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Colloque International 

SPIRIT-Sciences PO Bordeaux, 29-30 novembre 2007 

 

Économie sociale et solidaire, territoire et politique : regards croisĂ©s 

 
 
 
 
 
 
 

Atelier 4 : Perspectives Sud-EuropĂ©ennes 

 
 
 
 
 
 
 
 
 

LA CONSTRUCTION DE LA REVENDICATION SYNDICALE DANS 

UNE ENTREPRISE COOPERATIVE 

 

Lontzi Amado-Borthayre, Doctorant en Sciences Politiques Ă  l’IEP de Bordeaux 

Institut d’Études Politiques, 11 AllĂ©e Ausone, 33607 Pessac Cedex 

lontzi@hotmail.com 

 
 
 
 
 

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Ne pas citer, ne pas diffuser SVP 

 
 

 
 
 
 
 

 

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2

LA CONSTRUCTION DE LA REVENDICATION SYNDICALE DANS 

UNE ENTREPRISE COOPERATIVE 

 

Lontzi Amado-Borthayre, Doctorant en Sciences Politiques Ă  l’IEP de Bordeaux 
Institut d’Études Politiques, 11 AllĂ©e Ausone, 33607 Pessac Cedex 

lontzi@hotmail.com 

 
 
 

1.

 

INTRODUCTION  

 
La gĂ©nĂ©ralisation des processus d’internationalisation d’entreprises est un des phĂ©nomènes les 
plus rĂ©pandus auquel doivent faire face les syndicats. Le fait que les entreprises, mais surtout 
les firmes multinationales, utilisent les disparitĂ©s salariales et les diffĂ©rences de protection 
salariale Ă  un niveau global (mondial) est une des causes directes d’affaiblissement et de 
baisse d’efficacitĂ© de l’action syndicale en Europe Occidentale.  Dès lors, les menaces de 
dĂ©localisations d’unitĂ©s de production deviennent l’élĂ©ment central des craintes auxquelles 
doivent faire face les travailleurs (surtout les moins qualifiĂ©s) ainsi que les syndicats.  Si 
certains Ă©conomistes minimisent le phĂ©nomène de dĂ©localisation en soulignant qu’au-delĂ  
d’être marginal, ce dernier est souvent favorable aux pays de l’Union Européenne

1

 ;  il n’en 

reste pas moins que la menace de la dĂ©localisation reste une arme de dissuasion, qu’utilise les 
Firmes Multinationales en vue d’obtenir des salariĂ©s et des syndicats qui les reprĂ©sentent, plus 
de flexibilité salariale, voire des restructurations engendrant des plans de licenciements

2

Certains en arrivent Ă  parler de nouvelle division internationale du travail, oĂą l’Europe 
Occidentale se concentrerait sur l’industrie tertiaire des services et de la R&D et l’Europe des 
nouveaux pays de l’Union EuropĂ©enne deviendrait la zone industrielle de transformation. Les 
syndicats europĂ©ens, malgrĂ© leur union au sein de la ConfĂ©dĂ©ration EuropĂ©enne des Syndicats 
(CES), paraissent bien impuissants et plein de contradictions face Ă  ce phĂ©nomène. Comment 
peuvent rĂ©agir conjointement des syndicats qui subissent des dĂ©localisations avec des 
syndicats qui en bĂ©nĂ©ficient ? Nous trouvons lĂ , l’un des paradoxes devant lequel se trouvent 
les syndicats basques que nous Ă©tudierons dans ce travail. De mĂŞme, l’entreprise au sein de 
laquelle nous Ă©tudierons l’action syndicale (ou la non-action syndicale) FAGOR se trouve 
clairement dans la situation paradigmatique de l’entreprise internationale subissant les lois les 
plus fĂ©roces d’un marchĂ© global hautement concurrentiel. FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. 
Coop. reflète le dilemme des entreprises coopĂ©ratives qui se donnent pour objectifs la crĂ©ation 
d’emplois et de richesse sur un territoire, la gestion participative et dĂ©mocratique d’une 
entreprise hautement internationale immergĂ©e dans un marchĂ© global oĂą les dĂ©localisations 
sont monnaie courante.  
 
FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. fait partie du complexe coopĂ©ratif de MondragĂłn appelĂ© 
Ă©galement MondragĂłn Cooperativa CorporaciĂłn (MCC). MondragĂłn est une ville de l’Alto 
Deba dans le Gipuzkoa, proche d’Eibar, oĂą le nationalisme basque est omniprĂ©sent dans 
toutes ses variantes (des sensibilitĂ©s les plus modĂ©rĂ©es comme les reprĂ©sentent le PNV au plus 
radical de Batasuna) et dont les travailleurs de l’industrie de transformation et mĂ©tallurgique 
sont fortement reprĂ©sentĂ©s historiquement sĂ»r l'ensemble de la population active.  FAGOR 
Electrodomésticos S. Coop. est l’héritière directe de la première coopérative de l’

expérience

 

                                                 

1

 Voir le Rapport de la Commission des Affaires Économiques du SĂ©nat 2004. 

2

 Husson M, « 

La mondialisation, nouvel horizon du capitalisme

 Â», http://hussonet.fr/mondiali.htm 

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3

coopĂ©rative de MondragĂłn qui s’appelait ULGOR

3

 crĂ©Ă©e en 1955 grâce Ă  l’intervention d’un 

jeune prĂŞtre activiste, Don Jose Maria Arizmendiarrieta

4

. L’

expérience

 est donc issue de la 

fusion entre une variable sociale catholique et une opposition au rĂ©gime franquiste teintĂ©e de 
la variable identitaire. L’anthropologue J Apalategi fait d’ailleurs un parallèle entre les cinq 
fondateurs de ULGOR et les fondateurs de EKIN qui deviendra par la suite ETA (Euskadi ta 
Askatsuna), en soulignant tant, leurs origines sociales communes, que les idĂ©es mobilisatrices 
et les objectifs qu’ils se donnent

5

. L'ensemble de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. compte 

dĂ©sormais 10 000 salariĂ©s sur les 60 000 que possède MCC et a un chiffre d’affaire annuelle 
de 1.790 millions d’euros en 2005. La coopĂ©rative est le principal moteur industriel du Alto 
Deba et bĂ©nĂ©ficie de l’ensemble des avantages de MCC en matière logistique et financière 
Elle est devenue le premier groupe industriel du Pays Basque et le 7

ème

 de l’État Espagnol. Il 

est vrai que la vallĂ©e dispose d’un fort taux d’emploi et d’un des meilleurs taux de salaires par 
habitant de l’État Espagnol. Il convient tout de mĂŞme de signaler la grande dĂ©tĂ©rioration 
environmentale qu’a vĂ©cue cette vallĂ©e, due Ă  sa forte industrialisation mal contrĂ´lĂ©e.  
 
Le syndicalisme local se caractĂ©rise par une forte division idĂ©ologique fondĂ©e sur un clivage 
net entre les syndicats basques de tendance nationaliste ou souverainiste et les syndicats 
espagnols 

stato-nationaux

 ou Ă©tatiques. On compte quatre grandes organisations syndicales 

dans la vallĂ©e prĂ©tendant reprĂ©senter les intĂ©rĂŞts des travailleurs. Deux d’entre elles ont pour 
champ d’action syndicale et de reprĂ©sentation l’ensemble du territoire de l’État Espagnol. Il 
s’agit des Commissions Ouvrières (CCOO) et de l’Union GĂ©nĂ©rale des Travailleurs (UGT). 
Cependant, ce sont les syndicats nationalistes, Euskal Langileen Alkartasuna (ELA), Langile 
Abertzaleen Batasuna (LAB) et le très minoritaire Ezker Sindikalaren Kordinakundea (ESK)

6

qui sont largement majoritaires lors des Ă©lections professionnelles du Pays Basque et de la 
vallĂ©e de l’Alto Deba. Le syndicat ELA est nĂ© en 1911 au sein de la sphère du PNB. Il est 

inter-classiste

 et a pour but premier de freiner les syndicats UGT et CNT dans les usines du 

Pays Basque oĂą les immigrĂ©s d’Espagne affluent et les idĂ©es socialistes, anarchistes et 
rĂ©volutionnaires Ă©mergent. Le syndicat est d’obĂ©dience dĂ©mocrate chrĂ©tienne Ă  ses dĂ©buts 
puis Ă©volua vers la social dĂ©mocratie par la suite. Il disparaĂ®t quasiment sous le franquisme et 
se restructure pendant la transition, Ă  partir de 1976, en faisant un choix clair en faveur du 
Statut d’Autonomie qu’obtiendra le Pays Basque en 1979. Il convient de souligner que le 
syndicat ELA est membre de la ConfĂ©dĂ©ration Syndicale EuropĂ©enne

7

. ELA est prĂ©sent sur 

l’ensemble de la CommunautĂ© Autonome Basque (CAB) ainsi que dans la voisine 
CommunautĂ© Forale de Navarre (CFN). Le parcours de LAB est bien diffĂ©rent. Il est l’hĂ©ritier 

                                                 

3

 Du nom de la composition des initiales des fondateurs (Usatorre, Larranaga, Gorronogoitia, Ormaechea et 

Ortubay), qui Ă  l’époque fabriquait du petit matĂ©riel de chauffage mĂ©nager.  

4

 Don JM Arizmendiarrieta est arrivĂ© Ă  MondragĂłn en 1941 et mourra sur place en 1976. Membre du PNB 

pendant la guerre Civile Espagnole, il sera arrĂŞtĂ©, mais Ă©chappera Ă  la mort. CurĂ© rouge pour les franquistes, 
traĂ®tre pour les rĂ©volutionnaires qui lui supposent des liens tacites avec le pouvoir et surtout avec l’Opus Dei 
(voir le pamphlet Lertxundi J, 

La tecnocracia en MCC, el Opus Dei y el PNV

, ed Basanderea, Donostia, 2002). 

