Cas(s) No(s). 303, Rapport No. 83 (Ghana): Plainte contre le governement de Ghana présentée par La Confédération internationale des syndicats libres (C.I.S.L.)


Description:(Cas de la liberté syndicale)
Pays:(Ghana)
RAPPORT:83
CAS:303
Document:(Vol. XLVIII, 1965, No. 3 S II)
SEANCE:1
Type:INDIVIDUEL
Phase:(Rapport intérimaire)

PLAIGNANT
La Confédération internationale des syndicats libres (C.I.S.L.)

Introduction

171. Ce cas a été examiné par le Comité lors de ses réunions d'octobre 1962 et de novembre 1963.

172. Le 13 mai 1957, le gouvernement du Ghana, pays qui était déjà Membre de l'Organisation des Nations Unies, a adressé au Directeur général du Bureau international du Travail une lettre signée de M. Kwame Nkrumah, Premier ministre, dans laquelle il déclarait que le Ghana acceptait formellement les obligations découlant de la Constitution de l'O.I.T.: de ce fait, le Ghana est devenu Membre de l'Organisation internationale du Travail en vertu de l'article 1, paragraphe 3 de la Constitution, le 20 mai 1957, date de réception de la lettre. Dans la même lettre, le gouvernement du Ghana déclarait qu'il continuerait d'appliquer les dispositions de la convention (no 84) sur le droit d'association (territoires non métropolitains), 1947, en attendant la ratification formelle, par ce pays, de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. Le Ghana n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; par contre, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

ANTECEDENTS Allégations relatives à la législation concernant les syndicats et les relations du travail au Ghana

173. A sa session d'octobre 1962, le Comité a examiné dans les paragraphes 253 à 311 de son soixante-septième rapport, un certain nombre d'allégations portant sur les dispositions de la loi de 1958 sur les relations de travail dans sa teneur modifiée. Sur la recommandation du Comité, le Conseil d'administration, ainsi qu'il est indiqué au paragraphe 323 a), b) et c) de ce rapport, a attiré l'attention du gouvernement du Ghana sur certains principes, a prié le gouvernement d'examiner de nouveau les dispositions de la loi sur les relations de travail à la lumière de ces principes et lui a demandé de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant des progrès réalisés à cet égard. En ce qui concerne l'application de certaines dispositions de ladite loi, le Comité, de son côté, a prié le gouvernement de fournir d'autres renseignements, ainsi qu'il est indiqué aux paragraphes 269 et 285 de son soixante-septième rapport.

174. Dans une lettre datée du 26 juillet 1963, soumise au Comité lors de sa session de novembre 1963, le gouvernement déclarait que le Comité consultatif national du travail serait saisi sous peu, pour examen et approbation, de projets d'amendement de la loi sur les relations de travail. Dans ces conditions, le Comité a recommandé au Conseil d'administration, dans le paragraphe 144 a) de son soixante-douzième rapport, de prendre note de cette déclaration et de prier le gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant de tous faits nouveaux survenus à cet égard.

175. Le 26 avril 1965, le gouvernement a transmis avec sa « réponse finale » le texte des amendements proposés à la loi de 1958 sur les relations de travail et à la loi de 1959 sur les relations de travail (amendement), qui sont actuellement à l'étude. Ce document est examiné plus loin à propos des différentes allégations relatives à la législation que le Comité a étudiées dans son soixante-septième rapport.

a) Allégations relatives à la situation de monopole syndical créée par le Congrès des syndicats du Ghana

176. Ces allégations ainsi que les observations communiquées par le gouvernement à ce sujet ont été analysées par le Comité à sa session d'octobre 1962, dans les paragraphes 254 à 265 de son soixante-septième rapport. La situation est brièvement résumée ci-dessous.

177. L'article 3 1) de la loi de 1958 sur les relations de travail prévoit la création d'un Congrès des syndicats « qui aura qualité pour représenter le mouvement syndical du Ghana ». L'article 4 1) dispose que le Congrès sera composé des syndicats figurant sur la première liste annexée à la loi; l'article 4 3) confère au ministre le pouvoir d'ajouter à la liste ou d'en rayer le nom de tout syndicat. L'article 2 de la loi de 1959 sur les relations de travail (amendement) prévoit que, dans les deux mois qui suivent son adoption, sera dissous tout syndicat enregistré en vertu de l'ordonnance de 1941 sur les syndicats professionnels, dans sa teneur modifiée, qui, à la date de la promulgation de la loi, n'a pas le droit d'élire des membres du Congrès, c'est-à-dire qui ne compte pas parmi les syndicats figurant sur la liste annexée à la loi de 1958; seuls sont exceptés de cette dissolution les syndicats qui pourraient fusionner, pendant cette période, avec une des organisations figurant sur cette liste. L'article 3 interdit à tout nouveau syndicat professionnel de se faire enregistrer en vertu de l'ordonnance, sans le consentement écrit du ministre.

178. Il semble au Comité qu'aucun syndicat ne peut exister légalement au Ghana à moins que son nom ne figure sur la liste annexée à la loi de 1958 ou qu'il n'ait fusionné - étant une des organisations qui ne sont pas énumérées sur la liste, mais enregistrées en vertu de l'ordonnance - avec un des syndicats mentionnés dans la liste en question; la seule exception prévue vise les nouveaux syndicats qui ne peuvent être enregistrés qu'avec le consentement du ministre accordé à sa seule discrétion. Le Comité en a conclu qu'un monopole syndical semble avoir été établi par voie législative.

179. Le Comité a fait remarquer que la Commission d'experts de l'O.I.T pour l'application des conventions et recommandations avait noté que si les travailleurs peuvent avoir généralement avantage à éviter la multiplication du nombre des organisations syndicales, l'unité du mouvement syndical ne doit pas être imposée par une intervention de l'Etat par voie législative, intervention qui est contraire aux principes énoncés à l'article 2 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, selon lequel les travailleurs et les employeurs ont le droit de constituer des organisations « de leur choix » et de s'y affilier, est contraire aussi au principe énoncé à l'article 11 de cette convention qui préconise que les travailleurs et les employeurs doivent bénéficier « du libre exercice du droit syndical ». La Commission d'experts a également souligné que « le fait que les travailleurs et les employeurs ont en général avantage à éviter une multiplication du nombre des organisations concurrentes ne semble pas, en effet, suffisant pour justifier une intervention directe ou indirecte de l'Etat et notamment l'intervention de celui-ci par voie législative ».

