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SOMMAIRE

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M

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G

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A

P

H

I

Q

U

E

S

Numéro 438

D

ans le monde, 100 Ă  140 millions de filles et de femmes 

ont subi une mutilation sexuelle. Ces mutilations 

entraĂźnent de nombreux problĂšmes de santĂ©, variables 

selon le type et la gravitĂ© de la lĂ©sion (encadrĂ© 1). Le 

phĂ©nomĂšne est prĂ©sent essentiellement en Afrique sub-

saharienne et dans quelques rĂ©gions du Proche-Orient 

et de l’Asie du Sud-Est (YĂ©men, IndonĂ©sie et Malaisie). 

PrĂšs de 5 % des victimes vivent dans des pays du Nord, 

soit plus de 6,5 millions de filles et de femmes. Elles 

rĂ©sident principalement dans les pays europĂ©ens d’im-

migration africaine ainsi qu’en AmĂ©rique du Nord [1].

Une trentaine de pays d’Afrique concernĂ©s

En Afrique, on recense 28 pays oĂč les mutilations 

sexuelles fĂ©minines sont pratiquĂ©es. Le nombre de 

femmes excisĂ©es et la frĂ©quence des diffĂ©rentes formes 

d’excision y sont mieux connues depuis le dĂ©but des 

annĂ©es 1990 grĂące Ă  des enquĂȘtes nationales [2]. D’un 

pays Ă  l’autre, la proportion de femmes excisĂ©es varie 

beaucoup, s’échelonnant de 1,4 % au Cameroun Ă   

96 % en GuinĂ©e au dĂ©but des annĂ©es 2000 (carte).  

Trois groupes de pays se distinguent : les pays oĂč la 

grande majoritĂ© des femmes sont excisĂ©es (plus de 

85 %) ; ceux oĂč la proportion varie selon l’ethnie, la 

 catĂ©gorie sociale et la gĂ©nĂ©ration, seules certaines frac-

tions de la population Ă©tant touchĂ©es, et oĂč, au total, 

entre 25 et 85 % des femmes sont excisĂ©es ; enfin, les 

pays oĂč seules quelques minoritĂ©s ethniques sont concer-

nĂ©es et oĂč la proportion d’excisĂ©es est infĂ©rieure Ă  25 %.

Les mutilations sexuelles ont gĂ©nĂ©ralement lieu sur 

les jeunes filles avant l’ñge de 15 ans [1, 2]. Les plus frĂ©-

quemment pratiquĂ©es sont de type I et II (encadrĂ© 1), les 

mutilations de type III Ă©tant plus rares et trĂšs locali-

sĂ©es. La pratique des mutilations sexuelles fĂ©minines 

est souvent prĂ©sentĂ©e comme la consĂ©quence d’injonc-

tions religieuses, notamment de l’islam. Pourtant, l’ex-

cision Ă©tait pratiquĂ©e en Afrique bien avant l’arrivĂ©e 

des religions monothĂ©istes et aucun texte religieux ne 

permet de la justifier (1). Il n’y a pas de relation entre la 

diffusion de l’islam dans un pays et la proportion de 

femmes qui y sont excisĂ©es et on rencontre tous les cas 

de figures en Afrique. En Ă‰thiopie, par exemple, les 

trois quarts des femmes sont excisĂ©es alors qu’un tiers 

seulement de la population est musulmane. Dans 

l’autre sens, au Niger, seule une toute petite minoritĂ© de 

Pour lutter contre l’excision en France, il importe de mieux connaĂźtre la population de femmes concernĂ©es 

et les pratiques dans les pays d’origine, africains principalement. Armelle Andro et Marie Lesclingand 

nous expliquent que la situation varie d’un pays d’Afrique Ă  l’autre, ceci indĂ©pendamment de la reli-

gion. Concernant la France, elles tentent une Ă©valuation du nombre de femmes ayant dĂ©jĂ  subi cette 

mutilation sexuelle et annoncent une enquĂȘte pour mieux connaĂźtre les consĂ©quences de cette pratique, 

afin d’amĂ©liorer la prise en charge de ces femmes.

Les mutilations sexuelles fĂ©minines :

le point sur la situation en Afrique et en France

Armelle Andro* et Marie Lesclingand**

* UniversitĂ© Paris 1 et Institut national d’études dĂ©mographiques.
** UniversitĂ© de Nice et Institut national d’études dĂ©mographiques.