La vĂ©racitĂ© de ces derniers supposĂ©s n’est pas dĂ©montrĂ©e, il s’agit d’une hypothèse fondĂ©e sur une coĂŻncidence. 
La coopĂ©rative est un frein au mouvement ouvrier contestataire et Ă  la grève. Le Alto Deba est un territoire oĂą la 
prĂ©sence ouvrière de la mĂ©tallurgie, population de tradition fortement combative, est sur reprĂ©sentĂ©e mais oĂą la 
contestation sociale est neutralisĂ©e au sein des entreprises coopĂ©ratives.   

5

 Apalategi J, 

Los vascos, de la naciĂłn al Estado

, ed Astero, Donostia, 2006, p. 37 

6

 Ce syndicat est très minoritaire, mais il a une place très importante dans les dĂ©bats syndicaux par, sa forte 

mobilisation intellectuelle mais Ă©galement, par sa place stratĂ©gique au sein des coopĂ©rative de MCC, comme 
nous le verrons plus loin. Il est l’émanation syndicale du parti trotsko-maoĂŻste du Pays Basque ZUTIK.  

7

 ELA est Ă©galement membre fondateur de la ConfĂ©dĂ©ration Mondiale du Travail (CMT), d’obĂ©dience dĂ©mocrate 

chrĂ©tienne et de la ConfĂ©dĂ©ration Internationale Syndicat Libre (CISL, internationale syndicale sous influence de 
AFL-CIO amĂ©ricaine), ces deux internationales syndicales en fusionnant ont donnĂ© rĂ©cemment naissance la 
ConfĂ©dĂ©ration Syndicale Internationale (CSI).  

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4

du Front Ouvrier de l’organisation ETA sous la pĂ©riode franquiste. Ce syndicat fait partie de 
ce que l’on appelle la Gauche Abertzale

8

 Il naĂ®t juste avant la transition dĂ©mocratique et Ă  ses 

origines est d’obĂ©dience assemblĂ©aire et indĂ©pendantiste. La particularitĂ© de ce syndicat est 
qu’il est structurĂ© sur l’ensemble du territoire Basque, la CAB, la CFN mais Ă©galement sur le 
territoire basque de France. De plus, pour LAB la lutte des classes (Ă  laquelle adhère le 
syndicat comme grille de lecture sociale) est indissociable de la lutte en faveur de 
l’indĂ©pendance. La symĂ©trie entre les Ă©lections politiques et syndicales est indĂ©niable. Si ELA 
et LAB sont majoritaires comme l'est le nationalisme politique en Gipuzkoa, puis en Bizkaia 
et en Araba, UGT et CCOO sont quant Ă  elles majoritaires en Navarre

9

. Bien Ă©videmment les 

rĂ©sultats diffĂ©rent d’une branche professionnelle Ă  une autre. Pour ce qui est du secteur auquel 
nous nous intĂ©resserons, la mĂ©tallurgie, dans la CAB, le Gipuzkoa et  surtout dans l’Alto 
Deba, le syndicalisme nationaliste est de loin majoritaire. C’est pourquoi, nous nous 
intĂ©resserons surtout aux attitudes, discours, actions, cadres et grammaires syndicales, de 
syndicats, car en tant que syndicats nationalistes basques, ELA, LAB et ESK revendiquent un 
Cadre Basque de Relation du Travail

10

. Ce cadre serait un cadre lĂ©gislatif, juridique et de 

dialogue social spĂ©cifique au Pays Basque afin de construire une politique Ă©conomique et 
sociale qui leur soit propre dans les diffĂ©rents domaines que sont les salaires, l’emploi, la 
protection sociale, la formation, les services publics… De mĂŞme, dans le domaine de la 
nĂ©gociation collective ils ne veulent plus nĂ©gocier des conventions collectives dĂ©pendantes, 
articulĂ©es ou solidaires juridiquement de celles de l’État Espagnol. Ils revendiquent le 
territoire basque comme cadre propre et, s’ils souhaitent Ă  terme se passer de Madrid, la 
première Ă©tape est de pouvoir nĂ©gocier l’ensemble de ces sujets en vue de les amĂ©liorer au 
bĂ©nĂ©fice des travailleurs du Pays Basque. On constate une lutte idĂ©ologique nette entre ELA, 
LAB et ESK vis Ă  vis de CCOO et UGT, qui nous renvoie directement au schĂ©ma classique 
de S Rokkan de 

Centre / Périphérie

. Cela dit, la critique des syndicats nationalistes va bien 

au-delĂ  du schĂ©ma 

rokkanien

 puisqu'ils derniers critiquent surtout l’institutionnalisation des 

syndicats Ă©tatisĂ©s dont l’action et l’organisation reposent sur des subventions publiques et qui 
ont renoncĂ© Ă  mobiliser les travailleurs sur les lieux de travail. CCOO et UGT ont fait le choix 
de renforcer leur cadre d’action syndical au niveau europĂ©en en ayant une politique active au 
sein de la CES en vue de dĂ©velopper la co-gestion et le dialogue social avec les 
multinationales europĂ©ennes. Le syndicalisme nationaliste semble lui, plus enclin Ă  lutter 
contre la globalisation par des luttes plus proches des travailleurs et des rĂ©alitĂ©s locales

11

. Ils 

reprennent Ă  leur compte le slogan alter-mondialiste « penser global et agir local Â» face Ă  la 
globalisation. Ils considèrent que c’est la seule façon pour que le syndicalisme devienne 
participatif et associatif. Ce serait la seule façon de mobiliser les travailleurs en faveur d’un 
projet de transformation sociale culturelle et politique qui les concerne directement.  
 
Ce travail tente de croiser deux dynamiques ancrĂ©es directement dans leur territoire et identitĂ© 
locale forte, l’expĂ©rience coopĂ©rative de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. et le 
syndicalisme local (dans le territoire de l’

expérience

 et au sein de cette mĂŞme 

expérience

). 

Les principes de base de l’expĂ©rience coopĂ©rative de MondragĂłn reposent sur dix points : 
adhĂ©sion libre, organisation dĂ©mocratique, souverainetĂ© des travailleurs, soumission du 

                                                 

8

 Nous intĂ©grerons sous cette dĂ©nomination le syndicat LAB, le parti politique Batasuna, l’organisation de 

jeunesse SEGI, l’ETA, et les diffĂ©rents mouvements sociaux tels EGUZKI, EGIZAN, EHE… 

9

 Le syndicat LAB, seul syndicat transfrontalier, a obtenu près de 2 000 voix aux dernières Ă©lections 

Prud’homales en Pays Basque de France, ce qui en fait le quatrième syndicat derrière, la CFDT, la CGT puis FO 
et devant la CFTC, l’UNSA et Solidaires. 

10

 MVRL, Marco Vasco de Relaciones Laborales, au sein d’un Espace Socio-Économique Basque, Espacio 

Socio-EconĂłmico Vasco, ESEV. 

11

 Ce qui ne veut pas dire qu’il n’attache pas d’importance Ă  la lutte syndicale dans le cadre europĂ©en et 

international. Le syndicat ELA est membre de la CES et de la CIS. 

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5

capital au travail, gouvernance participative, solidaritĂ©, coopĂ©ration inter-coopĂ©rative 
(entreprise), transformation sociale, universalité et éducation

12

. Si l'on en croit les discours 

partisans des syndicats, ces dix points des principes coopĂ©ratifs font prĂ©cisĂ©ment partie  de 
leur panel revendicatif face Ă  la globalisation des firmes multinationales et Ă  leurs modes de 
gouvernance. Dès lors, comment les syndicats saisissent-ils le fait « coopĂ©ratif Â» de 
l’entreprise FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. pour l’intĂ©grer dans leur action syndicale et 
quelle place laisse cette entreprise coopĂ©rative Ă  ces syndicats ? A l’heure de la globalisation 
et des dynamiques de dĂ©localisations comme stratĂ©gie entrepreneuriale, quelle est la stratĂ©gie 
de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. et comment agissent les syndicats pour prĂ©server 
l’emploi sur le territoire de l’Alto Deba ? Cette Ă©tude s’appuie sur une recherche en cours sur 
le syndicalisme nationaliste et rĂ©gionaliste en France et en Espagne et repose principalement 
sur les premières observations tirĂ©es du Pays Basque. Nous tenons dès Ă  prĂ©sent Ă  prĂ©venir 
tout malentendu, le travail tente une ouverture originale du travail des syndicats basques de la 
vallée de l’Alto Deba quant à l’

expérience

 d’économie sociale que reprĂ©sente  FAGOR 

ElectrodomĂ©sticos S. Coop., tant par son originalitĂ© que par le dĂ©fi que cette 

expérience

 peut 

lancer au mouvement syndical. On se propose ici, d’analyser l’organisation et la stratĂ©gie 
d’internationalisation de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. (2) et au-delĂ  des critiques 
syndicales, le rĂ´le (ou pas) que joue (ou pourrait jouer) le syndicalisme dans cette nouvelle 
phase de dĂ©veloppement de cette entreprise (3).   
 

2.

 

FAGOR EletrodomĂ©sticos S. Coop. une multinationale comme les 

autres ? 

 
« MCC est la plus grande multinationale basque et elle agit comme toutes les multinationales, 
son statut coopĂ©ratif n’est absolument pas une caution sociale. FAGOR crĂ©e, dĂ©truit et 
délocalise des emplois »

13

. C’est en ces termes rudes qu’est dĂ©fini le groupe auquel appartient 

FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. par un responsable syndical du syndicat ELA. Derrière 
ces propos,  se trouvent deux questions fondamentales auxquelles doit faire face FAGOR. 
Tout d’abord, jusqu’à quand elle continuera Ă  crĂ©er de la richesse et de l’emploi dans le Alto 
Deba . Puis, jusqu’à quel point le modèle coopĂ©rativiste de gestion va perdurer, dans la 
mesure oĂą le marchĂ© est de plus en plus concurrentiel, concentrĂ© et globalisĂ© et que 
l’ensemble de ses concurrents dĂ©localisent leurs unitĂ©s de production dans les pays de l’Est de 
l’Europe.  
 

2.1.

