MĂȘme si la consommation rĂ©-
guliĂšre de poisson et de mammi-
fÚres marins représente une
source importante dâomĂ©ga-3,
elle est Ă©galement une source
non négligeable de contami-
nants environnementaux. « Plu-
sieurs polluants rejetés à des
milliers de kilomĂštres de lâArc-
tique sâaccumulent dans la chai-
ne alimentaire et les Inuits oc-
cupent le sommet de cette
chaine », affirme Dave Saint-
Amour.
Chercheur au Centre de re-
cherche du CHU Sainte-Justine
et au DĂ©partement dâophtalmo-
logie de la Faculté de médecine
de lâUdeM, M. Saint-Amour
soutient que certains agents
toxiques quâon retrouve en
grandes quantités dans les tissus
de phoques, de bĂ©lugas et dâours
polaires engendrent mĂȘme des
anomalies sur le plan de la
transmission neuronale. « Ce-
la nâest pas Ă©tonnant, dĂ©plore
M. Saint-Amour. Le cerveau en
développement est trÚs sensible
aux agents toxiques. Or, le
niveau de mercure a presque
triplé au cours des 25 derniÚres
années chez les mammifÚres
marins de lâArctique et les BPC,
bien que bannis de lâindustrie
depuis plus de 30 ans, sont
omniprĂ©sents dans lâenviron-
nement. »
Au cours dâune confĂ©ren-
ce-midi tenue Ă lâĂcole dâopto-
métrie le 5 février dernier, le
chercheur a effectué un survol
des résultats de recherches me-
nées depuis 20 ans sur les
consĂ©quences dâune exposition
à ces polluants sur le dévelop-
pement des enfants. Ayant lui-
mĂȘme conduit une Ă©tude au-
prĂšs dâenfants inuits dâĂąge
préscolaire, dont les résultats
ont été publiés dans la revue
Neurotoxicology lâan dernier,
M. Saint-Amour parle en
connaissance de cause.
Un environnement Ă
risque
Selon les travaux présentés
par Dave Saint-Amour, une ex-
position Ă long terme aux bi-
phényles polychlorés (BPC) et
au mercure, particuliĂšrement
pendant la grossesse, peut en-
trainer des déficits cognitifs chez
les jeunes enfants, dont des
troubles de lâattention et de la
mĂ©moire. Mais, jusquâĂ tout rĂ©-
cemment, on ne savait presque
rien sur les effets de ces conta-
minants sur les fonctions senso-
rielles. « Ceci est pourtant fon-
damental pour comprendre
lâorigine des dĂ©ficits observĂ©s et
ainsi mieux orienter les straté-
gies dâintervention », dĂ©clare le
chercheur.
Spécialiste des évaluations
comportementale et Ă©lectrophy-
siologique du systĂšme visuel,
Dave Saint-Amour fait partie
depuis 2000 dâune importante
équipe de recherche québéco-
amĂ©ricaine qui sâintĂ©resse Ă
cette problématique. « Notre
but est dâĂ©tudier, notamment
avec la vision, si le traitement
de lâinformation sensorielle est
touché chez les enfants inuits
du Nunavik en considérant
comme facteur potentiellement
protecteur le rÎle des oméga-3.
Cela nâa jamais Ă©tĂ© fait aupara-
vant », dit-il.
LâĂ©tude longitudinale, qui
se poursuivra jusquâen 2010,
comprend une cohorte de
483 nouveau-nés inuits du
Nunavik. Ă leur naissance, des
échantillons de sang ont été
prélevés dans leur cordon
ombilical afin de mesurer les
concentrations dâune panoplie
de contaminants environne-
mentaux. Durant la premiĂšre
annĂ©e de vie et Ă lâĂąge de cinq
ans, les enfants ont été soumis
à diverses évaluations du déve-
Hebdomadaire dâinformation
www.umontreal.ca
Volume 41 / Numéro 21 / 19 février 2007
Ă lâĂąge de quatre ans, Jacques Bou-
cher a vu entrer dans la maison fami-
liale de Saint-Pascal de Kamouraska
un groupe de violoneux venus célé-
brer la nouvelle année. DÚs les pre-
miĂšres mesures, il a voulu aller cher-
cher son meilleur ami, dans la maison
voisine, pour quâil assiste Ă la fĂȘte
musicale. « Toute ma vie est lĂ . Jâai
toujours aimé faire profiter les autres
de ma passion », dit le nouveau
doyen de la Faculté de musique, en-
tré en fonction en octobre dernier
en remplacement de RĂ©jean Poirier,
qui avait occupé le poste pendant
neuf ans.
à son avis, la Faculté de musique
excelle sur tous les plans et mérite
une meilleure visibilité dans la com-
munauté québécoise. Son objectif,
au cours des quatre prochaines an-
nées, sera de donner un plus grand
rayonnement aux multiples activités
publiques de la Faculté. « Nous
présentons dans nos trois salles
de concert environ 580 spectacles
par année, qui attirent quelque
100 000 personnes. De lâopĂ©ra, du
jazz, de la percussion, de la musique
contemporaine, de la musique ba-
roque, du piano, de la musique
de chambre et bien dâautres sont
au programme. Il est temps que ce
dynamisme soit reconnu Ă sa juste
mesure. »
Cette jeune mĂšre a des raisons de sâinquiĂ©ter, car le poisson que mange son enfant ne contient pas seulement des omĂ©ga-3âŠ
Suite en page 2
Jacques Boucher, nouveau doyen de la
Faculté de musique
Jacques
Boucher veut
faire rayonner
la Faculté de
musique
DÚs la gestation, les enfants du Nunavik sont exposés à des
taux
anormalement élevés
de contaminants environnementaux
Les BPC et le mercure
menacent la santé
des enfants inuits
Suite en page 2
P3
RECHERCHE Ă LâUDEM
Un
superordinateur fait son
entrée.
P4
CAPSULE SCIENCE
DâoĂč
vient lâinterdiction de manger
du porc ?
P4
SCIENCE POLITIQUE
Les
jeunes aiment la politique,
mais ne votent pas.
P6
IMMUNOLOGIE
Rafick Pierre
Sekaly fait une
découverte
majeure.
Figure majeure de la musique
au Québec mais peu connu dans
le monde universitaire, le nou-
veau doyen a été réalisateur ra-
diophonique à la Société Radio-
Canada (SRC) de 1972 Ă 1997, oĂč
il a assuré la direction des émis-
sions musicales de 1984 Ă 1987.
Puis il a occupé les fonctions de
directeur général et artistique des
Jeunesses musicales du Canada
(JMC) de 1998 Ă 2002. Sous sa
conduite, les JMC ont pris un es-
sor impressionnant : rénovation
du siĂšge social qui abrite aujour-
dâhui une salle de concert de qua-
litĂ©, ouverture Ă lâĂ©chelle nationa-
le du concours dâart vocal,
création du Concours musical in-
ternational de Montréal, implan-
tation dâun service de communi-
cation.
« Je considÚre mon poste ac-
tuel comme le troisiÚme grand dé-
fi de ma carriÚre », indique le
doyen en faisant référence à ses
années passées à la SRC et aux
JMC. Il nâinclut pas dans le comp-
te sa propre activité de musicien.
Titulaire depuis 21 ans des orgues
de lâĂ©glise Saint-Jean-Baptiste, Ă
Montréal, il a enregistré une ving-
taine de disques. Il donne envi-
ron 20 concerts par année, no-
tamment en compagnie de sa
femme, la violoniste Anne Robert.
Jean Chrétien au trombone ?
MĂȘme si M. Boucher a reçu
une formation universitaire en
bonne et due forme dans les an-
nées 70 (baccalauréat et licence
en interprétation organistique de
lâUniversitĂ© Laval), il nâa pas fait
carriĂšre dans le milieu de lâensei-
gnement. « Je me suis toujours
senti en filiation directe avec les
professeurs et les Ă©tudiants de la
FacultĂ© de musique de lâUniver-
sitĂ© de MontrĂ©al, prĂ©cise-t-il. Jâai
toujours reconnu la qualité de la
formation offerte ici. Quand jâĂ©tais
Ă Radio-Canada et que jâembau-
chais des recherchistes, 9 sur 10
venaient de cette faculté. »
Le doyen entend laisser sa
marque comme celui qui aura fait
rayonner la Faculté, à une époque
oĂč la visibilitĂ© sur la scĂšne pu-
blique est un facteur de réussite.
DÚs le début de son mandat, il
sâest fixĂ© comme objectif de ren-
contrer au moins une fois par mois
un acteur clé du milieu politique
ou du monde de affaires afin de
le sensibiliser aux besoins dâune
faculté de musique. Son agenda
nâa pas tardĂ© Ă se remplir. « Jâen
suis bien au-delà de mes prévi-
sions », signale-t-il trois mois aprÚs
son entrée en fonction.
Il se rĂ©jouit dâavoir vu lâan-
cien premier ministre du Québec
Bernard Landry assister au plus
rĂ©cent concert de lâOrchestre de
lâUniversitĂ© de MontrĂ©al. Quant
Ă lâex-premier ministre du Cana-
da Jean Chrétien, il est venu en
compagnie de sa femme Ă un
concert de jazz en novembre der-
nier. M. Chrétien était si enthou-
siaste Ă la fin du concert que, aprĂšs
avoir félicité un à un tous les étu-
diants qui avaient donné le spec-
tacle, il a dit quâil ressortirait son
trombone Ă coulisse du placard...
Finie lâhumilitĂ© !
« Les gens de lâindustrie nâen
font pas assez pour le financement
de la culture », mentionne le
doyen Boucher, qui souhaite
voir les choses chan-
ger dans un avenir
prochain. Il est
conscient dâentamer
son mandat Ă un mo-
ment oĂč les temps
sont durs pour les
universités québécoi-
ses en ce qui concer-
ne leur financement.
« Raison de plus pour
faire preuve dâune
plus grande créativi-
té », lance-t-il.
