Méningites

A. Gérard

Centre hospitalier universitaire de Nancy, hôpital de Brabois-Adultes, réanimation médicale,
Tour Drouet 6, 54511 Vandœuvre-lès-Nancy cedex, France

POINTS ESSENTIELS

· Il n'y a pas de contre-indication à la ponction lombaire dès l'instant où le diagnostic de méningite est suspecté (pour les inquiets, la ponction sous-occipitale, très facile, peut être alors réalisée).

· Le fond d'œil avant la ponction lombaire n'a aucune indication.

· L'antibiothérapie préhospitalière est tout à fait justifiée si une étiologie bactérienne est probable.

· En cas de méningite bactérienne, les corticoïdes peuvent avoir un intérêt, il est cependant limité.

· Les signes de gravité sont parfois discrets.

· Au moindre signe de gravité (pas toujours correctement estimé par beaucoup de médecins), l'hospitalisation en réanimation est systématique.

· Une antibiothérapie probabiliste est débutée dès la constatation d'un liquide céphalorachidien trouble, dans l'attente des résultats du laboratoire.

· Dans les méningo-encéphalites, le traitement anti-infectieux sera très large au départ, en l'absence d'orientation étiologique, le retard thérapeutique est l'élément pronostique majeur. Une désescalade pourra toujours être discutée ultérieurement.

· La prophylaxie pour les sujets contacts est simple. Elle doit également être ferme et n'admettre aucune dérive (la circulaire de 1990 peut être appliquée sans nuance).

Notre propos se limitera à la méningite de l'adulte immunocompétent, avec quelques digressions sur les méningites de l'enfant et de l'immuno-incompétent pour des raisons de physiopathologie, de compréhension ou de prise en charge.

L'épidémiologie en France est mal connue car, hormis les infections à méningocoques (364 cas en 1997), à Listeria et la tuberculose (6 456 cas en 1997), les infections éventuellement responsables de méningites et dues à d'autres bactéries ne sont pas à déclaration obligatoire [1]. Au Royaume-Uni, on estime à 250 le nombre annuel de méningites pneumococciques chez l'adulte (un antécédent de traumatisme crânien ou de neurochirurgie étant un facteur nettement prédisposant), les méningites à Staphylococcus aureus à 40 cas annuels, à Listeria à 20, tuberculeuses à 15 et à Escherichia coli à 10 [2].

L'intérêt d'un traitement rapide (speed in diagnosis and treatment is essential[3] est de toute évidence admis par tous. Un patient sur quatre mourra et nombre de survivants auront des séquelles neurologiques [4] [5]. Le pronostic n'aurait pas changé depuis 1960 malgré l'introduction d'antibiotiques puissants et le recours aux soins intensifs [2] [6].

Le pronostic est pire en cas de retard à la prise en charge [7] que ce soit en cas de méningite bactérienne ou herpétique [8]. Par conséquent, le pronostic dépend de la suspicion diagnostique par le médecin et des structures permettant une prise en charge rapide et correcte [9].

Pour ce qui concerne les méningites après anesthésie locorégionale rachidienne, elles ne seront pas envisagées ici. Les germes sont différents, le pronostic est meilleur [10], de même que les méningites nosocomiales en particulier après neurochirurgie.

Diagnostic évoqué

Le syndrome méningé est connu de tous : ses signes généraux (fièvre, insomnie), fonctionnels (le trépied méningitique, qui compte en fait quatre symptômes : céphalées classiquement en casque, vomissements en jet, constipation et photophobie) et physiques (raideur de nuque, signes de Kernig et de Brudzinski). Il n'est pas toujours aussi typique et complet [6] [11]. On recherche également des signes de focalisation, des convulsions, une confusion, des troubles de la conscience (pouvant aller jusqu'au coma) et du comportement, une éruption purpurique, parfois discrète, d'autre fois impressionnante en surface et en rapidité d'extension (purpura fulminans), des signes de sepsis sévère, voire de choc septique.