Éditorial 

– Les mutilations sexuelles fĂ©minines : le point sur la situation en Afrique et en France

Une trentaine de pays d’Afrique concernĂ©s - p. 1 â€ą Les mutilations en recul en Afrique - p. 2 â€ą En France, une rĂ©alitĂ© liĂ©e Ă  l’immigration des derniĂšres dĂ©cen-

nies - p. 3 â€“ 

EncadrĂ©s 1 :

 

Les diffĂ©rents types de mutilations sexuelles fĂ©minines et leurs consĂ©quences sur la santĂ© des femmes - p. 2  â€ą 

EncadrĂ©s 2 :

 

 Combien 

de femmes adultes excisées en France - p. 4

Octobre 2007

(1) Les Ă©glises protestantes sont actives depuis plusieurs dĂ©cennies 

dans la lutte contre les mutilations sexuelles alors que l’église catho-

lique s’est rangĂ©e dans les annĂ©es 1990 derriĂšre les engagements pris 

par la communautĂ© internationale. RĂ©cemment, lors d’une rĂ©union 

internationale Ă  l’UniversitĂ© d’al-Azhar du Caire en 2006, de hauts 

reprĂ©sentants religieux sunnites ont Ă©mis une fatwa dĂ©clarant que les 

mutilations sexuelles fĂ©minines Ă©taient infondĂ©es en droit musulman 

et appelant Ă  lutter contre ces pratiques.

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2

INED

femmes est excisĂ©e (2 %) alors que le pays est presque 

entiĂšrement musulman. En revanche, dans le pays voi-

sin Ă  l’Ouest, le Mali, Ă©galement musulman, plus de 90 % 

des femmes sont excisĂ©es. Quant aux pays voisins 

 d’Afrique du Nord, l’AlgĂ©rie, la Libye, mais aussi la Tuni-

sie et le Maroc, l’excision n’y existe pas alors que la quasi-

 totalitĂ© de la population est de confession musulmane.

En rĂ©alitĂ©, le principal facteur du risque de mutila-

tion est l’appartenance ethnique et non la religion, ces 

pratiques s’inscrivant traditionnellement dans les rites 

d’initiation associĂ©s Ă  l’entrĂ©e dans l’ñge adulte dans 

certains groupes ethniques. Ainsi, au SĂ©nĂ©gal, musul-

man Ă  95 %, et oĂč un peu plus d’un quart seulement des 

femmes sont excisĂ©es, le groupe ethnique majoritaire, 

les Wolofs, ne pratique pas l’excision. Traditionnellement, 

elle n’existe que chez les minoritĂ©s, notamment les 

Peuls, les Toucouleurs, les Soninkés et les Malinkés.

Les mutilations en recul en Afrique

La pratique recule dans la plupart des pays depuis 

quelques annĂ©es, mĂȘme si les changements sont lents 

dans certains. Une façon de repĂ©rer les Ă©volutions dans 

un pays est de comparer la proportion de femmes exci-

sĂ©es parmi celles ayant entre 30 et 49 ans Ă  la mĂȘme 

proportion dans la gĂ©nĂ©ration plus jeune, ayant entre 

15 et 29 ans (figure 1).

Dans la plupart des pays, les femmes les plus jeunes 

sont moins souvent victimes de mutilations que leurs 

aĂźnĂ©es et ce dĂ©crochage gĂ©nĂ©rationnel est particuliĂšre-

ment visible dans les pays oĂč l’excision est trĂšs rĂ©pandue, 

comme par exemple en GuinĂ©e ou en Ă‰rythrĂ©e. En 

outre, mĂȘme dans les pays oĂč l’excision Ă©tait peu frĂ©-

quente, la pratique touche encore moins les jeunes gĂ©-

nĂ©rations, Ă  l’exception du Cameroun oĂč il n’y a pas eu 

de changements jusqu’ici (figure 1).