180. Le Comité est également parvenu à la conclusion, compte tenu des dispositions mentionnées au paragraphe 177 ci-dessus, qu'il semble que le Congrès soit la seule confédération qui puisse exister au Ghana et que le droit de constituer des fédérations soit nécessairement limité à celles, pour autant qu'il en existe, que peuvent former les syndicats énumérés dans la liste annexée à la loi, et aux nouveaux syndicats qui peuvent se faire enregistrer avec le consentement du ministre: cette situation semble incompatible avec le principe généralement admis qui figure à l'article 5 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, selon lequel les syndicats ont le droit de constituer des fédérations et des confédérations de leur choix.

181. Dans ces conditions, le Comité, tout en comprenant le désir du gouvernement du Ghana de favoriser la création d'un mouvement syndical fort et d'éviter les faiblesses dues à une multiplication exagérée de petits syndicats rivaux, recommande au Conseil d'administration, au paragraphe 323 a) de son soixante-septième rapport:

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i) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée au principe généralement admis selon lequel les travailleurs doivent avoir le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, et à celui selon lequel les organisations des travailleurs doivent avoir le droit de constituer librement des fédérations et des confédérations;

ii) d'exprimer l'opinion que les dispositions de la loi sur les relations de travail de 1958, telle qu'elle a été amendée en 1959, portant création d'un Congrès des syndicats ayant qualité pour représenter le mouvement syndical du Ghana et limitant les syndicats pouvant légalement être homologués à ceux qui, sous réserve de toute modification que le ministre lui-même pourrait y apporter, sont énumérées dans la première annexe de la loi, à l'exception de tous autres syndicats dont le ministre pourrait autoriser l'enregistrement, ne sont pas compatibles avec lesdits principes;

iii) de prier le gouvernement d'examiner de nouveau les dispositions de la loi sur les relations de travail, 1958, telle qu'amendée, à la lumière des considérations exposées à l'alinéa ii) ci-dessus, en vue de donner pleinement effet aux principes énoncés à l'alinéa i) ci-dessus;

iv) de demander au gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant des progrès réalisés à cet égard.

182. Il est dit, dans le texte des amendements à la loi de 1958, que le gouvernement est en train d'étudier que l'article 3 sera modifié afin de permettre au Congrès des syndicats d'exercer les fonctions qui lui sont dévolues par ses propres statuts et règlement intérieur (l'article 3 1) actuel dispose que le Congrès aura qualité pour représenter le mouvement syndical du Ghana et exercer les fonctions qui lui sont dévolues par la loi). L'article 4 1) actuel, qui dispose que le Congrès sera composé de membres des syndicats qui figurent sur la première liste annexée à la loi, sera supprimé et remplacé par un nouveau paragraphe prévoyant que le Congrès sera composé des syndicats nationaux figurant sur la première liste annexée à la loi. L'article 4 3) sera supprimé « afin d'enlever au ministre chargé des questions de travail le pouvoir d'ajouter à la liste ou d'en rayer le nom de tout syndicat ». L'article 3 de la loi modificatrice de 1959, qui interdit à tout nouveau syndicat de se faire enregistrer sans le consentement écrit du ministre, sera abrogé.

183. Le gouvernement n'explique pas dans sa réponse quelles seraient les conséquences générales de ces amendements. Bien que ces derniers, considérés isolément et prima facie, semblent éliminer de la législation certaines des clauses mises en doute par le Comité dans son soixante-septième rapport, il paraît cependant nécessaire d'examiner la loi dans son ensemble, ainsi qu'elle sera modifiée, avant de pouvoir parvenir à des conclusions définitives en ce qui concerne l'application des principes énoncés dans le paragraphe 323 a) du soixante-septième rapport du Comité. Il faut également se rappeler que l'article 2 de la loi modificatrice de 1959, qui prévoit la dissolution dans les deux mois de tous les syndicats enregistrés autres que le Congrès, à moins qu'ils fusionnent avec l'un des syndicats énumérés dans la première liste annexée à la loi de 1958, semble avoir été mis en application; il n'en est pas question dans les amendements à l'étude.

184. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:

a) de noter que le gouvernement du Ghana se propose de modifier les articles 3 1), 4 1) et 4 3) de la loi de 1958 sur les relations de travail et d'abroger l'article 3 de la loi de 1959 sur les relations de travail (amendement) que le Conseil d'administration a trouvé incompatibles, lorsqu'il a adopté le paragraphe 323 a) du soixante-septième rapport du Comité, avec les principes généralement admis selon lesquels les travailleurs doivent avoir le droit de constituer des organisations de leur choix sans autorisation préalable et de former librement des fédérations et des confédérations;

b) de noter en outre que, pour les raisons exposées au paragraphe 183 ci-dessus, le Comité a décidé de ne pas faire connaître ses conclusions définitives quant à cet aspect du cas tant qu'il n'aura pas eu l'occasion d'étudier les répercussions des amendements envisagés à la lumière des dispositions de la loi modificatrice, considérée dans son ensemble, lorsqu'elle aura été adoptée.

b) Allégations concernant l'affiliation syndicale obligatoire

185. A sa session d'octobre 1962, le Comité a étudié l'allégation selon laquelle, conformément à l'article 16 de la loi de 1958, dans sa teneur modifiée, aucune personne appartenant à une catégorie de travailleurs spécifiée dans un certificat attribué à un syndicat enregistré, mais qui n'est pas membre de ce syndicat, ne peut être maintenue au travail pour une durée supérieure à un mois. Le gouvernement considère que cette disposition revient à appliquer le principe selon lequel un homme qui bénéficie de conditions meilleures obtenues par des travailleurs organisés doit contribuer à faire appliquer ces conditions; l'article 16 est conforme au principe de l'affiliation syndicale obligatoire adopté en Nouvelle-Zélande. Il a également fait observer que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations avait, sur la base de son rapport pour la période du fer juillet 1959 au 30 juin 1961 sur l'application de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par le Ghana, prié le gouvernement du Ghana de préciser par quel texte législatif l'article 16 avait été modifié dans ce sens et par lequel l'article 31 1) a) de la loi avait été amendé de façon que le fait pour un employeur de continuer à employer un travailleur dans ces conditions soit considéré comme pratique de travail déloyale.

186. Dans ces conditions, le Comité a prié le gouvernement, dans le paragraphe 269 de son soixante-septième rapport, de lui fournir le texte des articles 16 et 31 1) a) tels qu'ils ont été modifiés.

