Le cinéma a la particularité d'être né de la technique moderne. Il est même l'un des symptômes et des causes de la modernité. Par leur existence, ses principes - c'est-à-dire la reproduction technique, le collage et le montage, avec les nouveaux rapports d'espace-temps, de discontinuité et d'hétérogénéité qu'ils impliquent - ont bouleversé les modes de représentation dans les arts figuratifs et dans la littérature. À ses commencements, le cinéma va donc participer de la conjonction du moderne et de l'archaïque qui caractérise les arts du début du XXe siècle. Archaïque, car il lui faut tout découvrir et inventer, et moderne à cause de ses appareils, mais aussi des tentatives de recherches qui le lient aux avant-gardes, « théoriciennes » par principe. Pour se former et se rendre légitime, le cinéma a eu besoin de théories.Le cinéma porte en soi deux rêves contradictoires et complémentaires propres au XIXe siècle : la transparence positiviste de la technique et de la science, et l'œuvre d'art totale, la synthèse des arts. Qu'avec lui il s'agisse à la fois d'image de reproduction et d'œuvre d'art, indépendamment même de la fiction et du document, cela ne va jamais de soi.(...)