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Il faut donc nous méfier de ceux qui cherchent à nous convaincre par d'autres voix que celle de la raison (Primo Levi)

 Interview : Interview de Johan Weisz, co-auteur de
 Josiane Sberro

Interview de Johan Weisz

 

Récemment, la sortie d’un simple ouvrage d’enquête s’est vue accompagnée d’un battage exemplaire de la presse. Sept pages dans Le Point, six dans Marianne, une succession d’articles de la MENA. S’agirait-il d’une affaire d’Etat ? Non. Tout simplement de :
"OPA sur les juifs de France, enquête sur un exode programmé 2000-2005" de Cecilia Gabizon, reporter au Figaro et Johan Weisz, journaliste à Radio Shalom et Proche-Orient Info (Grasset)

Des personnalités mises en cause dans l’ouvrage et se sentant outragées par la teneur de certains articles ont aussitôt réagi avec vigueur. (lire les réactions)

Primo-Europe, fidèle à ses engagements de libérer la parole, a ouvert ses pages à cette manifestation de colère. Johan Weisz, co-auteur de l’ouvrage, nous a contactés. Il tenait à nous démontrer que son livre subissait des attaques injustifiées.

Rendez-vous a donc été pris avec Johan Weisz pour une longue interview corrigée et approuvée par son auteur.

Pour permettre à nos lecteurs de se faire une idée plus équilibrée, nous avons contacté tous les responsables officiels des instances objets de cette enquête, et leur avons demandé leur point de vue d’acteurs directs. Leurs réactions feront l’objet d’une parution séparée.


PE: Johan Weisz, bonjour. Vous avez contacté Primo après la parution sur notre site de deux articles critiques de votre enquête. Nous vous avons proposé d’expliciter votre démarche intellectuelle. Et vous nous avez aussitôt répondu positivement.
Dans un premier temps, pourquoi avoir choisi ce titre ?

JW: J’ai écrit "OPA sur les Juifs de France". Cela représente deux ans et demi de travail. C’est un livre de reportage. Ce n’est pas un livre à thèse. C’est un carnet de route de cinq ans de vie de la communauté juive de France. C’est un livre qui voulait poser la question de l’Alya. Quand Ariel Sharon, en Juillet 2004, apparaît sur toutes les télévions en France pour dire aux Juifs : "Votre pays ce n’est pas la France, c’est Israël, venez immédiatement", cela a été perçu comme une OPA, en France en tous cas ! Les Français se sont simplement demandés pourquoi on voulait leur dérober "leurs" Juifs.

Nous sommes donc allés voir quel était l’organisme, l’Agence Juive, censé encourager l’Alya des Juifs du monde, de la diaspora et des Juifs de France, et qui est "censée" œuvrer pour la réussite de votre Alya.

Nous sommes allés voir les nouveaux immigrants en Israël ; voir comment se passe leur vie là-bas ; puis nous avons enquêté et découvert le pourcentage de ceux qui reviennent. C’est un chiffre jalousement gardé : 30% à 40% des nouveaux immigrants s’en retournent vivre en France dans les cinq années qui suivent leur départ.

PE: Quant à l’affirmation d’Ariel Sharon, il nous faut préciser que sa présentation en est erronée : Ariel Sharon ne s’est jamais adressé aux Juifs de France; il était aux Etats-Unis, invité d’instances juives inquiètes de la montée de l’antisémitisme en France. Sa réponse fut simple: "si les Juifs de France ont des problèmes d’antisémitisme, Israël les attend".
« OPA sur les Juifs de France » vous avez choisi votre titre, on ne vous l’a pas imposé ?

JW: Bien sûr ! Je crois qu’un auteur, à un moment donné, travaille avec son éditeur. Nous sommes deux auteurs. Le livre est un produit de Cecilia Gabizon et Johan Weisz; nous avons travaillé main dans la main avec l’éditeur. "OPA sur les Juifs de France" est un titre qui me plaît pour trois raisons.

D’abord, c’est qu’effectivement l’opération de l’Agence Juive sur les Juifs de France est, quoi qu’on dise, une opération unilatérale, vis-à-vis de la France tout du moins !

Ensuite, c’est la conjonction historique de l’antisémitisme, qui est très fort en France à cette époque-là – et qui l’est toujours -, de la volonté d’action de l’Agence Juive qui est très active à partir de 2004, et de l’action de certains responsables communautaires et de militants dans les communautés ou hors communauté, de cercles très à droite. Tout cela a eu un impact. Il ya eu une d’OPA intellectuelle sur la manière de penser, de voir le monde, d’une partie des Juifs de France.