Le recul dĂ©pend beaucoup du degrĂ© de mobilisa-

tion des Ă‰tats : si dĂšs 1952, les mutilations sexuelles  

fĂ©minines apparaissent dans une rĂ©solution de la 

 commission des droits de l’homme des Nations unies, 

ce n’est qu’à partir des annĂ©es 1990 que des recomman-

dations internationales explicites sont diffusĂ©es et il 

faut encore attendre 2003 pour que l’ensemble des pays 

membres de l’Union africaine signent un protocole 

condamnant officiellement les mutilations sexuelles et 

les interdisant. Des lois existent dans la plupart des 

pays mais sont encore rarement appliquĂ©es.

Par ailleurs, la scolarisation croissante des femmes a 

un effet favorable, l’instruction ayant un rĂŽle protecteur : 

dans tous les pays, le risque de mutilation dĂ©croĂźt avec 

l’augmentation du niveau d’instruction (2) (figure 2).

Les mutilations sexuelles fĂ©minines : le point sur la situation en Afrique et en France

Population & Sociétés

 n° 438, octobre 2007

Figure 1 - Proportion de femmes excisées

parmi les 30-49 et les 15-29 ans

dans quelques pays d’Afrique

Guinée, 2005

Egypte, 2005

Erythrée, 2002

Mali, 2001

Soudan, 1990

Burkina Faso, 2003

Ethiopie, 2005

Mauritanie, 2001

RCA, 1994-95

Tchad, 2004

CĂŽte d'Ivoire, 2005

Sénégal, 2005

Nigeria, 2003

BĂ©nin, 2001

Tanzanie, 2004

Niger, 1998

Cameroun, 2004

30-49

ans

15-29

ans

Diminution du risque

d'excision entre les femmes de 30-49 ans

et celles de 15-29 ans

(rapport de risques (odd-ratio))*

Pays et 

date d'enquĂȘte

Proportion d'excisĂ©es (%)

parmi les :

98
96
94
92
90
82
80
73
48
45
44
30
23
21
18

2,6
1,5

93
96
85
92
89
73
70
70
40
45
40
27
17
14
13

2,0
1,4

Rapport

de risques

1

2

3

4

6

5

INED

18707

Pays oĂč la plupart des femmes

sont excisées (groupe I)

Pays oĂč entre 25 et 85 % des femmes

sont excisĂ©es (groupe II) 

Pays oĂč moins de 25 % des femmes

sont excisĂ©es (groupe III)  

(A. Andro, M. Lesclingand, 

Population & Sociétés

, n° 438, Ined, octobre 2007)

* Calcul du rapport de risques (odd-ratio) : dans un premier 

temps, le rapport entre l’effectif des femmes excisĂ©es et l’effec-

tif des femmes non-excisĂ©es a Ă©tĂ© calculĂ© pour chaque groupe 

d’ñge. Le rapport pour les femmes de 30 Ă  49 ans a ensuite lui-

mĂȘme Ă©tĂ© rapportĂ© Ă  celui pour les femmes de 15 Ă  29 ans, le 

rĂ©sultat Ă©tant un rapport de rapports. Celui-ci indique le sens 

des Ă©volutions. S’il est Ă©gal Ă  1, le risque d’excision est iden-

tique pour les femmes de 15 Ă  29 ans et pour les femmes de 

30 Ă  49 ans. S’il est supĂ©rieur Ă  1, le risque a diminuĂ© pour la 

gĂ©nĂ©ration plus jeune, le facteur de diminution Ă©tant indiquĂ© 

par la figure. 

Source

 : EnquĂȘtes dĂ©mographiques et de santĂ© et calculs des auteurs.

(2) Au  Nigeria,  les  femmes  instruites  sont  plus  frĂ©quemment  exci-

sĂ©es que celles qui ne le sont pas. Ce rĂ©sultat Ă©tonnant vient de ce 

que seuls les Yoruba et les Igbo pratiquent l’excision dans ce pays. 

Or ces deux groupes ethniques sont localisĂ©s dans le sud du pays, 

rĂ©gion beaucoup plus urbanisĂ©e que le Nord, et oĂč l’instruction est 

plus développée.

Les diffĂ©rents types de mutilations sexuelles fĂ©minines

et leurs consĂ©quences sur la santĂ© des femmes

L’Organisation mondiale de la santĂ© (OMS) distingue quatre 

types de mutilations sexuelles fĂ©minines :

– type I : excision du capuchon, avec ou sans excision partielle 

ou totale du clitoris,

– type II : excision du  clitoris, avec excision partielle ou totale 

des petites lĂšvres,

– type III : excision partielle ou totale des organes gĂ©nitaux ex­

ternes et suture/rĂ©trĂ©cissement de l’orifice vaginal (infibulation),

– type IV : autre (piqĂ»re, perforation ou incision).

