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DEMÊLÉS JUDICIAIRES.


Malgré ses démêlés, les proches de Kengo maintiennent le pari: «un jour, désormais proche, il va refaire surface. Comme hier, lui seul peut accepter de se salir les mains». Pari insensé, aux yeux d’aucuns.

Comme un enfant, Kengo a été poussé dans une souricière

Ses proches ont une autre lecture de ses démêlés judiciaires: ils annoncent un putsch alors que Kabila est accusé de blanchiment d’argent avec un complice japonais passé aux arrêts.

Comment le tri-Premier ministre du maréchal Mobutu autrefois homme parmi les mieux renseignés, est-il tombé si facilement dans une souricière savamment montée par une coalition pro-kabiliste et néo-mobutiste?

KINSHASA, 15 décembre 03, le Soft-Grands lacs, n°780, daté 15 déc. 03.
À Bruxelles, un proche est catégorique: seul un putsch pourrait le sauver. Comment? Tout laisse penser que le tri-Premier ministre du maréchal Mobutu est tombé dans un traquenard, une souricière savamment tendue par des adversaires pro-kabilistes et néo-mobutistes ayant constitué une redoutable coalition. Au train où vont les choses, tout laisse penser que Léon Kengo wa Dondo va passer Noël et le Nouvel an à Kinshasa. Pour la première fois, depuis six ans, loin de bonnes tables - et de bons vins - réservées à Bruxelles. Quel gâchis!


ASSIGNÉ À RÉSIDENCE.

Dimanche 7 décembre, celui que ses proches continuent d’appeler respectueusement «Premier», avait prévu de repartir pour l’Europe, toujours via l’Afrique du Sud tel que son billet retour Southafrican le lui permettait. Kengo wa Dondo en a été empêché. Tshimanga Mukeba, le Procureur général de la République, l’un des successeurs de l’ancien premier ministre que Kengo connaît très bien (Kengo fut, à l’époque du «Léopard», un vrai lion de PGR), l’a prévenu: il devait désormais «se mettre à la disposition pleine et entière de la justice» congolaise. Traduisez: Léon Kengo wa Dondo assigné à résidence. En clair: il est en quasi état d’arrestation...

Quelques jours plus tôt, après qu’une procédure fût ouverte contre lui au parquet général de la République, et qu’un vent favorable a amené la lettre-invitation à certaines rédactions de presse à Kinshasa, Tshimanga Mukeba avait envoyé une escouade de policiers avec un ordre de prendre le corps. Mais l’escouade s’est butée à la résistance farouche des gardes armés - certains parlent de milice - de l’ancien Premier ministre. D’anciens commandos ex-DSP, la redoutable armée de Mobutu, décidés d’empêcher que les policiers se saisissent du corps de leur nouveau chef.

Coups de téléphone, discussions, énervements, apartés. «Les autorités compétentes» ont finalement donné ordre de calmer le jeu. Aucun policier ne fut autorisé à pénétrer dans la résidence bien gardée de Kengo, sauf leur chef mais l’homme, après s’être entretenu avec Kengo, est sorti de la résidence peu après sans le «Premier».

Plus tard, selon des proches de l’ancien Premier ministre, Antoine Ghenda, ministre MLC des Affaires étrangères et gendre de Roger Nkema Liloo, un baron, tout comme Kengo, la région de l’Équateur, et qui dirigea longtemps les renseignements extérieurs de Mobutu, est allé rencontrer Kengo accompagné de deux avocats.


LA PROCÉDURE EST LANCÉE.

Mission: lui donner des assurances, toutes les assurances. C’est-à-dire que dans la procédure engagée, le gouvernement, tout en intervenant pas dans le cours de la justice - celle-ci étant indépendante - veillerait au triomphe du droit. Kengo n’avait rien à craindre: qu’il réponde à l’invitation-convocation du PGR; que personne ne le conduirait en prison illico presto. Pas en tout cas tant qu’il n’aurait pas eu droit à une procédure en bonne et due forme qui respecterait ses droits à être défendu par des avocats de son choix...

Vendredi 12 décembre, l’ancien premier ministre s’est donc rendu au Parquet général de la République où, selon ses proches, il a été interrogé pendant 7 heures. À l’en croire lui-même, selon ce qu’en rapporte toujours son entourage, «tout s’est bien passé». Pourtant, la justice a démarré son cours, la procédure est désormais lancée. Nul ne saurait l’arrêter. Il faut attendre un non-lieu ou une mise en examen, c’est-à-dire, une inculpation...

À voir le dossier à charge - des actes de détournement remontant aux exercices budgétaires allant de 1977 à avril 1997, soit à la veille de la chute du régime Mobutu impliquant des sommes de 60 millions de dollars, 40 millions de FB et 11 mille FS à propos desquels nombre de personnes, en tête, un ancien gouverneur de la banque centrale, l’inusable Ndiang Kabul dit détenir des documents authentiques et est prêt à témoigner publiquement - on imagine mal le PGR prononcer un non-lieu... Critiqué comme jamais ancien baron mobutiste ne l’a été, Kengo ne savait-il pas ce qui l’attendait? Selon un de ses proches, «tout a été fait en connaissance de cause. Kengo en avait marre d’être critiqué. Il fallait donner un coup de pied à la termitière...» Ce n’est pas sûr.