Mais le diagnostic n'est pas toujours évident [12] et une méningite bactérienne doit être évoquée même devant un tableau incomplet, en particulier, tout purpura fébrile fait l'objet d'une ponction lombaire (PL) systématique. Sur certains terrains, le tableau peut être particulièrement trompeur : chez le nourrisson où toute altération brutale de l'état général doit faire évoquer le diagnostic et où le tableau clinique peut être dominé par une hypotonie (méningite dite à nuque molle) mise en évidence par la manœuvre de Lesage. Chez la personne âgée, la méningite peut se révéler par une confusion fébrile, c'est dire l'importance de la prise de température devant tout syndrome confusionnel à cet âge.

La réalisation d'une PL est donc indiquée dans toutes ces situations.

En pratique devant un tel tableau clinique, deux examens sont à envisager : PL et tomodensitométrie (TDM) cérébrale. Plusieurs heures peuvent être nécessaires pour obtenir une TDM alors que les risques de la PL sont très faibles dans ce contexte (si position couchée, retrait de peu de liquide, aiguille de petit calibre), inférieurs aux risques du retard thérapeutique. La plupart des neurochirurgiens admettent que même en cas d'abcès cérébral une PL prudente peut être effectuée sans danger. C'est dire qu'il n'y a aucun argument pour en retarder la réalisation, dès lors que le diagnostic de méningite est simplement évoqué et qu'aucun examen complémentaire ne doit retarder la mise en route de l'antibiothérapie. La TDM pourra être réalisée en cas de doute diagnostique (sans entraîner de retard thérapeutique), de signes de focalisation ou d'aggravation neurologique au cours du traitement d'une méningite [2].

Le traitement peut être commencé à domicile s'il y a un purpura fulminans. La nécessité de ne pas démarrer une antibiothérapie avant les prélèvements bactériologiques ne doit pas s'appliquer en cas de méningite menaçant le pronostic vital, bien que l'antibiothérapie ne soit pas tout dans ce contexte et que, s'il existe, le traitement symptomatique d'un choc septique associé prime avant tout [2].

Le fond d'œil est sans intérêt, par manque de sensibilité et de spécificité, en particulier pour mettre en évidence des signes indirects d'œdème cérébral. Cet examen n'a donc aucune indication dans la réalisation d'une PL en cas de suspicion de méningite et ne doit donc en aucun cas retarder la réalisation de cet examen [2]. En pratique, nous n'effectuerons jamais un fond d'œil avant de réaliser une PL si le diagnostic de méningite est suspecté. Hémocultures, numération-formule sanguine, protéine C réactive et procalcitonine sérique (notamment chez l'enfant) [13] font partie du bilan initial.

CONDUITE PRATIQUE

Diagnostic confirmé

- Par l'aspect macroscopique du LCR, qui est louche voire eau de riz : le traitement est alors institué immédiatement sans confirmation biologique [14] ;

- par les résultats biologiques : pas toujours faciles à interpréter. La recherche des antigènes solubles dans le LCR ne donne pas de bons résultats en France et devrait être abandonnée ;

- des prélèvements cutanés peuvent être un apport diagnostique supplémentaire [15] [16] mais en pratique de peu d'intérêt.

Si la ponction par voie lombaire est techniquement impossible, la voie sous-occipitale (très facile, sans danger, mais nécessitant une position particulière du malade) peut être un recours. S'il n'est pas possible d'obtenir du LCR (ce qui, dans les équipes expérimentées est exceptionnel), le patient sera traité comme s'il avait une méningite bactérienne et/ou virale : en prenant en compte l'éventualité d'une méningo-encéphalite herpétique.

La valeur pronostique des paramètres du LCR n'est pas admise par tous hormis une hypoglycorachie lente à se corriger sous antibiotiques ou une hyperprotéinorachie élevée (> 5-6 g · L-1). La cellulorachie n'a aucune valeur pronostique [17] [18].

Épidémiologie

En France, les micro-organismes responsables des méningites communautaires sont essentiellement le pneumocoque et le méningocoque, beaucoup plus rarement Haemophilus depuis la généralisation de la vaccination chez l'enfant. Listeria peut également être rencontré, aux deux pôles de la vie, chez la femme enceinte, l'immunodéprimé, mais aussi en dehors de tout facteur de risque.