 

L’internationalisation de FAGOR electrodomĂ©sticos comme rĂ©ponse Ă  la 

globalisation du marchĂ© des Ă©lectromĂ©nagers 

 
L’évolution de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. est passĂ© par quatre phases. De 1956 Ă  
1970, correspond de la naissance d'ULGOR Ă  sa transformation en Groupe ULARCO. La 
première phase de 1971 Ă  1986 le groupe voie les annĂ©es de crises et de restructurations  
industrielles du Pays Basque. De 1986 Ă  1991, les coopĂ©ratives se trouvent dans une pĂ©riode 
de gestation de leur stratĂ©gie de dĂ©veloppement face Ă  l'ouverture du MarchĂ© Commun 
EuropĂ©en. Puis finalement de 1991 Ă  nos jours oĂą le choix stratĂ©gique d’internationaliser la 
production est fait, les coopĂ©ratives s’unissent sous la MCC.  Durant cette pĂ©riode pendant 
laquelle le pouvoir central Ă  Madrid est pris par la technocratie de l’Opus Dei, l’État Espagnol 
vit une forte croissance Ă©conomique dans un marchĂ© de l’électromĂ©nager relativement 

                                                 

12

 Â« 

Los principios Básico de la Experiencia de la Cooperativa de MondragĂłn

 Â», Congrès de 1987, texte 

ronĂ©otypĂ©. 

13

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat ELA, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007. 

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6

fermé

14

. Les 

socios

15

 n’étant ni salariĂ©s ni patrons n’ont pas droit Ă  la sĂ©curitĂ© sociale. Les 

coopĂ©rativistes, sous l’impulsion du père JM Arizmendiarrieta vont donc crĂ©er la Caja 
Laboral Popular

16

 (CPL) et la mutuelle-assurance Lagun Aro qui dĂ©pendra de cette dernière. 

Cet Ă©tablissement bancaire a Ă©tĂ© « la clĂ© de rĂ©ussite du système de l’expĂ©rience de 
Mondragón, car il s’agit, au moins durant la première période, de la fonction financement-
budget de chaque coopĂ©rative qui est gĂ©rĂ© par la CLP Â»

17

. D’autres coopĂ©ratives vont voir le 

jour durant  cette première pĂ©riode tel que, Arrasate, COPRECI, Ederlan et Lana et le besoin 
de coordination de ces diffĂ©rentes structures va pousser les 

socios

 Ă  crĂ©er le groupe ULARCO.  

 
C’est finalement la crise industrielle des annĂ©es 70 et la fin du protectionnisme franquiste qui 
va pousser le Groupe ULARCO Ă  regarder vers l’extĂ©rieur comme rĂ©ponse aux crises 
environnantes. Puis un deuxième Ă©vĂ©nement va pousser FAGOR Ă  se restructurer et s’ouvrir 
plus Ă  l’extĂ©rieur en 1986, c’est l’ouverture au MarchĂ© Commun et l’entrĂ©e de l’Espagne au 
sein de la CommunautĂ© Économique EuropĂ©enne (CEE). Le dĂ©but de la quatrième phase  
commence en 1991 au cours de Ă  la chute du bloc de l’Est et de l’ouverture totale des marchĂ©s 
mondiaux et du phĂ©nomène de globalisation.  
 

2.1.1.

 

La stratĂ©gie d’internationalisation de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. 

 
 Comme le remarque Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain 
A, « depuis 1984 il s’est produit plus de 30 fusions au sein du secteur de l’électromĂ©nager 
europĂ©en, donnant comme rĂ©sultat un nombre rĂ©duit de multinationales concurrentes qui 
dominent clairement le marché »

18

. FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. se trouve donc face Ă  

un marchĂ© oĂą les firmes multinationales se regroupent de plus en plus en vue de faire baisser 
le prix d’achat des matĂ©riaux. Cette dynamique de concentration et d’internationalisation des 
lieux de production en Chine, CorĂ©e, Maghreb ou Europe de l’Est a rĂ©duit sensiblement les 
marges des fabricants, surtout ceux dont le volume des ventes est plus faible, puisque leur 
capacitĂ© Ă  nĂ©gocier avec les distributeurs est rĂ©duite et leur capacitĂ© en R&D est de facto plus 
faible Ă©galement.  
 
En vue de ne pas perdre trop de parts de marchĂ© face Ă  ses concurrents, FAGOR a tentĂ© de 
croĂ®tre tant en interne qu’en externe. Entre 1985 et 1991, FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. 
va racheter  EDESA-FABRELEC (l’entreprise se trouve Ă  Basauri, en banlieue de Bilbao) 
devenant alors le premier groupe d’électromĂ©nager de l’État Espagnol. Cette « entreprise liĂ©e 
au groupe Iberdrola (entreprise privĂ©e de production Ă©lectrique) et au groupe Westinghouse 
(dans un premier temps), suite à une période rocambolesque

19

 fut rachetĂ©e par FAGOR  en 

                                                 

14

 Kasmir S, 

El mito de MondragĂłn, 

ed Txalaparta, Tafalla, 1999 

15

 

socio

 est le terme gĂ©nĂ©rique qu’utilisent les coopĂ©rativistes pour dĂ©finir un membre Ă  part entière de la 

coopĂ©rative. 

16

 Il est curieux de voir qu’elle se donne Ă©galement comme nom Euskadiko Kutxa (Caisses d’Euskadi), ce qui 

montre bien la volontĂ© et les objectifs politico-Ă©conomiques de ses fondateurs et leur attachement nationaliste et 
territorial au Pays Basque. 

17

  Prades  J,  Â« 

L’énigme de MondragĂłn, Histoire, rĂ©alitĂ© et enjeu du complexe coopĂ©ratif basque

 Â»,  texte 

ronĂ©otypĂ©, UniversitĂ© de Toulouse, p.3 

18

 Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A, « Deslocalizaciones y empleo 

cooperativo. El caso de FAGOR ElectrodomĂ©sticos, S. Coop Â», p.237-268, CIRIEC, Valencia, p. 252 

19

 Lors de la construction de la Centrale nuclĂ©aire de Lemoiz (contre  laquelle une forte proportion de la 

population basque s’était opposĂ©e), la compagnie d’électricitĂ© Iberdrola fit construire les rĂ©acteurs nuclĂ©aires par 
Westinghouse et lui racheta ses marques et ses patentes des filiales d’électromĂ©nagers. L’achat se fit avec les 
liquiditĂ©s d’EDESA-FABRELEC, l’entreprise ne pouvant faire face se vit mis en liquidation judiciaire en pleine 
crise du bassin industrielle de Bilbao en 1978. Ce n’est qu’en 1985, sous l’impulsion de la Chambre de 

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7

1985 »

20

. Dans les annĂ©es 90, l’accroissement de l’entreprise est devenu clairement 

international puisque FAGOR fait des acquisitions de filiales au Maroc, Argentine, Pologne, 
Chine et dernièrement en France (Brandt). MalgrĂ© cela, le groupe reste quand mĂŞme quinze 
fois plus petit qu’Electrolux et onze fois plus petit que Whirpool

21

, les leaders du marchĂ©.   

 
Les acquisitions les plus importantes et symboliques sont celles de Mastercook de Wrozamet 
en Pologne et de Brandt en France. La première, parce qu’elle rĂ©pond Ă  un besoin 
mimétique

22

 de FAGOR de se positionner sur le marchĂ© de l’Europe de l’Est et de s’ouvrir Ă  

la Russie ainsi que d'implanter des unitĂ©s de production Ă  bas coĂ»ts dans ces pays Ă©mergents 
comme le souligne F Gomez-Acedo l’ancien gĂ©rant de FAGOR lors de l’acquisition. 
Actuellement sont produits Ă  Wrozamet des cuisinières, des fours, et des machines Ă  laver, 
mais Ă©galement des cuisinières et des frigos qui se fabriquaient antĂ©rieurement Ă  MondragĂłn. 
Pour ce qui est de Brandt ÉlectromĂ©nager en France, l’acquisition s’est faite en deux temps. 
Tout d’abord, la coopĂ©rative a pris des parts (10%) dans le capital Brandt oĂą, le groupe 
israĂ©lien ELCO Ă©tait majoritaire. Par la suite en 2005, FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. va 
racheter l’ensemble de la participation d’ELCO et va acquĂ©rir par la mĂŞme occasion les 
marques Brandt, Sauter, Thompson, De Dietrich et Vedette en France, et San Giorgio et 
Ocean en Italie. Le groupe coopĂ©ratif dispose d’unitĂ©s de production en France (Lyon, 
Vendôme, Orléans, Aizenay, Lesquin et Laroche-Sur-Yon) et en Italie (Veralona)

23

. Cette 

stratĂ©gie de rachat tend, d’après la coopĂ©rative Ă  obtenir une nouvelle dimension-masse 
critique et des bĂ©nĂ©fices supĂ©rieurs de FAGOR Ă  travers ses filiales et rationaliser les 
structures commerciales, industrielles, administratives et les services

24

.  

 
Il est clair qu’avec les dernières acquisitions le groupe de MondragĂłn s’est donnĂ© une 
nouvelle dimension internationale. Il est vrai que les diffĂ©rentes acquisitions faites au Pays 
Basque se sont intĂ©grĂ©es Ă  la coopĂ©rative mère et se sont transformĂ©es en sociĂ©tĂ© coopĂ©rative ; 
il n’en reste pas moins que ces processus ont Ă©tĂ© longs et parfois conflictuels (comme nous le 
verrons par la suite). Il semble que la dernière phase d’internationalisation de FAGOR « ne 
soit pas dĂ©nuĂ© de risques. Premièrement, on peut douter de la capacitĂ© de FAGOR Ă  gĂ©rer la 
nouvelle entreprise et Ă  obtenir les synergies prĂ©vues. Deuxièmement, au moment oĂą la 
tendance est Ă  s’installer dans les pays asiatiques ou de l’Est de l’Europe et oĂą l’on prĂ©voit des 
difficultĂ©s dans le maintient de l’emploi coopĂ©ratif Ă  MondragĂłn, FAGOR n’aura d’autre 
possibilité que de réduire drastiquement l’emploi chez Brandt en France et en Italie »

25

 
Les syndicats de Brandt, dans un communiquĂ© du mois d’octobre 2006 s'opposaient au plan 
de restructuration de la direction soulignant que  le projet n'Ă©tait « pas un plan industriel, 
[c’était] un plan de destruction. Il [Ă©tait] uniquement basĂ© sur des critères financiers, sans tenir 
compte des contraintes industrielles et des consĂ©quences humaines et sociales et menace 
l’existence de tous les sites, la direction ne rĂ©pond pas aux questions des Ă©lus sur les dangers 

                                                                                                                                                         

Commerce de Bilbao et  du plan de restructuration industrielle de la CAB, que FAGOR rachète EDESA-
FABRELEC.   

