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Interview : Jean-Marie Poimboeuf, président de DCNS
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Interview : Jean-Marie Poimboeuf, président de DCNS


crédits : DCNS


27/10/2008

Livre Blanc, Loi de programmation militaire, Bilan du mariage avec Thales et éventuel rapprochement avec d'autres groupes, y compris civils ; état du marché de la navale militaire, développement de DCNS sur de nouveaux segments... Avec Jean-Marie Poimboeuf, nous faisons le point sur l'actualité et l'avenir du leader européen de la navale militaire. Cette interview revêt, également, un caractère particulier dans la mesure où le président de DCNS, atteint par la limite d'âge en janvier prochain, s'apprête à quitter la barre du groupe. A la tête de l'entreprise depuis presque 8 ans, l'« homme du changement », qui a porté la transformation de DCN en société de droit privé puis son ouverture à Thales, semble satisfait sur le travail mené ces dernières années, ce qui ne l'empêche pas d'avoir une vision lucide sur les défis que le groupe doit aujourd'hui relever.
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Mer et Marine : Après la publication du Livre Blanc sur la Défense, en juin dernier, le projet de Loi de Programmation Militaire sera présenté mercredi en Conseil des ministres. Seulement 11 des 17 frégates multi-missions (FREMM) seront finalement commandées. Le rythme de production doit par ailleurs être ralenti, tout comme celui des sous-marins nucléaires d'attaque (SNA) du type Barracuda, bien que leur nombre n'ait pas été modifié. Où en sommes nous actuellement et quelles conséquences y aura-t-il sur le plan de charge de DCNS ?

Jean-Marie Poimboeuf : Je constate que le Livre Blanc maintient dans le système de défense une place significative de la marine, qui continue d'être un outil de premier rang. La force de dissuasion est au coeur de la Défense et la composante navale est au coeur de la force de dissuasion. Cela signifie l'achèvement du quatrième sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) et la modernisation des trois premiers. Et il en découle les moyens qui vont avec.
Le nombre de SNA est confirmé à six unités. Il n'y aura pas de changement majeur sur les cadences. Nous en sommes toujours à deux ans et demi entre le prototype et le second bâtiment, puis sur une livraison tous les deux ans pour les SNA suivant. Par contre, l'ensemble du programme sera décalé d'environ six mois, ce qui est minime.
Concernant les FREMM, le programme reste à un niveau important. Onze, c'est certes moins bien que dix-sept, mais ce chiffre reste significatif. La cadence n'est, à ce jour, pas encore arrêtée mais elle sera plus espacée que ce qui était prévu dans le contrat initial en 2005. On parle aujourd'hui de 10 à 12 mois au lieu de 7 mois entre deux bateaux. Les discussions portent sur ce rythme, qui a encore industriellement du sens. Une FREMM tous les 10 à 12 mois nous saurons le gérer. Cela nécessitera une adaptation de l'outil industriel mais ça n'entrainera pas de plan social.

Les effectifs de DCNS vont quand même continuer de décroître, notamment sur les postes qui ne sont pas en production. Vous étiez encore plus de 13.000 au moment du rapprochement avec Thales, en 2007. Quels sont aujourd'hui vos objectifs ?

Nous continuerons à baisser. De 12.800 aujourd'hui, nous passerons à 12.000 d'ici 2010. Mais nous utiliserons les départs naturels, qui sont de l'ordre de 400 à 500 par an. Nous n'en renouvèleront que 60 ou 70%, au lieu de 90% jusqu'ici.

Concernant le second porte-avions de la Marine nationale. Le président de la République a décidé en juin de reporter à 2011 la décision de le construire, ou non. Certains observateurs interprètent d'ailleurs ce report comme un abandon déguisé. Ce qui est en revanche sûr, c'est que la France ne sera plus liée par l'accord de coopération signé en 2006 avec la Grande-Bretagne, et pour lequel un modèle voisin avait été étudié. Faites-vous partie de ceux qui pensent que l'on doit revenir sur une propulsion nucléaire pour le PA2 et, pourquoi pas, adapter le modèle du Charles de Gaulle ?

