A L'AUBE DU RENOUVEAU :
LE 1er REGIMENT DE CHASSEURS PARACHUTISTES


Une année à peine s'est écoulée après l'armistice que Compagnie d'Infanterie de l'Air N° 1 est constituée à Oued Smar en Algérie. La période de renouveau s'ouvre pour nos parachutistes. L'entraînement reprend pour les vétérans de l'Armée de l'air avec des Potez 540 aménagés pour le saut. En juin 1941, l'effectif de la Compagnie atteint 250 hommes.

 


Huit novembre 1942 : les Alliés débarquent en Afrique du Nord. Quatre parachutistes sont détachés auprès du 50le US Airborne Bo/n. Deux d'entre eux accomplissent avec un commando une mission de sabotage en Tunisie. Premier retour au combat des hommes de l'Infanterie de l'Air.
Vers la mi-décembre, la C.I.A. rejoint les anciens cantonnements du 602e à Baraki. D'importants renforts la rejoignent ; une page va se tourner dans l'histoire de l'Infanterie de l'air, avec la nouvelle année des changements radicaux vont intervenir.
Fin janvier 1943, la C.I.A. N° 1qui quitte l'Algérie pour Fez au Maroc est bientôt réorganisée en un bataillon à quatre compagnies qui prend le nom de Bataillon de Chasseurs Parachutistes N° 1. Il est équipé de parachutes américains et saute de Potez 540, mais dès avril, l'Airborne Training Center envoie un Dakota. Le 1er mai 1943, le Bataillon compte 700 brevetés. La période pauvre du Bataillon se poursuit, car si les parachutes sont neufs, l'armement laisse à désirer et le parc auto est bien pauvre. Les volontaires continuent à affluer. Il faut penser à créer un 2e Bataillon et par conséquent le 1er Régiment de Chasseurs Parachutistes est créé le 1er mai 1943 .
L'entraînement au combat occupe le principal de l'emploi du temps des Chasseurs Parachutistes.
A la fin de l'été, les premières dotations US parviennent au Régiment dont les véhicules vont très vite devenir célèbres : jeeps, 4x4 Dodges, GMC, motos Harley Davidson. Les uniformes surprennent par leur modernisme. Le paquetage est très complet et prévoit toutes les situations et tous les climats.
Les ordres du Général Eisenhower transmis par le Colonel Barber précisent : " Il est convenu que les parachutistes français seront utilisés dans le cadre des opérations alliées de troupes parachutées et des dispositions seront prises à cette fin pour leur instruction. " Le 1er R.C.P. se voit rattaché à la 82e US Airborne. Le régiment est transféré à 0ujda le 7 octobre 1943. Il rejoint aux Angades, l'Airbone Training Center, l'Ecole de Planeurs et une escadrille britannique de chasse puis devient régiment frère du 505th US Airborne .
L'entraînement au saut reprend, ainsi que celui au combat. Fin 1943, le 1er RCP comprend 1.700 officiers, sous-officiers et chasseurs.
Début 1944, le régiment fait mouvement sur Bordj Ménaiel. En mars, il se prépare à partir en Italie pour être aérotransporté sur la Sicile. Une unité de Pathfinders est mise alors sur pied. En mai 1944 le régiment est mis en alerte pour l'opération Brassard (conquête de l'île d'Elbe) mais il est retiré du dispositif peu de temps avant : Première déception!
Le Général De Lattre écrira à ce sujet : " Il est certain que si cet assaut terrestre fougueux avait pu, comme je l'avais demandé, être accompagné d'un assaut aéroporté, le succès aurait été plus facile et plus rapide".
Début juillet, transféré à Rome et ayant appris le débarquement en Normandie, les hommes se sentent oubliés. Le 1er R.C.P. est de nouveau mis en alerte pour le débarquement en Provence; hélas, une fois de plus, il est retiré du dispositif pour être placé en réserve car il est prévu pour une opération dans la Massif Central. Cette opération jugée incompatible avec le débarquement en Provence fut annulée.
Enfin, le 4 septembre, le 1er R.C.P. entre en France, aéroporté sur Valence. Il est aussitôt mis en alerte pour être parachuté en Alsace sur Thann et Cernay. Une fois de plus, l'opération envisagée n'a pas lieu. Envoyé au combat sans plus attendre, le régiment est transféré à Luxeuil en camions.
