Né à Audierne, non loin de la Pointe
du Raz, Etienne Perrot, après des études
supérieures de lettres et diplômé en Sorbonne, se
fixa à Paris ou il entra dans l'Administration et se maria.Une
fille lui est née.
Très tôt, il fut habité par une recherche
spirituelle. Mais laissons-lui la parole : «Après avoir
fait le tour des mystiques et des ésotérismes, qu'est-ce
qui me dirigea vers l'alchimie, autour de 1956 ? L'exigence d'une voie
de réalisation autochtone, certes, mais aussi et avant tout,
d'une voie qui met en oeuvre les possibilités foncières
de l'être humain pour le mener à son
accomplissement».
Il se mit donc à rechercher des traités d'alchimie, rares
à l'époque, et tomba un jour sur l'édition
anglaise de Psychologie et Alchimie, de C.G. Jung, ouvrage qui
n'était pas encore traduit en français. Et il se mit
à l'allemand. Sa connaissance des langues anciennes et de
l'hébreu, ses notions de sanscrit et sa fréquentation des
textes hermétiques et alchimiques lui permirent ensuite de mener
à bien l'énorme tâche qu'était la traduction
des oeuvres maîtresses de la seconde partie de la vie de Jung. Et
en même temps il entreprit une analyse junguienne.
La plupart de ses traductions attendirent de nombreuses années
avant d'être publiées (la liste se trouve ci-dessous). Par
contre, le grand livre oraculaire chinois, le Yi King ou Livre
des transformations, dont Richard Wilhelm, ami de Jung, avait fait une
version allemande avec l'aide d'un lettré chinois sortit dans la
traduction d'Etienne Perrot le 20 décembre 1968. Cet ouvrage,
qui semblait répondre à une attente, eut un très
grand succès et Etienne Perrot fut sollicité pour donner
des conférences ; mais il s'abstint, à deux ou trois
exceptions près, d'en donner sur le Yi King, par crainte
d'en affaiblir les merveilles qu'il contient et il choisit d'aborder
d'autres sujets qui lui tenaient à coeur.
En 1970, l'éditeur du Yi King (ou, suivant la
prononciation, Yi Jing) demanda à Etienne Perrot s'il
n'avait rien à lui proposer à publier. Rassemblant des
conférences et des séminaires, Etienne Perrot en fit un
livre, La Voie de la transformation d'après C.G. Jung et
l'alchimie. Comme tous les titres de ses ouvrages, celui-ci
évoque son contenu : un chemin qui mène à la
transformation, à la réalisation, un chemin qui se situe
dans le sillage des découvertes de Jung et des alchimistes.
D'autres livres eurent pour base des séminaires qu'Etienne
Perrot avait donnés sur l'alchimie. L'Aurore occidentale
présente un traité, Aurora consurgens, qui eut
une très grande importance pour lui. Dans un langage
poétique proche de l'incantation, il y trouva la confirmation de
la présence de «la Sagesse qui, dans l'homme,
dépasse l'homme» (p. 46). Marie-Louise von Franz avait
fait connaître cette oeuvre attribuée à Thomas
d'Aquin et Etienne Perrot en traduisit également le commentaire.
Les Trois pommes d'or font revivre, à
l'aide de songes survenus au cours du séminaire, un
traité alchimique écrit par M. Maïer et
illustré par M. Mérian intitulé Atalante
fugitive. En 1964 déjà Etienne Perrot avait traduit
en vers ce traité qui le mettait, grâce à ses
images et à ses symboles, dans une paix profonde, ce qui lui
fera dire :«Le centre de l'âme est un secret qu'on ne peut
aborder qu'en étant dans les ténèbres.»
La Consolation d'Isaïe a pour point de départ le texte
du prophète. Etienne Perrot, qui avait commencé sa vie
d'adulte en entrant au séminaire où il passa six ans,
connaissait parfaitement bien la Bible dont la lecture et la
compréhension se trouvaient revivifiées par l'alchimie.
Il est une consolation que découvre l'être qui
s'intériorise et descend en lui-même, c'est la
présence divine, alliant en elle les opposés.
En 1976, il composa un ouvrage puissamment évocateur, Coran
teint, qui parle un langage direct, prophétique,
poétique, «véhiculant un dynamisme
transformant». Quand il fut publié, deux ans plus tard, un
récit biographique "Mémoires d'un chemineau" ainsi que
des poésies lui furent adjoints.
Devenu veuf, il épousa Francine Saint René Taillandier
qui partageait, depuis de nombreuses années, les mêmes
intérêts. Etienne et Francine Perrot
créèrent en 1978 les éditions La Fontaine de
Pierre pour publier les livres de Marie-Louise von Franz (en
particulier les ouvrages sur les contes de fées qui, à
l'époque, n'avaient pas trouvé d'éditeur), ainsi
que les manuscrits d'Etienne Perrot.
En 1979, Etienne Perrot interpréta, sur les ondes de France
Inter, des rêves d'auditeurs. Un livre en sortit : Les
Rêves et la vie. Il donna, également à cette
époque, des conférences qui parurent plus tard sous le
titre de l'une d'entre elles Péril nucléaire et
transformation de l'homme.