20

 Entretien avec un membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© d’Entreprise, 

et membre actuellement de Ahots Kooperatibista (et toujours adhĂ©rent de LAB), Ă  Arrsate le 3 Octobre 2007.   

21

 Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A, Â« 

Deslocalizaciones y empleo 

cooperativo. El caso de FAGOR ElectrodomĂ©sticos, S. Coop 

», p.237-268, CIRIEC, Valencia, p. 253 

22

 Nous faisons rĂ©fĂ©rence ici, au concept de RenĂ© Girard dans 

La violence et le sacrĂ©

, ed Grasset, Paris, 1972 

23

 83% des 

socios

 de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. ont votĂ© pour l’acquisition de Brandt.  

24

 T.U. Revue interne de MCC, Mars 2005 

25

 Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A, Â« 

Deslocalizaciones y empleo 

cooperativo. El caso de FAGOR ElectrodomĂ©sticos, S. Coop 

», p.237-268, CIRIEC, Valencia, p. 254 

background image

 

8

soulevĂ©s par les experts Â»

26

. La dĂ©lĂ©guĂ©e CGT au CE central souligne de plus que « FAGOR 

agit comme les autres multinationales qui nous ont rachetĂ© ces dernières annĂ©es, nous on ne 
voit pas la diffĂ©rence. Nous, on doit lutter contre les suppressions d'emplois, les 
dĂ©localisations et l'autisme de la part de la direction de la mĂŞme façon, puisque notre 
entreprise a un PDG qui obĂ©it Ă  des actionnaires dont le seul but est de faire fructifier leurs 
investissements. Qu'ils soient coopérativistes ou pas, cela ne change rien pour nous. »

27

.  

 

2.1.2.

 

La nouvelle structuration de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. - EDESA – 

BRANDT (FED-E-B)  et MCC: le rĂ©seau comme outil face Ă  la globalisation 

 
Comme nous l’avons signalĂ© plus haut, FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. s’est construite 
sur le long terme. La première coopĂ©rative ULGOR fut crĂ©Ă©e en 1956, puis en 1965 le Groupe 
ULARCO prit sa place, et fin 1986 le Groupe changeat de nom pour devenir FAGOR. 
Actuellement, six coopĂ©ratives composent le Groupe FAGOR dans l’Alto Deba: FAGOR 
ElectrodomĂ©sticos S. Coop. (anciennement Ulgor), Arrasate, COPRECI, Ederlan, FAGOR 
Industrial, et FAGOR Electronica. L’ensemble de ces coopĂ©ratives ont pour points communs : 
 

-

 

elles sont issues d’un dĂ©veloppement Ă©conomique endogène coopĂ©rativiste 

-

 

elles ont un lien direct avec le territoire dans lequel elles se sont Ă©panouies 

-

 

elles rĂ©pondent toutes Ă  la mĂŞme matrice culturelle et idĂ©ologique basque 

(participative, catholique, nationaliste et coutumière)

28

 

 
Le rachat par FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. d’EDESA-FABRELEC, a Ă©tĂ© suivi d'un 
processus de coopĂ©rativisation en 1994. Actuellement, FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. 
dispose de 51% des parts d’EDESA-FABRELEC (Basauri) et les 49% restants sont la 
propriĂ©tĂ© des travailleurs de l’entreprise. Une autre entreprise historique de la mĂ©tallurgie 
basque a Ă©tĂ© rachetĂ©e par FAGOR Ederlan, il s’agit de V Luzuriaga qui est divisĂ©e en deux 
unitĂ©s de production, l’une Ă  Usurbil (banlieue de Donostia) et l’autre Ă  Tafalla en Navarre

29

Cette dernière unitĂ©, depuis Mars 2007, fait Ă©galement l’objet d’un processus de 
coopĂ©rativisation. La particularitĂ© de ces entreprises rĂ©side dans le fait qu’elles se situent 
toutes dans le territoire « historique Â» du Pays Basque et qu’elles ont vĂ©cu ou vivent des 
processus de coopĂ©rativisation (non sans problèmes comme nous le verrons plus loin).  
 
La deuxième catĂ©gorie d’entreprises faisant partie du groupe FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. 
Coop- EDESA-Brandt (FED-E-B,) sont les entreprises se trouvant Ă  l’extĂ©rieur de la CAB et 
de la CFN. Le groupe dĂ©tient une unitĂ© de production au Maroc depuis 1994, Ă  Wrozamet en 
Pologne depuis 1999, Brandt en France depuis 2001 et une Joint-Venture avec une entreprise 
allemande GEYSER-GASTECH SA au Pays Basque. 
 

 

 

 

                                                 

26

 Tract inter-syndical de Fagor-Brandt, octobre 2006 

27

 Entretien rĂ©alisĂ© avec une dĂ©lĂ©guĂ©e CE CGT de Brandt Ă  Lyon Juin 2007 

28

 Itçaina X, « 

L’identitĂ© au travail. Économie sociale et solidaire et mouvement identitaire en Pays Basque

 Â» 

Communication ISTR-EMES, Paris, CNAM,  Avril 2005. 

29

 Nous citons cet exemple dans un but heuristique pour la suite du travail, car il ne fait pas partie  Ă  proprement 

parler de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. 

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9

 

UnitĂ©s de 

Production 

Pays/territoire AnnĂ©e 

d’acquisition 

Participation 

Nombre de salariĂ©s 

FAGOR 
ElectrodomĂ©sticos S. 
Coop. 

Pays Basque (CAB 

et CFN) 

1956 100% 

socios 

4252 

Extra 
ElectromĂ©mager SA 

Maroc 1994  100%  212 

Wrozamet Pologne 

1999 41%  1254 

GEYSER-GASTECH 
SA 

Pays Basque (CAB) 

1998 

50% 

272 

Brandt SA 

France 

2001 

10%

→

100% 

4644 

Filiales commerciales 
Ă  l’étranger 

   

192 

Total  

 

 

10 

826 

Source : Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A   

 

De 1978 Ă  1985, les diffĂ©rentes coopĂ©ratives du Groupe ULARCO constatant  la grande 
incertitude industrielle et la hausse du chĂ´mage dĂ©cidèrent de rĂ©duire cette mĂŞme incertitude 
financière en formant de nouvelles formes de coopĂ©ration basĂ©es sur la CPL. Durant la 
pĂ©riode de reconversion industrielle, il est indispensable de souligner que le seul groupe 
industriel du Pays Basque qui a gardĂ© ses postes de travail et en a mĂŞme crĂ©Ă© de nouveaux 
c'est l'

expérience

 MondragĂłn. Nous qui avons vu l'ensemble des entreprises qui nous 

entouraient fermer, lorsque FAGOR est venu nous racheter, un certain soulagement a traversĂ© 
le ComitĂ© d'Entreprise Â»

30

. Certaines entreprises du groupe ont pendant cette pĂ©riode souffert 

de la récession et des postes de travail ont été détruits, mais le système de solidarité inter-
coopĂ©ratif a fait que ces 

socios

 ont Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©s dans d'autres coopĂ©ratives. 

 
« La plus grande transformation de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. intervient Ă  partir de 
1986, lorsque l'Espagne intègre la CEE et le MarchĂ© Commun. Cette transformation ne tient 
pas tant aux aspects salariaux mais plutĂ´t au besoin d'approfondir l'intĂ©gration et la cohĂ©sion 
interne du projet entrepreneurial Â»

31

. Le dĂ©bat interne donnera comme rĂ©sultat la crĂ©ation de 

MCC en 1991 qui rĂ©pond Ă  la nĂ©cessitĂ©, en considĂ©rant que la base entrepreneuriale est 
coopĂ©rativiste, c'est Ă  dire que le contrĂ´le de chaque entreprise est dĂ©tenu par les 

socios

, qui 

sont ceux qui dĂ©cident en dernier lieu, la construction d'un groupe qui exigeait une crĂ©ativitĂ© 
organisationnelle permettant de lier les principes de base de la coopĂ©rative, la participation 
des 

socios

 Ă  la politique gĂ©nĂ©rale du groupe. La seule solution fut alors le prolongement d'un 

processus de dĂ©lĂ©gation des capacitĂ©s de dĂ©cisions de la base vers la technostructure du 
Groupe. Les choix quotidiens vont dĂ©sormais ĂŞtre gĂ©rĂ©s par les cadres de MCC en 
coordination avec les cadres des différents groupes coopératifs

32

.   

 
Comme nous l'avons signalĂ© prĂ©cĂ©demment, c'est une logique d'accroissement de sa capacitĂ© 
productive et de son chiffre d’affaire afin de faire face tant Ă  la globalisation qu'Ă  la forte 
concurrence du marchĂ© de l’électromĂ©nager, qui a obligĂ© le Groupe FAGOR Ă  dĂ©velopper une 
politique de fusion-acquisitions, Joint-ventures... Cette politique est conduite conjointement 

                                                 

30

 Entretien avec un membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© d’Entreprise, 

et membre actuellement de Ahots Kooperatibista (et toujours adhĂ©rent de LAB), Ă  Arrasate le 3 Octobre 2007. 

