (SIMMAD). 

Dès 2003, la disponibilité des matériels de l’armée de l’air s’est 

accrue de près de 4 %. 

Depuis le 1

er

 septembre 2003, cette structure interarmées possède tous 

les leviers pour poursuivre la rationalisation des différentes chaînes 
logistiques et de la maintenance. En effet, elle est, dorénavant, ordonnateur 
répartiteur des pièces de rechange du matériel aéronautique, ce qui lui 
permet de gérer au mieux les rechanges à l’échelle du ministère et non plus 
par armées. 

C’est au titre de cette future maîtrise d’ouvrage déléguée qu’elle avait 

lancé, dès le milieu de l’année 2002, des contrats d’objectifs avec les maîtres 
d’œuvre de la maintenance aéronautique et de la distribution des pièces de 
rechange aéronautiques. Ces contrats comportent depuis la rentrée 2003, des 
objectifs précis et mesurables qui seront analysés en réunions de dialogue de 
gestion au cours de cette année. Les efforts vont également porter sur la 
création d'indicateurs économiques fiables et significatifs permettant 
d'orienter les choix technico-logistiques. 

Le ministre ayant approuvé les principales conclusions de l’audit 

réalisé au premier semestre 2004 sur l’organisation de la fonction 
maintenance aéronautique, un directeur de projet va être prochainement 
nommé pour en piloter la mise en oeuvre.  

S’agissant du matériel terrestre, la Cour souligne l’intérêt que 

représenterait la création d’une structure du même type que la SIMMAD ou 
le SSF pour l’armée de terre.  

Cependant, de nombreuses réformes s’étant succédé au cours des 

années passées, la mise en place d’une structure du type SIMMAD a été 
suspendue pour se concentrer sur les actions de redressement immédiat de la 
disponibilité opérationnelle 

Pour autant, une nouvelle organisation de la DCMAT a pris en 

compte les enseignements tirés des structures intégrées, notamment en 
renforçant la structure matricielle (gestion par parcs) et la participation de 
spécialistes de la DGA à la maîtrise d’ouvrage du maintien en condition 
opérationnelle (MCO). 

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REPONSE DU MINISTRE DE LA DEFENSE

 

 

 

 

91

Une seconde étape suivra afin de mieux identifier encore les fonctions 

de maîtrise d’ouvrage et la répartition des responsabilités avec les 
industriels. 

S’agissant des matériels de la marine, le ministère de la défense ne 

partage pas l’appréciation assez pessimiste de la Cour ; l’amélioration de la 
disponibilité des bâtiments est en effet très encourageante pour 2004, avec 
néanmoins la nécessité de surmonter les fragilités résiduelles, consécutives 
aux nombreuses restructurations qui sont intervenues depuis 1990. 

Le SSF s’est vu attribuer des fonctions supplémentaires dépassant sa 

vocation de maîtrise d’ouvrage du MCO. Pour les nouveaux marchés 
d’entretien (projet CAP 2005 de contractualisation), le SSF prévoit de 
confier la coordination d’ensemble des intervenants industriels (notamment, 
les maîtres d’œuvre industriels relevant d’autres maîtres d’ouvrage) à un 
maître de chantier (le titulaire du marché du MCO) et non au commandant 
du navire. Pendant les arrêts techniques majeurs (IPER et IEI), les tâches de 
l'équipage changent de nature et s’orientent vers l’assistance à maîtrise 
d’ouvrage pour aider le SSF à réceptionner les prestations prévues dans le 
marché.  

Des protocoles entre le SSF et les services de programmes, 

notamment le service des programmes navals (SPN) et le service des 
programmes d’observation, de télécommunication et d’information (SPOTI), 
sont en cours d'élaboration pour mettre en application dans les contrats cette 
fonction de maître de chantier. 

Le plan stratégique établit la vision du SSF en tant que maître 

d’ouvrage professionnel. Par conséquent, les nouveaux marchés de MCO 
(projet CAP 2005) recherchent comme titulaires des industriels capables 
d’assurer la maîtrise d’œuvre d’ensemble d'un arrêt technique du bâtiment 
dans son intégralité. Le SSF n’envisage donc pas d’assumer des fonctions de 
maître d’œuvre d’ensemble. 

S’agissant des ateliers militaires de la flotte (AMF), il n’est pas très 

pertinent de les comparer à des industriels qu’ils ne sont pas ; les AMF sont 
des ateliers qu’il faut préserver pour restaurer la disponibilité des bâtiments, 
hors arrêt technique majeur. Le SSF n’envisage donc pas d’être l’autorité 
organique des AMF, mais souhaite posséder la vision d’ensemble des 
travaux effectués par les AMF et par les équipage sur les bâtiments de la 
marine, d’autant qu’il est responsable de la délivrance des rechanges alors 
que les industriels, quant à eux, interviendront pièces et main d'œuvre. 

Les augmentations structurelles des coûts de DCN que prévoyait la 

Cour après le changement de statut, ne sont pas intervenues. Tout au 
contraire, au terme de négociations certes laborieuses mais volontaristes, le 
SSF a obtenu des diminutions de prix. De ce fait, les prévisions de 
financement du MCO de la flotte découlant de la loi de programmation 
restent la référence. 