Les consĂ©quences pour la santĂ© des femmes sont liĂ©es au type 

de mutilation pratiquĂ©e. L’OMS les classe en trois catĂ©gories : 

– les consĂ©quences mĂ©dicales Ă  court terme, telles que la dou­

leur, les hĂ©morragies, le risque de rĂ©tention urinaire, les infec­

tions et l’état de choc consĂ©cutif Ă  l’évĂ©nement,

– les consĂ©quences mĂ©dicales Ă  long terme, comme les infec­

tions pelviennes, la stĂ©rilitĂ©, les difficultĂ©s menstruelles et les 

problĂšmes pendant la grossesse et l’accouchement (dĂ©chirures 

pĂ©rinĂ©ales plus frĂ©quentes et souffrances fƓtales), les fistules 

vĂ©sico­vaginales ou recto­vaginales entraĂźnant des problĂšmes 

d’incontinence, 

– les consĂ©quences psychologiques, mentales et sociales comme 

l’altĂ©ration de la sensibilitĂ© sexuelle ou les complications psychia­

triques (angoisses, dépression).

Source :

 OMS, 2006

Encadré 1

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3

INED

Les mutilations sexuelles fĂ©minines : le point sur la situation en Afrique et en France

Population & Sociétés

 n° 438, octobre 2007

En France, une réalité liée

à l’immigration

des derniÚres décennies

InitiĂ©es dans les annĂ©es 1960, les migra-

tions africaines vers la France se sont 

peu Ă  peu fĂ©minisĂ©es, et en 2004, les 

 femmes sont majoritaires chez les nou-

veaux entrants [4]. Mais la prĂ©sence de 

femmes excisĂ©es est un phĂ©nomĂšne 

connu depuis prĂšs de 30 ans. DĂšs le dĂ©-

but des annĂ©es 1980, la pratique de l’ex-

cision sur des fillettes nĂ©es en France a 

suscitĂ© la rĂ©action des pouvoirs publics 

et des associations. La premiĂšre rĂ©ponse 

apportĂ©e par l’État a pris la forme judi-

ciaire (3), celle des associations Ă©tant 

avant tout prĂ©ventive et informative [5].

Le nombre de femmes concernĂ©es 

en France reste pourtant mal connu (4). 

Les mutilations sexuelles touchent des 

migrantes mais aussi des femmes nĂ©es 

en France de parents originaires de 

pays oĂč l’excision est encore pratiquĂ©e. 

Elle s’est trĂšs vraisemblablement per-

pĂ©tuĂ©e en France chez les filles de mi-

grants jusqu’au dĂ©but des annĂ©es 1980. 

Elle a sans doute rĂ©gressĂ© ensuite, ou a 

mĂȘme Ă©tĂ© abandonnĂ©e dans certaines 

familles, les gĂ©nĂ©rations les plus rĂ©centes 

ayant pu bĂ©nĂ©ficier des campagnes de 

prĂ©vention ciblĂ©es sur les petites filles. Mais on ne  

dispose pour l’instant d’aucune donnĂ©e nationale sur 

ces gĂ©nĂ©rations plus jeunes. Le seul chiffrage possible 

concerne la population adulte, ĂągĂ©e de 18 ans ou plus. 

Moyennant quelques hypothĂšses, on peut estimer  

qu’il y a en France en 2004 environ 50 000 femmes  

adultes excisées (encadré 2).

Pour les femmes et les jeunes filles qui ont subi une 

mutilation et qui en supportent aujourd’hui les consĂ©-

quences, une politique de prise en charge sanitaire 

reste Ă  dĂ©finir. RĂ©cemment, une Ă©tape marquante a Ă©tĂ© 

franchie avec la mise au point d’un protocole de chirur-

gie rĂ©paratrice remboursĂ© par l’assurance maladie (5). 

Cette avancĂ©e mĂ©dicale ouvre la voie Ă  la rĂ©versibilitĂ© 

des lĂ©sions qu’entraĂźne l’excision et permet d’envisager 

les consĂ©quences des mutilations sexuelles fĂ©minines 

comme un problÚme de santé publique.