C'est à la Délégation Générale pour l'Armement et à la marine d'en décider. Le second porte-avions n'est pas annulé mais reporté et l'importance du groupe aéronaval dans l'outil de Défense a été confirmé par le Livre Blanc.
Ce que l'on peut dire, c'est que le temps qui est devant nous doit être utilisé pour prendre en compte de nouvelles données, qui ne sont plus les mêmes par rapport à ce qui prévalait il y a deux ans. Nous avons, notamment, constaté un renforcement des contraintes énergétiques. Il faut étudier des solutions prenant en compte ces contraintes. Le nucléaire fait partie de ces solutions. Je note d'ailleurs que cette préoccupation ne se trouve pas seulement dans le militaire. Pour de très gros navires civils, il y a aussi des réflexions sur de nouvelles propulsions économes.

Cela nous emmène naturellement vers les chantiers de Saint-Nazaire, aujourd'hui Aker Yards et demain STX après le rachat de leur maison-mère par un groupe coréen. DCNS a travaillé avec Saint-Nazaire sur le PA2 et, lors de son déplacement là bas en septembre, Nicolas Sarkozy a posé la question du rapprochement des chantiers civils et militaires français. On a souvent évoqué ce mariage, notamment au début des années 2000, mais vous vous y étiez alors fermement opposé. Êtes-vous toujours contre un rapprochement avec les Chantiers de l'Atlantique ?

Je ne dirais pas que j'étais contre mais on ne peut pas tout faire à la fois. En 2003, la priorité était de clarifier, en France, le paysage naval de défense. C'était plus urgent et il y avait plus d'intérêt à mener à bien le projet Convergence. Cela devait passer avant un rapprochement avec le civil.
Maintenant, le président de la République a demandé qu'on regarde la question. Il nous faut du temps pour mener à bien l'étude en cours, d'autant qu'une telle démarche doit s'inscrire dans un cadre européen. Il faut, notamment, regarder les synergies possibles dans une coopération européenne.

On a également reparlé, il y a quelques semaines, d'un éventuel mariage de DCNS avec l'Allemand TKMS. Est-ce d'actualité ?

TKMS entre dans l'étude dont je vous ai parlé mais la piste franco-allemande n'est pas la seule. Il faut aussi regarder ce que nous pouvons faire avec les Britanniques, les Italiens et les Espagnols. Ensuite, ce sera aux actionnaires de décider.
On travaille sur le sujet mais toutes ces choses prennent du temps. La coopération doit mûrir et il faut un projet industriel derrière, projet qui est encore à élaborer. Il faut ensuite que les équipes se parlent et s'approprient le projet. Je ne vois pas cela à court terme.

Vous parlez des Espagnols mais vos relations avec Navantia ont été houleuses ces derniers mois. Il fut même question d'un divorce sur le programme des sous-marins Scorpène. Les Espagnols ont en effet lancé leur propre sous-marin, le S 80, doté d'équipements américains et présentés contre le Scorpène à l'export. La situation s'est-elle améliorée récemment ?

Concernant le Scorpène, la coopération industrielle est très bonne. Nous avons réussi le Chili et la Malaisie. En revanche, nous ne sommes pas satisfaits de la coopération sur le moyen terme avec l'arrivée du S 80. Nous continuons de discuter pour clarifier la situation.

Cinq ans après le changement de statut de l'entreprise et un an et demi après son rapprochement avec Thales, quel bilan dressez-vous ?

Les objectifs du changement de statut ont été assez bien tenus en termes d'efficacité. Nos navires sont bons, et bons au niveau des prix. La disponibilité a été améliorée et l'Etat actionnaire a récupéré sa mise de départ, qui était de 560 millions d'euros. Or, depuis 2003, le groupe lui a rapporté 2 milliards d'euros. L'Etat a touché 600 millions de dividendes, 600 autres millions de la vente de 25% de DCN à Thales et, s'ajoutent à cela, l'impôt sur les résultats et la TVA, que nous ne payions pas avant. Je note d'ailleurs que nos coûts n'ont, dans le même temps, pas augmenté.
DCNS a, ensuite, été capable de s'inscrire dans un rapprochement avec Thales, dans le cadre du projet Convergence. Nous nous préparons, aujourd'hui, à d?autres étapes futures.