Au mois de
décembre, le don
posthume dâun piano Steinway Ă
la Faculté par Denis Regnaud a
révélé le style de gestion du nou-
veau doyen. PlutĂŽt que de simple-
ment apposer sur lâinstrument une
plaque portant le nom du dona-
teur, on a créé un fonds Denis-
Regnaud qui attribuera annuelle-
ment des bourses aux Ă©tudiants
en musique pour le clavier (pia-
no, clavecin, orgue). Le tout a été
célébré par un concert auquel ont
pris part cinq professeurs de la
Faculté. Pour inciter les donateurs
Ă©ventuels Ă participer Ă la capita-
lisation du Fonds, le doyen a signé
554 lettres personnalisées adres-
sées aux gens qui ont cÎtoyé le
donateur. « On veut amasser
10 000 $ par année pour ce fonds.
On y arrivera ! »
La Faculté de musique, ce
sont 700 Ă©tudiants et 42 profes-
seurs. Sây ajoutent une centaine
de chargés de cours et une qua-
rantaine dâaccompagnateurs. Ces
gens ont en commun la passion
de la musique et le souci de la qua-
lité, fait remarquer M. Boucher.
« Il faut cesser dâĂȘtre humble. »
Dans ses rĂȘves, il imagine
que les grands ensembles de la
Faculté partent en tournée. « Et
jâespĂšre me dĂ©barrasser de mes
fantasmes... en les réalisant »,
conclut-il en riant.
Mathieu-Robert Sauvé
2
FORUM
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
loppement physique, moteur,
sensoriel et intellectuel. Tout un
éventail de méthodes ont été
employées, dont des mesures élec-
trophysiologiques de lâactivitĂ©
cérébrale.
Les résultats révÚlent que les
nouveau-nés du Nunavik sont ex-
posés à des taux anormalement
élevés de BPC et de mercure. « Les
concentrations de composés orga-
nochlorés retrouvées dans leur
cordon ombilical sont quatre fois
plus grandes pour ce qui est
des BPC et de 15 Ă 20 fois plus
grandes pour le mercure que celles
mesurées dans le sud du Québec.
Nous avons remarqué des asso-
ciations entre lâexposition Ă ces
contaminants et lâexistence de dĂ©-
ficits neurocomportementaux,
surtout au cours de la premiĂšre
annĂ©e de vie. Câest inquiĂ©tant »,
souligne Dave Saint-Amour.
Exposition intra-utérine
Comme bien dâautres pol-
luants organiques persistants, les
BPC et le mercure sont transmis
au fĆtus par la mĂšre. « Les BPC et
le mercure sâaccumulent dans les
tissus des ĂȘtres vivants, traversent
la barriĂšre placentaire et peuvent
perturber le développement du
fĆtus Ă un moment oĂč il est par-
ticuliÚrement vulnérable », in-
dique le chercheur. Certaines
Ă©tudes entreprises au Nunavik et
ailleurs dans le monde, notam-
ment aux ßles Féroé (archipel da-
nois), laissent Ă penser que les
nouveau-nés en subissent les
contrecoups.
Mais lâimpact de lâexposition
intra-utérine à certains contami-
nants suscite encore la controver-
se dans les milieux scientifiques.
« Ă lâheure actuelle, il est impos-
sible de dire si les problĂšmes
dâapprentissage que peuvent vivre
des jeunes du Nunavik sont dus
Ă des conditions familiales ou
sociales difficiles ou encore Ă
lâexposition aux contaminants »,
admet M. Saint-Amour.
Les taux découverts chez les
enfants inuits au Canada sont
comparables à ceux trouvés chez
les enfants dâautres rĂ©gions (dont
ceux du lac Michigan et des Pays-
Bas) qui souffrent de divers pro-
blĂšmes cognitifs. Cependant, les
consĂ©quences Ă long terme de lâex-
position aux contaminants pour
les enfants du Nunavik ne seront
pas connues avant quâils soient
de nouveau Ă©valuĂ©s, soit Ă lâĂąge
de 10 ans.
Un traitement de
lâinformation sensorielle
hors norme
Pour lâinstant, lâenregistre-
ment de lâactivitĂ© Ă©lectrique du
cerveau Ă partir des potentiels Ă©vo-
qués visuels auprÚs de 102 sujets
de la cohorte initiale démontre
une certaine influence bénéfique
des oméga-3 en ce qui concerne le
traitement visuel. Du moins chez
les enfants ùgés de cinq ans. Par
contre, ces acides gras ne sem-
blent pas empĂȘcher lâaction nĂ©-
faste des contaminants. De fortes
corrélations existent en effet entre
la performance aux tests visuels
et le degrĂ© dâexposition aux BPC
et au mercure.
« Plus le taux de mercure chez
les jeunes est élevé, plus la laten-
ce des potentiels évoqués visuels
est courte », mentionne Dave
Saint-Amour. Autrement dit, la
transmission de lâinformation vi-
suelle semble se faire plus rapide-
ment que dâhabitude. Et ce nâest
pas nécessairement bon signe.
« Vous savez, il y a plusieurs rai-
sons qui expliquent pourquoi les
potentiels évoqués visuels pren-
nent un certains temps Ă se mani-
fester, signale M. Saint-Amour.
Cela indique que les circuits et
processus neuronaux fonction-
nent normalement. »
Le chercheur a noté un pro-
cessus contraire en ce qui a trait
aux BPC. « La latence était beau-
coup plus longue que la norma-
le. » Signe dâune irrĂ©gularitĂ©, on
retrouve le mĂȘme phĂ©nomĂšne
chez les personnes atteintes de di-
verses maladies, dont la sclérose
en plaques. Ce qui fait croire Ă
M. Saint-Amour que le problĂšme
des latences neuronales longues et
courtes pourrait ĂȘtre dĂ» Ă des
anomalies dans le traitement de
lâinformation. « Câest ce que nous
tentons présentement de mieux
comprendre. »
Une subvention de 4,7 M$
GrĂące Ă une subvention
des National Institutes of Health
de 4,7 M$, lâĂ©quipe quĂ©bĂ©co-
américaine poursuit donc son étu-
de sur le développement des
enfants inuits du Grand Nord.
Outre Dave Saint-Amour,
Ăric Dewailly, Pierre Ayotte,
CĂ©lyne Bastien et Gina Muckle,
de lâUniversitĂ© Laval, Joseph et
Sandra Jacobson, de lâUniversitĂ©
Wayne State, Ă Detroit, et Charles
Nelson, de lâUniversitĂ© Harvard,
composent lâĂ©quipe responsable
du projet. Les conclusions défi-
nitives de lâĂ©tude seront connues
vers la fin de 2010.
Dominique Nancy
Les BPC et le mercure menacent la santé des enfants inuits
Suite de la page 1
Jacques Boucher veut faire rayonner
la Faculté de musique
Suite de la page 1
Le projet dâune boite Ă chansons,
genre trĂšs en vogue au QuĂ©bec Ă
cette Ă©poque, murissait depuis le
début des années 60. Souvent re-
légué aux oubliettes, il renaissait
obstinĂ©ment, succĂ©dant Ă lâeffer-
vescence des campagnes Ă©lecto-
rales de lâAGEUM.
Les défis étaient de taille pour
ses jeunes promoteurs ; il fallait
dâabord trouver un local suffisam-
ment grand et qui conviendrait aux
activités envisagées. Le désir des
Ă©tudiants Ă©tait de recrĂ©er lâambian-
ce dâun quartier latin, de constituer
un centre de vie culturelle tel le Ca-
fé de Flore, à Paris. On songea tout
dâabord Ă une ancienne Ă©glise an-
glicane située rue Jean-Brillant, mais
les travaux de réfection se seraient
avérés trop couteux. Le seul local
disponible dans le quartier semblait
ĂȘtre cette grande salle dĂ©nudĂ©e si-
tuĂ©e Ă lâangle de lâavenue Decelles
et du chemin Queen-Mary et qui
avait servi de cafĂ©tĂ©ria dâurgence
lors du boycottage de la cafétéria de
lâUdeM en 1966. Il fallait mainte-
nant voir comment on allait renta-
biliser ces 8000 pieds carrés.
La diversité des services
offerts et la durĂ©e dâexploitation,
jusquâĂ 16 heures par jour, sem-
blaient ĂȘtre la solution. Le CafĂ©
Campus sera effectivement ouvert
tous les jours de 8 h Ă minuit et se-
ra Ă la fois restaurant le jour et tour
Ă tour boite Ă chansons, disco-
thÚque, jazzthÚque, salle de théùtre,
de réception et de réunion le soir.
LâĂąge minimal requis pour les soi-
rées de discothÚque est de 20 ans ;
le prix de la biĂšre et du vin est de
0,40 $.
Le 10 février 1967 sera le soir
de lâavant-premiĂšre Ă©tudiante avec
en vedette Georges Dor et Stépha-
nie. Quelques avant-premiĂšres plus
tard a lieu lâouverture officielle dans
une joyeuse atmosphĂšre avec cock-
tail de lancement, illustres invités,
bar ouvert et prestation dâartistes.
Et ce ne sera quâun dĂ©but, plusieurs
personnalités de la scÚne culturel-
le quĂ©bĂ©coise sây produiront : Jean-
Pierre Ferland, Jean-Guy Moreau,
Pauline Julien, Louise Forestier, Ro-
bert Charlebois, Claude Dubois, les
Cyniques, etc.
De nombreux Ă©tudiants y
occuperont divers emplois : ils
seront disques-jockeys, prĂ©posĂ©s Ă
la restauration, aux services aux
tables, Ă lâĂ©clairage, Ă la mise en
scĂšne, au son ; dâautres encore sâes-
saieront à la chanson, à la poésie,
à la musique ou à la comédie. Le
Café poursuivra ses activités à la
mĂȘme adresse jusquâen 1993,
annĂ©e oĂč il dĂ©mĂ©nagera rue Prince-
Arthur Ă la suite de multiples
plaintes des résidants du quartier.
Source :
Division des archives, Université de Mon-
trĂ©al. Fonds de lâAssociation gĂ©nĂ©rale des
Ă©tudiants de lâUniversitĂ© de MontrĂ©al
(P0033).
Le Quartier latin,
1967.
Saviez-vous
que�
Le Café Campus a ouvert ses
portes en 1967
Hebdomadaire
dâinformation de
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Dave Saint-Amour
Georges Dor en 1967
Jacques Boucher a pour mission de mieux faire
connaitre les forces de la Faculté de musique.
A
RCHIVES
D
E
L
A
F
AMILLE
D
OR
. P
HOTO
: J
EAN
-P
IERRE
L
ECLERC
.
