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le feuilleton de la compétition |
Le 15 mai 2008 à 14h53 | envoyez à un ami imprimez | |
Tags : festival de cannes |
Un documentaire d’animation ? Le concept paraît foireux, voire franchement oxymorique, mais non, ça peut marcher, comme le prouve brillamment Valse avec Bachir. Ce dessin animé israélien, signé du documentariste Ari Folman, constitue le premier choc de la compèt’. A la base, une enquête à la première personne : Ari Folman avait dix-neuf ans à l’époque de la première guerre du Liban ; un quart de siècle plus tard, il se rend compte que sa mémoire a effacé l’épisode, et, en particulier, le massacre de Sabra et Chatila… Où était-il cette nuit d’horreur-là ?
Valse avec Bashir - bande-annonce (VO)
Le narrateur fait le tour des amis soldats qui l’accompagnaient à l’époque, et les images que leurs récits font peu à peu surgir mêlent souvenirs authentiques et passé réinventé, réalisme et onirisme. C’est là que l’animation trouve sa raison d’être, faisant de ce docu à l’intérieur d’une conscience un « bad trip » hallucinatoire, un voyage fatal en absurdie où l’on traque sans relâche des « terroristes » plus ou moins fantasmés, où l’on abat les chiens et les enfants. L’animation stylisée – comme un Persépolis survitaminée –, hyperréaliste, donne au récit son abstraction et sa puissance.
Mais le quotidien des jeunes soldats arrachés à la festive Tel-Aviv, ou l’entrée de Tsahal dans Beyrouth rappellent aussi les meilleurs films de guerre hollywoodiens (d’Apocalypse Now à Jarhead), bande-son comprise : le titre « dance » de P. I. L., This is not a love song, donne ainsi une drôle de touche post-moderne à l’une des séquences les plus frappantes de cette descente aux enfers.
In fine, le massacre de Sabra et Chatila est comme le trou noir qui aspire peu à peu le récit tout entier. Il l’amène inexorablement vers une conclusion d’une rare force émotionnelle, qui substitue la vérité, les faits, aux souvenirs refoulés. Un personnage de psy fait le lien avec le passé d’Israël ; on regrettera – c’est notre unique réserve – que le film ne jette pas un pont avec son présent – et celui du Liban. Comment la société israélienne recevra-t-elle cet étrange film-brûlot ? Comme une courageuse autocritique (le film ne contredit pas la commission Kahane qui a jugé les faits en 1983, et établi la « responsabilité indirecte » de l’état-major israélien) ou un acte de sédition ?
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TÉLÉRAMA DU MERCREDI 3 SEPTEMBRE 2008