DCNS reste encore très dépendant des commandes de l'Etat...

Oui, et dépendre à 75% des commandes de l'Etat, c'est une fragilité. L'objectif est donc d'augmenter notre activité pour être moins dépendant. Il faut que DCNS se développe sur d'autres créneaux que les navires armés, sans toutefois sortir de ses coeurs de métiers. L'internationalisation est nécessaire. Après la création de DCNS Far East à Singapour, nous avons lancé cet été DCNS India et nous créerons début 2009 une nouvelle filiale en Malaisie. Nous devons nous installer dans des pays avec lesquels nous avons des relations de longue durée afin de développer nos marchés.
Le deuxième axe est le développement des services, dans la marine mais aussi dans d'autres secteurs que Toulon et Brest, ainsi que pour d'autres forces armées et d'autres forces navales. Nous ne le ferons pas seuls, c'est pourquoi nous nous associons avec Veolia.
Nous devons par ailleurs faire fructifier notre savoir-faire dans le domaine nucléaire, pour lequel travaillent 650 personnes chez DCNS. Il s'agit de l'ingénierie sur des chaufferies nucléaires, mais aussi de la fabrication de pièces, de services et d'entretien. Pour DCNS, le marché du nucléaire civil est un marché d'avenir. C'est pourquoi nous mettons nos compétences au service d'Areva, EDF et peut être demain Suez, qui ont devant eux un challenge pour monter en puissance. Nous voulons donc participer à cette croissance.

La diminution de la dépendance au marché domestique passera aussi, bien évidemment, par le développement des contrats à l'export. Vous avez notamment parlé de la création de filiales à l'étranger. Comment analysez-vous le marché actuel ? N'y a-t-il pas un décalage entre l'image de produits très complexes et technologiques que dégagent des groupes comme DCNS, et en face des marines aux budgets souvent limités ?

C'est pourquoi nous avons décliné les bâtiments développés pour la Marine nationale en bateaux plus petits et plus simples, à la fois dans l'architecture et la propulsion. De même, les systèmes de combat sont adaptés pour répondre aux besoins. Tout cela, aussi bien dans les bâtiments de surface que pour les sous-marins. Nous avons par exemple développé les familles de frégates FM 400 et Gowind, qui répondent aux besoins d'un très large éventail de marines. Nous proposons aussi un sous-marin côtier, l'Andrasta, dont le coût est nettement inférieur à celui des sous-marins plus sophistiqués. Même chose pour les Bâtiments de Projection et de Commandement, avec une gamme à 14.000 et 16.000 tonnes, contre plus de 21.000 tonnes pour les BPC de la marine française.

Vous espérez signer bientôt de nouveaux contrats à l'export. Il y a bien évidemment la Grèce, où vous espérez placer six FREMM en version antiaérienne, mais aussi le Brésil, qui pourrait acquérir quatre sous-marins. Qu'en est-il ?

Ce sera plutôt pour l'année prochaine...

On ne peut terminer cet entretien sans évoquer votre carrière dans l'entreprise, qui touche à sa fin. Cela fait huit ans que vous êtes aux commandes d'une véritable institution. De l'arsenal à DCNS... C'est une mutation énorme que vous avez porté. Que retiré vous de ces années ?

Je suis heureux d'avoir accompagné cette évolution. C'est un travail formidable qui a été réalisé par l'ensemble des personnels et l'équipe de direction qui m'a entouré. Mais nous ne sommes qu'un maillon. Il ne faut surtout pas couper les quelques années que nous venons de vivre des 300 ans qui ont précédé. DCNS, c'est une longue histoire. Je pense à ces ingénieurs de haute volée qui ont fait ce que DCNS est aujourd'hui, c'est-à-dire un groupe capable de développer les navires les plus complexes que très peu d'entreprises au monde savent faire. DCNS, c'est aussi un formidable travail collectif des compagnons, techniciens et ingénieurs, de tous ces hommes et femmes qui, par leur investissement et leur savoir-faire, font que les bateaux sortent, et sortent à l'heure, y compris quand il s'agit de challenges extraordinaires, comme la construction du Terrible ou l'IPER du Charles de Gaulle.
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Propos recueillis par Vincent Groizeleau


       




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