Enfin, remarquons que si le titre choque aujourd’hui, dans les années 1980, Schmuel Trigano écrivait un article titré « Non à l’OPA sur le judaïsme !», et personne ne s’en émouvait ! Certes, aujourd’hui, le contexte a changé. Mais ce qui est important pour moi dans le choix d’un titre, c’est qu’il choque et qu’il casse des réflexes automatiques. Il y a eu pas mal de réflexes automatiques avec la sortie de ce livre, souvent fondées sur le titre, ce qui prouve que ce ne sont que des réflexes automatiques. J’attends une pensée autonome.

PE: Titre choc ou idée préconçue quand vous parlez d’OPA sur les Juifs ? 250 000 jeunes diplômés quittent la France tous les ans pour un avenir meilleur. 3000 Juifs (hommes, femmes, enfants) vont faire leur Alya dans l’année, et cela donne lieu à ce concept analytique. La divergence d’approche est telle que l’on ne peut éviter de s’en étonner, voire de s’en émouvoir. Et si l’on y ajoute les réactions dans la presse.

JW: Le magazine Le Point a effectivement fait 7 pages sur le livre, avec des extraits des bonnes feuilles ; Marianne a fait aussi 6 pages, avec essentiellement des extraits des bonnes pages. Que des journalistes chevronnés comme Joseph Macé-Scaron, ancien du Figaro, ou Emilie Lanez au Point reconnaissent la qualité du travail journalistique, c’est bien ! J’attends que Tribune Juive et Actualité Juive fassent de même, car c’est un débat qui intéresse autant la communauté française que la communauté juive.

PE: Les journaux ont publié les bonnes pages; mais quand, sur la couverture de Marianne, journal souvent vendu pour ses couvertures, on découvre, en titres énormes, "l’OPA et la collusion des Juifs avec l’ultra droite", il y a de quoi être outré. Comment se fait-il que l’on ait pu utiliser votre livre pour enfermer tous les Juifs de France dans cet immonde magma ? Erreur de parcours, volonté de nuire, comment cela a-t-il été possible ?

JW: Parlons du fond, c’est ce qui doit nous intéresser. Il y a une volonté d’OPA d’une partie de l’extrême droite sur la communauté juive. Simples exemples : Sur le site de Primo-Europe, on invite à des conférences d’Alexandre del Valle, et aujourd’hui, en une, de Guy Millière. Je ne suis pas là pour juger, je suis là pour donner l’information. Je constate une permanence de la présence de personnalités de la droite extrême dans certains cercles communautaires. C’est un constat factuel. Pas un jugement. A chacun de trancher à partir des faits.

PE: Sur Primo, del Valle ou Guy Millière hier, et vous aujourd’hui, Johan Weisz. Nous n’avons aucune exclusive quand il s’agit de donner la parole en dehors des extrêmes et des idéologies toutes faites. Primo n’est pas un site communautaire, faut-il le rappeler ? Nous sommes de toutes obédiences, de toutes croyances, de toutes sensibilités politiques. C’est une question de respect de la liberté d’expression.

JW: Très bien. C’est votre choix. Souvenez-vous de la critique que vous portiez aux altermondialistes qui défilaient côte à côte avec des militants de l’islamisme politique. Vous leur disiez de faire le ménage dans leurs rangs ! Eux répondaient notamment en invoquant la liberté d’expression.

PE: Vous voyez que vous êtes dans l’exclusion et l’exclusive.

JW: Revenons au chapitre IV de mon livre, il est important. Je rappelle que la 11e chambre de la Cour d’Appel de Paris a jugé qu’Alexandre del Valle a "fréquenté tour à tour les milieux royalistes légitimistes, les milieux intégristes catholiques, les milieux de la droite païenne antisémite, ceux de la droite radicale, ceux du Grece et de la Nouvelle droite, les milieux fascistes identitaires européens".

PE: La vie d’Alexandre del Valle nous importe peu. Ce qui nos importe c’est le contenu des ses livres. Et sur le sujet qui est le sien il est d’un apport incontournable.

JW: Dans les dernières années qui ont été des années troubles, certains dans la communauté ont accueilli avec plaisir des conférenciers non juifs (et ils étaient rares !) qui partageaient les mêmes thèses qu’eux. Or, certains de ces conférenciers venaient de la droite extrême et ont pu, du coup, trouver un public acquis à leur cause. En quelque sorte, la communauté juive leur a donné une audience et un crédit. Je pose cette question : la communauté juive doit-elle aller chercher ses appuis dans la droite extrême ?

