Jeannette Bougrab: berrichonne, fille de harki et docteur en Droit

publié le 19/04/2010 à 13:16

PARIS - Jeannette Bougrab a été nommée présidente de la Halde (Haute autorité de lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité) par un décret du 16 avril de la Présidence de la République publié samedi au Journal officiel.

Jeannette Bougrab, nouvelle présidente de la Halde, le 6 avril 2010 au Conseil d'Etat à Paris

AFP/Olivier Laban-Mattei

Jeannette Bougrab, nouvelle présidente de la Halde, le 6 avril 2010 au Conseil d'Etat à Paris

Cette juriste de 36 ans née à Déols (Indre) est une spécialiste des questions de discrimination qui veut "servir l'intérêt général" loin du milieu politique qu'elle a choisi de quitter après une "violente" campagne aux législatives de 2007.

Jeannette Bougrab qui s'étonnait d'être souvent interrogée sur ses origines ethniques, a fini par s'y habituer et à se présenter spontanément comme "berrichonne" et "fille de harki", parce qu'il "est utile de rappeler cette histoire douloureuse" de ses parents.

"Quand on dit +sous-hommes+ ou +traître+ pour un harki, ça me fait mal", a confié la jeune femme brune à un journaliste de l'AFP. C'est surtout pendant la campagne des législatives de 2007 que l'ancienne militante de SOS Racisme a expérimenté la violence de ce propos.

Candidate UMP dans l'imprenable dix-huitième circonscription de Paris, un bastion de gauche où réside une forte communauté immigrée, elle a affronté des adversaires qui ont remué le couteau dans la plaie d'une histoire familiale difficile: ils appelaient à ne pas voter pour la "fille d'un traître".

Seul Gérard Longuet lui a tendu la main dans cette épreuve "difficile, voire violente". Plus que jamais reconnaissante au sénateur qui a récemment suscité la polémique avec ses propos sur le "corps traditionnel français", elle a fait le choix de se retirer de la vie politique. Elle a alors abandonné ses fonctions de secrétaire nationale chargée des nouvelles adhésions à l'UMP où l'avait engagée Alain Juppé.

"On peut servir l'intérêt général autrement", résume cette "héritière d'un certain gaullisme social", membre du Conseil d'Etat, une institution qu'elle a intégrée grâce à son diplôme de Docteur d'Etat en Droit avec une thèse sur les institutions de la IVe République.

Dans un pays où "les déterminismes sociaux sont très forts", elle a puisé son énergie dans la souffrance d'un père, ouvrier illettré banni d'Algérie, mal accueilli en France, après une errance à travers l'Allemagne.

"Si je dois remercier quelqu'un aujourd'hui c'est mon père", reconnaît celle que le président Nicolas Sarkozy a choisi pour remplacer Louis Schweitzer à la présidence de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.

Cette institution créée en 2004 et qui, selon elle, "a assis sa notoriété dans le paysage français" ne sera pas sous sa direction "un outil de revanche d'une minorité contre la majorité" ou "une caisse de résonance des communautarismes", a-t-elle assuré lors de son audition à l'Assemblée nationale.

Maître de requêtes au Conseil d'Etat, Jeannette Bougrab, a été juriste au Conseil constitutionnel, alors présidé par Pierre Mazeaud, devenu son mentor. Elle a ensuite été membre du Haut Conseil à l'Intégration, membre du conseil d'administration de l'Institut du monde arabe et membre de l'observatoire de la diversité du Conseil supérieur de l'Audiovisuel.

Nommée le 10 janvier présidente du conseil d'administration de l'Agence pour la Cohésion sociale et l'Egalité (Acse), dont la mission est de renforcer l'action de l'Etat en faveur des 2.213 quartiers de la politique de la ville, elle a renoncé à ses fonctions de maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris. Elle avait assuré les mêmes fonctions à l'université de Paris-I Panthéon-Sorbonne jusqu'en 2007.

Auteur d'une étude sur "l'égalité dans l'accès à l'emploi", Jeannette Bougrab, hostile aux quotas ethniques et à la discrimination positive, fera de la lutte contre les discriminations dans ce domaine une de ses ses priorités car "l'emploi est le seul moyen de lutter contre l'exclusion".

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