Premier signe du rapprochement avec Thales, DCN change de nom et devient DCNS. L'ex-Direction des Constructions Navales, qui n'était plus que DCN depuis 2003, date de son changement de statut, ajoute donc un « S » a son nom. « C'est un S pour systèmes et services, ce qui ouvre de nouvelles perspectives. La racine DCN a été conservée car elle a une histoire à laquelle les collaborateurs, clients et partenaires sont attachés », explique-t-on au siège de l'entreprise, qui présentera aujourd'hui cette évolution à ses personnels. En plus des Services et Systèmes, DCN absorbe au passage le « S » de Thales et Armaris, ancienne filiale commune dont elle détient désormais l'intégralité du capital. D'ici mercredi, un nouveau logo sera dévoilé, alors que « tout l'univers de la marque sera profondément modifié ». Avec un nom en quatre lettres, le leader européen de l'industrie navale militaire souhaite se positionner à l'international dans la lignée de grands groupes, comme EADS, mais aussi face à son grand concurrent européen, Thyssen Krupp Marine Systems (TKMS).
De Richelieu à la création de Saint-Tropez en 1937
DCN est l'héritière d'une industrie fondée il y a 376 ans. C'était en 1631. Le cardinal de Richelieu venait de créer les premiers arsenaux. Colbert et son fils Seignelay développeront considérablement Brest puis feront édifier le port de Rochefort, appelé à devenir au XVIIIème siècle le deuxième port de France. Toulon, détruit par un incendie gigantesque, est également reconstruit. En 1751, le marquis de Montalembert choisit le site de Ruelle, près d'Angoulême, pour y établir une fonderie de canon de marine. En 1771, s'ouvre sur les bords de la Loire l'établissement de Nantes-Indret, qui se spécialisera dans la conception et la réalisation des systèmes propulsifs. En 1778, l'arsenal de Lorient succède à la Compagnie des Indes. A partir de 1813, l'arsenal de Cherbourg produit des bâtiments de surface, avant de se spécialiser dans les sous-marins. Le tout premier, le Morse, est lancé en juillet 1899. Après avoir marqué l'histoire de la marine à voile, l'arsenal de Rochefort, devenu trop exigu, est fermé en 1926. En 1937 enfin, les installations de Schneider, qui travaillait depuis 30 ans sur les torpilles, sont reprises, pour donner naissance à l'établissement de Saint-Tropez. Il y a 70 ans déjà, la DCN telle qu'on la connaît aujourd'hui s'articulait donc autour de Brest, Lorient, Cherbourg, Indret, Ruelle et Toulon.
Le tournant des années 90 et 2000
Pendant toutes ces années, la marine a connu le système hérité des arsenaux de Colbert. La même entité, placée sous la responsabilité du préfet maritime, construisait, entretenait et approvisionnait les navires. Les établissements étaient rattachés à la marine, au sein d'une structure ayant changé plusieurs fois de noms, de la Direction du Matériel (1852) à la Direction des Constructions Navales (1900). Après la seconde guerre mondiale, l'entité devient Direction des Constructions et Armes Navales (DCAN). Dans le même temps, la Délégation Ministérielle pour l'Armement (DMA) est créée en 1961 et deviendra en 1977 la Délégation Générale pour l'Armement. DCN y sera rattachée jusque dans les années 90. Après la chute du mur de Berlin, le ministère de la Défense souhaite séparer le donneur d'ordres étatique de l'industriel. Ce mouvement commence en 1991 et s'achèvera, en 2003, avec le changement de statut. DCN quitte l'administration pour devenir une société de droit privé. Afin de vendre des matériels à l'export, une société commune, détenue à parité, est créée avec Thales (ex-Thomson CSF). Armaris sera le premier pas vers le rapprochement des deux groupes, entériné avec le projet Convergence. En décembre 2005, une lettre d'intention est signée en ce sens entre DCN, Thales et les ministères de la Défense et de l'Economie. Quinze mois plus tard, le rapprochement est devenu opérationnel jeudi dernier. Thales détient désormais 25% du capital de l'ex-Direction des Constructions Navale, qui a racheté de son côté les activités navales françaises de l'électronicien (hors équipements), ainsi que ses parts dans Armaris (50%) et MOPA2 (35%), la société en charge du projet de second porte-avions. Thales pourra, également, augmenter sa participation à 35%. A l'issue de ce rapprochement, vivement contesté par les syndicats, la nouvelle DCNS est forte de 13.300 salariés, avec un chiffre d'affaires d'environ 3 milliards d'euros et un carnet de commandes supérieur à 10 milliards d'euros.
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- Voir notre article sur les modalités et les valorisations de Convergence