Le
DĂ©partement
de chirurgie
compte se doter
dâun simulateur
haptique
Voici des chiffres à faire frémir :
pour la seule année 2000, une
Ă©quipe du Groupe de recherche
interdisciplinaire en santé a éva-
luĂ© Ă 185 000 le nombre dâerreurs
médicales survenues au Canada.
Il en a rĂ©sultĂ© un million dâheures
dâhospitalisation supplĂ©mentaires
et les chercheurs estiment que de
9000 à 24 000 décÚs auraient pu
ĂȘtre Ă©vitĂ©s nâeĂ»t Ă©tĂ© ces « Ă©vĂšne-
ments indésirables ».
« Quatre-vingts pour cent de
ces fautes surviennent en situa-
tion dâapprentissage au cours de
laquelle un médecin doit maitriser
un nouvel instrument ou un nou-
veau type dâintervention, affirme
SĂ©bastien Delorme, agent de re-
cherche au Conseil national de
recherches du Canada (CNRC).
La plupart de ces erreurs sont liées
Ă des chirurgies hautement com-
plexes et prĂšs de 40 % pourraient
ĂȘtre prĂ©venues par un meilleur en-
trainement. »
Câest tout dire de lâimportan-
ce du contrĂŽle des gestes et de la
technologie. Selon les données
recueillies par lâagent de re-
cherche, un entrainement sur un
appareil de rĂ©alitĂ© virtuelle dâabla-
tion de la vésicule biliaire permet
de gagner 29 % du temps néces-
saire à une telle intervention et ré-
duit de cinq fois le risque de bles-
sure chez le patient.
Réalité virtuelle haptique
La technologie peut donc ĂȘtre
dâun grand secours pour Ă©viter les
erreurs médicales. Sébastien
Delorme présentait, le 12 février,
lâĂ©tat dâun projet de recherche
commun du CNRC, du DĂ©parte-
ment de chirurgie de la Faculté
de mĂ©decine et de lâunitĂ© de
laparoscopie avancĂ©e de lâhĂŽpi-
tal Maisonneuve-Rosemont, pro-
jet portant sur une nouvelle géné-
ration dâappareils simulateurs de
laparoscopie.
Pour permettre aux Ă©tudiants
et aux mĂ©decins de sâexercer Ă pra-
tiquer des interventions par lapa-
roscopie, il existe des simulateurs
qui reconstituent en trois dimen-
sions et de façon trÚs réaliste di-
verses parties du corps oĂč de telles
chirurgies sont possibles. Ces si-
mulateurs peuvent mĂȘme faire en-
tendre les gémissements plaintifs
du patient virtuel si lâopĂ©rateur ef-
fectue une fausse manĆuvre ou
manque de délicatesse.
« Mais ces appareils ne ren-
dent pas la réalité du contact avec
les tissus de lâorganisme ni la rĂ©-
sistance de ces tissus lorsque nous
manipulons les outils chirurgi-
caux », souligne le D
r
Serge
Dubé, vice-doyen aux affaires pro-
fessorales à la Faculté de médeci-
ne. Le défi des concepteurs en
rĂ©alitĂ© virtuelle est donc dâajou-
ter cette dimension aux prochains
appareils. Câest ce quâon appelle la
dimension haptique du mouve-
ment.
Le néologisme « haptique »
dĂ©signe lâensemble des compo-
santes sensorielles â soit kinesthĂ©-
siques, tactiles et thermiques â qui
entrent dans la sensation du tou-
cher. Lâun des Ă©lĂ©ments essentiels
est le « retour de force », qui nous
permet de déployer la force né-
cessaire dans lâaccomplissement
dâun geste, que ce soit pour sou-
lever un verre, tourner un volant
dâautomobile ou serrer une main.
« Le programme haptique sur
lequel nous travaillons permettra
Ă lâopĂ©rateur de ressentir la rĂ©sis-
tance dâun tissu lorsque ses ins-
truments entreront en contact
avec celui-ci, par exemple avec la
paroi intestinale, explique SĂ©bas-
tien Delorme. Le retour de force
nĂ©cessitera que lâopĂ©rateur exerce
la bonne pression pour faire adé-
quatement son intervention.
Lâimage montrera Ă©galement en
temps réel la déformation des
tissus au moment dâun contact
accidentel ou pendant lâinterven-
tion. »
Assurer lâacquisition des
connaissances
Le programme de simulation
sur lequel porte le projet concer-
ne les interventions dans la zone
du bassin, soit les laparoscopies
en gynécologie et en urologie ain-
si que pour lâablation de tumeurs
colorectales.
MĂȘme si les constituants mĂ©-
caniques dâun tel appareil existent
dĂ©jĂ et sont produits ici mĂȘme, Ă
Montréal, par la firme MPB, qui
fabrique les meilleures piĂšces du
genre dans le monde, le logiciel
haptique nâen est quâĂ sa phase
embryonnaire. Serge Dubé espÚ-
re entrer en possession du pro-
duit final en 2010.
Sâil accorde sa confiance Ă
cette technologie, le vice-doyen
jette toutefois un regard critique
sur celle-ci. « Câest une vĂ©ritable
rĂ©volution dans lâenseignement,
mais il ne faut pas que ces appa-
reils ne soient que des gadgets, dé-
clare-t-il. Il faut sâassurer que les
connaissances sont transmises et
quâil en reste quelque chose chez
les étudiants. »
Lui-mĂȘme nâa pas appris Ă
partir de simulateurs, mais lâĂ©va-
luation des apprentissages réali-
sĂ©s Ă lâaide de tels appareils dĂ©-
montre, à son avis, leur utilité et
leur pertinence.
Daniel Baril
LâAltix 4700
est
Ă la disposition
de 350 chercheurs
québécois
Le superordinateur à mémoire
partagée le plus puissant du pays,
lâAltix 4700, est maintenant Ă la
disposition de 350 scientifiques
québécois grùce à un important
don en nature de SGI Canada au
Réseau québécois de calcul de
haute performance (RQCHP). Le
RQCHP regroupe les cinq Ă©tablis-
sements universitaires suivants :
lâUniversitĂ© de MontrĂ©al, lâUni-
versitĂ© de Sherbrooke, lâUniver-
sitĂ© Concordia, lâĂcole polytech-
nique et lâUniversitĂ© Bishopâs.
Le RQCHP abrite aujourdâhui
le superordinateur Altix 4700 qui,
avec 384 processeurs Ă cĆur
double (768 cĆurs) et 1536 giga-
octets de mémoire vive (à titre com-
paratif, un ordinateur personnel
contient de 1 Ă 2 gigaoctets), aug-
mentera la capacité et la perfor-
mance du parc dâĂ©quipements ser-
vant au calcul de haute
performance.
« Le geste de SGI mĂ©rite dâau-
tant plus dâĂȘtre soulignĂ© quâil per-
met Ă des centres de recherche
quĂ©bĂ©cois dâĂȘtre concurrentiels
dans un environnement oĂč la
technologie évolue rapidement »,
a expliqué le recteur, Luc Vinet, au
cours dâune cĂ©rĂ©monie destinĂ©e
Ă remercier SGI Canada et Ă
laquelle assistaient Robert David-
son, directeur des programmes et
de lâexploitation Ă la Fondation
canadienne pour lâinnovation,
Martin Pinard, président de SGI
Canada, ainsi que David Séné-
chal et Michel CÎté, respective-
ment directeur et directeur de
site Ă lâUniversitĂ© de MontrĂ©al
pour le RQCHP.
« Avec lâAltix 4700, nos cher-
cheurs peuvent à présent compter
sur lâun des superordinateurs les
plus puissants du monde, a ajou-
té Joseph Hubert, doyen de la
Faculté des arts et des sciences.
De nouvelles portes sâouvriront Ă
eux, alors quâils pourront entre-
prendre des calculs dâune telle
complexitĂ© que ceux-ci nâĂ©taient
pas envisageables auparavant. »
Les Ă©tudes des chercheurs du
RQCHP portent sur un vaste
Ă©ventail de domaines scientifiques
et leurs retombées influent sur plu-
sieurs secteurs dâactivitĂ© : santĂ© et
pharmaceutique, automobile, aé-
ronautique, physique, chimie et
nanotechnologie, pour ne nom-
mer que ceux-lĂ . La performance
des superordinateurs auxquels les
chercheurs ont accÚs a des réper-
cussions certaines sur les possibi-
litĂ©s de recherche. LâAltix 4700
permettra de réduire considéra-
blement la durée des simulations,
certaines passant mĂȘme de deux
semaines Ă deux minutes.
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
FORUM
3
Affaires
universitaires
Un superordinateur Ă
mémoire partagée est
logĂ© Ă lâUdeM
CĂ©line Pilon, directrice de la cam-
pagne Centraide Ă lâUdeM depuis
prÚs de 20 ans, se réjouit du résul-
tat de la collecte de 2006 qui,
cette année encore, a dépassé son
objectif. Le total atteint est de
362 383 $ pour 1300 dons. Et
lâobjectif initial avait Ă©tĂ© fixĂ© Ă
350 000 $. Signalons par ailleurs
que la participation des Ă©tudiants
sâest chiffrĂ©e Ă 3609 $.
Ces résultats, qui une fois de plus
attestent de la générosité de la
communautĂ©, ont pu ĂȘtre
obtenus grĂące au travail du
comité local de Centraide,
présidé par le professeur émérite
Gilles Rondeau, assisté de nom-
breux bénévoles qui ont tendu la
main au bénéfice des plus dému-
nis.
Centraide :
objectif
dépassé !
De gauche à droite, Guy Berthiaume, vice-recteur au développement et aux relations avec les diplÎmés, Michel CÎté,
Robert Davidson, Martin Pinard, le recteur Vinet et Joseph Hubert
Soins
et pédagogie
Réalité virtuelle en
laparoscopie
Trouvez le nom commun qui a successivement désigné les éléments
ci-dessous.
