Le métier d'exploitant a plus de 100 ans. De simple curiosité montrée sur les foires, le cinéma est devenu une activité culturelle et commerciale dont l'établissement cinématographique est la pierre angulaire.

Ménil-Palace (Paris) : 900 places, E. Vergnes, architecte (1920) Ménil-Palace (Paris) : 900 places, E. Vergnes, architecte (1920)

La salle de cinéma est non seulement la première étape de l'exploitation d'un film mais également un lieu de culture et de loisir, intégré dans la cité, où se rencontrent les spectateurs. Une salle, un film, un public sont les trois composantes du métier d'exploitant.

Une Salle
Un Film
Un Public



Cinéma 2 Alizés Dinard (35)

Une Salle

La salle de cinéma ne relève d'aucun statut juridique particulier, aussi l'exploitation cinématographique peut-elle être exercée sous n'importe quelle forme. L'exploitation française reflète cette liberté : on trouve des exploitants en nom propre, des sociétés commerciales, des associations ou encore des salles exploitées en régie directe par des municipalités.

Si aucune forme juridique n'est exigée pour exercer le métier d'exploitant, l'ouverture d'une salle de cinéma peut dépendre d'une ou plusieurs autorisations administratives. Il existe, en effet, une autorisation administrative pour l'exercice de la profession d'exploitant et, dans certains cas, une autorisation administrative préalable à la délivrance du permis de construire pour la création ou l'extension de salles de cinéma.

  • L'autorisation d'exercice


  • Comme pour les autres professionnels du cinéma (producteurs, distributeurs, ...), le Centre national de la cinématographie délivre une autorisation d'exercice aux exploitants de salle de cinéma. Cette autorisation est obligatoire pour pratiquer une activité de projection publique d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles. Elle est accordée aux salles fixes ou itinérantes et régie par la Décision réglementaire n°12.
    L'autorisation est délivrée au propriétaire de la salle ou à toute personne disposant d'une autorisation d'exploiter (bail commercial ou autre) après vérification de la conformité de la salle au réglement de sécurité et aux normes techniques établies par la Commission Supérieure Technique de l'Image et du Son (CST).


  • La CDEC

    La création d'un ensemble de salles de spectacles cinématographiques de plus de 300 places est soumise à une autorisation administrative préalable à la délivrance du permis de construire. Cette autorisation est accordée par la Commission Départementale d'Equipement Cinématographique (CDEC). Une autorisation est également requise pour les extensions qui dépassent un certain seuil. Ce régime juridique est inspiré de celui mis en place pour la grande distribution commerciale et intégré dans la loi du 27 décembre 1973, dite "Loi Royer".

    Lieu ouvert au public, la salle de cinéma relève aussi de la réglementation sur les Etablissements Recevant du Public (ERP) qui impose le respect d'un certain nombre de normes de sécurité qui font l'objet de vérifications par les services départementaux d'incendie et de secours.

    MK2 Bibliothèque (Paris) : Jean-Michel Wilmotte, architecte


    Enfin, la salle de cinéma, en tant que lieu d'animation culturelle de la ville, bénéficie de certains aménagements juridiques et fiscaux autorisant les municipalités à leur apporter une aide financière directe ou indirecte.

    • Une aide directe

      La loi "Sueur", par dérogation au principe général d'interdiction des aides directes aux entreprises, autorise les collectivités locales à contribuer au fonctionnement ou aux investissements des salles de cinéma. Ce mécanisme permet la préservation de salles en centre-ville ou le développement de véritables partenariats entre exploitants et municipalités dans le cadre de projets d'urbanisme.

    • Une aide indirecte

      Les collectivités locales peuvent également accorder une aide indirecte aux salles de cinéma en les exonérant partiellement ou en totalité du paiement de la taxe professionnelle. L'exonération totale de la taxe professionnelle est réservée aux salles classées "Art et essai" qui réalisent moins de 5000 entrées hebdomadaires mais des exonérations partielles peuvent être accordées pour les salles qui relèvent d'autres critères. Cette exonération est prévue à l'article 1464-A du code général des impôts.