31

 Entretien avec la prĂ©sidente du Conseil Social (CS) du Groupe FAGOR, Ă  Arrasate el 3 Octobre 2007 

32

 Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A, Â« 

Deslocalizaciones y empleo 

cooperativo. El caso de FAGOR ElectrodomĂ©sticos, S. Coop 

», p.237-268, CIRIEC, Valencia 

background image

 

10

avec la direction de MCC qui fixe dĂ©sormais les stratĂ©gies et axes gĂ©nĂ©raux Ă  suivre

33

. Alors 

que le rĂ©seau offert par la nouvelle structuration de MCC

34

 garantit la solidaritĂ© inter-

coopĂ©rative et l'emploi Ă  ses 

socios,

 la crĂ©ation d'emplois salariĂ©s non coopĂ©ratifs n'a cessĂ© 

d'augmenter depuis 1991, tant dans les entreprises coopĂ©ratives que dans les entreprises dont 
elle dĂ©tient le capital. Comme le souligne le responsable syndical de LAB, « Ă  partir de 1991 
la politique que prĂ©conise MCC Ă  FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop.-EDESA ne peut la 
mener qu'au rachat d'autres entreprises capitalistiques et Ă  l'accroissement au sein de ses 
coopĂ©ratives Ă  plus de flexibilitĂ©: rĂ©organisation du temps de travail en flux tendu, 
augmentation des cadences... mais surtout l'augmentation de la flexibilitĂ© salariale Ă  l'intĂ©rieur 
des unitĂ©s de production coopĂ©ratives, par l'embauche de travailleurs en CDD, d'intĂ©rimaires, 
voire d'entreprises sous traitantes. Bref, une gestion de la masse salariale identique Ă  celle des 
multinationales auxquelles on Ă  faire tous les jours Â»

35

. I Halary semble aller dans le mĂŞme 

sens lorsqu’elle dĂ©crit le rĂ©seau de MCC ; horizontal dans sa mutualisation des risques, mais 
complètement verticale dans les dĂ©cisions et la coordination des stratĂ©gies Ă©conomiques et 
politiques salariales

36

.  

 

2.1.3. DĂ©veloppement endogène vs emploi local, dĂ©veloppement exogène vs 
destruction d’emploi ?  

 
La vallĂ©e du Alto Deba, tout comme celle du Goierri, est une vallĂ©e tortueuse, Ă©troite et assez 
peu propice aux grandes zones industrielles qu’a connu le grand Bilbao. Cette gĂ©ographie 
rude a fait que la structure des entreprises ait Ă©tĂ© de type familial pendant assez longtemps. La 
ville de MondragĂłn a eu la particularitĂ© d’avoir l’une des entreprises les plus grandes de la 
vallée, Unión Cerrajera de Mondragón

37

 dès le dĂ©but du XX

ème

  siècle. La caractĂ©ristique du  

marchĂ© local de l’emploi rĂ©side dans son faible taux de chĂ´mage et par la forte prĂ©sence du 
secteur industriel. De plus, MCC est sans doute la seule entreprise du secteur mĂ©tallurgique Ă  
avoir connu une Ă©volution croissante de  crĂ©ation d’emplois entre 1973-2002, et ce, malgrĂ© la 
crise industrielle de la mĂ©tallurgie  qu'a subi la CAB ainsi que le Alto Deba. On peut constater 
que le holding coopĂ©ratif est passĂ© entre 1992 et 2002 de 25 392 emplois Ă  66 558 et que 
l’emploi coopĂ©ratif reprĂ©sentait en 2002 27% de l’emploi de l’Alto Deba.  
 
MĂŞme si certaines coopĂ©ratives sont touchĂ©es par cette crise industrielle, leur rĂ©glementation 
et solidaritĂ©  au sein du Groupe leur interdient les licenciements  des 

socios

 et oblige les 

coopĂ©ratives bĂ©nĂ©ficiaires Ă  ĂŞtre solidaires vis Ă  vis des dĂ©ficitaires. Dès les annĂ©es 70, le 
système coopĂ©ratif montre ses avantages puisque dans une pĂ©riode d’incertitude et de crise la 
pĂ©rennitĂ© de l’emploi sera valorisĂ©e comme un bien prĂ©cieux (surtout dans le secteur 
mĂ©tallurgique le plus touchĂ© durant cette pĂ©riode de crise), ce qui fera dire Ă  Benton L, « le 

                                                 

33

 Errasti AM, Heras I, Elgoibar O, Begiristain A, « 

La internacionalizaciĂłn de las cooperativas y su 

responsabilidad social

 Â», in  

Revista de DirecciĂłn y AdministraciĂłn de Empresas

, n° 10, Diciembre 2002, p.119-

145, p.132 

34

 MCC est composĂ© de groupe sectoriel, le Groupe Financier (CPL, Lagun Aro, Aro Leasing et LKS), la 

distribution (Eroski, qui a la particularitĂ© d’être une coopĂ©rative mixte travail-consommation) et la groupe 
Industriel (qui lui mĂŞme est divisĂ© en sept sous groupes dont, FAGOR), on y adjoint les centres de formation 
initiaux (UniversitĂ©, Ă‰cole professionnelle, Ă‰cole d’IngĂ©nieur), de formation continue, les centres de R&D et 
enfin les centres de directions de MCC, la superstructure. 

35

 Entretien avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate  le 3 Octobre 2007 

36

 Halary I, Â« 

Le rĂ©seau ; une solution pour les coopĂ©ratives face Ă  la globalisation,  

trad. de, Â«

 Co-operatives in 

globalization : The advantgaes of networking

 Â»,  in 

Advances in the Economic Analysis of participatory and 

Labor-managed Firms

, vol 9, Elsevier, Janvier 2006 

37

 L’œuvre sociale de cette entreprise Ă  MondragĂłn est très importante, puisque les futurs fondateurs de 

l’

expérience

 ont fait leurs Ă©tudes Ă  l’école d’apprentis de l’Union Cerrajera, pour mesurer le rĂ´le jouĂ© par 

l’Union Cerrajera, voir, Kasmir S, 

El mito de MondragĂłn

, ed Txalaparta, Tafalla, 1999 

background image

 

11

succès des coopĂ©ratives de MondragĂłn est prouvĂ© non seulement par sa croissance, mais 
Ă©galement par sa capacitĂ© Ă  survivre durant les rĂ©cessions Ă©conomiques et Ă  surpasser avec 
succès les zones pĂ©riphĂ©riques. MĂŞme si les marchĂ©s des produits fabriquĂ©s par MondragĂłn 
furent très touchĂ©s par la rĂ©cession globale de la moitiĂ© des annĂ©es 70 et des longues 
rĂ©percussions qui s’en suivirent en Espagne, les coopĂ©ratives rĂ©sistèrent sans licencier 
massivement. L’organisation gĂ©nĂ©rale des coopĂ©ratives leur permit de transfĂ©rer des membres 
des unitĂ©s de production les plus touchĂ©es vers les plus bĂ©nĂ©ficiaires. Au mĂŞme moment, 
d’ailleurs, se créèrent de nouvelles coopĂ©ratives pour rĂ©pondre aux nouvelles opportunitĂ©s du 
marché »

38

 . 

 
L’union des principes coopĂ©rativistes de crĂ©ation d’emploi local et la solidaritĂ© est un des 
facteurs du maintien puis de la crĂ©ation de l’emploi au sein de MCC et du Groupe FAGOR. 
Ce point de vue dĂ©fensif que l’on a traitĂ© jusqu'Ă  maintenant doit ĂŞtre croisĂ© avec une stratĂ©gie 
parallèle imposĂ©e par MCC de façon verticale d’accroĂ®tre des niveaux d’emploi, afin de faire 
face aux phases de croissances et de demande, ainsi que de rĂ©cession voire de dĂ©croissance, 
grâce Ă  la flexibilitĂ© salariale. Comme le notent E Abizu et I Basterretxea, « une des 
principales caractĂ©ristiques opĂ©ratoires de la gestion de l’emploi au sein de MCC qui a permis 
cette croissance ininterrompue, tant de son chiffre d’affaire que de son taux d’emploi, a Ă©tĂ© 
sans doute la flexibilitĂ© salariale contextualisĂ©e. Elle est dans le code axiologique et 
stratĂ©gique de MCC Â»

39

. Pour ce qui est de la flexibilitĂ© numĂ©rique, FED-E-B utilise : les 

contrats Ă  durĂ©e dĂ©terminĂ©e (CDD) , les travailleurs intĂ©rimaires et les sous-traitants au sein 
de ses unitĂ©s de production et a recourt aux dĂ©localisations d’activitĂ©s de production dans des 
pays oĂą les coĂ»ts et la rĂ©glementation salariale sont moins favorables. Le deuxième type de 
flexibilitĂ© qui se dĂ©veloppe est de type fonctionnel : elle repose sur des groupes de travail 
autonomes et auto-organisĂ©s

40

. Le troisième type de flexibilitĂ© est liĂ© Ă  la variable des heures 

supplĂ©mentaires de travail.  
 
I Pradales dans son Ă©tude comparative des bassins d’emplois de l’Alto Deba, Vitoria-Gasteiz 
et de la rive gauche de Bilbao souligne que l’Alto Deba se caractĂ©rise par « une instabilitĂ© 
salariale très majoritaire dans la tranche d’âge des 16-24 ans, fluctuant dans un fourchette 
entre 61% et 76,5% des jeunes actifs (…). On suppose que la forte incidence Ă©conomique du 
mouvement coopĂ©rativiste dans ce bassin d’emploi est en train de jouer en faveur de 
l’accroissement des taux de prĂ©caritĂ© pour les jeunes (…) qui parait ĂŞtre une phase de 
transition, puisque Ă  partir de 36 ans la mĂŞme zone obtient des taux de stabilitĂ© salariale très 
hauts, mais pas nĂ©cessairement par conversion coopĂ©rativiste Â»

41

. L’emploi de la vallĂ©e de 

l’Alto Deba se caractĂ©rise par une forte prĂ©caritĂ© de l’emploi qui touche essentiellement les 
jeunes et les femmes. L’auteur explique le 

cleavage

  qui existe « entre le statut de 

coopĂ©rativiste et celui de salariĂ©, et sa relation avec les forts taux de prĂ©caritĂ© subis par les 
jeunes [est dĂ»] (…)  au phĂ©nomène coopĂ©rativiste qui joue en faveur de la hausse du taux 
d’instabilitĂ© salariale jusqu’à 35 ans, puisque au-delĂ  le phĂ©nomène disparaĂ®t brusquement  (..)  
Les raisons de ce phĂ©nomène sont doubles : d’un cotĂ© l’intensification du statut de 

socio

 

                                                 