âą Une Ă©toffe de laine
âą Un tapis de table fait de cette Ă©toffe
âą Une table ainsi couverte
âą Une table de travail
âą La piĂšce oĂč se trouve une table de travail
âą Un lieu de travail
âą Un Ă©tablissement ouvert au public
âą Lâensemble des employĂ©s travaillant dans un bureau
Ce test linguistique a été élaboré par le Centre de communication
Ă©crite (CCE) et reproduit avec son autorisation. Source : < www.cce.umon-
treal.ca>. Pour plus de détails, consultez le site du Centre sous la
rubrique « Boite à outils ».
test
linguistique
RĂ©ponse:
Ces définitions sont celles du nom
bureau,
dont le sens
a évolué par métonymie: avec le temps, le terme désignant le contenu
sâest appliquĂ© aussi au contenant ou le terme dĂ©signant la partie sâest
appliquĂ© au tout. LâĂ©volution du mot
toilette
est un autre exemple
dâextension mĂ©tonymique. DĂ©signant dâabord une petite toile, le nom
toilette
a désigné ensuite le linge sur lequel étaient déposés les acces-
soires servant Ă la parure, puis les accessoires mĂȘmes, ensuite le meuble
garni des accessoires, enfin lâaction de sâhabiller ou dâeffectuer les soins
de propreté du corps. Au pluriel, le terme
toilettes
désigne maintenant
les cabinets dâaisance.
Louise LĂ©vesque, coordonnatrice du Laboratoire dâenseignement chirurgical
de lâhĂŽpital Maisonneuve-Rosemont, et Serge DubĂ© montrent le fonctionnement
du simulateur de laparoscopie actuel.
P
HOTO
: Ă
VE
-L
INE
M
ONT
AGNE
.
4
FORUM
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
Mais lâintĂ©rĂȘt des
jeunes tombe quand
ils sont en Ăąge
dâaller voter
Lorsquâon invite les adolescents
montrĂ©alais Ă Ă©valuer leur intĂ©rĂȘt
pour la politique sur une Ă©chelle
de 0 Ă 10, plusieurs donnent une
note supĂ©rieure Ă 6. « Câest dĂ©jĂ
pour moi une surprise. Les jeunes
sont moins apathiques que les pré-
jugés le laissent entendre », com-
mente Eugénie Dostie-Goulet,
dont la thĂšse de doctorat au DĂ©-
partement de science politique
porte sur les adolescents et la po-
litique.
Pour les besoins de sa re-
cherche, la jeune femme de 26 ans
a menĂ© une vaste enquĂȘte auprĂšs
de 760 Ă©lĂšves de troisiĂšme secon-
daire afin de connaitre leurs opi-
nions sur lâactualitĂ© politique. Les
réponses obtenues sont éton-
nantes. « Les jeunes ont des
opinions éclairées sur plusieurs
sujets liés à la politique nationale
ou internationale, dit-elle. Ils sont
de plus trĂšs critiques. Le menson-
ge, la corruption, les fausses pro-
messes, câest ce quâils dĂ©testent le
plus chez les politiciens. »
LâoriginalitĂ© de cette recher-
che est quâelle sâĂ©tend sur plu-
sieurs années, de façon à voir
comment progressera le rapport
des jeunes avec la politique. « La
littérature scientifique sur le sujet
est extrĂȘmement rare et remonte
aux années 70, explique la cher-
cheuse. Ă cette Ă©poque, on a sur-
tout Ă©tudiĂ© lâinfluence parentale
sur les attitudes Ă©lectorales des
enfants. Notre étude est différen-
te. Il sâagit de dĂ©couvrir les atti-
tudes et opinions des jeunes eux-
mĂȘmes pour ce quâelles sont et de
voir comment elles vont Ă©voluer
sur plusieurs années. »
Les jeunes sondés avaient 14
et 15 ans au moment de la pre-
miĂšre rencontre. Ils seront de nou-
veau interrogés en quatriÚme puis
en cinquiĂšme secondaire. Ils au-
ront ensuite le droit de vote.
VoilĂ oĂč la recherche dâEu-
génie Dostie-Goulet pourrait
sâavĂ©rer le plus utile. « Moins du
quart des Ă©lecteurs de 18 ans
votent, souligne-t-elle. On aime-
rait mieux comprendre pourquoi
ils sont si nombreux Ă sâabstenir. »
Ce phĂ©nomĂšne de lâabsten-
tion chez les jeunes adultes préoc-
cupe les politologues. Selon une
recherche de Jon Pammett et
Lawrence LeDuc effectuée en
2000, 38,2 % des Ă©lecteurs cana-
diens qui ont eu 18 ans en 1993
ont exercé leur droit de vote aux
élections fédérales de 2000. Ceux
qui ont atteint la majorité en 1997
nâont Ă©tĂ© que 27,5 % Ă dĂ©poser
leur bulletin dans lâurne et ceux
qui pouvaient voter pour la pre-
miĂšre fois en 2000 nâont Ă©tĂ© que
22,4 % Ă le faire.
Pourquoi sâabstiennent-ils au-
tant sâils manifestent un intĂ©rĂȘt
pour la politique plus tĂŽt dans
lâadolescence, comme tend Ă le dĂ©-
montrer lâĂ©tude de M
me
Dostie-
Goulet ? « Pour lâinstant, câest une
question sans rĂ©ponse. Et jâaime
les questions sans réponse », lan-
ce la doctorante en esquissant un
sourire.
Ătudes et engagement
Sous la direction dâAndrĂ©
Blais, professeur spécialisé dans
lâanalyse du comportement de
lâĂ©lectorat, EugĂ©nie Dostie-
Goulet poursuivra sa recherche
au cours des trois prochaines an-
nées.
Sâil est vrai quâil serait hĂątif
de tirer la moindre conclusion, el-
le Ă©met lâhypothĂšse que des
mythes entourent les jeunes au
chapitre de leur engagement dans
la vie publique. « Jâai le sentiment
que les jeunes sont plus politisés
quâon pense, indique-t-elle. Cette
recherche permettra peut-ĂȘtre dâen
apprendre davantage à ce sujet. »
Il est important dâĂ©tudier cet-
te question puisque les habitudes
Ă©lectorales sâacquiĂšrent trĂšs tĂŽt
dans la vie. Des chercheurs ont
découvert dans les années 90 que
voter est une habitude qui se
prend jeune. Et inversement. Câest
donc essentiel de comprendre ce
qui distingue les jeunes qui négli-
gent dâexercer leur droit de vote et
ceux qui, au contraire, sâen prĂ©-
valent Ă la premiĂšre occasion.
En matiĂšre dâengagement,
Eugénie Dostie-Goulet est un mo-
dĂšle en soi. PrĂ©sidente de lâAsso-
ciation des Ă©tudiants des cycles
supérieurs en science politique de
lâUniversitĂ© de MontrĂ©al, elle a
toujours accordé une bonne pla-
ce à ses propres activités poli-
tiques. En 2001 et 2002, par
exemple, alors quâelle Ă©tudiait Ă
lâUniversitĂ© de Sherbrooke, elle a
animĂ© lâĂ©mission Politique en
direct Ă la station CFLX 95,5. Du-
rant les mĂȘmes annĂ©es, elle a par-
ticipé à une simulation des tra-
vaux de lâOrganisation des
Nations unies. Puis, en 2005, el-
le a suivi un stage dâĂ©tĂ© en psy-
chologie politique Ă lâUniversitĂ©
Stanford.
Vote et mariage gai
Sur le plan universitaire, sa
recherche précédente a obtenu
beaucoup de succĂšs dans le sec-
teur de la science politique. En
2005, lâĂ©tudiante dĂ©posait Ă
lâUdeM un mĂ©moire de maitrise
sur lâimpact du mariage gai sur les
élections fédérales de 2004. Un
article synthĂšse vient de paraitre
dans la revue Politique et socié-
tés (volume 25, numéro 1).
Dans ce travail, la jeune
femme a voulu savoir si le débat
sur le mariage gai a influencé les
électeurs. La réponse est oui.
« Nous avons calculé que plus de
4 électeurs sur 100 ont voté diffé-
remment en raison de cet enjeu
Ă©lectoral, signale-elle. Une pro-
portion qui a atteint six pour cent
dans lâOuest canadien. »
Câest grĂące Ă lâĂtude Ă©lecto-
rale canadienne (une Ă©tude dont
André Blais est un des principaux
responsables) quâEugĂ©nie Dostie-
Goulet a pu obtenir les réponses
de 3275 entrevues réalisées avant
et aprĂšs les Ă©lections qui ont
porté les conservateurs de Ste-
phen Harper au pouvoir. « Nous
croyons que, si cet enjeu nâavait
pas fait partie des considérations
des électeurs, le résultat du scru-
tin aurait été différent, certains
électeurs ayant alors voté pour un
autre parti que celui quâils ont
choisi », écrit-elle dans sa présen-
tation des résultats.
Cependant, le Parti conser-
vateur (seul parti ouvertement op-
posĂ© au mariage gai) nâa pas bĂ©nĂ©-
ficié du déplacement des votes,
puisque les Ă©lecteurs qui Ă©taient
en faveur du mariage gai ont été
nombreux à privilégier le Nou-
veau Parti démocratique ou le Par-
ti libéral. « Cette étude démontre
finalement que mettre lâaccent sur
les enjeux moraux, mĂȘme si cela
suscite lâĂ©motion, nâa pas vraiment
plus dâeffet quâune campagne sur
lâĂ©conomie ou la santĂ© », conclut-
elle.
Mathieu-Robert Sauvé
Recherche
en science politique
Les adolescents
sâintĂ©ressent plus quâon
pense Ă la politique
Ces Ă©lĂšves de lâĂ©cole River Heights Elementary School, en Alberta, dĂ©pouillent les votes Ă lâissue dâun scrutin local. Ă
lâadolescence, ils auront dĂ©jĂ une certaine expĂ©rience du processus Ă©lectoral.
On apprenait, il y a quelques
semaines, que les garderies de la
Commission scolaire de Montréal
ont banni le porc des menus
destinés aux enfants. La raison ? Il
devenait trop difficile de gérer les
repas sâil fallait accommoder les
juifs et les musulmans de stricte
observance qui refusent toute
consommation de porc, animal
considéré comme impur.