    Pathé Boulogne (salle 1) : 374 fauteuils, écran de 16 m. de base

    Un Film


    Le Code de l'industrie cinématographique dispose que la représentation cinématographique est soumise à l'obtention de visas d'exploitation. La représentation publique d'une oeuvre cinématographique sans visa est punie d'une peine d'amende.

    Les visas d'exploitation sont accordés par le Ministre de la culture et de la communication sur avis d'une commission rassemblant pouvoirs publics, professionnels, association de consommateurs ou de protection de la jeunesse : la commission de classification des films.

    Six types de visas peuvent être accordés :

    • Visa autorisant pour tous publics la représentation de l'oeuvre cinématographique
    • Visa comportant l'interdiction de la représentation aux mineurs de douze ans
    • Visa comportant l'interdiction de la représentation aux mineurs de seize ans
    • Visa comportant l'interdiction de la représentation aux mineurs de dix-huit ans
    • Visa comportant la classification du film en "X"
    • Interdiction totale de représentation (mesure très exceptionnelle)

    Les visas d'exploitation permettront aux exploitants de savoir à quelle catégorie de public le film est réservé.



    Une fois muni de son visa, le film peut entamer son exploitation commerciale. Ce sont les distributeurs de films, mandataires des producteurs, qui sont chargés de la distribution du film auprès des exploitants.

    Les relations entre distributeurs et exploitants sont encadrées par des usages professionnels dont l'essentiel est regroupé dans les conditions générales de location des films. Ce contrat général accorde aux exploitants le droit de représentation publique sur les oeuvres cinématographiques en échange d'un paiement qui est par principe proportionnel aux recettes mais peut, dans certaines situations, être forfaitaire.
    En plus de la location du film, les exploitants paient à la Société des Auteurs Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM) la rémunération due aux ayants-droit de la musique du film pour sa représentation publique. En effet, les droits musicaux ne font pas partie des droits cédés automatiquement au producteur du film qui ne peut donc mandater le distributeur pour en autoriser la représentation publique.

    La programmation de la salle de cinéma peut être, soit effectuée directement par l'exploitant, soit confiée à une tierce partie notamment par le biais des groupements et ententes de programmation. Les groupements de programmation, nationaux ou locaux, et les ententes de programmation permettent aux exploitants de regrouper leurs moyens pour programmer leur salle.
    Le fonctionnement de ces organisations est encadré par un décret qui a pour objectif de préserver l'équilibre concurrentiel entre exploitants et distributeurs de films. Les groupements et ententes de programmation sont soumis à un agrément délivré par le Centre national de la cinématographie dont l'octroi dépend d'engagements de programmation (engagements sur la diversité des oeuvres ou sur des relations avec des distributeurs indépendants). Les entreprises d'envergure nationale qui se programment elles-mêmes doivent fournir au CNC des engagements de programmation similaires.

    Ciné Zénith Evreux (27) : 519 fauteuils, écran de 189 m² (salle 1)


    La programmation de certains types d'oeuvres peut donner lieu à la classification d'un établissement dans la catégorie "Art et Essai". Il en est ainsi de la programmation de films appartenant à l'une des catégories suivantes :
    • Oeuvres cinématographiques ayant un caractère de recherche ou de nouveauté dans le domaine cinématographique
    • Oeuvres cinématographiques présentant d'incontestables qualités mais n'ayant pas obtenu l'audience qu'elles méritaient
    • Oeuvres cinématographiques reflétant la vie de pays dont la production cinématographique est assez peu diffusée en France
    • Oeuvres cinématographiques de reprise présentant un intérêt artistique ou historique, et notamment oeuvres cinématographiques considérées comme des "classiques de l'écran"
    • Oeuvres cinématographiques de courte durée tendant à renouveler par leur qualité et leur choix le spectacle cinématographique
    Ou exceptionnellement à l'une des deux catégories suivantes :
    • Oeuvres cinématographiques récentes ayant concilié les exigences de la critique et la faveur du public et pouvant être considérées comme apportant une contribution notable à l'art cinématographique
    • Oeuvres cinématographiques d'amateur présentant un caractère exceptionnel.