D’autres expliquent que l’ancien Premier ministre qui a reçu nombre d’émissaires de Kabila l’invitant à regagner le pays, aurait reçu toutes les assurances de ces émissaires. Prudent, Kengo a longtemps repoussé ces avances, expliquant qu’il ne repartirait que s’il avait les assurances des chancelleries occidentales: des Belges qui l’avaient accueilli mais aussi des Français et des Américains. Avait-il obtenu ces assurances quand il est monté dans l’avion à Bruxelles en route pour Johannesburg avec pour destination finale Kinshasa?

D’autres sources assurent que Kengo, avant sa décision finale, aurait reçu en sa résidence de Rhôde-St-Génèse, la cossue banlieue de Bruxelles, Alexis Thambwe Mwamba, plusieurs fois l’un de ses ministres, devenu président de son ancien parti UDI, Union des Démocrates Indépendants (baptisé Union des détourneurs impénitents par les Kinois), aujourd’hui ministre du Plan chez Kabila. Thambwe aurait convaincu l’ancien Premier ministre, avec lequel il n’a pas toujours été en bonne intelligence, de regagner le pays, s’il voulait récupérer ses biens meubles et immeubles saisis par le pouvoir et la famille Kabila et pour lesquels le «Premier» avait fait parvenir plusieurs lettres restées vaines et mandaté plusieurs avocats.

Sans doute que Kengo wa Dondo avait commis l’erreur fatale de tout mélanger: ou il voulait revenir à Kinshasa en allié de Kabila - et il avait à le dire; ou, il voulait revenir à Kinshasa en vue de rentrer dans ses droits; ou, il voulait revenir faire la politique... Or, dans plusieurs déclarations, notamment quatre mois avant son retour, Kengo avait annoncé dans une interview-choc sur Rfi, que la question de son retour ne se posait pas, qu’il attendait de voir une bonne «visibilité et lisibilité» et qu’en tous les cas de figure, il prenait le pari de regagner le pays en vue «de remettre les choses en place».

Or, on sait que Kengo, malgré que certains de ses compatriotes lui contestent la nationalité congolaise, vient de la même province que feu le maréchal Mobutu, c’est-à-dire l’Équateur. La province est connue pour être celle dont sont originaires les Dsp. À la recherche d’un nouveau chef, elle a toujours mal accepté d’avoir perdu le pouvoir. Il suffit d’un homme autour duquel se réaliserait un consensus pour que l’on reparle de l’Équateur...De quoi donner des sueurs froides aux Kabilistes...Or, c’est un discours décalé sinon confus que l’on a entendu de la bouche de Kengo à son arrivée le 16 novembre à Kinshasa. «Nous appuyons l’Accord de Sun City. Les institutions de la transition sont en place. Nous sommes tous appelés à les accompagner. Je suis venu apporter mon soutien aux Institutions...»


PARI OUBLIÉ.

S’il avait oublié le pari qu’il avait pris quatre mois auparavant de «revenir pour remettre les choses en place», les Kabilistes qui l’avaient bien entendu, sur une Rfi pieusement bue sur Fm à Kinshasa, étaient loin d’avoir perdu la mémoire. Le site Internet (digital.net) de la sœur jumelle de Kabila, Jeannette, n’avait d’ailleurs jamais cessé de lui prédire férocement l’accueil qui lui avait été réservé à son atterrissage à Kinshasa (le Soft-Grands lacs, n°779, 27 novembre 2003) publiant et republiant des «dossiers sur les crimes économiques de Kengo wa Dondo».

Alors, la question: pourquoi Kengo était-il revenu? Qui lui avait tendu le piège? Était-il devenu soudain démuni au point qu’il n’avait plus à attendre que tout se calme un petit peu plus alors qu’aucune occupation ne lui manquait (il rédigeait calmement ses mémoires à Bruxelles)? Comment et pourquoi un homme de sa taille est-il venu se jeter aussi facilement dans la gueule du loup? La question qui se pose sur Kengo est celle qui se pose sur tous ces Mobutistes, faussement bon choc bon genre.

C’est ce qui pousse ses égéries à affirmer: «tout se passe comme cela avait été prévu. Il faut un peu de confusion avant le putsch. La dernière mission de Kabila à Washington a été un échec cuisant. Les Américains n’en veulent plus désormais. Ils savent plus que jamais que ce n’est pas l’homme de la situation. On veut créer cette confusion pour favoriser un coup. les choses se précipitent maintenant que l’on parle de blanchiment d’argent sale par Kabila avec l’aide d’un Japonais - déjà arrêté à Kinshasa et d’érection d’une banque en Tanzanie. Au parlement, ça chauffe, déjà!» On attend de voir...

MUNYONGA MUBALU.
lesoftonline.net 15/12/2003

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