Plusieurs associent ce rejet
du porc Ă son apparente malpro-
preté. Cette justification ne tient
pas la route quand on considĂšre
les conditions hygiéniques dans
lesquelles vivent dâautres animaux,
comme la chĂšvre ou la vache, qui
ne font pas lâobjet dâinterdits reli-
gieux. LâhypothĂšse de lâhygiĂšne
perd tout fondement lorsquâon
remonte Ă la source biblique de
lâinterdiction, soit le LĂ©vitique et le
DeutĂ©ronome, oĂč le porc figure
parmi une vingtaine dâautres ani-
maux qui ne doivent pas ĂȘtre
consommés. La liste va du liÚvre
jusquâĂ lâaigle en passant par
lâautruche et la grenouille.
Il est en fait défendu de
manger tout animal dont le sabot
est fendu mais qui ne rumine pas,
tout animal qui rumine mais dont
le sabot nâest pas fendu, tout ce
qui vit dans lâeau mais qui nâa pas
de nageoires ou dâĂ©cailles, tout
oiseau qui nâest pas granivore, tout
reptile et tout insecte, sauf la sau-
terelle. Ils sont tous qualifiĂ©s dâim-
purs. Le porc nâest quâun exemple
parmi dâautres dâanimal dont le sa-
bot est fendu mais qui nâest pas
un ruminant.
Prototype pur
Pourquoi ces animaux sont-
ils impurs ? Lâexplication la plus
plausible a été proposée au milieu
des annĂ©es 60 par lâanthropologue
Mary Douglas. Les animaux qui
tombent sous le coup de lâinterdit
possÚdent des caractéristiques qui
les associent à deux espÚces diffé-
rentes : ils sont impurs en ce sens
quâils ne correspondent pas au pur
prototype de la catégorie dans la-
quelle les anciens HĂ©breux les ran-
geaient.
Câest aussi lâexplication que
privilégie Jean Duhaime, profes-
seur et doyen de la Faculté de théo-
logie et de sciences des religions.
« Les rÚgles alimentaires structu-
rent et renforcent lâidentitĂ© dâun
groupe, observe-t-il. Tout groupe
se perçoit comme étant distinct et
veut Ă©viter sa dissolution. Pour ce-
la, il doit empĂȘcher les âmĂ©langesâ.
Si cette rĂšgle vaut pour les humains,
elle vaut aussi pour les animaux ;
ceux qui semblent avoir enfreint la
rÚgle sont considérés comme im-
purs et il faut sâen Ă©carter », sou-
ligne le thĂ©ologien en prĂ©cisant lâin-
terprétation de Mary Douglas.
La tradition juive attribue le
DeutĂ©ronome et le LĂ©vitique Ă
MoĂŻse, dont lâexistence, non attes-
tée, remonterait au 13
e
siĂšcle avant
notre Úre. Toutefois, la rédaction
de ces livres date des 5
e
et 6
e
siĂšcles
avant JĂ©sus-Christ.
Lâaccommodement
de Paul
Si les musulmans ont conser-
vé ces interdits alimentaires issus
du judaĂŻsme, pourquoi le christia-
nisme nâen a-t-il pas fait autant ?
MĂȘme si lâĂglise chrĂ©tienne des pre-
miers temps Ă©tait une branche du
judaïsme, « Paul a voulu accueillir
dans cette Ăglise tous ceux qui ve-
naient de lâextĂ©rieur du judaĂŻsme »,
explique Jean Duhaime. Pour ce
fondateur du christianisme, la si-
gnification de la conversion Ă©tait
plus importante que lâadhĂ©sion
stricte au « code de vie » du judaïs-
me ancien.
Toute nouvelle religion Ă©tant
faite de syncrétisme, cet « accom-
modement raisonnable », le pre-
mier de lâhistoire du christianisme,
a sans doute favorisĂ© lâexpansion de
cette nouvelle religion.
Les interdits alimentaires
de la loi juive constituent, en défi-
nitive, un excellent exemple de ce
qui, en psychologie développe-
mentale, est appelé la « perception
essentialiste » : lâĂȘtre humain, dĂšs
les premiÚres années de la vie, per-
çoit les ĂȘtres et les objets comme
sâils avaient une essence interne
qui les distingue. Ce processus co-
gnitif est manifestement Ă lâĆuvre
dans les fonctions de catégorisa-
tion sociale, qui nous amĂšnent Ă
classer les personnes en fonction
de similitudes réelles ou imagi-
naires.
Daniel Baril
capsule
science
DâoĂč vient lâinterdiction
de manger du porc ?
www.iForum.umontreal.ca
Le site dâinformation
de lâUniversitĂ© de MontrĂ©al
Publié par le Bureau des communications et des relations publiques.
Le cochon a le sabot fendu, mais ne rumine pas.
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
FORUM
5
Lâaspirine demeure
un excellent
médicament
préventif contre
les troubles
coronariens,
confirme
Chantal
Pharand
Le recours Ă lâacide acĂ©tylsalicy-
lique, mieux connu sous son nom
populaire dâaspirine, est aujour-
dâhui une pratique courante dans
le traitement préventif des troubles
coronariens. Toutefois, les méde-
cins relÚvent des cas de résistan-
ce à ce médicament, un phéno-
mĂšne qui ne fait que commencer
Ă ĂȘtre Ă©tudiĂ©.
« Il est trĂšs bien Ă©tabli que lâas-
pirine prévient les troubles car-
diaques et quâon devrait la prescri-
re aux patients qui sont Ă risque de
souffrir de maladies corona-
riennes », affirme Chantal Pha-
rand, professeure à la Faculté de
pharmacie.
Cet effet préventif a été ob-
servé de façon épidémiologique
chez les personnes atteintes dâan-
gine instable (une phase plus aigĂŒe
que ce qui est communément ap-
pelé angine de poitrine) et chez
celles qui ont déjà fait un infarc-
tus.
Mais la littérature scientifique
rapporte depuis quelques années
des cas de résistance, soit des pa-
tients chez qui lâeffet prĂ©ventif ne
se serait pas manifesté. Une revue
de la littérature réalisée par Marie
Lordkipanidzé, étudiante à la mai-
trise codirigée par Chantal Pha-
rand et Jean Diodati, a révélé que
les taux de rĂ©sistance, mesurĂ©s Ă
lâaide de tests in vitro, varient de
0,4 Ă 83 % ! Comment expliquer
un tel Ă©cart ?
Une chaine complexe
Pour répondre à la question,
il faut connaitre tout le processus
de lâapparition des troubles coro-
nariens.
« Lâangine est une douleur
ressentie dans la région du muscle
cardiaque parce que ses tissus
manquent dâoxygĂšne, explique
Chantal Pharand. Le manque
dâoxygĂšne est dĂ» Ă un trop faible
apport sanguin Ă la suite dâun rĂ©-
trĂ©cissement de lâune des artĂšres
qui irriguent le muscle cardiaque ;
ce rétrécissement est causé par
des plaques dâartĂ©riosclĂ©rose, qui
sont des dépÎts de cholestérol. »
La douleur peut se faire sen-
tir Ă la suite dâun effort physique,
dâun stress ou dâun simple chan-
gement de température. Elle peut
aussi sâĂ©tendre vers le cou ou vers
lâĂ©paule et elle sâestompe avec du
repos. Si la douleur augmente
avec les crises et sâaccompagne de
nausĂ©es et dâĂ©vanouissements, on
parle dâangine instable ; le risque
dâinfarctus est alors plus grand.
Les plaques dâartĂ©riosclĂ©rose
présentent par ailleurs des fissures
dont la cicatrisation va contribuer
Ă obstruer davantage la circula-
tion sanguine Ă lâintĂ©rieur de lâar-
tĂšre en crĂ©ant des caillots. Câest Ă
ce stade quâagit lâaspirine.
« Lâaspirine nâĂ©limine pas le
dépÎt de cholestérol, précise la
chercheuse. Elle empĂȘche plutĂŽt
lâadhĂ©sion des plaquettes san-
guines, un phénomÚne à la base de
la coagulation, ce qui prévient la
formation du caillot. »
La formation dâun caillot est
elle-mĂȘme le rĂ©sultat dâune longue
chaine dans laquelle interviennent
plusieurs agents biologiques. Une
enzyme présente à la surface des
plaquettes, la cyclo-oxygénase
(COX), est nécessaire à leur agré-
gation et câest prĂ©cisĂ©ment cette
enzyme que neutralise lâaspirine.
Selon M
me
Pharand, la com-
plexité du processus explique les
résultats aussi éloignés que 0,4 et
83 % dans les taux de résistance
observĂ©s Ă lâaspirine. « Tout dĂ©-
pend de lâĂ©tape de la formation
du caillot ou de lâagent prĂ©cis vi-
sé par chacun des tests, indique-
t-elle. Les taux varient Ă©galement
selon le groupe de patients sou-
mis au test. »
Résistance réelle : 4 %
La chercheuse a refait les tests
répertoriés dans la revue de la lit-
térature de Marie Lordkipanidzé
en recourant Ă un Ă©chantillon de
patients ayant déjà subi un infarc-
tus. Les taux de résistance mesu-
rés ont varié de 3 à 60 %, ce qui est
quelque peu inférieur à ce qui
avait dâabord Ă©tĂ© notĂ© dans la lit-
térature.
Mais le test considéré par les
spécialistes comme le test stan-
dard et qui porte sur lâaction de
lâenzyme COX a rĂ©vĂ©lĂ© un taux de
rĂ©sistance dâĂ peine 4 %. Les
autres tests concernent dâautres
phases du processus sur lesquelles
lâaspirine nâaurait que peu ou pas
dâeffet.
« Lâaspirine est donc efficace
chez la grande majorité des pa-
tients souffrant de troubles coro-
nariens, déclare Chantal Pharand.
La résistance plaquettaire touche
surtout les diabétiques, les obÚses
et sans doute les porteurs dâune
variante génétique renforçant
lâagrĂ©gation des plaquettes. »
Pas de contre-indication
Selon la chercheuse, lâaspiri-
ne ne constitue pas une contre-
indication chez les patients qui
ne répondent pas à son action. La
sagesse indique par conséquent
de prescrire ce médicament à tous
ceux qui sont Ă risque puisque
seuls des tests de laboratoire per-
mettent de déceler une résistan-
ce.
Les seules contre-indications
seraient lâhĂ©mophilie et la prise
dâanticoagulants puisque lâacide
acĂ©tylsalicylique rĂ©duit dĂ©jĂ lâef-
ficacité de la coagulation.