    Le Centre national de la cinématographie dresse, chaque année, la liste des films pouvant relever de l'une de ces catégories et fixe la liste des salles pouvant faire l'objet du classement Art et Essai dans des conditions fixées par un décret du 22 avril 2002.

    Etoile Cinéma Saulieu (21) Etoile Cinéma Saulieu (21) Etoile Cinéma Saulieu (21)


    Enfin, la salle est la première fenêtre d'exploitation du film cinématographique. C'est le principe de la primauté de la salle qui se traduit par l'exclusivité de la première exploitation publique du film. L'exclusivité de l'exploitation du film en salles est consacrée par la loi sur la communication audiovisuelle qui organise la première étape de la chronologie des médias en interdisant l'exploitation simultanée d'un film en salles et sur support vidéo pendant un délai d'un an pouvant faire l'objet de dérogations.
    La vente, la location au public et la représentation de films fixés sur supports vidéo avant l'expiration de ce délai constitue une infraction sanctionnée pénalement.
    Des accords interprofessionnels régissent les autres fenêtres d'exploitation : diffusion des films sur les chaînes de télévision, paiement à la demande. En outre, ces accords prévoient une grille de diffusion des films à la télévision interdisant le passage à l'antenne d'oeuvres cinématographiques aux moments les plus susceptibles de porter préjudice à l'exploitation en salle du film.






    Un Public

    L'accès du public à la salle se fait par l'entremise d'un contrat de vente : l'achat d'un billet pour assister à une séance.

    La délivrance de billets aux caisses des salles de cinéma est une activité réglementée. En effet, la vente d'un billet entraîne le paiement d'une taxe, la Taxe Spéciale Additionnelle - TSA - dont la collecte alimente le Soutien Financier de l'Etat aux Industries Cinématographiques (SFEIC) dont le CNC a la gestion. Le SFEIC permet de financer les activités de la production, de la distribution, de l'exploitation ou des industries techniques du cinéma. La billetterie des salles est la base du mécanisme de financement de l'industrie cinématographique en permettant "la remontée des recettes" à l'ensemble des bénéficiaires du SFEIC.

    La billetterie fait l'objet d'un contrôle par les agents du CNC. Les billets sont édités par ce dernier ou émis par des caisses informatisées agréées. Les recettes des films font l'objet d'une déclaration par bordereau au CNC qui traite ensuite ces informations. Le bordereau est, soit manuel, soit transmis par voie électronique par le biais du système Web cinedi.

    L'exploitant est également tenu d'informer le public de la nature du visa d'exploitation des films. Ainsi, lorsqu'un film fait l'objet d'une restriction (interdiction aux mineurs de moins de 12 ans, 16 ans, 18 ans ou X), l'accès de la salle est interdit au public visé même accompagné par une personne majeure. Le non respect de ces dispositions, tant par l'exploitant que par l'éventuel accompagnant d'un mineur, est passible d'une peine d'amende.



    La promotion du cinéma est une part active de l'exploitation cinématographique. Les salles de cinéma ne se contentent pas de leur programmation pour attirer les spectateurs. Elles organisent des événements, tels que des festivals ou des avant-premières, ou participent à des opérations régionales de promotion des films ou d'envergure nationale, telles que Le Printemps du Cinéma qui se déroule au mois de mars ou La Fête du Cinéma, fin juin, organisées par la Fédération Nationale des Cinémas Français.

    En outre, de nombreux exploitants sont les partenaires d'actions en faveur du public jeune. Des opérations en faveur des scolaires (Ecole, Collège, Lycée au cinéma) permettent aux élèves de découvrir en salles des films sélectionnés par des professionnels (exploitants, distributeurs) et des enseignants. D'autres actions offrent au jeune public la possibilité d'aller découvrir le cinéma en salle, c'est par exemple le cas d'"Un Eté au Ciné".







Quelques mots-clés...
 