Figure 2 - Diminution du risque d’excision

avec l’instruction des femmes

96
98
90
92
78
76
74
47
46
50
30
13
19
16

2,3
2,1

90
92
83
87
64
64
58
23
31
17
19
29

5
3
0,7
0,4

Guinée, 2005

Egypte, 2005

Erythrée, 2002

Mali, 2001

Burkina Faso, 2003

Ethiopie, 2005

Mauritanie, 2001

RCA, 1994-95

Tchad, 2004

CĂŽte d'Ivoire, 2005

Sénégal, 2005

Nigeria**, 2003

BĂ©nin, 2001

Tanzanie, 2004

Niger, 1998

Cameroun, 2004

primaire

ou

moins

secondaire

et 

supérieur

Proportion d'excisĂ©es (%)

parmi les femmes ayant 

un niveau d'instruction:  

Diminution du risque d'excision

entre le groupe moins instruit

et celui le plus instruit

(rapport de risques (odd-ratio))*

Pays

et date d'enquĂȘte

Rapport

de risques

1

2

3

4

6

5

INED

18807

(A. Andro, M. Lesclingand, 

Population & Sociétés

, n° 438, Ined, octobre 2007)

Lecture :

 en CĂŽte d’Ivoire, en 2005, une femme ayant un niveau 

d’instruction primaire ou pas d’instruction a environ cinq fois 

plus de risques d’avoir Ă©tĂ© excisĂ©e qu’une femme ayant un ni-

veau d’instruction secondaire ou supĂ©rieur.

* Calcul :

 voir figure 1. 

** Voir note 2 dans le texte.

Source : EnquĂȘtes dĂ©mographiques et de santĂ© et calculs des auteurs..

Proportion : 

supérieure à 85 %

entre 25 et 85 %

inférieure à 25 %

Excision non pratiquée

INED

18907

RĂ©publique

démocratique

du congo

Angola

Namibie

Botswana

Zimbabwe

Mozambique

Zambie

Malawi

Comores

Tanzanie

Ouganda

Kenya

Somalie

Madagascar

Swaziland

LĂ©sotho

Afrique du Sud

Ethiopie

ÉrythrĂ©e

Dijbouti

Nigeria

Cameroun

Guinée Equatoriale

Rwanda

Burundi

Gabon

Congo

Centrafrique

Soudan

Egypte

Lybie

Tchad

Niger

Algérie

Maroc

Tunisie

Sahara

Occ.

Mauritanie

Mali

Burkina

Faso

Ghana

Ghana

BĂ©nin

CĂŽte-

d'Ivoire

Liberia

Sierra Leone

Guinée

Guinée-

Bissau

Gambie

Sénégal

Cabinda 

Carte – Proportion de femmes de 15 à 49 ans ayant subi des mutilations sexuelles

selon le pays d’Afrique (situation au dĂ©but des annĂ©es 2000)

(A. Andro, M. Lesclingand,

Population & Sociétés

, n° 438, Ined, octobre 2007)

(3) La France est le premier pays europĂ©en Ă  avoir intentĂ© des procĂšs 

dĂšs 1979 : les mutilations relĂšvent de l’article 222 du code pĂ©nal sur 

les violences. Les peines encourues par les parents et les personnes 

pratiquant la mutilation

 

peuvent aller jusqu’à 20 ans de rĂ©clusion 

criminelle. En outre, dans le cadre de la protection de l’enfance, les 

professionnels sont soumis Ă  un devoir de signalement (article 223-6 

du Code pénal).
(4) Les deux seules estimations du nombre de femmes excisĂ©es en 

France remontent Ă  plus de quinze ans, Ă  une Ă©poque oĂč la popu-

lation originaire d’Afrique sub-saharienne Ă©tait moins importante 

qu’aujourd’hui. L’une, en 1982, estimait qu’« environ 24 000 femmes 

et fillettes Ă©taient excisĂ©es ou menacĂ©es de l’ĂȘtre (pour les plus 

 jeunes) Â» ; la seconde, en 1989, Ă©valuait Ă  Â« environ 27 000 la popula-

tion fĂ©minine Ă  risque Â» [5].
(5) Actuellement, une dizaine d’hĂŽpitaux et de cliniques proposent 

l’opĂ©ration, principalement en rĂ©gion Île-de-France.