Ces bactéries peuvent poser des problèmes de sensibilité aux antibiotiques : 40 % des Haemophilus sont sécréteurs de bêtalactamases, plus de 50 % des pneumocoques sont de sensibilité diminuée à la pénicilline G, mais la résistance aux céphalosporines injectables de troisième génération est rare (0,5 % des souches), Listeria est naturellement résistante aux céphalosporines. Tous ces problèmes ne simplifient pas le choix d'une antibiothérapie empirique.

La méningite tuberculeuse reste présente dans les pays industrialisés, le diagnostic n'est pas toujours rapide malgré les techniques par polymerase chain reaction qui manquent de sensibilité [19] [20] [21].

La méningo-encéphalite herpétique est la méningo-encéphalite virale la plus fréquente en France.

Les causes de méningites de l'immunodéprimé sont variées, pouvant être candidosiques, cryptococciques et même parasitaires (anguillulose maligne).

Les méningites nosocomiales sont dues à des bactéries souvent multirésistantes et sont parfois polymicrobiennes.

Pharmacocinétique

Un des critères de choix d'un antibiotique est qu'il atteigne une concentration suffisante au site de l'infection. En matière de méningite il faut atteindre dix fois la concentration minimale inhibitrice dans le LCR ; ce qui n'est pas possible avec bon nombre de molécules, surtout s'il s'agit de bactéries de sensibilité diminuée. C'est ce qui explique le choix et la posologie de certains antibiotiques (C3G par exemple), des modalités particulières de prescription (la vancomycine est ainsi prescrite en perfusion continue car le passage hématoméningé, réalisé par un transporteur actif saturable, est ainsi nettement augmenté). Les inhibiteurs de bêtalactamases, diffusant mal dans le LCR, ne sont pas indiqués dans les méningites. Enfin, les corticoïdes peuvent diminuer le passage méningé des antibiotiques [2] [22] [23].

Toutes ces données, épidémiologiques, pharmacologiques et pharmacocinétiques conditionnent la prise en charge des méningites.

Conduite à tenir

La prise en charge préhospitalière

Elle concerne essentiellement le purpura fulminans qui est dans la majorité des cas d'origine méningococcique (les cas où Haemophilus ou le pneumocoque sont en cause sont rares et surviennent plus volontiers chez le splénectomisé). Certains auteurs recommandent la benzylpénicilline [2]. Nous lui préférons, en France, la ceftriaxone, en raison de son spectre plus large et prenant en compte tous les germes déjà cités, de sa diffusion dans le LCR, de sa disponibilité en pratique de ville, de la possibilité d'injection intramusculaire et de la possibilité de recours chez l'allergique à la pénicilline. La posologie recommandée est de 50 mg · kg -1 en une injection intramusculaire (IM) ou intraveineuse (IV) en préhospitalier (médecin de famille ou médecin du Samu). Le risque de décapiter les résultats biologiques apparaissent faibles, surtout si on les comparent à la gravité de la maladie.