38

 Benton L, Â« 

La emergencia de los distritos industriales en España: reconversiĂłn industrial y divergencia de 

respuestas regionales

 Â», in Pyke F et Sengerberger W, 

Los distritos industriales y las pequeñas empresas, III

MTSS, Madrid, 1993, p.114 

39

 Albizu E et Basterretxea I, « 

Flexibilidad laboral y generaciĂłn de empleo en tiempos de crisis. El caso 

MondragĂłn CorporaciĂłn Cooperativa 

», p. 83-98, in Revista Europea de DirecciĂłn y EconomĂ­a de la Empresa, 

Vol. 7, 3, p.91 

40

 La production de frigorifiques a Ă©tĂ© rĂ©organisĂ©e Ă  titre expĂ©rimental puisque le reste de la production continue 

d’être organisĂ© de façon taylorienne. Sur ce type de process de production au sein des coopĂ©ratives il convient de 
lire le livre de Ugarte L, 

ÂżSinfonĂ­a o Jazz ? Koldo  Saratxaga y el modelo Iri

zar, ed Granica, Barcelona, 2006  

41

 Pradales I, 

Estructura social del empleo en la CAPV

, ed EJ-GV, Vitoria-Gasteiz, 2005, p.364 

background image

 

12

temporaire

42

,

 qui est utilisĂ© comme pĂ©riode de mise Ă  l’essai par la coopĂ©rative ; et d’un autre 

cĂ´tĂ© l’intensification de l’utilisation des sous-traitants comme outil de baisse des coĂ»ts 
internes et d’extĂ©riorisation de l’incertitude.  
 
L’auteur soutient que le statut de coopĂ©rativiste prend des caractères endogamiques ces 
dernières annĂ©es puisque les postes de travail coopĂ©rativistes n’ont que très peu augmentĂ©. La 
hausse du taux d’emploi est bien due Ă  l’activitĂ© productive coopĂ©rativiste  mais  ne se 
rĂ©percute pas en hausse Ă©gale de coopĂ©rativistes. I Pradales souligne Ă  cet effet, que suivant 
les trois types de flexibilitĂ©s citĂ©es, FED-EDESA, crĂ©e de l’emploi salariĂ© (de droit privĂ© et 
non coopĂ©rativiste) et prĂ©caire car il est dĂ©terminĂ© dans le temps et qu’il est souvent liĂ© Ă  des 
structures sous-traitantes. Ces hypothèses sont corroborĂ©es par la PrĂ©sidente du CS de FED-E-
B qui souligne que FAGOR « a un trop fort taux d’

eventuales

 et un problème d’endogamie,  

eu Ă©gard au fait que la famille a des droits sur les postes de travail. Cette logique d’achat du 
poste de travail permise par notre norme juridique est incompatible avec la ligne de conduite 
d’une vraie coopĂ©rative, on devrait avoir pour but et politique, la redistribution des richesses 
et la mĂ©ritocratie sur notre territoire Â»

43

.    

 

2.2.

 

Structuration et statuts au sein de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. - EDESA 

– BRANDT    

 
« L’essence du coopĂ©rativisme rĂ©side dans la primautĂ© des personnes sur le capital. Dès lors 
la souverainetĂ© de l’entreprise rĂ©side dans le travail, qui suit la logique dĂ©mocratique 

« d’un 

homme une voix Â».

 Ce n’est donc pas le capital qui engage le travail, mais au contraire le 

travail qui engage et contrĂ´le le capital Â»

44

. Toute la problĂ©matique d'une entreprise 

coopĂ©rative multinationale rĂ©side dans sa capacitĂ© Ă  garder ses valeurs et principes et dans son 
modèle de gouvernance. Depuis 1991, comme on l'a signalĂ© prĂ©cĂ©demment, l'ensemble des 
coopĂ©ratives de l'expĂ©rience de MondragĂłn s’est structurĂ© au sein de MCC et s’est dotĂ© 
d'organes de gouvernance censĂ©s respecter les dĂ©cisions des membres et leurs choix 
stratĂ©giques et pallier les postulats des thĂ©ories de la dĂ©gĂ©nĂ©ration des coopĂ©ratives

45

. Il 

existerait trois types de dĂ©gĂ©nĂ©rations : la dĂ©gĂ©nĂ©ration des valeurs dans laquelle le 

socio

 perd 

des droits et des acquis sociaux, la dĂ©gĂ©nĂ©ration des objectifs coopĂ©ratifs et la dĂ©gĂ©nĂ©ration 
des institutions de reprĂ©sentation de l'ensemble des travailleurs. Mais qu’advient-il des 
travailleurs des coopĂ©ratives qui ne sont pas 

socios

? Quel est le rĂ´le des structures de contrĂ´le 

dans la structure internationalisĂ©e de FED-E-B? Comment les syndicats apprĂ©hendent-ils ces 
structures et quel est leur point de vue sur ces structures?   
 

2.2.1. Les structures de contrĂ´le de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop

 
L’organisation participative et gouvernante des coopĂ©ratives de MondragĂłn a Ă©voluĂ© tout au 
long de son histoire et ce dans un seul but, rendre l’ensemble de l’expĂ©rience plus efficiente 
vis Ă  vis du marchĂ©. L’organisation est basĂ©e sur des Groupement Sectoriels (ex : le Groupe 
FED-E-B), qui constituent eux-mĂŞmes des Divisions (Division Industrielle) regroupĂ©es au 
sein d’une superstructure oĂą se trouvent les organes centraux ou tĂŞte du groupe (MCC).  

                                                 

42

 

le socio temporaire

 (

socio-temporal

), est le statut pendant lequel le futur (ou pas) 

socio

 jouit de ses plein droits 

dans un temps limitĂ©, souvent trois ans . Ce statut est utilisĂ© comme « 

période d’essai

 Â» 

43

 Entretien rĂ©alisĂ© avec la PrĂ©sidente du CS de FED-E-B Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

44

 Errasti AM, Heras I, Elgoibar O, Begiristain A, « 

La internacionalizaciĂłn de las cooperativas y su 

responsabilidad social

 Â», in  

Revista de DirecciĂłn y AdministraciĂłn de Empresas

, n° 10, Diciembre 2002, p.119-

145, p.127 

45

 Ibidem 

background image

 

13

 
Au sein de FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop., l’organe souverain est l’assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale 
des 

socios

. Ses fonctions sont essentiellement d’élire le Conseil Recteur (Consejo Rector-CR-

), qui est l’organe de reprĂ©sentation et de gouvernance de la coopĂ©rative. On peut comparer le 
CR Ă  un Conseil d’Administration d’une SA et comme ce dernier, le CR Ă©lit le gĂ©rant de la 
coopĂ©rative, que l’on peut comparer par analogie Ă  un PDG. Le CR, le gĂ©rant et les chefs de 
dĂ©partements (qui ne sont pas Ă©lus et sont en règle gĂ©nĂ©rale les hauts cadres des coopĂ©ratives) 
sont ceux qui conduisent les dĂ©cisions stratĂ©giques approuvĂ©es en AG. Certaines dĂ©cisions 
aussi importantes que l’acquisition de nouvelles filiales lorsque celles-ci dĂ©passent les limites 
financières marquĂ©es par les statuts sont directement soumises Ă  l’AG. 
 
Contrairement Ă  une entreprise privĂ©e oĂą les syndicats reprĂ©sentent les intĂ©rĂŞts des salariĂ©s au 
sein du CE, Ă©tant donnĂ© que l’activitĂ© syndicale est interdite par aux 

socios

 dĂ©finition au sein 

des coopĂ©ratives (puisqu’ils sont travailleurs et propriĂ©taires de leurs moyens de production) 
la reprĂ©sentation des 

socios

 est individuelle et non collective. Le rapport d'Ă©galitĂ© entre les 

socios

, du fait au principe « un homme une voie Â», individualise les relations entre les 

socios

 

travaillant dans les ateliers et ceux qui dirigent la coopĂ©rative. Comme le souligne un membre 
d’Ahots Kooperatibista de Basauri « oui, effectivement, dĂ©sormais nous pouvons participer 
aux dĂ©bats, remettre en question la stratĂ©gie en AG du CR et des directeurs, on peut mĂŞme se 
prĂ©senter au CR… Mais c’est un leurre, on n'est pas formĂ© pour Ă§a ! Nous on est Ă   l’atelier, 
eux ils sortent des Ă©coles universitaires… eux ils savent comment ça fonctionne, nous on sait 
faire des Ă©lectromĂ©nagers ! Donc, on ne se prĂ©sente pas, car on n’a pas la formation et 
l’assistance que pourrait fournir un syndicat pour pouvoir faire face Ă  ces situations comme 
dans un CE puisque les syndicats sont interdis au sein des coopératives »

46

 

 
L’autre organe rĂ©fĂ©rant au sein de la coopĂ©rative est le Conseil Social qui par analogie 
Ă©quivaudrait au CE des entreprises capitalistiques. Son rĂ´le est purement consultatif. 
Toutefois, lors de l’élaboration des plans stratĂ©giques de FED-E-B pour la pĂ©riode 2005-2008, 
la direction a prĂ©sentĂ© ses plans d’internationalisation et de restructurations productives aux 
membres du CS. Si la tradition dĂ©cisionnelle entre ces diffĂ©rents organes s’est construite 
durant des annĂ©es sur la base du consensus, il convient de noter la multiplication des remises 
en cause, tant sur le plan stratĂ©gique que sur le plan de l’organisation du travail, de la part des 

socios

 et de leurs reprĂ©sentants (envers les choix de la direction de la coopĂ©rative). Dans la 

revue d’Ahots Kooperatibista,  des 

socios

 reconnaissaient la lĂ©gitimitĂ© du CR pour prendre 

des dĂ©cisions en vue d’amĂ©liorer la productivitĂ© et le rendement Ă©conomique de l’entreprise. 
Ils soulevaient le problème actuel qui se dĂ©veloppe au sein de FED-E de l’ascendance de plus 
en plus grande des logiques rentables et des choix des cadres sur les conditions de travail, 
remettant en cause par lĂ  mĂŞme le principe de base de la coopĂ©rative oĂą le travail engage et 
contrĂ´le le capital

47

. Greenwood D et Gonzalez JL, dans « 

Culturas de FAGOR

 Â» soulignent 

la perception qu’ont les 

socios

 de leur positionnement au sein de la coopĂ©rative, « nous, les 

subordonnĂ©s, nous n’avons ni voix ni vote. Oui, on vote, mais comme ils nous le disent, au 
final on vote ce qu’ils veulent, ce que les chefs veulent Â»

48

. Le positionnement que font les 

socios

 entre ceux travaillant Ă  l’atelier, « d’en bas Â» et ceux travaillant « en haut Â», dans les 

bureaux, fait dire aux auteurs qu’il est paradoxal d’entendre de tels propos  dans une 
coopĂ©rative qui se veut participative, Ă©galitaire et Ă©quitable. Les auteurs nous montrent bien 

                                                 

46

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un membre de FAGOR-EDESA Basauri, membre du CS et d’Ahots Kooperatibista Ă  

Arrasate le 3 Octobre 2007   

47

 Revue d’Ahots Kooperatibista, Arrasate, (n°, non datĂ©). 