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4

résumé

Dans le monde, 100 Ă  140 millions de femmes ont subi 
une mutilation sexuelle. Habitant principalement en 
Afrique sub-saharienne, 5 % vivent dans les pays euro-
pĂ©ens d’immigration africaine ainsi qu’en AmĂ©rique du 
Nord. Dans les pays d’origine, la situation varie, certains 
pays pratiquant massivement l’excision, comme la Gui-
nĂ©e, oĂč 96 % des femmes sont excisĂ©es, et d’autres, pres-
que pas, comme le Niger,  oĂč seulement 2 % des femmes 
le sont. L’excision est par ailleurs en recul  dans ces pays. 
La France compterait en 2004 autour de 50 000 femmes 
adultes excisĂ©es. Une enquĂȘte est en prĂ©paration pour 
mieux connaĂźtre les consĂ©quences de ces mutilations afin 
d’amĂ©liorer la prise en charge sanitaire de ce problĂšme.

Population & SociĂ©tĂ©s

 n° 438, octobre 2007

 â€“ Bulletin mensuel d’information de l’Institut national d’études dĂ©mographiques 

ISSN 0184 77 83

Directeur-GĂ©rant : François HĂ©ran â€“ RĂ©dacteur en chef : Gilles Pison â€“ Assistante de rĂ©daction : Sophie Quinchard â€“ Maquette : Isabelle Brianchon â€“ C.P. n° 1207 B 06304 ADEP - D.L. 4

e

 trim. 2007

I n e d   :   1 3 3 ,   b o u l e v a r d   D a v o u t   -   7 5 9 8 0   P a r i s ,   C e d e x   2 0   â€“   TĂ© l Ă© p h o n e   :   ( 3 3 )   ( 0 ) 1   5 6   0 6   2 0   0 0   â€“   TĂ© l Ă© c o p i e   :   ( 3 3 )   ( 0 ) 1   5 6   0 6   2 1   9 9   â€“  

RĂ©daction : ined@ined.fr â€“ Service des abonnements : 01 56 06 20 88 â€“ Le numĂ©ro : 1,50€ â€“ Abonnement 1 an - France : 10€ - Etranger : 16€ â€“ Imp. : Jouve -

RÉFÉRENCES

[1]  OMS - Â« Female genital mutilation â€“ new knowledge 

spurs optimism Â», 

Progress in Sexual and Reproductive Health 

Research

, n° 72, 2006, 8 p.

[2]  Yoder P. Stanley, Abderrahim Noureddine et Zhuzhuni 

Arlinda - Female Genital Cutting in the Demographic and 

Health Surveys : A Critical and Comparative Analysis, ORC 

Macro, Calverton, Maryland, (

DHS Comparative Reports n° 7

), 

2004, 65 p.
[3]  UNICEF - 

Female genital mutilation/cutting : a statistical 

exploration

, New York, UNICEF, 2005, 58 p.

[4]  Borrel Catherine - Â« EnquĂȘtes annuelles de recensement 

2004 et 2005, prĂšs de 5 millions d’immigrĂ©s Ă  la mi-2004 Â», 

Insee PremiĂšre

, n° 1098, aoĂ»t 2006, 4 p.

[5]  Gillette-Faye Isabelle - 

La polygamie et l’excision dans 

l’immigration africaine en France, analysĂ©es sous l’angle de la souf-

france sociale des femmes

, Villeneuve d’Ascq, Presses universi-

taires du Septentrion, thĂšse de doctorat en sociologie, Paris 7, 

2002, 352 p.

Les mutilations sexuelles fĂ©minines : le point sur la situation en Afrique et en France

Tous les numĂ©ros de 

Population & SociĂ©tĂ©s

 sont accessibles sur le site de l’Ined : www.ined.fr

L’État continue de s’engager dans la lutte contre les 

mutilations sexuelles Ă  travers le renforcement de l’ar-

senal juridique [5] et par la prise en compte de cette 

question dans le plan national Â« Violences et SantĂ© Â» (6). 

Dans le cadre de ce plan, une enquĂȘte nationale Exci-

sion et handicap (ExH) est en prĂ©paration : elle permet-

tra une meilleure connaissance des consĂ©quences 

sanitaires, sociales et psychologiques des mutilations 

sexuelles et dĂ©bouchera sur des propositions pour la 

prise en charge des femmes mutilĂ©es vivant aujourd’hui 

en France.

