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Les «indignés» de Madrid s'interrogent sur leur avenir

La commission «alimentation» a dérivé en une espèce de banque alimentaire et éprouve des difficultés à nourrir les non-manifestants. © Susana Vera / Reuters/REUTERS

Le mouvement de la Puerta del Sol s'essouffle, mais ne veut pas se dissoudre.

«¡No nos vamos!» Le cri s'échappe de milliers de poitrines réunies Puerta del Sol. Dimanche soir, au terme d'une longue assemblée générale, le mouvement des «indignados» a refusé de lever le camp. La semaine dernière, les manifestants avaient adopté la même résolution. Mais depuis, les choses ont changé. Une à une, les commissions - qui agissent comme des ministères de ce camp autogéré - ont égrené les problèmes qu'elles rencontraient.

La commission «alimentation» a dérivé en une espèce de banque alimentaire et éprouve des difficultés à nourrir les non-manifestants: des indigents, voire des opportunistes frappent à sa porte sans respecter les horaires. Les spécialistes de la communication, eux, demandent un prolongement maximum d'une semaine. Quant aux responsables des infrastructures, ils avertissent d'une possible pénurie d'électricité…

Outre les contingences, les «indignés» doivent faire un choix stratégique. Les assemblées de quartiers qu'ils ont lancées à Madrid et dans sa banlieue se sont mises en marche. Dans l'esprit de la majorité des manifestants, elles devront à terme prendre le relais de la Puerta del Sol.

Car ils en sont bien conscients: leur présence ne suscite plus l'unanimité initiale. Les commerçants de Madrid ont demandé à la police de les évacuer. Eux-mêmes en ont parfois assez de faire figure de zoo urbain, que les touristes prennent en photo. Plus grave, certaines voix s'élèvent contre une «déviation de l'esprit du 15-M» - l'un des noms du mouvement, né le 15 mai 2011. Des demandes unitaires de «démocratie réelle», on serait passé à une collection de chapelles. Ici les féministes, là les animalistes, plus loin les Sahraouis…

Et, à Barcelone, un avertissement a été lancé vendredi dernier. Sous prétexte de «nettoyer» la Plaza Catalunya avant la finale de la Ligue des champions - remportée par le Barça -, la police régionale a réalisé une charge violente. Bilan: plus de 120 blessés.

De l'autre côté, des raisons affectives pèsent aussi. Les Catalans ont donné aux Madrilènes un formidable exemple de résistance, disent les indignés. Après l'opération policière, ils sont revenus par milliers sur leur campement, la fleur à la boutonnière. Et, fait rare dans ce pays où les rivalités régionales sont exacerbées, les campeurs de la Puerta del Sol ont crié, des heures durant, leur solidarité avec Barcelone.

Décision finale reportée

Et puis, le mouvement semble prendre à l'étranger, en Grèce, en Italie, voire en France. La dispersion de la manifestation parisienne a beaucoup ému outre-Pyrénées. «¡Paris, no estás sola!» («Paris, tu n'es pas seul!»), ont chanté les «indignados» à plusieurs reprises. Depuis le début du mouvement, la France fournit quelques-unes des références de l'imaginaire collectif de la Puerta del Sol: la Bastille, Mai 1968 et l'amour légendaire des Français pour la révolte apparaissent régulièrement sur les pancartes.

Dans ces conditions, dissoudre le berceau international de la révolte ne serait-il pas un très mauvais signal envoyé aux autorités? L'assemblée, qui prend toutes ses décisions par consensus, a accouché d'une solution intermédiaire. Le campement restera, mais sera «restructuré». En clair, il devrait être réduit. Moins de tentes et de commissions, davantage d'espaces pour les passants, les touristes et les commerçants. Quant à la décision finale, l'assemblée l'a reportée… à la prochaine assemblée.

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