Par ailleurs, on découvre sans
cesse de nouvelles vertus à ce mé-
dicament qui, en plus dâĂȘtre un
excellent analgésique et de com-
battre la fiÚvre, réduirait les risques
de cancer du sein chez les femmes
ménopausées ainsi que les risques
de cancer du cĂŽlon dans lâen-
semble de la population.
Daniel Baril
Certains patients angineux sont
rĂ©sistants Ă lâaspirine
Lâaspirine prĂ©vient les troubles cardiaques, mais ne peut rien chez certains patients angineux.
Recherche
en pharmacie
Chantal Pharand
6
FORUM
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
Le D
r
Rafick
Pierre Sekaly
et son Ă©quipe
découvrent une
protéine clé et
un mécanisme
important de la
mémoire des
lymphocytes T
On sait depuis longtemps quâaprĂšs
avoir reçu un vaccin notre systÚ-
me immunitaire reconnait les si-
gnaux chimiques de lâennemi et
se met Ă produire des anticorps et
des lymphocytes T cytotoxiques
pour le détruire. Cette réaction est
possible parce que notre organis-
me possÚde une mémoire immu-
nologique qui assure une protec-
tion Ă long terme contre ce mĂȘme
virus. Mais jusquâĂ ce jour, on
ignorait à peu prÚs tout des mé-
canismes associés à la longévité
de cette mémoire, dont la durée
peut aller jusquâĂ 60 ans.
LâĂ©quipe du D
r
Sekaly, pro-
fesseur au DĂ©partement de micro-
biologie et immunologie, vient
dâen percer le secret. « Câest lâune
des plus grandes découvertes de
ma carriÚre », lance le chercheur
au cours dâune entrevue. Il
explique : « On a découvert que
la molécule FOXO3a était respon-
sable dâintĂ©grer tous les signaux
reçus de lâextĂ©rieur par les cellu-
les CD4+. Ce sont ces lymphocy-
tes T à mémoire qui séquestrent
FOXO3a dans le cytoplasme et
du coup permettent aux cellules
de la mémoire centrale de survivre
pendant autant dâannĂ©es. »
Il sâagit dâun mĂ©canisme dâac-
tion qui nâĂ©tait pas connu et qui
faisait lâobjet dâune intense inves-
tigation de la part de la commu-
nauté scientifique. Cette décou-
verte a été effectuée par la stagiaire
posdoctorale Catherine Riou sous
la direction des D
rs
Sekaly et Elias
K. Haddad, attaché de recherche
à la Faculté de médecine. Les
chercheurs présentent leurs résul-
tats prometteurs pour lâĂȘtre hu-
main dans le numéro de janvier
du Journal of Experimental Me-
dicine. Ce travail a été financé en
grande partie par GĂ©nome Cana-
da et Génome Québec.
Agir sur la mémoire centrale
Les chercheurs du laboratoi-
re dâimmunologie sont parvenus Ă
cette dĂ©couverte en recourant Ă
une technique qui consiste Ă fai-
re un tri cellulaire. Ils ont ainsi
réussi à isoler FOXO3a en puri-
fiant de façon homogÚne des cel-
lules de la mémoire centrale. Puis,
ils ont comparĂ© lâexpression de
différents gÚnes avec plusieurs po-
pulations de lymphocytes (aussi
appelées cellules T). Ils ont enfin
analysé leurs résultats avec des lo-
giciels bio-informatiques.
Ce nâest quâĂ ce moment
quâils ont compris lâampleur de
leurs données. « Tous les gÚnes
qui Ă©taient les cibles de FOXO3a
nâĂ©taient pas exprimĂ©s dans les
cellules de la mémoire centrale
contrairement aux autres popu-
lations cellulaires », indique le
D
r
Sekaly. Ă son avis, ce qui
contrÎle « cette activité de trans-
cription des gĂšnes », câest la capa-
cité de FOXO3a de partir du cyto-
plasme et dâaller dans le noyau de
la cellule.
« Lorsque la protéine se trou-
ve dans le cytoplasme, les gĂšnes ne
sont pas exprimés et, quand
FOXO3a est dans le noyau, les
gÚnes sont exprimés », signale-t-il.
Or, lâĂ©tude de lâĂ©quipe du D
r
Se-
kaly démontre clairement que
FOXO3a est séquestrée dans le
cytoplasme lorsquâelle reçoit les
signaux des cellules « à mémoi-
re ». Tous les gÚnes qui induisent
la mort cellulaire ne sont dĂšs lors
pas exprimĂ©s. « Câest ce qui protĂš-
ge les lymphocytes T à mémoire de
la mort cellulaire », affirme lâim-
munologue, dont les travaux ou-
vrent de nouvelles perspectives
dans la mise au point de straté-
gies thérapeutiques. Celles-ci se-
ront applicables non seulement Ă
un vaccin contre le sida, mais Ă
tout type de vaccin.
« Maintenant quâon sait quâil
est possible dâagir directement sur
la mémoire centrale, mentionne
le D
r
Sekaly, on va essayer de
mettre au jour des molécules qui
empĂȘcheront FOXO3a de se
phosphoryler, câest-Ă -dire de res-
ter dans le cytoplasme. Cela va
permettre aux cellules de rester
vivantes trĂšs longtemps et de de-
venir des mémoires centrales. Les
vaccins de demain pourraient
donc ĂȘtre beaucoup plus effi-
caces. »
Dans le cas des maladies au-
to-immunes comme le sida, oĂč les
cellules « à mémoire » alimentent
la maladie, un procédé inverse de-
vra ĂȘtre appliquĂ©. « Il faut repĂ©rer
des antagonismes qui vont empĂȘ-
cher FOXO3a de recevoir les si-
gnaux de survie afin dâinhiber la
phosphorylation de la molécule. »
Autrement dit, FOXO3a devra
ĂȘtre neutralisĂ©e dans le noyau.
Les Américains le courtisent
Ăminent chercheur en biolo-
gie cellulaire, immunologie et vi-
rologie, le D
r
Rafick Pierre Seka-
ly dirige lâun des plus importants
centres de recherche consacrĂ©s Ă
cette science : le Laboratoire dâim-
munologie de lâUniversitĂ© de
Montréal du Centre de recherche
du CHUM. Cinquante chercheurs
y sont rattachés de façon perma-
nente et plusieurs Ă©tudiants au
doctorat et au postdoctorat y mĂš-
nent leurs travaux. Quatre grands
axes les occupent : le thymus, la
mémoire immunologique, les cel-
lules dendritiques ainsi que les
vaccins et lâimmunothĂ©rapie.
On doit Ă ce pionnier, qui
a crĂ©Ă© et dirigĂ© jusquâen 2006
le RĂ©seau canadien pour lâĂ©labo-
ration de vaccins et dâimmunothĂ©-
rapies, une avancée majeure dans
le traitement du sida. Le profes-
seur Sekaly et son Ă©quipe ont en
effet découvert la façon de corri-
ger un défaut de la réponse immu-
nitaire au VIH. « Nous avons
trouvé une nouvelle cible théra-
peutique, la protéine PD-1, qui per-
mettrait de restaurer la fonction
des cellules T, responsables de lâĂ©li-
mination des cellules infectées par
le virus du VIH », expliquait-il Ă
Forum en aout 2006, peu de temps
aprÚs la publication des résultats
de son Ă©tude dans la revue Natu-
re Medicine. Cette percée a susci-
tĂ© beaucoup dâintĂ©rĂȘt dans les mĂ©-
dias.
Son expertise relativement au
cancer, au sida et Ă lâhĂ©patite C
lui vaut aussi des invitations aux
quatre coins du monde et plu-
sieurs centres de recherche amé-
ricains qui le courtisent sont prĂȘts
Ă lui offrir le triple de son salaire
et de ses ressources. « Si jâai refu-
sĂ© de quitter MontrĂ©al jusquâĂ prĂ©-
sent, ce nâĂ©tait pas que pour une
question dâargent, fait remarquer
le chercheur. Constituer une Ă©qui-
pe de recherche prend du temps,
et câest chose faite ici. Notre la-
boratoire est trĂšs productif et
lâĂ©quipe est dynamique, compĂ©-
tente. »
De son propre aveu, le D
r
Se-
kaly admet que beaucoup reste Ă
faire dans les prochaines années
en ce qui concerne lâĂ©laboration
de vaccins contre le VIH et le can-
cer. Le spĂ©cialiste sâattend pour-
tant dâici cinq ans Ă ce que la lut-
te contre ces maladies prenne un
tournant dĂ©cisif. Dâici lĂ , pas de
retraite en vue pour lâimmuno-
logue dâorigine libanaise. « Au
contraire, dit-il en souriant, je suis
présentement plus occupé que ja-
mais. »
Dominique Nancy
Malgré plusieurs offres alléchantes, Rafick Pierre Sekaly reste à Montréal, avec une équipe de chercheurs « dynamiques,
productifs et compétents ».
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Percer le secret de la mémoire
immunologique
Les cellules CD4+, aussi appe-
lées lymphocytes T à mémoire
ou cellules T, sont responsables
de la réponse immunitaire de
longue durée, explique le D
r
Ra-
fick Pierre Sekaly. « Ces cellules
sont la cible privilégiée du VIH »,
dit-il. Un premier contact avec
le virus infecte les CD4+ et in-
duit progressivement leur mort
cellulaire, tout comme lâabeille
meurt aprÚs avoir planté son
dard. RĂ©sultat ? Le systĂšme im-
munitaire sâaffaiblit parce que le
corps ne peut produire des
anticorps qui le protĂšgeraient du
virus et lui permettraient de lâĂ©ra-
diquer. Conséquence : ses lym-
phocytes T sont diminués en
nombre et ceux qui restent sont
incapables de remplir leurs fonc-
tions dâaide Ă la production dâan-
ticorps appropriés.
On distingue trois sortes
de lymphocytes T : les cellules
naĂŻves, qui nâont pas encore ren-
contrĂ© dâantigĂšne ou corps Ă©tran-
ger, les cellules T à mémoire, qui
ont été en contact avec un agent
infectieux et qui sont respon-
sables de la réponse immunitai-
re, et les cellules T effectrices,
qui détruisent les cellules infec-
tées. Des lymphocytes T à mé-
moire peuvent se reproduire
pendant une soixante dâannĂ©es
et câest ce qui fait lâefficacitĂ© dâun
vaccin.