La prĂ©vention de l’excision chez les fillettes et les 

jeunes filles vivant en France reste essentielle, et doit 

continuer Ă  ĂȘtre soutenue par les pouvoirs publics. Les 

excisions sont dĂ©sormais rarement pratiquĂ©es sur le sol 

français, les filles Ă©tant excisĂ©es lors de sĂ©jours tempo-

raires dans le pays d’origine de la famille, ou suite Ă  des 

reconduites. La prĂ©vention passe par une protection 

accrue lors de ces déplacements.

(6) Plan prĂ©vu par la loi du 9 aoĂ»t 2004, relative Ă  la politique de santĂ© 

publique, visant Ă  limiter l’impact des diffĂ©rentes formes de violence 

sur la santé.

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(1) La dĂ©finition retenue pour la population de femmes originaires d’un pays Ă  risque est trĂšs restrictive : seules les femmes dont le pĂšre et la mĂšre sont 

originaires d’un pays Ă  risque sont comptabilisĂ©es.

Encadré 2

Nous avons estimĂ© dans un premier temps l’effectif de femmes ĂągĂ©es de 18 ans et plus vivant en France et immigrĂ©es ou filles d’immigrĂ©s 
d’un pays Ă  risque, oĂč les mutilations sexuelles sont encore pratiquĂ©es (1). Nous avons utilisĂ© pour cela l’« Ă‰tude de l’Histoire Familiale Â», 
enquĂȘte complĂ©mentaire au recensement de 1999, rĂ©alisĂ©e auprĂšs de 380 000 hommes et femmes, en actualisant Ă  la hausse l’effectif de 
1999 avec les donnĂ©es publiĂ©es jusqu’à ce jour par l’Insee [4]. 

Le nombre de femmes excisĂ©es parmi elles a Ă©tĂ© estimĂ© en fai-

sant l’hypothĂšse que dans chaque sous-groupe de femmes origi-
naires d’un mĂȘme pays Ă  risque, la proportion d’excisĂ©es Ă©tait la 
mĂȘme que dans le pays concernĂ© (carte). On a cependant distin-
guĂ© les femmes nĂ©es au pays (8 sur 10) de celles nĂ©es en Europe 
(2 sur 10). Et, au sein des premiĂšres, celles arrivĂ©es en France 
aprĂšs 15 ans de celles arrivĂ©es avant, pour tenir compte du fait que 
les mutilations sexuelles fĂ©minines sont essentiellement pratiquĂ©es 
avant l’ñge de 15 ans.

Sous l’hypothĂšse haute, le risque de mutilation est le mĂȘme quel 

que soit le lieu de naissance : on applique les taux de prĂ©valence Ă  
toutes les femmes originaires d’un pays Ă  risque. Sous l’hypothĂšse 
moyenne, on suppose que le risque de mutilation est nul pour les 
femmes nĂ©es en Europe : on applique les taux de prĂ©valence uni-
quement aux femmes originaires et nĂ©es dans un pays Ă  risque. 
Enfin, sous l’hypothĂšse basse, on considĂšre que seules les femmes 
arrivĂ©es en France aprĂšs l’ñge de 15 ans ont Ă©tĂ© soumises au ris-
que. Si l’on retient l’estimation moyenne, environ 53 000 femmes 
adultes vivant en France en 2004 auraient subies des mutilations 
sexuelles féminines (schéma).

Combien de femmes adultes excisĂ©es en France ?

(A. Andro, M. Lesclingand, 

Population & Sociétés

, n° 438, Ined, octobre 2007)

SchĂ©ma - Estimation du nombre en 2004 de femmes adultes, 

vivant en France, victimes de mutilations sexuelles fĂ©mnines

Femmes originaires d'un pays Ă  risque :

Femmes

non

excisées

Femmes

excisées

nées en

Europe

avant l'Ăąge

de 15 ans

Arrivées en France :

aprĂšs l'Ăąge

de 15 ans

nées dans un pays à risque

*

*

*

HypothĂšse basse : 42 000

*

HypothĂšse moyenne : 53 000

HypothĂšse haute : 61 000

INED

19007