48

 Greenwood D et Gonzalez JL, 

Culturas de FAGOR

, ed Txertoa, Donostia, 1990, p.106 

background image

 

14

que les 

socios

 de l’atelier ne se sentent pas partie prenante des dĂ©cisions et que les dĂ©cisions 

sont prises par les cadres dirigeants de l’entreprise.  
 
Pour le responsable de LAB, « l’AG d’une coopĂ©rative comme celle de FAGOR ressemble Ă  
une AG d’actionnaires. On y parle principalement de la situation Ă©conomique, des tendances 
du marchĂ© (les difficultĂ©s, la concurrence fĂ©roce qui oblige le CR Ă  prendre des dĂ©cisions qui 
dĂ©tĂ©riorent les conditions de travail…) et bien sĂ»r des rĂ©tributions des 

socios

 qui sont très 

attendues. Personne ne parle des problèmes des 

eventuales

, des intĂ©rimaires, de ceux qui 

travaillent au sein de FAGOR pour des sous-traitants, des travailleurs du Maroc, de Pologne 
de France et de ce que sont devenus les derniers licenciĂ©s… Â»

49

. Cela peut paraĂ®tre paradoxal 

puisque les 

socios

 de FED-E-B ne reprĂ©sentent pas plus du tiers des travailleurs du groupe. 

Ces derniers, d'ailleurs, vont avoir Ă  dĂ©cider des fermetures d’unitĂ©s de production et des 
limites des droits de propriĂ©tĂ© et la participation des travailleurs des filiales. Les 

socios

 malgrĂ©  

l’internationalisation et la constitution d’un grand groupe de l’électromĂ©nager, continuent Ă  
vivre dans l’incertitude de pouvoir continuer Ă  crĂ©er de la richesse et de l’emploi local face Ă  
la concurrence toujours plus forte du marchĂ© de l’électromĂ©nager.  
 
La relation entre FED-E et les filiales se fait Ă  travers la nomination de gĂ©rants par les 
coopĂ©rativistes qui ont pour mission de reprĂ©senter les intĂ©rĂŞts des 

socios

 et de gĂ©rer 

l'entreprise. Ces derniers sont responsables devant les institutions reprĂ©sentatives des 
coopĂ©rativistes. Un membre d'Ahots Kooperatibista relevait « le manque d'information que 
l'on a sur la gestion de nos filiales et la politique sociale qu'on y dĂ©veloppe. Les 

socios

 ne se 

soucient guère des travailleurs des filiales et, mis Ă  part nous, personne ne semble se plaindre 
d'une telle ignorance »

50

. Il convient de souligner qu'aucun organe central de reprĂ©sentation de 

l'ensemble des travailleurs des filiales et des 

socios

 n'existe Ă  FED-E-B. De mĂŞme, il n'existe 

aucune reprĂ©sentation salariale et syndicale chez les 

eventuales

 et intĂ©rimaires de  FED-

EDESA alors mĂŞme qu'ils y ont droit. La raison d'après le responsable d'ELA rĂ©side dans le 
fait que « les 

eventuales

 souhaitent en règle gĂ©nĂ©rale devenir 

socios

. Dès lors il est prĂ©fĂ©rable 

qu'ils soient dociles et très dĂ©vouĂ©s Ă  la coopĂ©rative. De plus, la pression sociale est trop forte 
dans l’Alto Deba ainsi que dans le mouvement abertzale (nationaliste). Toute critique ou 
demande de respect des droits des travailleurs des coopĂ©ratives est prise comme une attaque et 
une remise en cause du projet coopĂ©ratif. Pour un syndicaliste de l’Alto Deba, il est 
impossible de parler des coopĂ©ratives avec un 

socio

. D'ailleurs, les coopĂ©ratives ne souhaitent 

pas partager leur projet salarial et leur soi-disant transformation sociale avec les syndicats, 
nous qui sommes les principaux agents de cette transformation sociale en Euskal Herria»

51

.  

  

2.2.2.

 

La disparitĂ© des statuts des travailleurs au sein de FAGOR electrodomĂ©sticos 

 

Cette apparente bonne santĂ© du holding cache les disparitĂ©s et rĂ©alitĂ©s qui peuvent exister 
d’une coopĂ©rative Ă  l’autre, puisque le rĂ©seau de solidaritĂ© oblige les coopĂ©ratives qui vont 
bien Ă  ĂŞtre solidaires des pertes des autres coopĂ©ratives ainsi que du maintien de l’emploi des 

socios

. Dès lors, les difficultĂ©s et la destruction d’emplois d’une coopĂ©rative peuventt ĂŞtre 

masquĂ©es par la bonne santĂ© des autres coopĂ©ratives. Les membres de MCC et donc le 
Groupe FAGOR-EDESA, se doivent d’assurer un emploi, mĂŞme en temps de crise Ă  ses 
membres. Comme nous rappelle un 

socio

 d’EDESA, « nous (LAB) et UGT, lorsque FAGOR 

nous proposa au ComitĂ© d’Entreprise (CE) d’EDESA de transformer l’entreprise en 
coopĂ©rative et de devenir nous mĂŞme 

socios

, nous avons votĂ© pour (…), ELA et CCOO 

                                                 

49

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

50

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un membre d’Ahots Kooperatibistak, Ă  Arrasate 3 Octobre 2007 

51

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

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15

Ă©taient contre. CCOO Ă©tait contre parce que leur lecture « pseudo marxiste Â» les empĂŞchait de 
voir au-delĂ  du cĂ´tĂ© travailleur-patron, ils n’arrivaient pas Ă  dĂ©passer cette schizophrĂ©nie et 
parce que les syndicats ne peuvent avoir d’activitĂ© au sein des coopĂ©ratives, donc ils 
disparaissaient. ELA s’est opposĂ© parce que le syndicat reprĂ©sentait essentiellement les cadres 
de l’entreprise et les cadres ont vu « rouge Â». Ils savaient qu’ils gagneraient largement moins 
au sein d’une coopĂ©rative que dans une SA. De plus on sait très bien que… ils trouvent plus 
facilement un emploi que nous Ă  l’atelier. Puisqu’ils avaient la majoritĂ© au CE, la 
coopĂ©rativisation fut rejetĂ©e, mais FAGOR fut très habile. Elle proposa une coopĂ©rativisation 
individuelle, chaque salariĂ© passait chez le DRH et lui donnait une rĂ©ponse positive ou 
nĂ©gative. Et lĂ , la majoritĂ© des salariĂ©s a choisi le statut de 

socio

. Nous sommes devenus 

socios

 dans une entreprise qui ne nous appartient pas, et les cadres, bien sĂ»r sont partis. Nous, 

Ă  LAB, on Ă©tait pour car on savait que soit on disparaissait Ă  court terme soit on se faisait 
racheter par une multinationale qui nous liquiderait. Tant qu’à faire on prĂ©fĂ©rait se faire 
racheter par une multinationale basque qui n’oserait pas nous licencier Â« Ă  sec Â» et on savait 
que si l’on devenait 

socios

 on bĂ©nĂ©ficierait d'un emploi Ă  vie, comme les fonctionnaires, Ă  

cause de la clause de solidarité inter-coopératives»

52

.  

 
La politique de non augmentation sensible de nouveaux 

socios

 rĂ©pond au choix stratĂ©gique de 

l'entreprise de faire face Ă  la duretĂ© des marchĂ©s et de la concurrence avec plus de flexibilitĂ© et 
de baser cette flexibilitĂ© sur la masse salariale. Pour le responsable d'ELA « il existe quatre 
types de travailleurs au sein des coopĂ©ratives: les 

socios

, les 

eventuales

, les intĂ©rimaires et les 

travailleurs des sous-traitants. Comment une entreprise qui se veut sociale et Ă©galitaire peut-
elle justifier une telle discrimination salariale? La flexibilitĂ© et les exigences des marchĂ©s ne 
peuvent conditionner les droits les plus Ă©lĂ©mentaires des travailleurs au sein d'une 
coopĂ©rative. FED-E-B agit comme une multinationale classique oĂą le capital prĂ©domine sur le 
travail, et surtout sur le travailleur Â»

53

. Il convient de rajouter Ă  la typification faite par le 

responsable d'ELA ,celle des travailleurs des filiales Ă©trangères.  
 
La rĂ©alitĂ© des marchĂ©s internationaux et leurs exigences « nous obligent Ă  avoir cette politique 
salariale, tout en sachant qu'elle n'est pas en adĂ©quation avec nos valeurs et nos principes. 
Mais ceux qui nous critiquent, que proposent-ils? Quelle solution rĂ©aliste nous proposent les 
syndicats qui nous critiquent tant pour gĂ©rer plus convenablement l'entreprise? Â»

54

, souligne la 

PrĂ©sidente du CS de FED-E-B. Pour le responsable de LAB de l’Alto Deba, le problème est 
que « les coopĂ©ratives doivent s’ouvrir au monde social mais surtout aux syndicats, seulement 
de cette manière elles pourront ĂŞtre en accord avec leurs objectifs de transformation sociale… 
Évidemment, on n’a pas toutes les solutions, mais on peut offrir un avis objectif sur le 
traitement des salariĂ©s au sein des coopĂ©ratives et dans les autres entreprises. Il faut bien le 
dire, aujourd’hui on fabrique de la mĂŞme façon des frigos chez FAGOR, Brandt, Electrolux, 
Bosch… OĂą passe l’épanouissement de l’homme, le respect de cadences soutenables… Et ne 
parlons pas de la diffĂ©rence de statut des travailleurs qui nous renvoie Ă  des siècles passĂ©s oĂą 
tous les travailleurs n’étaient pas égaux mais les raisons étaient autres à l’époque !»