187. Dans sa dernière réponse, le gouvernement déclare que l'article 16 a été modifié par la loi no 7 de 1960 dans le sens suivant: « Aucune personne qui appartient à une catégorie de travailleurs spécifiée dans un certificat délivré en vertu des dispositions de la partie II de la présente loi, mais qui n'est pas membre du syndicat auquel se rapporte le certificat, ne pourra être maintenue au travail pour une durée supérieure à un mois. » L'article 31 1) a), modifié par la loi de 1960, dispose qu'un employeur qui « maintient au travail une personne qui n'est pas membre d'un syndicat et qui appartient à une catégorie de travailleurs spécifiée dans un certificat conforme à la partie II de la présente loi et qui voudrait bénéficier des dispositions d'une convention collective conformément à l'article 17 de ladite loi, se rendrait coupable d'une pratique de travail déloyale ».

188. Rien dans la réponse du gouvernement et dans les textes fournis par lui n'indique qu'une modification de ces dispositions soit envisagée.

189. Les articles 16 et 31 1) a) de la loi de 1958, dans sa teneur modifiée, ont pour conséquence d'imposer l'affiliation syndicale obligatoire par voie législative. Le Comité a été appelé antérieurement déjà à étudier des cas dans lesquels le prélèvement des cotisations syndicales était prévu non pas dans la législation, mais par des conventions collectives ou par une pratique instituée entre les deux parties en cause. Dans ces cas, le Comité s'est refusé à tenir compte des allégations présentées, se fondant sur la déclaration qui figure dans le rapport 2 de la Commission des relations professionnelles instituée en 1949 par la Conférence internationale du travail, selon laquelle la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ne devrait en aucun cas être interprétée comme autorisant ou interdisant les clauses de sécurité syndicale, ces questions relevant de la réglementation et de la pratique nationales.

190. En fait, il y a de nombreux exemples de pays dont la législation interdit certaines formes de clauses de sécurité syndicale et d'autres où la législation autorise ces clauses, soit formellement, soit implicitement, du fait que ces cas no sont pas prévus par la loi. Toutefois, ainsi que le Comité l'a signalé à propos du cas no 266 concernant le Portugal, la situation est entièrement différente dès que la législation impose la sécurité syndicale, soit qu'elle rende obligatoire l'affiliation syndicale, soit qu'elle impose le versement des cotisations syndicales dans des conditions telles que le même but est atteint.

191. La Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a jugé incompatible avec les principes contenus dans la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, une situation dans laquelle un individu se voit refuser toute possibilité de choix entre différentes organisations, la législation n'autorisant l'existence que d'une seule organisation dans sa branche professionnelle; en fait, de telles dispositions créent par voie législative un monopole syndical qu'il convient de distinguer, d'une part, des clauses et pratiques de sécurité syndicales, et, d'autre part, des situations dans lesquelles les organisations syndicales de base se groupent volontairement en une seule fédération ou confédération. Le Comité de la liberté syndicale a estimé qu'il existe un tel monopole syndical au Portugal en vertu de la législation de ce pays et en a conclu, dans le cas no 266, qu'il semblerait que l'obligation légale de cotiser à ce monopole syndical vient consacrer et renforcer davantage ce monopole. Dans ces conditions, le Comité a recommandé au Conseil d'administration d'attirer l'attention du gouvernement du Portugal sur le fait qu'à son avis le pouvoir conféré par la loi au ministre compétent d'obliger tous les travailleurs d'une branche professionnelle donnée à verser des cotisations au syndicat national unique dont la constitution est autorisée par branche professionnelle et par district n'est pas compatible avec le principe selon lequel les travailleurs doivent avoir le droit de s'affilier aux organisations « de leur choix ».

192. Le Comité a déjà exprimé l'avis, dans le paragraphe 259 de son soixante-septième rapport, qu'il semble que la législation aurait établi un monopole syndical au Ghana. Les articles 16 et 31 1) a) de la loi de 1958, dans sa teneur modifiée, semblent renforcer encore ce monopole et sont de ce fait incompatibles avec le principe selon lequel les travailleurs ont le droit de s'affilier aux organisations de leur choix.

193. Bien que les amendements à la législation actuellement à l'étude puissent, lors- qu'ils auront été promulgués, aboutir à permettre aux travailleurs de constituer des syndicats autres que ceux qui sont énumérés sur la liste en tant que membres du Congrès des syndicats du Ghana, il semble ressortir des textes communiqués par le gouvernement que les articles 16 et 31 l) a) seraient conservés; il s'ensuivrait qu'un travailleur, tout en ayant légalement la possibilité de s'affilier à un autre syndicat, serait cependant contraint - par la législation - de devenir membre d'un syndicat déterminé pour conserver son emploi. Cette obligation semble incompatible avec son droit de s'affilier à une organisation de son choix.

194. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:

a) d'attirer l'attention du gouvernement sur le fait qu'à son avis les articles 16 et 31 1) a) de la loi de 1958 sur les relations de travail, dans sa teneur modifiée, semblent incompatibles avec le principe généralement admis selon lequel les travailleurs ont le droit de constituer les organisations de leur choix et de s'affilier aux organisations de leur choix;

b) d'exprimer l'espoir que lorsqu'il procédera aux amendements qu'il envisage d'apporter à la législation actuelle et compte tenu des considérations énoncées dans les paragraphes 190 à 193 ci-dessus, le gouvernement modifiera également lesdites dispositions afin d'appliquer sans restriction le principe énoncé dans l'alinéa ci-dessus.

c) Allégations concernant l'intervention dans les affaires internes du Congrès des syndicats

195. Ces allégations ainsi que les observations communiquées par le gouvernement à ce sujet ont été examinées en détail par le Comité lors de sa session d'octobre 1962, dans les paragraphes 270 à 285 de son soixante-septième rapport. La situation est brièvement résumée ci-dessous.

196. Les premières dispositions de la loi de 1958 sur les relations de travail, dans sa teneur modifiée, à avoir été examinées sont l'article 5 1), qui prévoit que les pouvoirs du Congrès pour adopter son propre règlement intérieur sont subordonnés à l'approbation du ministre du Travail, et l'article 5 3) de la loi, qui réserve certains pouvoirs au ministre compétent en ce qui concerne les dépenses du Congrès et le contrôle de ses finances. Avant d'aboutir à des conclusions définitives quant à cet aspect du cas, le Comité, tout en indiquant que les dispositions de ce genre devraient être examinées à la lumière, notamment, du principe généralement admis selon lequel les organisations de travailleurs doivent avoir le droit d'élaborer en toute liberté leurs statuts et leur règlement intérieur, signale que le gouvernement avait fait remarquer que ces dispositions étaient transitoires. Il a demandé au gouvernement si elles avaient cessé d'être appliquées depuis que le Congrès a été constitué.

