1946-2007 : l'événement culturel le plus médiatisé au monde
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1946-2007 : l'événement culturel le plus médiatisé au monde

Avec les Jeux olympiques ou une Coupe du monde de football, Cannes figure parmi les événements réguliers qui attirent le plus de journalistes. En 2006, plus de 4 115 journalistes avaient été accrédités. Deuxième volet de la série d'articles du Monde sur la "saga" du Festival de Cannes.

Le Monde | • Mis à jour le | Par

Chaque année, photographes et journalistes envahissent la Croisette à Cannes.

A en croire Jean-Luc Godard, si "la télévision fabrique de l'oubli, le cinéma a toujours fabriqué des souvenirs". Pour autant, c'est bien le petit écran qui a donné une mémoire aux éclats de rire et de voix des festivaliers à Cannes, et tissé la chronique du rendez-vous mondial du cinéma et de ses coulisses. En se faisant l'échotier des rumeurs dont bruissait la Croisette, il lui a aussi conféré un suspens et, par son métalangage fait de reportages et d'archives, inventé son propre film.

Car la manifestation, par ce qu'elle donne à voir et à lire en abondance chaque année, est surtout médiatique. Ainsi, Cannes est de loin le premier événement culturel le plus médiatisé au monde. Mieux : avec les Jeux olympiques ou une Coupe du monde de football, le Festival figure parmi les événements réguliers qui attirent le plus de journalistes. En 2006, 4 115 journalistes et techniciens, originaires de 78 pays, ont été accrédités. Ils n'étaient que 700 en 1966, ce qui dit l'ampleur prise par la manifestation. L'hégémonie des télévisions du monde entier va grandissant, avec 306 équipes présentes en 2006 - on n'en dénombrait que 156 en 1990.

A l'origine, l'actualité du cinéma, c'était toujours... le cinéma. Les premières éditions donnent lieu à des sujets des "Actualités françaises", Pathé ou Gaumont, mêlés à d'autres informations projetées dans les salles avant le film à l'affiche. En 1952, le réalisateur Stellio Lorenzi propose un résumé quotidien pour la poignée de Français ayant fait l'acquisition des premiers récepteurs. Deux ans plus tard, en 1954, débute à l'antenne de l'unique chaîne de télévision un magazine présenté par le critique François Chalais. "Reflets de Cannes" voit défiler vedettes et starlettes. Cette collection comptera soixante-dix émissions jusqu'en 1967. Henry Chapier reprendra le flambeau avec "Couleurs du Festival".

En 1970, l'organisation du Festival confie à la télévision la retransmission en direct de la cérémonie de clôture. L'audiovisuel impose ses premiers diktats, notamment un décalage horaire de la proclamation de la remise des prix. A partir de 1975, outre les magazines culturels, apparaissent des émissions de variétés comme "Les Rendez-vous du dimanche" ou encore "C'est encore mieux l'après-midi". "La nouveauté, c'est que ce sont des envoyés spéciaux des rédactions des chaînes publiques qui traitent cette actualité et qui descendent en équipes pour faire des directs", explique Emmanuel Hoog, PDG de l'Institut national de l'audiovisuel, qui vient de lancer, avec la présidence du Festival, le site ina-festivaldecannes.com, lequel retrace en 1 500 documents audiovisuels l'histoire du festival.

AXE FORT DE LEUR COMMUNICATION

Une nouvelle ère s'ouvre en 1984 avec Canal+ et son " info-divertissement, explique Emmanuel Hoog. La chaîne voit le traitement du Festival comme une illustration de sa politique éditoriale et une contrepartie de son investissement financier". L'arrivée de Canal+ et des grands barnums people de "Nulle part ailleurs" puis du "Grand Journal" a marqué un tournant. En perte d'abonnés, Canal+ a délaissé les planches cannoises en 2000 avant de réinvestir la Croisette et d'asseoir de nouveau sa légitimité de partenaire officiel quatre ans plus tard. Ainsi, pour cette 60e édition, Canal+, qui tient studio face à l'Hôtel Martinez, provoquant chaque jour des attroupements, fait "descendre" plus de 400 personnes qui vont produire 300 heures de programmes pour l'ensemble des chaînes du groupe.

Aujourd'hui, les grosses chaînes de télévision font de leur dispositif à Cannes et des soirées qu'elles y organisent un axe fort de leur communication. La manifestation possède aussi sa propre chaîne, TV Festival de Cannes, confiée à la société de production KM. Celle-ci fournit des sujets prémontés et assure en exclusivité la couverture des événements officiels (cérémonies, montées de marches, conférences de presse, etc.) qu'elle commercialise en intégralité et en extraits dans le monde entier. Nouveauté : l'essor de la presse en ligne, qui a délégué 86 envoyés spéciaux pour couvrir la dernière édition.