PE: De quel pseudo appui parlez-vous ? Tout juif est un citoyen français, libre des ses choix... Vos propos relèvent de la méprise et de la globalisation primaires. Effet d’annonce de Marianne et instrumentalisation. Un certain comique peut donner un spectacle des plus sectaires au Zenith sans soulever une ligne de dérision. L’annonce d’une conférence suffit à vous faire frémir !

JW: Quand il y a des collusions étranges entre les altermondialistes et des islamistes antisémites, je l’écris, je fais mon métier de journaliste. Quand Marianne reprend un extrait de mon livre dans lequel je dis "que des militants de la droite extrême sont accueillis à bras ouverts dans ces cercles de la communauté juive", Marianne prend ce chapitre, c’est tout à son honneur, car, du point de vue factuel, c’est un chapitre irréprochable.

PE: Allez-vous comprendre que les Juifs concernés par votre OPA, à Sarcelles, ont bien d’autres soucis, de nos jours, que l’adhésion à une idéologie ? Les Juifs de votre OPA ont des questions vitales : comment par exemple, des Noirs proches voisins et amis, sont soudainement devenus si violemment antisémites ? Antisémitisme de compensation.

JW: Oui. Je crois tout de même que les enjeux dont nous parlons sont éminemment politiques. Or, quand on fait de la politique, il faut avoir en tête à qui on parle. Quel est l’objectif de la personne avec qui je m’allie et quel est mon objectif à long terme ? Les combats politiques de la communauté juive sont-ils les mêmes que ceux d’intellectuels qui prônent – c’est le cas de Guy Millière -, de marcher dans les pas d’Alain Sanders, du journal catholique intégriste Présent. Mon livre est là pour vous donner les éléments du problème.

PE: Revenons à votre livre. Votre enquête a débuté en 2000. Vous avez tenté de comprendre comment l’Agence Juive avait surfé sur la vague de peur. Or, l’année 2000 c’est l’affaire Al Dur’ha et la deuxième Intifada.

JW: Oui et non. Il y a une conjonction historique. La France connaît un violent antisémitisme qui se poursuit. Au même moment, en Israël, les chiffres de l’Alya sont au plus bas. Cessons de réfléchir avec angélisme. L’Agence Juive est certes un organisme sioniste. Ce qui permet son existence, c’est qu’elle produit de l’Alya, sinon elle met les clés sous la porte et tous les fonctionnaires de l’Agence se retrouvent au chômage, on pourrait l’imager en disant : "L’Agence, dont les soutiens financiers se fragilisent, a pour contrainte existentielle de créer de l’Alya, et faute de résultats significatifs ses dirigeants se retrouveront au guichet de l’ANPE !".

L’Agence Juive constate que les réservoirs d’immigration juive, en ex-URSS ou en Ethiopie sont épuisés. Par contre, les Juifs de France apparaissent en difficulté.

L’erreur que va faire l’Agence Juive en montant l’opération Sarcelles d’abord, c’est qu’elle va raisonner pour les Juifs de France en terme d’Alya de secours, de sauvetage "rescue Alya". Ils vont monter un plan en envoyant des délégués, avec des listes des membres de la communauté juive ils vont faire du porte à porte. Cela va se révéler être un échec, car même s’il y a un antisémitisme terrible en France, les Juifs ne montent pas en Israël pour cela.

PE: Si l’Alya s’arrête, les envoyés de l’Agence juive vont pointer à l’ANPE ; conception originale mais erronée ! Ce sont des fonctionnaires de l’Etat d’Israël, ils rentreront au pays pour mettre leurs compétences au service d’autres causes.

JW: C’était une image. Mais l’Agence Juive est une organisation dont le seul but est de produire de l’Alya. 50% de son budget est financé par des donateurs américains. Eux raisonnent en termes d’investisseurs. S’il n’y a pas d’Alya, pourquoi donner 150 millions de dollars par an à l’Agence Juive ? Et sans ces financements, l’Agence Juive fermerait ses portes !

PE: Mais l’Agence Juive disparaît d’elle-même quand elle n’a plus de raison d’être. Dans les pays arabes sa mission est terminée avec la disparition des Juifs.

