Une technique de virtuose

 

Activité exclusivement masculine, l’apprentissage du travail de la plume se déroule souvent durant ou après les rituels d’initiation. Très tôt, un jeune garçon doit savoir fabriquer des flèches aux pointes en os ou en bambou aiguisé, des flèches assommoir pour capturer des animaux vivants, tirer à la carabine et dresser des pièges. Ensuite, il doit être capable de déplumer un oiseau et de classifier les plumes selon leurs formes et leurs couleurs.

Les plumes sont classées en trois catégories : les pennes provenant de la queue ou des ailes avec un aspect fusiforme et de superficie continue; les plumes qui recouvrent les côtes et l’abdomen, larges et arrondies et les plumules du jabot de structure duveteuse.

La matière-plume peut être combinée à d’autres éléments éclectiques comme griffes, cuir, peau de mammifères, graines, cheveux humains, nacres, fibres végétales, fil de coton, plastiques synthétiques et aluminium, pour amplifier le potentiel esthétique de l’objet.

Les Amérindiens ont développé plusieurs techniques d’assemblage des matières premières qui englobent une multitude de procédés consistant à fixer une série de plumes petites et grandes. Ils peuvent aussi, grâce à la technique de collage avec des résines, de la cire ou de la suie, disposer les plumes sur des supports comme le tissu et le bois. La plume peut, dans certains cas, subir des transformations en étant taillée de formes diverses (épointage,en dent-de-scie, triangulaire, etc.).

 Certaines nations amérindiennes savent modifier la couleur naturelle des plumes. La méthode de coloration artificielle des plumes blanches trempées dans une décoction de Bois du Brésil afin de les teindre en rouge est la plus répandue. Les plumassiers peuvent aussi changer le régime alimentaire des oiseaux provoquant une décoloration du plumage. La technique du tapirage pratiquée sur des oiseaux vivants est celle qui nécessite la plus importante maîtrise car elle fait appel à une excellente connaissance de la faune et de la flore. Elle consiste à plumer l’oiseau, surtout les psittacidés (perroquets et aras) et à frotter leur épiderme avec une mixture faite à base de diverses plantes. Les pennes vertes ou bleues se colorent alors en jaune ou en rose lors de la repousse.

MYHARA Guirlande avec couvre nuque - Population rikbaktsa État du Mato Grosso – Brésil - 
Dernier quart du XXe siècle - Fibres de palmier (tucum et reina), fils de coton, plumes d’ara et de 
dindon sauvage hocco (Mitua mitu), cheveux humains - Muséum – Lyon. Inv°. 60004158Les Indiens Enawenê-Nawê pratiquent la technique du tapirage pour la confection des coiffes de la cérémonie du Yakwa. Ils capturent des grenouilles,les attachent à une armature en bois et frottent le dos des batraciens avec un bâton afin de récolter leur venin qu’ils mélangeront avec du jus de rocou. Cette mixture est introduite dans le canal des plumes rectrices préalablement arrachées. A la fin de l’opération, la queue du perroquet est complètement déplumée. Lors de la repousse, les plumes qui étaient à l’origine vertes apparaissent, après quelques semaines, jaunes avec des nuances vermillon.

(Art Tribal VI)