Manoeuvrant avec la 1ère D. B. dans les Vosges, Il va entrer de plein pied dans l'Histoire!
L'axe de progression se situe en direction de l'Alsace sur un trajet Remiremont - Col de Bussang -Travexin (Sud - Nord).La première action du régiment a lieu à Ferdrupt qui sera la base de départ de toute l'action. Au cours de cet engagement, l'Aspirant Berger sera le premier mort du régiment dans la campagne de libération du sol national.
Nous sommes le 3 octobre. La 8e Compagnie partant de Rupt sur Moselle se dirige sur Ferdrupt qu'elle prend à midi. La 10e Compagnie débouche derrière elle et s'enfonce dans la forêt du Gehant. : Le régiment vient de recevoir son baptême du feu. La 9ème la rejoint et, à l'aube du 4, les deux compagnies se ruent sur les positions allemandes qu'elles font sauter. Dans la journée du 4, la progression se poursuit vers le col du Morbieux afin de déborder au nord sur le village du Thillot. La 4e Compagnie accroche violemment l'ennemi. Pendant plusieurs heures, un combat furieux fait rage. Les mitrailleuses de 30 de la Compagnie d'Appui obligent l'adversaire à se replier.
Le régiment en colonne, compagnie par compagnie, s'enfonce dans la forêt du Gehant. Au petit jour, les chasseurs parachutistes ont réussi une infiltration de 8 km et établissent une solide base de départ pour la 10èmeCompagnie qui s'élance à l'assaut des positions ennemies, enlevant deux pièces de 150 et faisan de nombreux prisonniers, au col de Morbieux.
Le 1er Bataillon prend position bientôt au col du Morbieux, tandis que le 2ème s'installe à la Tête du Midi.
De toutes les unités engagées avec D.B., le 1er R.C.P. est la seule à avoir pu s'infiltrer.
Le 6, l'ennemi contre-attaque mais le 1er Bataillon, solidement établi, tient bon et repousse les assauts successifs. Les parachutistes n'ont plus de ravitaillement et ne peuvent pas faire de feu pour ne pas révéler leurs emplacements ; ils mangent cru, un peu de viande prise sur les chevaux allemands tués.
Le 7 octobre, la 1ère et la 10ème Compagnie débouchant des bois qui entourent le village au sud, arrivent sur le Menil. Les paras investissent l'agglomération, dégagent les hommes du Pathfinder (Radio Guidage) qui étaient pris à partie par un fort détachement ennemi. Au cours de l'action un panther et deux automoteurs sont détruits, ainsi qu'une pièce antichar. La 4ème Compagnie en embuscade sur la route le Menil-Cornimont détruit une forte colonne ennemie qui se replie.
Le 8, le Capitaine Chevalier et son adjoint le Lieutenant Veras sont tués au cours d'une action de la 8e Compagnie sur le village de Ramonchamp, non loin du Menil. La Compagnie prise à partie par l'artillerie doit se replier. Le régiment tient toujours la forêt du Géhant et de là, ses compagnies mènent des actions sur la vallée.
La pluie continue et froide agresse les hommes seulement vêtus de la légère tenue d'assaut en toile beige. Les blessés sont nombreux et disposés dans des abris précaires. Le 9 enfin, un convoi d'ambulancières arrive à faire jonction avec le régiment grâce à l'action conjuguée du 3ème R.T.A et de blindés.
Le régiment se lance alors dans une série coups de main en direction des points occupés. Le 15, les Chasseurs Parachutistes sont maîtres du terrain. Le 16, sous une pluie battante, et après un important pilonnage d'artillerie, le 1er Bataillon se lance en direction du col du Ménil, surprend l'ennemi mais subit avec le 2ème Bataillon qui l'a rejoint, de lourdes pertes. Au cours de heures de combat souvent au corps à corps, le 1er R.C.P enlève la position.
Au soir de cette journée, le 2ème Bataillon renforcé de la 5ème Compagnie arrive après une progression malaisée à la côte 1008 et s'en empare.
Aujourd'hui sur cette position un monument signale aux passants l'abnégation et le courage du régiment.
Après une série de bonds vers l'Alsace, le régiment qui a beaucoup souffert atteint les crêtes qui dominent l'Alsace. Il se replie sur Travexin puis est envoyé au repos à Lons-le-Saunier.
La bataille des Vosges est terminée pour lui.