Art et Essai

Le classement "Art et Essai" est attribué par le CNC après avis d'une commission. Pour donner son avis, la commission du cinéma d'art et d'essai, composée de représentants des pouvoirs publics, de professionnels et de personnalités qualifiées, tient compte de la programmation d'un certain type d'oeuvres cinématographiques mais également des conditions locales, de l'environnement culturel, des actions d'animation, de l'effort accompli dans le domaine de la diffusion et de la diversité des oeuvres, des politiques de fidélisation du public ou encore, des conditions d'accueil et de confort.

Autorisation d'exercice

C'est l'autorisation délivrée par le CNC pour toute activité de projection publique d'oeuvres audiovisuelles ou cinématographiques.

Billetterie

Les billets délivrés aux caisses des salles de cinéma ont un caractère réglementaire. Edités par le CNC ou par des caisses informatisées agréées, ils permettent de déterminer le montant de la recette par film en vue de sa déclaration par bordereau au CNC.

Plan du Montrouge Palace (Marcel Oudin, architecte, 1920)


CDEC

La CDEC, ou Commission Départementale d'Equipement Cinématographique, est la commission chargée de donner une autorisation préalable à la délivrance du permis de construire dans le cas de la création ou de l'extension d'un établissement cinématographique qui dépasse un seuil calculé en nombre de fauteuils. Le seuil prévu pour la création d'un établissement est de 300 fauteuils et, pour l'extension, il est de 30 % de la surface intiale si l'extension est réalisée moins de 5 ans depuis la dernière création ou extension.

Chronologie des médias

La chronologie des médias désigne la hiérarchie des fenêtres d'exploitation d'un film. Le principe en est fixé par la loi pour la vidéo et - conformément à la directive Télévision sans Frontières - par des accords professionnels pour la télévision. Une oeuvre cinématographique est d'abord exploitée en salles, puis en vidéo, puis en paiement à la séance et sur les chaînes cryptées et enfin sur les autres services de télévision.

Location du film

C'est l'expression qui désigne le contrat passé entre le distributeur du film et l'exploitant par lequel ce dernier obtient le droit de représentation publique de l'oeuvre contre une rémunération en principe proportionnelle. D'un point de vue matériel, la location se traduit par le dépôt du film à l'exploitant pour la période convenue avec le distributeur.

Cinéma Le Vauban, St Jean Pied de Port (64)


Représentation publique

La représentation publique d'un film doit être autorisée par ses ayants-droit sinon, il s'agit d'une contrefaçon. Cette autorisation est donnée aux exploitants par les distributeurs dans le cadre de la location du film. En outre, la représentation publique d'une oeuvre cinématographique constitue une activité réglementée dont le contrôle est assuré par le CNC. Les projections publiques accessoires à une activité principale ne nécessitent pas d'autorisation d'exercice lorsqu'elles sont exceptionnelles mais elles doivent faire l'objet d'une déclaration et sont soumises à des conditions précises.

Cinéma Palace Gergovia Clermont-Ferrand (1920) : Marcel Oudin, architecte


SFEIC

Le Soutien Financier de l'Etat aux Industries Cinématographiques est un mécanisme de refinancement des industries du cinéma (production, distribution, exploitation, industries techniques, ...) alimenté par la recette des films en salles.
Concernant l'exploitation, il permet d'attribuer un soutien automatique aux investissements et un soutien sélectif pour favoriser le maintien d'un parc de salles dans des régions insuffisamment équipées.

Royal Biarritz (64)


TSA

La Taxe Spéciale Additionnelle, prévue par le code général des impôts, est la taxe prélevée sur chaque billet selon un barème adapté au prix des places. La TSA, reversée au CNC, permet de constituer le SFEIC.

Visa d'exploitation

Le visa d'exploitation est l'autorisation administrative de représentation publique d'un film cinématographique. Il est accordé par la commission de classification des films. Le visa peut autoriser un film pour tous publics, l'interdire aux moins de douze ans, aux moins de seize ans, aux moins de dix-huit ans, classer le film en X ou l'interdire totalement.

UGC Ciné Cité Lille (59)



FNCF - 15 rue de Berri - 75008 Paris - 01 53 93 76 76