Un grand nombre d'articles écrits d'abord dans des revues
trouvèrent eux aussi leur place dans des livres. Etienne Perrot
voyait dans Des étoiles et des pierres, «des
fleurs d'éternité écloses au coeur de nos plus
épaisses ténèbres». Le Jardin de la reine
est pour sa part consacré à la présence de la
synchronicité de Jung dans la vie de celui qui lit, dans la
nature, dans l'instant, un sens révélé par les
coïncidences significatives. Dans Chroniques de la vie
libérée, l'expérience personnelle prime, elle
est relatée dans le but d'ouvrir et de libérer la vie
totale en chacun, dans un élan de confiance qui permet de
traverser les épreuves les plus douloureuses. De Dieu aux
dieux est l'aventure d'un livre qui se crée,
l'écriture reproduisant les mouvements intérieurs de
l'âme au moment où elle prend conscience de ce qui se
passe en elle quand le dieu élit résidence en elle.
Le titre de Mystique de la Terre livre à lui seul la
dynamique dans laquelle s'inscrit toute la recherche de son auteur qui,
en véritable alchimiste, ne fait jamais fi de la
réalité terrestre dans laquelle s'incarne le dieu vivant.
Cet ouvrage, publié après le décès de son
auteur, regroupe des articles parus de son vivant dans des revues.
Comme son maître Jung, Etienne Perrot n'a cessé de se
pencher sur les rêves, leur accordant une attention et une
confiance sans faille. Leur interprétation symbolique et
psychologique sous-tend son oeuvre, douze ouvrages et différents
articles traitant tous de la transformation de l'être humain au
contact de ses profondeurs. La langue poétique et originale dans
laquelle s'exprime Etienne Perrot pour évoquer la
réalité de l'âme laisse souvent transparaître
une touche d'humour qui était une de ses grandes
qualités. L'alchimie n'est-elle pas cette gaie science qui
s'émerveille des mystères de la nature et sait
mêler le rire à l'intensité aussi bien qu'aux
larmes?
C'est en 1996 qu'Etienne Perrot s'est éteint, endeuillant tous
ceux qui avaient bénéficié de son rayonnement.
Nous terminons en proposant à votre méditation une
pensée d'Etienne Perrot :
«Ce qui est ne peut être changé. Je ne le voudrais
pas et, si on me demandait de choisir entre ce que je "veux" et ce que
me présente la vie, je ne pense pas que j'hésiterais, car
la vie est l'expression de la volonté supérieure à
laquelle je me rends complètement».
__________
Bibliographie des oeuvres d'Etienne Perrot
Aux éditions de La Fontaine de Pierre :
La Voie de la transformation
d'après C.G. Jung et l'alchimie
Coran teint, le
livre rouge
L'Aurore occidentale
Les Trois pommes
d'or
La Consolation
d'Isaïe
Des
étoiles et des pierres. Méditation sur la voie alchimique
Le Jardin de la
reine
Mystique de la
terre
C.G. Jung et
la voie des profondeurs (collectif) 3e édition remaniée
Aux éditions Jacqueline Renard
(Collection La Fontaine de Pierre) :
Les Rêves et la vie
Chroniques de la vie libérée
De Dieu aux dieux
Péril nucléaire et transformation de l'homme
Oeuvres traduites par Etienne Perrot :
A partir de l'allemand
C.G. Jung, Psychologie et
Alchimie, trad. fr. R. Cahen H. Pernet, E. Perrot, Buchet-Chastel,
1970.
- Les Racines de la conscience, trad. fr. Y.
Le Lay, Etienne Perrot, Paris, Buchet-Chastel, 1971.
- Commentaire sur le Mystère de la Fleur
d'Or, trad. fr. E. Perrot, Paris, Albin Michel, 1979.
- La Psychologie du transfert, trad. fr. E.
Perrot, Paris, (Albin Michel), 1980.
- Mysterium Conjunctionis, Tome I et II,
trad. fr. E. Perrot, Albin Michel, 1980 et 1982.
- Aïon, trad. fr. E. Perrot, M.-M.
Louzier, Paris, Albin Michel, 1978 réédité en 1998.
Marie-Louise von Franz, C.G. Jung, son mythe en notre temps, trad. fr. E.
Perrot, Paris, Buchet-Chastel, 1975.
- Nombre et Temps, trad. fr. E. Perrot, M.-M.
Louzier, Paris, La Fontaine de Pierre, 1978
réédité en 1998.
- Aurora Consurgens, trad. fr. E. Perrot,
M.-M. Louzier, Paris, La Fontaine de Pierre, 1982. (Le traité
est traduit à partir du latin, le commentaire à partir de
l’allemand.)
Yi King ou Livre des
transformations, de Richard Wilhelm, trad. fr. E. Perrot, Paris,
Librairie de Médicis, 1973.
Tao Te King, trad. fr. E. Perrot, Paris,
Librairie de Médicis.
Le Secret de la fleur d'or, trad. fr. E.
Perrot, Paris, Librairie de Médicis.
A partir du latin
Michel Maïer, Atalante
Fugitive, trad. fr. E. Perrot, Librairie de Médicis, 1969,
réédité chez Dervy, 1997.
Le Rosaire des philosophes, trad. fr. E.
Perrot, Librairie de Médicis, 1973. (Les images qui illustrent
ce traité ont servi de base aux méditations de Jung dans La
Psychologie du transfert.)
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