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C

OUR DES COMPTES

 

 

 

 

92

La stratégie contractuelle que le SSF met en œuvre a déjà trouvé des 

réalisations concrètes au travers des contrats d'entretien courant des sous-
marins nucléaires d’attaque (SNA) et des sous-marins nucléaires lanceurs 
d’engins (SNLE). Dans ces deux cas, les contrats fixant des exigences de 
disponibilités n'ont pas été « obtenus à un prix trop élevé » (page70), mais au 
contraire à des prix plus bas pour un même niveau de disponibilité. 

L’évolution du niveau des crédits alloués au MCO naval tiendra 

compte des exigences des nouveaux bâtiments et systèmes dans une logique 
de contrats de résultats. L’application aux navires des nouvelles règles de 
protection de l’environnement va en particulier nécessiter un effort financier. 

Le fonctionnement du système de soutien des éléments navals doit 

évoluer sous enveloppe de ressources humaines. Après des réformes 
multiples, il est important de laisser l’organisation récente se consolider et 
confirmer les bons résultats déjà obtenus, sans enchaîner de façon 
rapprochée les évolutions de structures. 

Les réformes commencent à porter leurs fruits. L’organisation ne 

nécessite dans l’immédiat que quelques ajustements pour tenir compte des 
conséquences du changement de statut de DCN. 

Par ailleurs, les réformes conduites dans les autres pays, notamment 

la Grande-Bretagne, amènent la Cour à souhaiter que soit examinée la 
pertinence pour la France de certaines évolutions, dont une interarmisation 
plus poussée dans l’organisation et la gestion du MCO, avec, pour 
conséquence, la réalisation à terme d’une organisation unifiée pour 
l’ensemble des milieux. 

Concernant la mise en place d’une organisation comparable à la 

DLO britannique, et sans pour autant l’exclure, il convient cependant d’être 
prudent compte tenu du manque de visibilité sur les améliorations attendues, 
spécialement sous l’angle opérationnel. Le retour d’expérience des 
interventions récentes et les analyses internes à cet organisme confirment 
cette perception. 

La finalité des forces étant leur emploi opérationnel, toute démarche 

de rationalisation dans le domaine du MCO doit en effet être appréhendée de 
façon globale de manière à ne générer aucune difficulté capacitaire.

 

Dans l’orientation choisie au sein de la nouvelle organisation de la 

délégation générale pour l’armement (DGA), les structures de soutien, ainsi 
que la nécessité d’une réflexion plus ambitieuse visant à optimiser et à 
fédérer les ressources et les moyens dédiés au MCO, ont été privilégiées par 
la création d’un service du MCO, rassemblant l’ensemble des activités de 
soutien logistique intégré – maintien en condition opérationnelle (SLI-MCO), 
au profit de tous les milieux. 

 

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REPONSE DU MINISTRE DE LA DEFENSE

 

 

 

 

93

La nécessité de distinguer et de séparer nettement les rôles de 

prescripteur et de maître d’œuvre, est un élément majeur de réforme. Elle 
conditionne la performance économique et l’efficacité industrielle. Sur cette 
base, ont été proposées les mesures organisationnelles relatives à la 
structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels 
aéronautiques de défense SIMMAD et au service de soutien de la flotte 
(SSF). 

La rénovation des modes de fonctionnement internes au ministère, en 

faisant appel de manière optimale aux compétences des différents acteurs, est 
un deuxième axe et, dans ce but, la DGA apporte au sein des structures de 
soutien ses compétences en matière de conduite de programmes au service 
des opérations de MCO. 

La généralisation de modes de contractualisation reposant sur la 

globalisation, la forfaitisation, et l’obligation de résultats, exprimés chaque 
fois que possible en exigences de disponibilité, est également un axe de 
progrès majeur. Elle doit être menée avec discernement, tout 
particulièrement dans la définition des exigences, dont le niveau influence 
directement les prix. 

Désormais sont prises en compte toutes les composantes du coût 

global de la fonction MCO, y compris les coûts internes au ministère de la 
défense. En 2003 une action de renforcement des compétences en matière de 
coût global, avec la création de postes spécifiques a été mise en place à la 
DGA. 

Les responsabilités des autorités du ministère sont différentes. Une 

uniformisation est nécessaire, tout en préservant une certaine spécificité de 
chaque milieu dans la mise en œuvre. La DGA a engagé une réflexion sur 
l’optimisation de sa participation dans la SIMMAD et le SSF. En ce qui 
concerne le milieu terrestre, la DGA apporte ses compétences spécifiques à 
la DCMAT dans le cadre de la conduite de projets pilotes en matière de 
maîtrise d’ouvrage du MCO. 

Concernant la maîtrise d’œuvre étatique, la dispersion des activités de 

type industriel entre différents acteurs du ministère et l’évolution des parcs 
de matériels dans les années à venir ont amené les différents partenaires à 
réfléchir sur l’évolution de la fonction technique au sein des armées.  

 

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