Une fois la PL réalisée

Le LCR est trouble

Les recommandations de la conférence de consensus [14] sur le traitement des méningites bactériennes font appel en première intention chez le patient de plus de trois mois soit au céfotaxime à la posologie de 200 à 300 mg · kg -1 · j -1 en quatre injections IV ou à la ceftriaxone à la posologie de 70 à 100 mg · kg -1 · j -1 en une ou deux injections IV, traitement à instituer à notre avis avant la coloration de Gram, dès le recueil du LCR quand il est trouble. En cas d'obtention d'un liquide clair, force est d'attendre les résultats biologiques orientant vers une méningite bactérienne, sauf si des signes cliniques orientent vers ce diagnostic, en particulier l'existence d'un purpura. Dans ce cas, l'antibiothérapie sera également démarrée immédiatement. Tout LCR clair, même s'il est cytologiquement et biochimiquement normal fera l'objet d'une coloration de Gram (qui peut, en cas de méningococcémie, fourmiller de méningocoques). En l'absence d'orientation bactériologique, le traitement antibiotique par une céphalosporine injectable de troisième génération sera maintenu. S'il existe des signes de gravité (troubles de la conscience, signes de focalisation, retard de prise en charge), la vancomycine sera associée (15 mg · kg -1 en dose de charge sur 1 heure, puis la même posologie toutes les 6 heures en perfusion continue). Les auteurs anglo-saxons [2] privilégient la rifampicine à la vancomycine à la posologie de 10 mg · kg -1 deux fois par jour en IV. Au moindre doute quant à une listériose (immunodéprimé, femme enceinte, personne âgée, signes de rhombencéphalite), l'amoxicilline (200 mg · kg -1 · j -1 en six injections) est adjointe au traitement précédent. Lorsque le micro-organisme est identifié, le traitement antibiotique est adapté. L'amoxicilline est retenue s'il s'agit d'un méningocoque (encore que des méningocoques de moindre sensibilité à l'amoxicilline commencent à être décrits [24] [25]) ou d'un pneumocoque de sensibilité normale à la pénicilline G, en cas d'Haemophilus, la préférence reste à une C3G (les inhibiteurs de bêtalactamase ont une mauvaise diffusion méningée, quoique théoriquement, une amoxicilline peut suffire si Haemophilus n'est pas sécréteur enzymatique). S'il s'agit d'un pneumocoque de sensibilité diminuée à la pénicilline [26] [27] [28] [29] (et, à notre avis, ce fait est à considérer de façon systématique si un pneumocoque est possible, puisque plus de 50 % sont dans ce cas), la céphalosporine injectable est maintenue, sauf en cas de concentration minimale inhibitrice élevée à cet antibiotique, dans ce cas la vancomycine est poursuivie, éventuellement associée à de la rifampicine [2]. Il n'existe cependant aucune attitude univoque sur le traitement antibiotique des méningites à pneumocoques de sensibilité diminuée aux C3G. S'il s'agit de Listeria, on a plutôt recours à l'amoxicilline, éventuellement associée à la gentamicine [30] ou plutôt à la combinaison sulfaméthoxazole-triméthoprime (pour des raisons de meilleure diffusion méningée) dans notre expérience [31], ceci par voie IV. La durée des traitements antibiotiques n'est pas standardisée dans les méningites. En général, on admet 7 jours pour une infection à méningocoques, 14 pour le pneumocoque et 21 pour Haemophilus et Listeria, mais selon les pays les avis divergent, avec souvent des durées plus courtes [2] [32]. Ainsi, pour Roine et al. [32], un traitement de 4 jours est tout aussi efficace que 7 jours dans la méningite bactérienne de l'enfant lorsque l'évolution est initialement favorable.

Une deuxième PL est souvent réalisée à la 48e heure après la ponction diagnostique. Un bon gage d'efficacité thérapeutique est alors l'absence de bactéries à l'examen direct. Pour bon nombre d'auteurs français, cet examen ne se justifie pas pour les méningites communautaires si l'évolution clinique est favorable.

La corticothérapie

Les avantages sont surtout dans les méningites expérimentales :

- les corticoïdes ont un effet anti-inflammatoire et la dexaméthasone diminue le relargage des cytokines [33] [34] [35]. La dexaméthasone associée à la ceftriaxone diminuent la production de TNF alpha chez le lapin (méningite à Haemophilus) [35] ;

- pour améliorer le pronostic dans la méningite à pneumocoques, la dexaméthasone doit être administrée avant ou juste au moment de l'injection antibiotique [36] [37]. Les effets de la dexaméthasone dans la méningite à méningocoques ne sont pas connus.

Les désavantages :

- des concentrations antibiotiques efficaces peuvent être obtenues chez l'animal, quoi qu'une diminution est souvent notée. Aucune donnée fiable n'existe chez l'Homme.

- les complications hémorragiques digestives sont de l'ordre de 2 % au cours de telles corticothérapies.

Dans une étude cependant, la corticothérapie apporte un bénéfice, chez l'enfant et dans la méningite à Haemophilus, avec une réduction significative des complications à type de surdité [38] ou d'autres séquelles neurologiques [39], mais aussi dans les méningites à pneumocoques [22] [40].