D.N.
à quoi servent les lymphocytes T à mémoire ?
Menés par leur capitaine Michel
Boulianne, les nageurs des Cara-
bins ont remporté un troisiÚme
titre masculin en quatre ans le
weekend dernier au Champion-
nat provincial de natation, qui
sâest dĂ©roulĂ© Ă lâUniversitĂ© de
Sherbrooke.
LâĂ©tudiant en biochimie est
monté sur le podium à six reprises,
dont cinq fois pour une médaille
dâor, une performance qui lui a
valu le titre de nageur de lâannĂ©e
au Québec.
Il a mis la main sur lâor aux
50 m brasse (29,48), 100 m bras-
se (01:03,79) et 200 m brasse
(02:17,28) ainsi quâaux relais
4
x
200 m libre (56,27 du 07:40,58)
et 4
x
100 m quatre nages (28,94
du 03:55,05). Il a grimpé sur la
deuxiĂšme marche du podium Ă
lâissue du relai 4
x
50 m quatre
nages (28,58 du 01:47,22). Souli-
gnons Ă©galement que ses temps
aux 50, 100 et 200 m brasse ont
tous été ses meilleurs chronos de
lâannĂ©e dans ces Ă©preuves.
Ses résultats ont grandement
contribuĂ© Ă la conquĂȘte du titre
masculin par les Carabins, qui ont
terminé deuxiÚmes au champion-
nat combinĂ©, derriĂšre lâUniversi-
té Laval, qui a aussi gagné le titre
féminin.
« Je suis trÚs satisfait de la
prestation de lâĂ©quipe au Cham-
pionnat, oĂč nous lâavons empor-
té chez les hommes, en plus de ré-
trĂ©cir lâĂ©cart qui nous sĂ©parait de
Laval chez les femmes et au com-
binĂ©, a soulignĂ© lâentraineur-chef
Marc DĂ©ragon. Câest une excel-
lente préparation en vue du
Championnat canadien, oĂč nous
ne visons rien de moins quâune
place parmi les quatre premiers. »
Du cĂŽtĂ© fĂ©minin, lâentraineur
relevait surtout la performance de
ChrystĂšle Roy-LâĂcuyer (Ă©tudes
françaises), qui a remporté sa pre-
miĂšre mĂ©daille dâor en trois ans.
Elle a aussi battu des nageuses qui
avaient lâhabitude de la coiffer.
« ChrystÚle a offert une de ses
meilleures performances Ă vie. El-
le est assurément sur une lancée »,
a déclaré Marc Déragon.
Soulignons en outre que Mi-
kaĂ«l Benoit (arts et sciences) sâest
vu décerner le titre de recrue de
lâannĂ©e au QuĂ©bec.
Ă propos du Championnat
canadien, câest une dĂ©lĂ©gation
de 15 nageurs, soit 6 femmes
et 9 hommes, qui représentera
lâUdeM du 23 au 25 fĂ©vrier pro-
chain Ă lâUniversitĂ© Dalhousie, Ă
Halifax.
Le volet féminin sera formé
dâĂlaine Chatel-DeRepentigny
(nutrition), de Marie-Raphaëlle
Allan-Lefebvre (arts et sciences),
dâAudrey Lacroix (communica-
tion et politique), dâHĂ©loĂŻse
Lacroix (HEC Montréal), de
Michelle Laprade (maitrise en
informatique) et de ChrystĂšle Roy-
LâĂcuyer.
Outre Michel Boulianne et
Mikaël Benoit, les autres nageurs
seront Louis-Philippe Delorme
(Polytechnique), Marc-André Du-
chesneau (Ă©ducation physique),
Régis Fortino (kinésiologie), Nico-
las Jorgensen (design industriel),
Pierre-Luc Le Blanc (Polytech-
nique), JĂ©rĂŽme Le SiĂšge (Polytech-
nique) et Kevin Paradis-Rioux
(droit).
Benoit Mongeon
Collaboration spéciale
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
FORUM
7
La formation
participera Ă la
soirée Spatio
Lumino du
Festival MNM
Lorsque Delphine Measroch et
Nicolas Bernier présenteront
les trois piÚces de vidéo musicale
qui composent leur Ćuvre Treelo-
gy au Festival international
Montréal/Nouvelles Musiques, le
24 février, ce sera en quelque sor-
te une premiĂšre Ă©tape de leur col-
laboration qui sera bouclée.
AprÚs avoir été vue sur tous
les continents â du Japon Ă lâAr-
gentine, en passant par lâItalie â
et avoir récolté quelques prix au
passage, Treelogy, composée en
2004-2005, sera présentée inté-
gralement à Montréal pour la pre-
miĂšre fois.
Les piĂšces qui constituent
Treelogy sont les premiĂšres que
Delphine Measroch et Nicolas
Bernier ont Ă©crites ensemble. Les
deux Ă©tudiants Ă la maitrise en
composition Ă©lectroacoustique
ont fondé leur duo, Milliseconde
Topographie, il y a trois ans, alors
quâils Ă©taient au baccalaurĂ©at.
On retrouve Ă la base de
lâĆuvre de Milliseconde Topogra-
phie une volonté de faire entendre
la musique de façon différente.
« Au dĂ©part, câest la vidĂ©o mu-
sicale qui est venue naturellement,
mais nous avons fini par voir
dâautres avenues pour atteindre
cet objectif », explique Delphine
Measroch.
Lâune de ces avenues est
lâ« installation sonore », expĂ©rien-
ce qui offre la liberté au specta-
teur de capter une piĂšce musica-
le au moment oĂč il le souhaite.
« Il y a un cÎté immersif dans
lâinstallation qui nâexiste pas dans
lâexpĂ©rience de concert, indique
la musicienne. Et lâinstallation
sonore offre plus dâautonomie au
spectateur. »
Milliseconde Topographie
a présenté, en juin 2006,
dans une piscine de Montréal,
Sub.a.quat.ic, qui proposait
lâĂ©coute musicale sous lâeau, voi-
re la différence entre celle-ci et
lâĂ©coute Ă la surface de lâeau. Les
compositeurs avaient élaboré des
trames différentes pour les deux
expériences.
En septembre dernier, Ă lâoc-
casion de la manifestation Cité in-
visible, qui visait Ă mettre en relief
lâarchitecture et lâurbanitĂ© du bĂą-
timent abritant la Grande Biblio-
thÚque de Montréal, les deux étu-
diants ont été invités à réaliser un
« parcours sonore ». En incorpo-
rant voix parlées, sons concrets
et paysages sonores, ils ont fait se
croiser des personnages de lâhis-
toire actuelle et dâautres de lâhis-
toire passée du quadrilatÚre qui
accueille la bibliothĂšque.
En plus de ces installations
sonores, Milliseconde Topogra-
phie sâest associĂ© avec le graphis-
te Urban9 pour produire une tri-
logie dâaffiches⊠avec fonds
sonores ! Cinquante copies de
chaque affiche ont été apposées
dans MontrĂ©al, chacune dâelles
munie dâun disque de la musique
composée par le duo à partir du
visuel. Les disques disparaissaient
au cours de la premiĂšre nuit !
Avec ses projets, le duo touche
un public différent de celui
de la musique Ă©lectroacoustique.
Sub.a.quat.ic a attiré des gens des
milieux de lâarchitecture et des arts
visuels, entre autres. Et le projet
dâaffiches a fait lâobjet dâun article
dans la revue Grafi-
ka.
« Nous ne tra-
vaillons pas nécessai-
rement avec lâinten-
tion dâatteindre un
public différent, mais,
si câest lâun des rĂ©sul-
tats, tant mieux.
Nous sommes certai-
nement favorables au
dialogue entre les dif-
férents domaines »,
déclare Nicolas Ber-
nier.
Retour aux
sources
MĂȘme sâils tra-
vaillent en composi-
tion Ă©lectroacous-
tique, les deux
musiciens tiennent Ă conserver
une grande part de musique ins-
trumentale dans leurs piĂšces.
« Nous voulons des instru-
ments acoustiques, des mélodies,
des vrais bruits, des sons concrets.
Je suis instrumentiste au départ
et, à un moment donné, la sensa-
tion de jouer mâa manquĂ© », lan-
ce Delphine Measroch, qui joue
du piano, du violoncelle et de lâac-
cordéon.
En plus dâavoir recours aux
instruments dont ils jouent
(Nicolas Bernier, lui, joue de la
guitare), les membres du duo uti-
lisent divers objets qui leur per-
mettent dâobtenir les sons
concrets quâils cherchent.
Pour Sub.a.quat.ic, par
exemple, ils se sont servi de
jouets, de boites Ă musique et de
vieux appareils photo.
« Oui, nous recourons à des
logiciels, nous ne sommes pas
complÚtement détachés des ou-
tils Ă©lectroniques. Mais ces outils
ne doivent pas nous engloutir.
Parce quâen bout de ligne nous
ne voulons pas que notre musique
sonne comme si elle sortait dâun
ordinateur. Notre souhait est
quâon entende une musique pro-
duite par un ĂȘtre humain »,
conclut Nicolas Bernier.
Julie Fortier
Collaboration spéciale
Treelogy, de Milliseconde
Topographie, sera présentée
au Festival international Mon-
tréal/Nouvelles Musiques le
samedi 24 février à 20 h, au
cours de la soirée Spatio Lumi-
no, à la Société des arts techno-
logiques ; entrée : 10 $ (www.fes-
tivalmnm.ca).
Pour plus dâinformation
sur les activités de Millise-
conde Topographie : <www.eku-
men.com>.
La vidéo musicale de Delphine Measroch et Nicolas
Bernier a été vue sur plusieurs continents avant
dâĂȘtre jouĂ©e, enfin, Ă MontrĂ©al.
Aff. : FSE 02-07/1
Apprentissage
au secondaire
Le
Département de psychopéda-
gogie et dâandragogie
de la Fa-
cultĂ© des sciences de lâĂ©ducation sol-
licite des candidatures pour un poste
de professeure réguliÚre ou de pro-
fesseur régulier en apprentissage au
secondaire.