197. Le Comité a également examiné l'article 8 1) de la loi, selon lequel, si le gouverneur général est d'avis que le Congrès a pris une initiative « qui n'est pas dans l'intérêt public », il pourra, par voie d'arrêté, faire transférer et confier au receveur désigné dans ledit arrêté tous les avoirs du Congrès et le charger de les conserver. Le Comité a considéré que les dispositions de ce genre doivent être examinées à la lumière des principes généralement admis selon lesquels les organisations de travailleurs doivent avoir le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité et de formuler leurs programmes, les pouvoirs publics devant s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. Le gouvernement ayant cependant déclaré que cette disposition était plus ou moins transitoire, le Comité, avant de poursuivre son examen, a décidé de demander au gouvernement s'il serait disposé à abroger ou à modifier l'article 8 1).

198. Dans sa communication du 26 avril 1965, le gouvernement a fait savoir que les articles 5 1), 5 3) et 8 1) de la loi seraient abrogés par les amendements actuellement à l'étude.

199. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre note avec satisfaction du fait que le gouvernement se propose d'abroger les articles 5 1), 5 3) et 8 1) de la loi de 1958 sur les relations de travail, dans sa teneur modifiée.

d) Allégations relatives à la reconnaissance légale des syndicats

200. Le Comité examine les questions suscitées par ces allégations dans les paragraphes 286-299 de son soixante-septième rapport. On lira ci-dessous un exposé raccourci de la situation.

201. Le titre II de la loi traite des négociations collectives menées par les syndicats possesseurs de certificats les agréant à cet effet; les articles 10, 11 et l'article 12 (amendé en 1959) portent plus spécialement sur la délivrance et le retrait des certificats désignant un syndicat enregistré conformément à l'ordonnance sur les syndicats pour représenter, dans les négociations, la catégorie professionnelle y mentionnée, que les travailleurs relevant de celle-ci soient membres de ce syndicat ou ne le soient pas.

202. L'article 10 1) dispose que, saisi d'une requête présentée conformément aux dispositions de l'article 11, le ministre peut, après avis des organisations patronales compétentes, délivrer à un syndicat enregistré en application de l'ordonnance précitée un certificat l'agréant comme organisme qualifié pour représenter légitimement la catégorie professionnelle donnée dans les négociations collectives avec les employeurs. L'article 10 4) Précise que ce certificat produit effet lors même que certains travailleurs de la catégorie considérée ne font pas partie du syndicat agréé. L'article 10 6) ne permet pas de délivrer de certificat au titre d'agents de la fonction publique, de personnes au service d'un conseil municipal ou d'un conseil institué en vertu de l'ordonnance sur l'administration locale. L'article 11 exige que la demande de certificat soit présentée par le Congrès des syndicats au nom du syndicat intéressé. Si le Congrès ne dépose pas de demande dans les trois mois, celui-ci peut s'adresser directement au ministre. L'article 12 de la loi (c'est-à-dire le nouveau texte inséré en vertu de l'amendement de 1959) autorise le ministre, s'il le juge opportun, à retirer un certificat, après avoir pris l'avis du syndicat intéressé et de l'organisation patronale compétente.

203. La deuxième annexe à la loi prévoit que, si le ministre s'est assuré que 40 pour cent au moins des travailleurs de la catégorie désignée dans la demande sont membres du syndicat agréé et que cette catégorie constitue une unité qualifiée pour participer aux négociations collectives, il peut délivrer un certificat s'il l'estime convenable. Faute de cette assurance, il peut faire trancher la question par la catégorie professionnelle intéressée, au moyen d'un vote émis au scrutin secret, à la majorité des suffrages, et organisé dans les conditions prescrites par lui. Si les deux tiers au moins des votants se prononcent pour la désignation du syndicat agréé et que le nombre des votants ne soit pas inférieur à 52 pour cent du nombre des personnes ayant le droit de vote, le ministre délivre le certificat; à défaut, il le refuse. Une nouvelle requête pourra toutefois être présentée dans un délai minimum de douze mois. Tout différend relatif à l'application de ces dispositions de vote est réglé par le ministre, qui statue en dernier ressort. 204. Le Comité, en examinant ces dispositions au cours de sa session d'octobre 1962, a rappelé que, dans nombre de cas, il avait fait ressortir l'importance qu'il a toujours attachée au fait que le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale et au principe selon lequel les syndicats devraient avoir le droit de chercher, soit par négociations, soit par tout autre moyen légal, à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu'ils représentent, et qui veut que les pouvoirs publics s'abstiennent de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. Toute intervention de ce genre apparaîtrait, selon le même critère, une violation du principe généralement admis, énoncé dans l'article 3 de la convention (no 87), sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d'action en dehors de telles interventions.

205. Le Comité estime que s'il n'est pas forcément incompatible avec l'article 3 de la convention précitée de prévoir la délivrance, au syndicat le plus représentatif d'une unité donnée, d'un certificat l'agréant en qualité de négociateur exclusif pour cette unité, encore faut-il qu'un certain nombre de garanties soient assurées. Plusieurs pays qui ont établi ce système ont estimé indispensable que ces garanties comprennent notamment: a) la délivrance du certificat par une autorité indépendante; b) le choix de l'organisation représentative par un vote majoritaire des travailleurs composant l'unité considérée; c) le droit pour une organisation qui ne réunirait pas le nombre de suffrages suffisant de demander un nouveau scrutin au terme d'un délai déterminé; d) le droit pour une organisation autre que les organisations agréées de demander un nouveau scrutin à l'expiration d'une période déterminée (qui est souvent de douze mois) écoulée depuis le scrutin précédent.

206. Le Comité a estimé que, dans sa forme actuelle, la loi en vigueur ne fournit pas de telles garanties, les certificats étant établis par le ministre compétent, et non pas une autorité indépendante, comme un conseil des relations de travail ou un tribunal du travail, etc., et que, sous l'empire de cette loi, l'organisme représentatif n'est pas nécessairement désigné par un vote libre de travailleurs composant l'unité intéressée. Le Comité a invoqué à ce sujet les pouvoirs discrétionnaires dont le ministre dispose en vertu des articles 10 1) et 12 1) et de la deuxième annexe à la loi.

207. Dans ces conditions, le Comité a conclu que ces dispositions ne semblaient pas compatibles avec les principes énoncés à l'article 3 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.

208. Le Comité a en outre rappelé, dans les paragraphes 297 et 298 de son soixante-septième rapport, qu'en 1962, le Comité d'experts pour l'application des conventions et recommandations avait adressé au gouvernement du Ghana une demande directe lui signalant certaines incompatibilités entre les articles 10 1), 10 6) et 12 de la loi modifiée (voir paragr. 202) d'une part, et, de l'autre, l'article 4 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par le Ghana.