Le 1er R.C.P. a perdu en 20 jours d'incessants combats 129 tués, 339 blessés et 380 hommes ont été évacués avec de profondes gelures. Une citation lui attribuant la croix de guerre avec palme, marquait son sacrifice.
Fin novembre 1944, le Commandant Faure prend le commandement du 1er R.C.P. et va conduire le régiment dans la bataille d'Alsace pour le périmètre de Colmar, la défense de Strasbourg et enfin la prise de Colmar. Le régiment est affecté à la 2ème D.B. Leclerc en décembre; il agira au profit du 2ème Corps d'Armée.
Les mauvaises conditions météo empêchent l'aviation d'intervenir et l'ennemi envoie 30 bataillons autour de la ville. Il faudra au régiment lancer des attaques successives contre les points d'appuis ennemis en débordant Colmar.
Le 13 décembre à 6 h 30, l'attaque est lancée. Le 1er Bataillon est, dès le départ de son assaut, particulièrement agressé par les tirs ennemis. De sa base de départ située à Herbsheim, il doit foncer vers le sud et atteindre Witternheim. Au prix de lourdes pertes, les Chasseurs Parachutistes prennent le village sur lequel aussitôt est déployé le drapeau tricolore.
Dans la nuit, malgré le tir des batteries ennemies, le bataillon prend position sur sa base de départ située dans le petit village de Neunkirch et à 7 heures, le 14, s'élance vers Binderheim. Dans le brouillard très dense les paras progressent. Bientôt, les tirs ennemis s'ajustent sur le 1er Bataillon et dès que celui-ci atteint un bois à 800 mètres de l'objectif, il reçoit un feu nourri de projectiles qui lui font subir des pertes élevées : 136 hommes.
Le bataillon se replie. L'effort principal de l'ennemi se fait en direction de Neunkirch appuyé par des chars panther. Pendant deux jours, les Chasseurs Parachutistes rejettent les assauts successifs; un char est détruit. Le 17 dans la nuit, il décroche et rejoint Gerstheim, ayant perdu 10 officiers, 43 sous-officiers et 150 hommes tués ou blessés.
Le 21 décembre, ayant reçu des renforts, le 1er Bataillon rejoint le 2ème afin d'attaquer sur Diebolsheim et Zelsheim. Mais le 23, l'ordre de partir au repos arrive à des hommes épuisés qui se sont battus avec des troupes ennemies fraîches et supérieures nombre, sans soutien de char, face aux Panther et à l'artillerie. Ils n'ont cependant pas cédé le terrain .Noël interrompt un instant les combats.
Déjà se déclenche la contre-offensive des Ardennes "Von Runstedt ".
Les forces américaines encaissent mal les premiers assauts et commencent un douloureux repli. à Bastogne . L'armée ennemie lance une offensive afin de s'emparer de la trouée de Saverne. L'Armée U.S. se repliant pour mieux faire face, la 1ère Armée Française doit manoeuvrer également et abandonner Strasbourg. Les Français refusent. La 3e D.I.A. tiendra le secteur, elle reçoit le 1er R.C.P. en renfort. Le régiment occupe alors la région des Vosges tenue par la 3e D.I.A. pour permettre à la Division son avance sur Strasbourg.
Le 2 janvier 1945, le R.C.P. occupe la région d'Orbey. Les positions sont difficiles à tenir et les deux bataillons subissent des tirs de mortiers et de M.G. Relevé, il va mener alors une série de patrouilles et d'embuscades dans la fameuse région des lacs.
Le 6, la 198ème Division Allemande partie de Colmar se rue sur Strasbourg. Ses ordres sont clairs : " Le drapeau à croix gammée doit de nouveau flotter sur Strasbourg ".
Le 7, les panzers sont à 15 km de Strasbourg. A 16 heures, le 9 janvier, les 9ème et 10ème Compagnies du 1er R.C.P. appuyées par des chars du R.B.F.M. partent à l'assaut, prises immédiatement à partie par l'artillerie adverse. Le terrain miné ne facilite pas la progression ; l'attaque réussit cependant, les parachutistes tiennent bientôt les routes menant aux unités françaises encerclées et font de nombreux prisonniers. Strasbourg est sauvée!
Colmar représente désormais l'objectif principal pour la 1ère Armée qui s'élance les 20 et 22 janvier en direction de la ville renforcée par le 21ème Corps U.S.