Fonctions
Enseignement aux trois cycles dans
le domaine de lâapprentissage
au secondaire : thĂ©ories dâappren-
tissage, apprentissage scolaire et
enseignement au secondaire ;
Ă©laboration dâun programme de
recherche dans ces secteurs.
Exigences
Doctorat en sciences de lâĂ©ducation
ou dans un domaine connexe ; expé-
rience en enseignement universitai-
re et en recherche ; dossier de publi-
cations ; connaissance du milieu
scolaire au secondaire (la connais-
sance des programmes et une expé-
rience en contexte scolaire seront
considérées comme un atout) ; ca-
pacité de travailler en équipe.
Traitement
LâUniversitĂ© de MontrĂ©al offre un
salaire concurrentiel jumelé à une
gamme complĂšte dâavantages
sociaux (www.bpe.umontreal.ca/
infosProfesseurs/index.html).
Date dâentrĂ©e en fonction
Le ou aprĂšs le 1
er
juin 2007 (sous ré-
serve dâapprobation budgĂ©taire).
Les personnes intéressées doivent
faire parvenir leur curriculum vitĂŠ,
une lettre précisant leurs champs
dâintĂ©rĂȘt et leurs compĂ©tences dans
le domaine et trois lettres de recom-
mandation,
avant le 15 mars 2007,
Ă lâadresse suivante :
Madame Manon ThĂ©orĂȘt
Directrice
Département de psychopédagogie
et dâandragogie
FacultĂ© des sciences de lâĂ©ducation
Université de Montréal
C.P. 6128, succ. Centre-ville
Montréal (Québec) H3C 3J7
Conformément aux exigences pres-
crites en matiĂšre dâimmigration au
Canada, cette annonce sâadresse en
priorité aux citoyens canadiens et
aux rĂ©sidents permanents. LâUniver-
sitĂ© souscrit Ă un programme dâaccĂšs
Ă lâĂ©galitĂ© en emploi pour les
femmes, les minorités visibles et eth-
niques, les autochtones et les per-
sonnes handicapées.
poste
vacant
Faculté
de musique
Le duo Milliseconde Topographie veut sortir du cadre
de la composition Ă©lectroacoustique
Championnat
provincial de natation
Michel Boulianne et les Carabins
remportent le titre masculin
HĂ©loĂŻse Lacroix Ă©coute les conseils de lâentraineur-chef Marc DĂ©ragon.
P
HOTO
:
PHOTOACTION
.
CA
.
Nadia Aubin-
Horth
a réalisé
la premiĂšre Ă©tude
portant sur les
facteurs biologiques
de comportements
affiliatifs chez
les poissons
Les cichlidés sont des poissons
trĂšs populaires auprĂšs des aqua-
riophiles. Mais bien peu dâentre
eux connaissent les mĆurs plu-
tĂŽt Ă©tonnantes de ces poissons en
milieu naturel. Ce sont des ani-
maux sociaux chez qui un mĂąle
et une femelle masculinisée for-
ment le seul couple reproducteur
et dominant au sein dâune colo-
nie coopĂ©rative. Câest du moins
le cas chez lâune des nombreuses
espĂšces de cette vaste famille, le
Neolamprologus pulcher, qui vit
dans le lac Tanganyika, situé à la
frontiĂšre du Burundi, de la Tanza-
nie et de la République démocra-
tique du Congo.
« Ce poisson nâa pas de nom
populaire, mais lâune de ses sous-
espÚces est communément appe-
lĂ©e âprincesse du Burundiâ», nous
dit Nadia Aubin-Horth, profes-
seure au DĂ©partement de sciences
biologiques. Les facteurs environ-
nementaux qui influent sur les
comportements de reproduction
des cichlidés sont assez bien com-
pris, mais on ne savait rien sur les
déterminants biologiques de ces
comportements combinant Ă la
fois la dominance et la coopéra-
tion.
Nadia Aubin-Horth a donc
réalisé la premiÚre étude portant
sur les facteurs biologiques de
comportements affiliatifs chez les
poissons. Les résultats de cette re-
cherche postdoctorale effectuée
Ă lâUniversitĂ© Harvard seront pu-
bliés dans le numéro de mars de
Molecular Ecology.
Un couple uniâŠ
Lâune des caractĂ©ristiques des
cichlidés est la grande variété des
modes de reproduction, dont on
connait au moins 19 modĂšles dans
le seul lac Tanganyika. La ponte
des Ćufs peut se faire Ă dĂ©couvert
ou dans des endroits cachés et la
surveillance du nid ou des alevins
peut ĂȘtre maternelle, paternelle
ou biparentale. Si les ressources
sont abondantes, il arrive quâun
mĂąle entretienne deux nids. Chez
certaines espĂšces, la femelle pro-
tĂšge les Ćufs dans sa bouche et
câest lĂ quâils sont fĂ©condĂ©s par le
mĂąle ! Le mĂąle peut aussi relayer
la femelle dans ce rĂŽle dâincuba-
teur buccal.
Les couleurs de ces poissons
varient dâune espĂšce Ă lâautre et
diffĂšrent Ă©galement entre les in-
dividus dominants et les subal-
ternes.
« Chez le Neolamprologus
pulcher, un mĂąle et une femelle
monogames et dominants Ă©lĂšvent
ensemble la portée comme chez
les oiseaux, fait remarquer la pro-
fesseure Aubin-Horth. Avec eux
vivent de 1 Ă 15 individus subor-
donnĂ©s qui nettoient les Ćufs et
aident à protéger le territoire. Cha-
cun a la capacité de reconnaitre vi-
suellement non seulement le rang
social des autres poissons mais
aussi les individus qui ne font pas
partie du groupe. »
Un intrus ou un mĂąle adulte
compétiteur pourra facilement
ĂȘtre mis Ă mort. Fait Ă©tonnant, la
femelle manifeste dâautant dâagres-
sivité que le mùle dans la défense
du territoire et les chercheurs par-
lent, dans ce cas inhabituel, de
comportement masculinisé.
Pour comprendre les méca-
nismes de ce comportement par-
ticulier chez la femelle, Nadia Au-
bin-Horth a mesuré le taux
dâexpression cĂ©rĂ©bral de trois hor-
mones â soit la testostĂ©rone, la 11-
kĂ©totestostĂ©rone et lâarginine va-
sotocine â chez les mĂąles et les
femelles, tant dominés que domi-
nants.
⊠par la vasotocine
PremiĂšre constatation, les fe-
melles ont le mĂȘme niveau de tes-
tostérone que les mùles. Toute-
fois, chez le couple de dominants,
la proportion de cette hormone
est significativement plus élevée
que chez les dominés.
Le mĂȘme profil a Ă©tĂ© observĂ©
pour lâarginine vasotocine (AVT).
« LâAVT est une neurohormone
dont lâĂ©quivalent chez les mam-
mifÚres est la vasopressine, préci-
se la chercheuse. Elle joue un
rÎle dans la territorialité, la repro-
duction et lâaffiliation sociale. »
On sait que lâaugmentation du
taux de vasopressine chez le mĂą-
le campagnol polygame asocial le
rend monogame et affectueux.
Le niveau de la 11-kétotesto-
stérone, un androgÚne propre aux
poissons, sâest rĂ©vĂ©lĂ© pour sa part
significativement plus haut chez
les mĂąles que chez les femelles,
quel que soit le rang social.
« Les caractÚres sexuels par-
ticuliers des mĂąles viennent donc
de la kétotestostérone, conclut la
chercheuse. Lâarginine vasotoci-
ne pourrait ĂȘtre responsable du
lien dâaffiliation entre les deux
membres du couple dominant,
alors que le haut niveau de testo-
stérone serait lié aux comporte-
ments de défense du territoire. »
Cette hypothÚse sera testée
dans les prochains travaux de Na-
dia Aubin-Horth, qui cherchera
Ă moduler les taux de lâAVT et de
la testostérone chez le Neolam-
prologus pulcher afin dâen noter
les effets sur les comportements
de dominance et dâaffiliation.
La professeure a Ă©galement
pris en compte lâexpression, dans
la rĂ©gion cĂ©rĂ©brale, dâune cinquan-
taine de gÚnes associés à des dif-
férences interindividuelles. Les
résultats ont révélé que le cerveau
des femelles dominantes res-
semble plus Ă celui des mĂąles, do-
minants ou subordonnĂ©s, quâĂ ce-
lui des autres femelles.
Les avantages de la
coopération
Le fait que des poissons su-
balternes coopĂšrent dans la pro-
tection des alevins est considéré
en biologie comme un comporte-
ment altruiste qui demande Ă ĂȘtre
expliquĂ© puisquâil semble aller Ă
lâencontre de la sĂ©lection naturel-
le.
« La sélection de parentÚle
peut permettre de comprendre ce
phénomÚne puisque les jeunes
poissons sont apparentés à la nou-
velle portée », explique la cher-
cheuse. La probabilité que les
jeunes et les alevins aient les
mĂȘmes parents est trĂšs Ă©levĂ©e. Du
point de vue de la diffusion géné-
tique, les jeunes ont donc intĂ©rĂȘt
Ă assurer la survie de leurs frĂšres
et sĆurs cadets.
Mais cette rĂšgle ne tient plus
dans le cas des poissons subal-
ternes plus vieux, qui ne sont pas
nĂ©cessairement des mĂȘmes pĂšre
et mÚre que les plus jeunes. « Dans
leur cas, ils profitent des avantages
du groupe pour la défense du ter-
ritoire, ce qui leur confĂšre un
meilleur taux de survie. Câest le
principe du âpayer pour resterâ»,
souligne Nadia Aubin-Horth.
Le couple dominant profite
également de cette coopération,
dont les avantages sont plus
grands que le cout associé à la
compĂ©tition dâĂ©ventuels rivaux au
sein du groupe.
Daniel Baril
Un couple de
Neolamprologus pulcher monte la garde Ă lâentrĂ©e dâun nid.
Nadia Aubin-Horth
8
FORUM
S e m a i n e d u 1 9 f Ă© v r i e r 2 0 0 7
Recherche
en sciences biologiques
Des poissons sociaux chez qui
les femelles sont dominantes
Chez les
Neolamprologus pulcher du lac Tanganyika, la femelle dominante adopte des comportements masculinisés.