Pour Begg et al. [2], au vu des données expérimentales et des quelques données cliniques, il semble licite de prescrire de la dexaméthasone dans les méningites bactériennes, chez l'adulte, sans septicémie, 4 à 6 mg toutes les 6 heures, juste avant ou immédiatement pendant le début de l'antibiothérapie s'il existe des troubles de la conscience, des signes de focalisation ou d'œdème à la TDM cérébrale. Les risques, comparés aux bénéfices semblent faibles, sauf s'il s'agit de neuropaludisme [41]. Pour d'autres, elle est plutôt à réserver à la méningite bactérienne documentée de l'enfant, à la dose de 0,6 mg · kg -1 · j -1 [12].

En cas de méningite à liquide clair

Dans ce cas, le problème étiologique est plus complexe et peut faire évoquer une méningite bactérienne décapitée par une antibiothérapie intempestive, une listériose, une méningite tuberculeuse (d'installation cependant plus progressive), une cryptococcose (sur un terrain immunodéprimé, même avec un LCR parfaitement normal et où le clinicien aura demandé, de façon systématique, une coloration à l'encre de Chine), voire une méningo-encéphalite herpétique, ou à d'autres virus, ou à germes intracellulaires (Legionella, Mycoplasma, Chlamydiae, Coxiella) d'où l'attitude empirique possible devant une méningite ou une méningo-encéphalite à liquide clair, qui consiste par exemple à initier le traitement anti-infectieux par (en dehors de toute notion de pneumocoque de sensibilité diminuée) amoxicilline (200 mg · kg -1 · j -1), cotrimoxazole (80 à 100 mg · kg -1 · j -1 en sulfaméthoxazole), aciclovir (à la posologie de 15 et non 10 mg · kg -1 · j -1[42] et une fluoroquinolone à bonne pénétration cérébroméningée (type péfloxacine 1 600 mg · j -1). En cas de séjour récent en zone d'endémie paludique, on pourra également discuter l'adjonction de quinine IV dans l'hypothèse d'un neuropaludisme, en respectant la contre-indication d'une corticothérapie.

Dans la méningite tuberculeuse, si l'indication d'une corticothérapie est retenue (arachnoïdite de la base) on utilise plutôt la prednisolone à 40-60 mg · j -1 ou plus rarement, la dexaméthasone à 8-12 mg · j -1. Il faut se méfier de l'effet inducteur enzymatique de la rifampicine (qui entraîne une diminution des taux sériques de la dexaméthasone) [2] [43] [44].

Réanimation générale

Il faut admettre en réanimation, les patients qui présentent et/ou qui nécessitent [2] :

- une instabilité cardiovasculaire, avec indication d'une exploration hémodynamique (en particulier dans les méningites à méningocoques où une dépression myocardique est fréquente) ;

- une instabilité respiratoire, avec ses indications classiques de ventilation mécanique mais aussi en cas d'état de mal convulsif clinique et/ou électroencéphalographique ;

- un déficit neurologique ou des convulsions, la mesure de la pression intracrânienne n'a pas prouvé son effet sur la survie et est à discuter au cas par cas (hypertension intracrânienne majeure, œdème papillaire, signes pupillaires). L'intérêt d'autres examens reste à évaluer : scanner cérébral, Doppler intracrânien, lactates cérébraux, EEG continu chez les patients ayant des convulsions et pouvant avoir des crises infracliniques. L'isolement neurosensoriel reste toujours indiqué ;

- un support vasoactif, qui est celui des sepsis sévères et des chocs septiques en général ;

- des techniques d'épuration extrarénale, en particulier l'hémofiltration continue pour sa bonne tolérance hémodynamique avec toutes les indications classiques en réanimation ;

- un support hématologique, notamment dans les méningites à méningocoques où une coagulopathie de consommation, voire une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) sont fréquentes, un traitement symptomatique (selon les habitudes des équipes) curatif, voire préventif (en cas de geste invasif prévu) peut être indiqué ;