Le 20 janvier au petit jour, appuyé par 102 batteries et dans une tourmente de neige, le 1er Corps s'élance. Partout l'ennemi résiste et l'avance est faible, le 22, le 2e Corps s'élance en direction de l'ennemi, créant une profonde surprise.
Le 1er R.C.P, ainsi que la 5ème D.B. et le Groupement de Choc sont rattaché au 21ème Corps U.S.
Il va, au sein de la 5ème D.B. du Général Vernejoul, écrire une des plus belles et des plus difficiles pages de son épopée.
Le 25 janvier au soir, le 2ème Bataillon reçoit pour mission de s'emparer du bois du Moulin de Jebsheim qui sera la base de départ à toute l'action sur Jebsheim. En effet, le village est un ulcère sur l'accès du canal du Rhône au Rhin et sur celui du canal de Colmar. Pendant trois jours, dans la neige et le froid, les Chasseurs Parachutistes livreront un combat de nettoyage aux troupes de la Wehrmacht qui savent ce que vaut cette position. Les adversaires sont tellement imbriqués que les combats deviennent de plus en plus difficiles. Le froid enraye les armes et le ravitaillement ne peut être consommé, car transformé en bloc de glace. L'artillerie ennemie ne cesse de pilonner nos positions et les pertes sont importantes. Enfin au prix d'une bataille acharnée, le 1er R.C.P. et le 254ème R.I.U.S. prennent pied dans Jebsheim le 27.
C'est alors qu'une extraordinaire bataille va se livrer pour prendre le village. Maison par maison, étage par étage, cave par cave, les Chasseurs Parachutistes appuyés par les chars du C.C. 6 de la 5ème D. B. combattent à l'arme automatique, au bazooka, à la grenade et parfois même au poignard. Cela dure toute la nuit, au petit jour le spectacle est dantesque
Toute la journée du 28, les combats acharnés et meurtriers se poursuivent. Dans l'après-midi, la situation semble se retourner. Les lisières du village sont enfin prises. Les chars ouvrent des brèches où aussitôt s'engouffrent les parachutistes. Au soir du 29, Jebsheim est prise, il ne reste de la petite ville martyre que des ruines. 500 cadavres ennemis jonchent le sol ainsi que de nombreux Français.
Le 1er R.C.P., épuisé, demeure sur place jusqu'au 30. Le 31, il fait mouvement sur le canal de Colmar et se rue l'assaut de Widensolen . L'action débutant à minuit se terminera le matin. En pointe du dispositif allié, le 1er R.C.P. permet une avance importante sur Colmar à l'est de la ville.
La résistance ennemie à l'ouest du Rhin est pratiquement annihilée.
Le 2 février, le régiment reçoit l'ordre d'atteindre Colmar. Il y entre en tête des troupes alliées le 3 février à 11 heures. Il comprend alors trois bataillons le 3ème ayant été mis sur pied en janvier à base d'éléments F.F.I. Le 8 février, il défile devant le Général Lattre.
Le 5 avril, le régiment après une période de repos est regroupé à Avord et est alors rattaché à la 1re Armée Alliée Aéroportée du Général Brereton. Le 3e Bataillon, essentiellement composé de non brevetés, doit subir son entraînement. Les 1er et 2ème Bataillons comprennent également des éléments non brevetés arrivés en renfort pendant la campagne d'Alsace.
Le 8 mai 1945, l'armistice vient mettre un terme à l'entraînement puis la capitulation du Japon un terme définitif à la guerre mondiale.
Le 1er août 1945, le régiment est transféré à l'Armée de Terre. Fin septembre, le 1er Bataillon s'installe à Bayonne, le P.C. et le 2ème Bataillon à Pau, le 3ème Bataillon prend ses quartiers à Pau-Idron.
La fourragère aux couleurs de la Croix de Guerre lui est remise par le Général Bonjour commandant la 25e D.A.P., le 2 février 1946, jour anniversaire de la prise de Colmar.
Une page se referme pour ce régiment à l'âme jeune et ardente, capable de toutes les audaces et de tous les efforts. S'il n'a pas eu la satisfaction de sauter en opération au cours de ce conflit, il s'est trouvé là où l'ennemi voulait imposer son fait et a toujours été vainqueur. Son épopée est jalonnée par 305 tués et 851 blessés qui marquent à jamais sa valeur ! Mais bientôt ce sera l'Indochine...

 

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