209. Dans ces conditions, le Comité, tout en se félicitant du désir du gouvernement du - Ghana de faire en sorte que des syndicats puissants et stables mènent les négociations collectives au nom des travailleurs et soient reconnus comme ayant le droit de négocier, recommandait au Conseil d'administration, dans le paragraphe 323 b) de son soixante-septième rapport:

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i) d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée au fait que le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale, et au principe selon lequel les syndicats doivent avoir le droit, par la négociation collective ou tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu'ils représentent, et les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal;

ii) d'exprimer l'opinion que, pour les raisons indiquées aux paragraphes 294 et 295 ci-dessus, les pouvoirs discrétionnaires accordés au ministre en vertu des articles 10 1) et 12 de la loi sur les relations de travail, 1958, telle qu'amendée, et de la deuxième annexe de cette loi, ne semblent pas compatibles avec les principes ci-dessus;

iii) d'attirer l'attention du gouvernement sur les différents points soulevés par la Commission d'experts de l'O.I.T pour l'application des conventions et recommandations, ainsi qu'il est indiqué aux paragraphes 297 et 298 ci-dessus, en ce qui concerne les incompatibilités qui semblent exister entre les dispositions des articles 101), 10 6) et 12 de la loi sur les relations de travail, 1958, telle qu'amendée, et les dispositions de l'article 4 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par le Ghana;

iv) de suggérer au gouvernement du Ghana de bien vouloir envisager la possibilité d'amender la loi sur les relations de travail, eu égard aux considérations exposées aux alinéas i), ii) et iii) ci-dessus;

v) de prier de gouvernement du Ghana de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant de l'évolution de la situation à cet égard.

210. Dans sa communication en date du 26 avril 1965, le gouvernement annonce que l'article 10 1) de la loi (voir paragr. 202 ci-dessus) sera remplacé par le texte suivant:

Sous réserve des dispositions du présent titre de la présente loi, le greffier (Registrar) des syndicats agissant à la requête du Congrès des syndicats professionnels enregistre et délivre, conformément aux dispositions de l'ordonnance sur les syndicats, un certificat agréant un syndicat en qualité de représentant pour mener, au nom de la catégorie professionnelle spécifiée dans ledit certificat, des négociations collectives avec les employeurs des travailleurs qui en relèvent.

Il s'agit, selon le gouvernement, de transférer au greffier des syndicats les attributions que le titre Il de la loi réserve au ministre chargé des questions relatives au travail.

211. Le gouvernement déclare se proposer d'abroger l'article 10 6) de la loi interdisant la délivrance d'un certificat aux agents de la fonction publique, aux personnes au service de conseils municipaux, aux instituteurs occupés dans l'enseignement ou autres services publics tels que les définit l'ordonnance de 1965 sur les pensions des instituteurs.

212. Les alinéas 1 et 2 de l'article 11 seraient abrogés. Celui-ci dispose actuellement, dans son alinéa 1, que la requête sollicitant la délivrance d'un certificat doit être présentée par le Congrès des syndicats professionnels, au nom du syndicat intéressé; dans son alinéa 2, ledit article prévoit que, faute pour le Congrès de déférer à la demande du syndicat dans un délai de trois mois, celui-ci peut s'adresser au ministre.

213. L'alinéa 1 12) de l'annexe il serait abrogé. Celui-ci prévoit actuellement que, dans le cas où le ministre s'est assuré que 40 pour cent au moins des travailleurs de la catégorie constituent une unité réunissant les conditions nécessaires pour mener des négociations collectives, il peut délivrer un certificat, s'il le juge convenable.

214. L'actuel paragraphe 2 de la deuxième annexe, qui contient, en matière de vote des syndicats, des dispositions complexes mentionnées au paragraphe 203 ci-dessus, serait abrogé et remplacé par une brève disposition ainsi conçue: « Lorsqu'une organisation compte plusieurs syndicats, le Congrès des syndicats désigne celui qui représentera les intérêts de cette organisation.»

215. Lors même que les dispositions faisant l'objet de réserves dans le soixante-septième rapport du Comité seraient ainsi en grande partie abrogées, aboutissant surtout à retirer au ministre ses attributions actuelles en matière de délivrance des certificats, il y a lieu d'envisager la situation que créerait le remplacement de ces textes. Ainsi qu'il est fait observer dans le paragraphe 182 ci-dessus, au sujet des allégations relatives au monopole du Congrès des syndicats professionnels, le gouvernement a laissé prévoir, dans sa réponse en date du 26 avril 1965, l'abrogation de l'article 3 de la loi modificatrice de 1959, qui fait dépendre de l'approbation du ministre l'enregistrement d'un nouveau syndicat en vertu de l'ordonnance sur les syndicats. Or il semble que, d'après le nouvel article 10 1) actuellement à l'étude, l'enregistrement de tout nouveau syndicat en vertu de cette ordonnance et la délivrance à tout syndicat d'un certificat l'habilitant à négocier, seraient assurés par le greffier, « à la demande du Congrès des syndicats ». Au surplus, le projet d'amendement ne paraît pas définir les critères selon lesquels un syndicat pourra obtenir ce certificat. Si le Comité interprète correctement la situation, aucun nouveau syndicat ne pourra se faire enregistrer, et aucun syndicat en général, si représentatif soit-il, ne pourra obtenir de certificat l'habilitant à négocier, à moins que le Congrès des syndicats présente une requête en son nom. Le Comité a différé la présentation de ses recommandations définitives concernant le monopole allégué du Congrès jusqu'au moment où il pourra examiner la loi modificatrice dans son ensemble, lorsqu'elle aura été mise en application. Il apparaît, si ce raisonnement qui précède est correct, que le Congrès serait en fait seul juge pour décider si tel nouveau syndicat pourrait se faire enregistrer et si tel syndicat aurait le droit de négocier, sans que le Congrès fût lié par des normes quelconques quant à leur degré de représentativité. Dans ce cas, il faudrait examiner même la loi amendée, en se demandant si elle est compatible avec les principes généralement admis, énoncés à l'article 3 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et avec les dispositions de l'article 4 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par le Ghana.

216. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:

a) de prendre acte de la déclaration du gouvernement selon laquelle il envisage de nouvelles modifications à la loi de 1959 sur les relations de travail par l'abrogation des alinéas 1 et 6 de l'article 10, des alinéas 1 et 2 de l'article 11 et des paragraphes 1 2) et 2 de la deuxième annexe à la loi; b) d'appeler l'attention du gouvernement sur les considérations exposées au paragraphe 215 ci-dessus, au sujet des nouvelles dispositions concernant l'enregistrement de nouveaux syndicats et la délivrance aux syndicats de certificats les agréant en qualité de représentants aux négociations collectives;

c) de suggérer au gouvernement de bien vouloir tenir compte de ces considérations en mettant en oeuvre ces projets d'amendement aux lois en vigueur;

d) de noter que, sous réserve de ces considérations, le Comité a décidé de différer la présentation de ses conclusions finales concernant cet aspect de l'affaire, jusqu'à ce qu'il ait eu l'occasion d'examiner les effets des modifications en question, compte tenu des dispositions de la loi modificatrice dans son ensemble, lorsqu'elle aura été promulguée.

e) Allégations relatives à la réglementation du droit de grève

217. Lors de sa session d'octobre 1962, le Comité, en rappelant qu'il a toujours été guidé par le principe que les allégations relatives à l'exercice du droit de grève n'échappent pas à sa compétence, dans la mesure où elles affectent l'exercice des droits syndicaux, a examiné ces allégations dans les paragraphes 303 à 311 de son soixante-septième rapport.

218. Le Comité a commencé par examiner les dispositions de l'article 28 de la loi, qui imposent, à titre temporaire, des restrictions au droit de grève des travailleurs et de leur organisation de la catégorie spécifiée dans le certificat les agréant pour mener des négociations collectives, en attendant le recours aux procédures de conciliation et d'arbitrage instituées par la loi. Après avoir examiné les procédures prévues, le Comité a estimé, dans le paragraphe 308 de son soixante-septième rapport, que les plaignants n'ont pas apporté la preuve que, dans la mesure où il s'agit des syndicats agréés, les restrictions imposées au droit de grève ne sont pas assorties de dispositions prévoyant des procédures de conciliation et d'arbitrage d'un caractère tel qu'elles constituent une sauvegarde pour les travailleurs intéressés.

219. Le Comité a toutefois relevé qu'une différence de traitement existe entre les syndicats agréés, qui ont le droit de faire la grève sous certaines conditions, et les syndicats non agréés qui, aux termes de l'article 29, ne peuvent exercer le droit de grève en aucune circonstance, et qu'en outre, les catégories professionnelles non agréées ne peuvent pas participer aux procédures réglementaires, prévues par la loi.

220. Dans ces conditions, le Comité a recommandé au Conseil d'administration, dans le paragraphe 323 c) de son soixante-septième rapport:

.............................................................................. ........................................................................

i) d'appeler l'attention du gouvernement sur le fait que le droit des travailleurs et de leurs organisations d'utiliser la grève comme moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels est généralement reconnu, et sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée, en cas d'interdiction ou de restriction du droit de grève, à assurer les garanties appropriées de nature à sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs qui se trouvent ainsi privés d'un moyen essentiel de défense de leurs intérêts professionnels et à faire en sorte que ces restrictions soient assorties de procédures d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés puissent participer;

ii) de noter que le droit de grève des travailleurs et de celles de leurs organisations qui appartiennent à une catégorie spécifiée dans le certificat de négociation collective, en vertu de la loi sur les relations de travail, fait l'objet d'une restriction temporaire en attendant le recours aux procédures de conciliation et d'arbitrage instituées par ladite loi;

iii) de noter encore, néanmoins, que les travailleurs et celles de leurs organisations qui appartiennent à une catégorie qui n'est pas spécifiée pour le moment ou à une catégorie qui ne peut être légalement spécifiée dans un certificat, ne sont nullement autorisés à faire la grève, ni à participer à des procédures de conciliation et d'arbitrage établies par la loi;

iv) d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration attache au principe selon lequel, s'il existe dans la législation une distinction entre les organisations les plus représentatives et d'autres organisations, aux fins de négociation collective, cette distinction ne doit pas avoir pour effet de priver les organisations syndicales non reconnues comme étant parmi les plus représentatives des moyens essentiels propres à leur permettre de défendre les intérêts professionnels de leurs membres, d'organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d'action;

v) d'exprimer l'opinion que la situation actuelle au Ghana des syndicats de travailleurs appartenant à une catégorie non spécifiée dans un certificat de négociation collective, au contraire de ceux qui sont ainsi spécifiés, ne semble pas correspondre aux principes énoncés aux alinéas i) et iv) ci-dessus; vi) de suggérer au gouvernement d'envisager la possibilité d'amender la loi sur les relations de travail, à la lumière des considérations qui précèdent;

vii) de demander au gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant des progrès réalisés à cet égard.

221. Dans sa réponse en date du 26 avril 1965, le gouvernement annonce l'abrogation de l'article 29 de la loi.

222. Le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre acte de cette déclaration.

Allégations relatives aux grèves qui ont eu lieu en septembre 1961 et à l'arrestation de syndicalistes

223. Dans les paragraphes 312 à 319 de son soixante-septième rapport, le Comité examine les allégations relatives aux mesures prises par le gouvernement, comportant notamment l'arrestation de vingt et un syndicalistes, dont plusieurs responsables de syndicats, à la suite d'une grève de travailleurs des chemins de fer qui a commencé le 4 septembre 1961. Le gouvernement a affirmé qu'il n'existait pas, à cette époque-là, de conflit de travail et que la grève, purement politique, comportait une protestation contre la loi relative aux «économies forcées ». De l'avis du gouvernement, c'était une tentative d'ordre politique, d'intimider le gouvernement et de renverser, par des moyens illégaux, le gouvernement légalement constitué.

224. Le Comité, tout en prenant note de ces déclarations du gouvernement et rappelant qu'à l'occasion de cas antérieurs il s'est estimé incompétent pour connaître des grèves de nature politique, a considéré qu'un autre point sollicitait son attention en l'occurrence le cas des syndicalistes qui auraient été arrêtés, sans qu'il soit bien établi si tous ou certains d'entre eux sont encore emprisonnés ou détenus, ou si tous ou certains d'entre eux ont jamais été traduits devant la justice.