JW: En 2004, le but escompté par l’Agence était de faire immigrer 30 000 Juifs de France. Seuls 2415 Juifs ont émigré. L’Agence Juive se rend ensuite compte de son erreur d’appréciation. Une Task force est créée et constate que la logique d’Alya de secours était inadaptée et va passer d’une méthode de "rescue alya" à une "alya by choice". Les businessmen de cette Task force font appel à des consultants d’IBM Business Consulting Services, rémunérés 300 000 dollars par an pour produire une étude marketing, sur deux communautés : celle de France et des Etats-Unis. Marketing, positionnement, quelles catégories de Juifs en France ? Quoi proposer aux Juifs de France pour "vendre" le produit Israël. Ces mots ne sont pas une invention de ma part, ce sont simplement les mots employés aujourd’hui par les dirigeants de l’Agence…

PE: N’y a-t-il pas inversion du problème ? Pourquoi l’Agence Juive s’active-t-elle à certains moments de l’histoire des communautés ? Il y a quinze ans seulement, en France, l’Agence juive avait même fermé ses locaux de la rue Fortuny. Pourquoi ?

JW: Dans ce livre à aucun moment nous ne disons "c’est bien" ou "c’est mal". Nous décrivons l’état des lieux sans jugement. Dans les séminaires des dirigeants de l’Agence, on découpe les communautés juives en tranches de camemberts et on discute sur des diagrammes de positionnement pour répondre à la question "Comment vendre Israël ?".

Parmi les dirigeants historiques de l’Agence Juive, les sionistes socialistes, ce procédé a choqué au départ, mais ensuite ils ont bien du l’accepter.

On parle aussi de sionisme dans ce livre. Force est de constater qu’aujourd’hui, dans le camembert de l’identité juive en diaspora, la part israélienne de l’identité juive est plus importante qu’hier.

PE: Pourquoi ?

JW: Le leader sioniste Ahad ha’am voyait en Israël un centre culturel et "national-spirituel" pour le judaïsme auprès duquel la diaspora périphérique vient s’y ressourcer. Mon sentiment est que l’on va vers cela.

PE: Pourquoi depuis 2000 l’identité juive a-t-elle pris une forte connotation israélienne ?

JW: Elle n’est pas devenue plus israélienne ; elle est devenue plus active pour la défense politique d’Israël. Là, nous arrivons au problème des médias communautaires qui fonctionnent en miroir. Aujourd’hui, la communauté juive est crispée sur des mots. Par exemple quand on entend "colon" sur France info, on n’est pas content. On réagit typiquement en disant "on n’est pas d’accord avec ces gens-là !". On tente, après coup, de légitimer la crispation ; mais en entendant "colon" on va dire : "ces gens-là ont un parti pris contre Israël !"

Je pense qu’à un moment donné, il faut penser par soi même et ne pas se crisper. L’autodérision a toujours été la force du peuple juif. Il nous manque dans la communauté juive une autonomie de la pensée. C'est-à-dire penser par soi-même et non penser contre. A utiliser 90% de notre intelligence à lutter contre, on oublie juste qui on est.

PE: Si je n’accepte pas le mot "colon", ce n’est pas par crispation mais par simple raison sémantique. Un colon vit sur une terre d’appartenance désignée. Le roi de Jordanie, après Septembre Noir, a abandonné à Israël la Cisjordanie, et l’Egypte a "oublié" Gaza dans le giron d’Israël après avoir récupéré le Sinaï. Ces terres sont en fait libres de droit. Que les occupants juifs de ces régions doivent céder la place à un peuple naissant est un fait, mais le terme "colons" est impropre. Donc inacceptable !

JW: C’est une vérité historique, mais ce terme est passé dans les usages.

PE: C’est cet état de fait que je refuse.

JW: Evidemment que chaque mot a un sens. Mais parle-t-on ici de l’essentiel ? Vous allez me reprendre, moi Johan Weisz sur Radio Shalom, parce que j’utilise parfois le mot "colon" et j’ai peut-être mes raisons aussi. Vous allez par contre écouter avec émerveillement tel ou tel évangéliste américain qui ne va refuser le mot "colon" parce qu’il est "pro-israël mais qui est, par ailleurs, un antisémite notoire.

On peut aussi parler des rabbins et de leur rôle. On s’intéresse dans le livre aussi bien aux Juifs de France, qu’aux francophones en Israël. On se dirige vers une sorte de franco-israéliens, avec des rabbins qui ont un grand succès en Israël. Ils organisent des week-ends, des repas, des regroupements et séminaires. Ils ont été actifs dans l’Alya des Juifs de France vers les territoires.

PE: Là, j’accepte d’entendre parler de marketing. Ne vaut-il pas mieux que ce soit l’Agence Juive peuplée de fonctionnaires d’un Etat démocratique qui se charge de l’Alya, plutôt que de laisser ce rôle à l’idéologie et à certains rabbins ?