- contrairement à ce qui a longtemps été prescrit, la restriction hydrique n'est plus recommandée en raison de ses effets délétères. Il faut, au contraire, maintenir une perfusion cérébrale correcte [3] [45] [46]. Les patients doivent être maintenus normovolémiques [2] ;

- le mannitol diminue la pression du LCR dans la méningite à Haemophilus du lapin [47], à pneumocoques du rat [48] et dans la méningite à pyogènes de l'enfant [49]. Il peut être indiqué en cas d'œdème cérébral menaçant ;

- divers traitements ont également été proposés. Ils sont encore en évaluation ou anecdotiques ; comme par exemple les anti-endotoxines, dont les résultats ne sont pas concluant dans le purpura fulminans (Levine, non publié, cité par [2]). Les traitements par protéine C et protéine S semblent prometteurs mais sont encore en évaluation [50] [51] [52]. La place des échanges plasmatiques reste anecdotique [53].

PRÉVENTION DES CAS SECONDAIRES

Le diagnostic de méningite à méningocoque, mais aussi à Haemophilus est, en France, à rapporter en urgence à la DDASS afin de limiter le nombre de cas secondaires (1 000 fois plus fréquents dans l'entourage du cas princeps) [2], le risque persistant pendant six mois [2]. Dans ce cas, la conduite à tenir est parfaitement rapportée dans la circulaire du Bulletin épidémiologique hebdomadaire [54] et tout médecin doit s'y référer et être convaincu de son bon sens, ceci afin d'éviter toute attitude illogique confinant parfois à des décisions injustifiées.

En cas de méningite à méningocoque

Le réservoir est uniquement humain, ce qui devrait limiter les attitudes de panique ! Ce sont surtout les contacts conviviaux (personnes partageant le même toit) qui sont à risque. La circulaire [54] précise parfaitement les indications, en France, de la prophylaxie. Celle-ci repose sur la rifampicine à la dose de 600 mg deux fois par jour pendant deux jours chez l'adulte, de 10 mg · kg -1 · j -1 chez l'enfant entre 1 mois et 12 ans (sans dépasser 600 mg deux fois par jour) et de 5 mg · kg -1 deux fois par jour chez l'enfant de moins d'1 mois. Chez le patient traité pour une méningite à méningocoques, en fin de traitement, une prophylaxie par rifampicine est également indiquée, en raison de cas secondaires survenus chez des patients ayant présenté une méningite de ce type avec transmission suivant le retour à domicile. En cas de contre-indication à la rifampicine (allergie, grossesse, insuffisance hépatique grave...), la spiramycine peut être prescrite à la dose de 3 millions d'unités internationales (UI) deux fois par jour pendant cinq jours chez l'adulte ou de 75 000 UI · kg -1 · j -1 chez l'enfant. Les auteurs anglo-saxons préconisent également, en alternative, la ciprofloxacine ou la ceftriaxone [2]. En cas de méningocoque de sérogroupes A ou C, une vaccination par le vaccin méningococcique A + C sera effectuée chez les personnes soumises à l'antibioprophylaxie.

En cas de méningite à Haemophilus

Une prophylaxie par rifampicine pendant quatre jours, aux mêmes posologies, est recommandée, éventuellement associée, selon l'âge, à une vaccination.

Aucune attitude n'est préconisée pour les méningites dues à d'autres micro-organismes.

CONCLUSION

La méningite est une des pathologies où le bon sens, la clinique et des attitudes systématiques sont les meilleurs garants d'une prise en charge correcte et d'un pronostic favorable. La réalisation de la PL sans ergoter sur ses inconvénients potentiels, presque nuls dans ce contexte, en est le meilleur exemple. C'est dire que cet examen sera réalisé lors de tout syndrome méningé (quels que soient les signes) fébrile, de toute confusion fébrile, de tout purpura fébrile et, chez un enfant, de toute altération brutale de l'état général. Même si les signes rapportés par le médecin traitant ont disparu à l'admission, si le motif d'hospitalisation est une indication de ponction lombaire, celle-ci sera effectuée par le médecin qui prendra en charge le patient.

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