225. Ainsi que le Comité l'a fait ressortir dans le paragraphe 318 de son soixante-septième rapport, il a déjà reconnu qu'il y a une claire distinction entre le fait de détenir des chefs syndicalistes ou des travailleurs en raison d'activités syndicales et le fait de détenir des personnes qui se trouvent être des syndicalistes du chef d'activités subversives étrangères au domaine des syndicats. Le Comité a également déjà fait observer que le cas de personnes condamnées pour des actes sans rapport avec les droits syndicaux échappait à sa compétence non sans relever toutefois que le point de savoir s'il s'agit en la matière d'une infraction pénale ou de l'exercice de droits syndicaux n'est pas de ceux qui peuvent être déterminés de manière unilatérale par le gouvernement intéressé. Comme le Comité l'a expliqué dans le paragraphe 159 de son soixante-deuxième rapport, en examinant le cas no 251, relatif à la Rhodésie du Sud, c'est là une des raisons pour lesquelles le Comité, relevant que, dans tous les cas où les dirigeants syndicaux sont détenus à titre préventif, ces mesures peuvent créer un sérieux obstacle à l'exercice des droits syndicaux, il a toujours affirmé le droit pour toutes les personnes détenues d'être jugées équitablement dans le plus bref délai possible, et a en outre demandé aux gouvernements qui affirmaient que les arrestations ou les détentions étaient opérées pour cause d'activités subversives, de fournir des informations sur la nature et les résultats de la procédure légale ou judiciaire instituée. En fait, c'est en se fondant sur un procès entouré de toutes les garanties d'une procédure judiciaire régulière que le Comité peut déterminer si une telle affirmation est justifiée ou ne l'est pas.

226. A sa session d'octobre 1962, le Comité, après avoir rappelé ces principes, qu'il a observés au cours de ses travaux, a recommandé au Conseil d'administration, dans le paragraphe 323 d) de son soixante-septième rapport:

.............................................................................. ........................................................................

i) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée au droit qu'a toute personne détenue d'être jugée équitablement dans les délais les plus prompts;

ii) de demander au gouvernement d'indiquer si, parmi les syndicalistes dont on allègue qu'ils sont arrêtés ou détenus, il s'en trouve encore en prison ou en détention et, dans l'affirmative, de fournir des informations sur les procédures légales ou judiciaires engagées et que l'on se propose d'engager, ainsi que sur le résultat de telles procédures.

227. Dans sa réponse en date du 26 avril 1965, le gouvernement déclare que « la grève en question n'est pas une grève de caractère professionnel, mais une tentative de subversion devant aboutir au renversement du gouvernement légalement constitué », et termine en déclarant que « s'agissant d'un grave mouvement politique mettant en péril la sécurité de l'Etat, cette question échappe à la compétence de l'O.I.T et qu'en conséquence, le gouvernement du Ghana n'a pas l'intention de fournir d'autres renseignements ».

228. Le Comité a déjà exposé au paragraphe 318 de son soixante-septième rapport et réitéré au paragraphe 225 ci-dessus les raisons pour lesquelles, en pareil cas, il a toujours demandé aux gouvernements intéressés de lui fournir des informations sur la nature et les résultats des procédures légales ou judiciaires instituées. Il y a lieu de rappeler en outre que sa pratique constante, en pareil cas, a été de prier les gouvernements intéressés de lui communiquer le texte des jugements prononcés et les motifs y invoqués, et que, de manière générale, les gouvernements ont apporté leur concours au Comité en donnant suite aux requêtes de cette nature. La demande faite au gouvernement du Ghana de fournir des informations sur la nature et les résultats de toute action légale ou judiciaire engagée contre les vingt et un syndicalistes arrêtés ne constitue donc pas un procédé exceptionnel que le Comité suivrait dans ce cas précis; elle est conforme à la pratique normale à laquelle il a toujours recouru, pour apprécier pleinement les faits allégués dans une plainte.

229. Le Comité regrette que, dans sa « réponse finale », le gouvernement refuse d'indiquer si certains des vingt et un syndicalistes arrêtés sont encore en prison ou en détention et, dans l'affirmative, de fournir des informations sur le point de savoir si une procédure légale ou judiciaire a été engagée ou doit l'être, et sur le résultat éventuel de cette procédure. Il est également surpris par l'affirmation du gouvernement selon laquelle une affaire entraînant l'arrestation de syndicalistes « échappe à la compétence de l'O.I.T. ». Par le passé, lorsque les gouvernements refusaient d'accueillir les requêtes du Conseil d'administration demandant le texte des jugements prononcés dans les affaires de syndicalistes accusés de délits, du fait que les chefs d'accusation étaient sans rapport avec les activités syndicales des personnes en cause, le Conseil d'administration, se fondant sur les considérations exposées au paragraphe 225 ci-dessus, a toujours rejeté pareils arguments.

230. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:

a) de rappeler à l'attention du gouvernement l'importance que le Conseil d'administration a toujours attaché au droit, pour toutes les personnes détenues, d'être jugées équitablement dans le plus bref délai;

b) d'attirer l'attention du gouvernement sur le point de savoir si une accusation d'actes délictueux formulée sur la base de faits et d'allégations touchant à l'exercice des droits syndicaux doit être considéré comme une question relative à une infraction pénale, ou comme une question relative à l'exercice de droits syndicaux, n'est pas de celles que le gouvernement intéressé peut trancher unilatéralement, de manière à empêcher le Conseil d'administration de poursuivre son enquête à ce sujet;

c) de rejeter, en conséquence, l'argument du gouvernement selon lequel, en raison de la nature des infractions dont sont inculpés les syndicalistes intéressés, la question échappe à la compétence de l'O.I.T.;

d) d'exprimer sa profonde déception de voir le gouvernement refuser d'apporter son concours au Conseil d'administration en lui fournissant les informations demandées précédemment;

e) de déclarer que, dans ces conditions, le Conseil d'administration se trouve dans l'impossibilité de déterminer si l'arrestation et la détention des vingt et un syndicalistes en cause constituent ou ne constituent pas une violation des droits syndicaux.

Allégations relatives à la dissolution de certains syndicats

231. Le Comité a examiné, à sa session d'octobre 1962, des allégations selon lesquelles, à la suite des grèves de septembre 1961, le gouvernement aurait ordonné la dissolution de toutes les sections syndicales de Takoradi et Sekondi. Le Comité a été saisi d'une communication du gouvernement, en date du 5 octobre 1962, dans laquelle le gouvernement déclarait que « Les organisations en question ont été dissoutes pour leurs activités subversives et non en raison du simple exercice de leur droit d'association ».

232. C'est pourquoi, tout en soulignant l'importance qu'il attache au principe généralement admis selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution ou suspension par voie administrative, et en prenant note du fait que les renseignements qu'il possède n'expliquent pas entièrement de quelle façon la dissolution en question s'est effectuée au juste, le Comité a décidé, comme le montre le paragraphe 322 de son soixante-septième rapport, de demander au gouvernement d'indiquer si la dissolution a été ordonnée directement par le gouvernement ou par l'intermédiaire de procédures instituées par les autorités compétentes des tribunaux, et en vertu de quelles dispositions légales cette dissolution a été ordonnée.