JW: Les dirigeants de l’Agence Juive sont élus par le Congrès Sioniste. Mais ça n’a pas empêché l’Agence d’encourager jusqu’en 2004 les installations de familles françaises à Gaza.

PE: C’était la politique du moment d’un Etat organisé. Avec le repli ce ne sera plus possible.

JW: C’est vrai. Il y a un discours sur les Arabes, chez certains Juifs de France ou de francophones en Israël, qui m’a beaucoup étonné. Si l’on remplaçait le terme "arabe" par "Juif" dans la même phrase, leurs auteurs eux-mêmes crieraient à l’antisémitsime !

PE: Où habitez-vous, Johan ? Vous êtes à l’image de tous les Parisiens. Il faut venir en banlieue pour comprendre l’exaspération.

JW: J’habite dans le centre de Paris, à deux pas de la rue des Rosiers. J’ai beaucoup de chance d’habiter dans ce quartier magique. Maintenant, encore une fois, je ne juge rien. Quand un rabbin répète dans des cassettes enregistrées – c’est donc un discours assumé - : "Avec les arabes, ou tu cognes, ou tu te fais cogner. Y’a pas de kavod à faire à un arabe. Ou bien il est sous tes pieds, ou bien tu es sous les siens. (…) Sarah, l’épouse d’Abraham, veut nous faire comprendre quelque chose : Attention à l’Arabe!"… et bien je m’étonne qu’on me tombe dessus parce que je retranscris des propos assumés et répétés à l’envie… plutôt qu’on ne vienne demander des éclaircissements à ce rabbin très apprécié chez les francophones en Israël.

PE: Vous parlez dans le livre d’un malaise au sein des institutions juives et du CRIF. Vous en concluez la création du groupe AMI pour aider à l’émigration francophone. Vous les mettez sur le même plan. Or le CRIF n’a rien à voir avec l’émigration. Il n’a pas à s’en mêler de près ou de loin

JW: Il y a une sorte de compétition entre les instances communautaires pour conquérir l’assentiment de la communauté. Il y a un flou. Nous sommes allés voir les responsables, les institutionnels et les anonymes. Nous avons interviewé 250 personnes, du simple individu au ministre, en France comme en Israël, pour écrire ce livre.

On sent que les Juifs se demandent quelle carte jouer. Celle du lobby par exemple, choisie par les patrons de l’UPJF qui s’alignent derrière Nicolas Sarkozy ; de l’autre côté il y a la carte républicaine. Alors que la France va vers une société des communautés, cette interrogation est dans toutes les têtes des gens que nous avons rencontrés.

PE: Ce partage de la France des communautés nous est imposé de l’extérieur.

JW: Luc Rozensweig qui est un ancien journaliste, nous insulte sans avoir pris la peine d’ouvrir notre livre. Quel sérieux ! Quel souci de l’intelligence ! Simplement parce que Marianne a publié un chapitre de notre livre. Pourquoi se braquer quand on parle de Marianne ? Chacun a son avis sur la presse, mais se représenter un canard qui a soutenu à bout de bras les accords de Genève comme un tissu d’immondices, c’est un peu fort de café.

PE: A cause de l’usage de titres accrocheurs qui ne reflètent pas toujours le contenu des articles.

JW: Nous essayons dans ce livre avec des mots simples de mettre la réalité à la portée de tous. Nous aurions pu l’appeler "les Juifs pour les nuls". Au-delà des reportages, on apporte la contextualisation. Expliquer Théodore Hertzl, abolir les fantasmes qui concernent le lien avec Israël, la double fidélité. Ce livre fait exploser les préjugés. Voilà comment ça fonctionne ; si madame Cohen veut acheter un appartement à Ashdod, qu’elle le fasse. Que l’on comprenne enfin que ce lien à Israël est ancré dans la vie juive. Dans le contexte de mondialisation d’aujourd’hui, pourquoi empêcher un juif d’aimer deux pays ? Ceux qui avaient des fantasmes sans lire le livre les garderont. Et ceux qui liront le livre y verront plus clair.

Un dernier mot : Sur le blog du livre, blogoptimist.com nous ouvrons le débat. N’hésitez pas à nous faire part de vos remarques, coups de gueules, récits vécus.

Propos recueillis par Josiane Sberro pour Primo-Europe ©

Auteur : Josiane Sberro
Date d'enregistrement : 13-05-2006
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