233. Dans sa communication du 26 avril 1965, le gouvernement déclare: « Il est maintenant précisé (contrairement à l'information contenue dans une réponse précédente) qu'aucun syndicat n'a en fait été dissous en conséquence de la grève. Il est également précisé qu'après la grève, certains dirigeants du Syndicat national des travailleurs des chemins dé fer et des docks ont été congédiés par ce syndicat en stricte conformité de ses statuts et règlements. »

234. Le Comité est saisi maintenant de deux réponses du gouvernement qui sont en contradiction directe l'une avec l'autre.

235. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:

a) de prendre note que, dans sa communication du 5 octobre 1962, le gouvernement déclarait que « les organisations en question ont été dissoutes pour leurs activités subversives et non en raison du simple exercice de leur droit d'association », alors que, dans sa communication en date du 26 avril 1965, le gouvernement déclare qu'« en fait, aucun syndicat n'a été dissous en conséquence de la grève »;

b) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il attache au principe généralement admis selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution par voie administrative.

RECOMMANDATIONS 236. En ce qui concerne le cas considéré dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:

a) au sujet des allégations relatives à la situation de monopole créée par le Congrès des syndicats du Ghana:

i) de noter que le gouvernement du Ghana envisage de modifier les articles 3 1), 4 1) et 4 3) de la loi de 1958 sur les relations de travail et d'abroger l'article 3 de la loi de 1959 sur les relations de travail (modification), que le Conseil d'administration a estimé incompatibles, lorsqu'il a adopté le paragraphe 323 a), du soixante-septième rapport du Comité, avec les principes généralement admis selon lesquels les travailleurs doivent avoir le droit de constituer, sans autorisation préalable, des organisations de leur choix et les organisations de travailleurs ont le droit de constituer librement des fédérations et confédérations;

ii) de noter en outre que, pour les raisons indiquées au paragraphe 183 ci-dessus, le Comité a décidé de différer la présentation de ses conclusions définitives sur cet aspect du cas jusqu'à ce qu'il ait eu l'occasion d'examiner les effets des modifications particulières qui ont été proposées, à la lumière des dispositions de la loi modificatrice dans son ensemble, quand elle aura été promulguée;

b) au sujet des allégations relatives à l'affiliation obligatoire aux syndicats:

i) d'attirer l'attention du gouvernement sur le fait qu'à son avis, les articles 16 et 31 1) a) de la loi de 1958 sur les relations de travail, telle qu'elle a été modifiée, semblent être incompatibles avec le principe généralement admis selon lequel les travailleurs ont le droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier;

ii) d'exprimer l'espoir que, lorsqu'il procédera aux modifications qu'il se propose d'apporter à la législation, le gouvernement modifiera également, en tenant compte des considérations exposées dans les paragraphes 190 à 193 ci-dessus, lesdites dispositions afin de donner plein effet au principe énoncé à l'alinéa précédent;

c) au sujet des allégations relatives à l'intervention dans les affaires internes du Congrès des syndicats, de prendre note avec satisfaction de la déclaration du gouvernement selon laquelle celui-ci envisage d'abroger les articles 5 1), 5 3) et 8 1), de la loi de 1958 sur les relations de travail, dans sa teneur modifiée;

d) au sujet des allégations relatives à la reconnaissance légale des syndicats:

i) de prendre note de la déclaration du gouvernement selon laquelle celui-ci se propose d'apporter de nouvelles modifications à la loi de 1959 sur les relations de travail, en abrogeant les articles 10 1), 10 6), 11 1) et 11 2), ainsi que les paragraphes 1 2) et 2 de la seconde annexe à ladite loi;

ii) d'appeler l'attention du gouvernement sur les observations contenues au paragraphe 215 ci-dessus au sujet des nouvelles dispositions concernant l'enregistrement de nouveaux syndicats et l'octroi aux syndicats de certificats leur reconnaissant la qualité d'organes représentatifs pour les négociations collectives;

iii) de suggérer au gouvernement qu'il ait soin de tenir compte de ces observations lorsqu'il donnera suite à son intention de modifier la législation;

iv) de prendre note que, sous réserve de ces observations, le Comité a décidé de différer la présentation de ses conclusions définitives sur cet aspect du cas jusqu'à ce qu'il ait eu l'occasion d'examiner les effets des modifications envisagées, à la lumière des dis positions de la loi modificatrice dans son ensemble, lorsqu'elle aura été promulguée;

e) au sujet des allégations relatives à la réglementation du droit de grève, de prendre note de la déclaration du gouvernement selon laquelle celui-ci se propose d'abroger l'article 29 de la loi de 1958 sur les relations de travail; f) d'inviter le gouvernement à bien vouloir lui remettre copie des textes législatifs portant modification de la loi de 1958 sur les relations de travail, ainsi que des modifications qui pourraient être apportées à ces textes lorsqu'ils auront été promulgués;

g) au sujet des allégations relatives aux grèves qui ont eu lieu en septembre 1961 et à l'arrestation de syndicalistes:

i) d'attirer une fois encore l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée au droit de toute personne détenue d'être jugée équitablement et dans le plus bref délai possible;

ii) d'attirer l'attention du gouvernement sur le point de savoir si une accusation d'actes délictueux formulée sur la base de faits et d'allégations touchant à l'exercice des droits syndicaux doit être considérée comme une question relative à une infraction pénale, ou comme une question relative à l'exercice de droits syndicaux n'est pas de celles que le gouvernement intéressé peut trancher unilatéralement de manière à empêcher le Conseil d'administration de poursuivre son enquête à ce sujet;

iii) de repousser par conséquent la thèse du gouvernement selon laquelle, en raison de la nature des délits dont sont inculpés les syndicalistes en cause, cette affaire n'est pas de la compétence de l'O.I.T.;

iv) d'exprimer sa profonde déception de voir le gouvernement refuser d'apporter son concours au Conseil d'administration en lui fournissant les renseignements précédemment demandés;

v) de déclarer que, dans ces circonstances, le Conseil d'administration se trouve dans l'impossibilité de déterminer si l'arrestation et la détention des vingt et un syndicalistes en question constituent ou non une violation des droits syndicaux;

h) au sujet des allégations relatives à la dissolution de certains syndicats:

i) de prendre note de ce que, dans sa communication du 5 octobre 1962, le gouvernement déclarait que «les organisations en question ont été dissoutes pour leurs activités subversives et non en raison du simple exercice de leur droit d'association », alors que, dans sa communication en date du 26 avril 1965, le gouvernement déclare qu'« en fait, aucun syndicat n'a été dissous en conséquence de la grève »;

ii) d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il attache au principe généralement admis selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution par voie administrative.


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