55

 . 

 
 
 

                                                 

52

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© 

d’Entreprise, et membre actuellement de Ahots Kooperatibista (et toujours adhĂ©rent de LAB), Ă  Arrasate le 3 
Octobre 2007. 

53

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’ELA, Ă  Arrasate le 3 Octobre 2007 

54

 Entretien rĂ©alisĂ© avec la PrĂ©sidente du CS de FED-E-B Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

55

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate, le 3 octobre 2007 

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16

3.

 

Le syndicalisme: critique de la responsabilitĂ© sociale et salariale de la 

coopĂ©rative   

 
La seule approche et action de type syndicale qui a Ă©tĂ© menĂ©e au sein d'une coopĂ©rative de 
MCC, s'est dĂ©roulĂ©e en 1974. FED-E-B est dĂ©sormais une entreprise multinationale. Elle a 
doublĂ© sa taille en très peu de temps ces dernières annĂ©es. La coopĂ©rative n'a toujours pas vu 
Ă©merger de prĂ©sence syndicale Ă  l'intĂ©rieur de ses unitĂ©s de production au Pays Basque, alors 
mĂŞme que le personnel non 

socio

 pourrait introduire ce cadre de reprĂ©sentation salariale. Elle 

doit par contre faire face Ă  des actions syndicales de la part d'organisations syndicales au sein 
de ses filiales. Le paradoxe de la structure de FED-E-B fait que le syndicalisme basque, dont 
la prĂ©sence au sein de la branche mĂ©tallurgique au Pays Basque est très forte, est absent de 
celle-ci, mais le syndicalisme français est fortement prĂ©sent au sein des unitĂ©s de production 
de la filiale française, Brandt. Le syndicalisme basque ne peut saisir le phĂ©nomène 
coopĂ©rativiste que de l'extĂ©rieur et ne peut construire des axes d’actions syndicale, avec les 
syndicats français de Brandt que de façon limitĂ©e. Les syndicats de Brandt, quant Ă  eux, se 
trouvent extrĂŞmement isolĂ©s et perdus dans leurs moyens classiques d'action syndicale car 
FED-E-B n'est pas une entreprise classique et les cadres classiques de rapport de force ont 
changĂ© alors mĂŞme que l'entreprise dans laquelle ils se trouvent n'a pas changĂ©.  
 
MalgrĂ© la difficultĂ© des syndicats Ă  saisir le phĂ©nomène coopĂ©rativiste, des tentatives et des 
stratĂ©gies sont mises en place pour « ramener la coopĂ©rative Ă  ses buts premiers, au respect de 
ses principes, Ă  la redĂ©finition de ces derniers et Ă  ce que la coopĂ©rative soit une entreprise 
solidaire des travailleurs Â»

56

. On trouve d'une part, une prise de conscience de la part de 

certains syndicats basques du rĂ´le qu'ils pourraient jouer au sein des coopĂ©ratives en vue 
d'influer dans la responsabilitĂ© sociale de FED-E-B. D’autre par, des constructions d'actions 
de « types syndicales Â» au sein de la coopĂ©rative et des actions syndicales cherchant Ă  se 
structurer au sein de l'ensemble du groupe, se structures. Elles ont la particularitĂ© de naĂ®tre v 
essentiellement au sein des filiales et ce malgrĂ© l'interdiction au sein de la coopĂ©rative de 
mener des actions syndicales sur des questions salariales. Des lors, les cadres syndicaux et 
coopĂ©ratifs si longtemps incompatibles doivent faire face Ă  la volontĂ© d’agents syndicaux et 
coopĂ©rativistes de les unir, en vue de redonner sens au projet coopĂ©rativiste et de lier le projet 
social des coopĂ©ratives Ă  celui des mouvements sociaux qui les entourent. 
 

3.1.La ResponsabilitĂ© Sociale de l’Entreprise mise Ă  l’épreuve du syndicalisme local et 
extĂ©rieur   

 

Le problème fondamental de FED-EDESA est que le phĂ©nomène de trasnationalisation 
classique des multinationales se fait par transposition de l’activitĂ© productive et par le 
transfert de technologie. Bien Ă©videmment, dans une entreprise d’économie sociale de type 
coopĂ©rativiste le rĂ©sultat ne peut ĂŞtre que plus complexe. En effet, elle doit se battre contre 
d’autres modèles d’entreprise, en particulier contre les entreprises capitalistiques. Ce qui 
diffĂ©rencie FED-EDESA des autres entreprises,  c’est son caractère dĂ©mocratique et ses 
valeurs rĂ©unies dans ses principes coopĂ©ratifs. Des Ă©lĂ©ments soulignĂ©s par diffĂ©rents auteurs 
limiteraient la possibilitĂ© de dĂ©veloppement des coopĂ©ratives Ă  un niveau international : tout 
d’abord, le caractère local voire territorial des coopĂ©ratives, puis les problèmes financiers 
souvent liĂ©s Ă  la petite taille des unitĂ©s de production et Ă  l’esprit des coopĂ©rativistes

57

 et 

                                                 

56

 Entretien avec un membre d’Ahots Kooperatibista et du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

57

 Nous posons lĂ  le problème qu’auraient les coopĂ©rativistes face au risque entrepreneurial. L’hypothèse micro-

Ă©conomique de l’aversion face au risque dans la gestion des coopĂ©rativistes doit ĂŞtre confrontĂ©e aux 
engagements individuels et collectifs, voir la thèse que soutiendra X Larralde le 28 Octobre 2007 Ă  Bordeaux IV. 

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17

enfin, la difficultĂ© et complexitĂ© Ă  crĂ©er une coopĂ©rative transnationale face Ă  une plus grande 
facilitĂ© de crĂ©ation d’une multinationale capitalistique. Toutefois, la coopĂ©rative jouit d’une 
plus grande implication de ses membres et peut plus facilement appliquer la flexibilitĂ© du 
travail

58

. La stratĂ©gie du Groupe FAGOR n’a pas Ă©tĂ© de crĂ©er ni de transposer son modèle 

coopĂ©ratif Ă  l’extĂ©rieur lorsqu’elle a commencĂ© sa phase d’internationalisation. Le Groupe a 
optĂ© pour le rachat et la crĂ©ation de filiales Ă  l’extĂ©rieur et seule une entreprise jusqu’à 
aujourd’hui a Ă©tĂ© coopĂ©rativisĂ©e, EDESA. Le Groupe FED-EDESA se trouve actuellement 
dans une situation oĂą, le centre du groupe est une sociĂ©tĂ© d’économie sociale dont la 
pĂ©riphĂ©rie est  capitaliste (composĂ©e d’investissements directs en capital ou de joint-ventures, 
et dĂ©pendantes du centre coopĂ©ratif).  
 
L’ensemble des articles portant sur l’

expérience

 MondragĂłn souligne les valeurs et le Code 

Éthique qui s’imposent dans les coopĂ©ratives mais peu parlent des moyens qui sont mis en 
place pour suivre leur application. Un responsable d’Ahots Kooperatibista souligne que « les 
valeurs ne sont pas bien dĂ©finies par Ă©crit. Il est par contre plus que nĂ©cessaire de les redĂ©finir 
par Ă©crit et d’instaurer un cahier des charges dĂ©taillĂ©, non seulement au sein de FAGOR 
ElectrodomĂ©sticos S. Coop., mais plus gĂ©nĂ©ralement au sein de l’ensemble du groupe MCC. 
Qu’entend-on par transformation sociale lorsqu’on achète des entreprises Ă  l’Est et une 
multinationale plus grande que nous ? De quoi parle-t-on lorsqu’on parle d’innovation 
sociale ? Les syndicats de nos filiales et ceux prĂ©sents en Euskal Herria (Pays Basque) ont 
beaucoup à dire sur ces sujets là »

59

.  

 

3.1.1.

 

La remise en cause du rĂ´le de transformation social de l’entreprise par les 

syndicats 

 
« Pour ce qui est de la relation « 

capital-travail

 Â» des filiales, on observe que les conditions de 

travail et les relations salariales au sein des filiales des coopĂ©ratives multinationales ne 
dĂ©pendent pas tellement des caractĂ©ristiques de l’entreprise mère, elles dĂ©pendent des 
conditions du pays oĂą sont installĂ©es les filiales Â»

60

. Dans tous les cas de figure, deux critères 

doivent ĂŞtre pris en compte pour analyser le comportement des entreprises multinationales: les 
dispositions lĂ©gales (lois, conventions collectives de branches et d’entreprises) qui 
s’appliquent dans le pays d’installation et les pratiques salariales des autres entreprises de la 
branche. Il n'existe pas de plan d'homogĂ©nĂ©isation des conditions de travail de l'ensemble des 
travailleurs du groupe FED-E-B, ni Ă  MondragĂłn ni Ă  l’extĂ©rieur.  
 
Le syndicaliste de LAB indique que « les modes de production sont les mĂŞmes que dans les 
entreprises capitalistiques. Les problèmes de santĂ© au travail liĂ©s aux troubles musculo-
squelettiques, le stress, les cadences de production… sont tous les mĂŞmes. Cependant dans 
une entreprise ordinaire, les syndicats sont lĂ  pour que les directions prennent en 
considĂ©ration ces problèmes, voire pour assumer leurs responsabilitĂ©s au cas oĂą les problèmes 
ne seraient pas pris en compte. Or, au sein de FAGOR, cela est impossible, les travailleurs 
n’ont pas le droit Ă  l’action et Ă  l'assistance syndicale. Ils ne peuvent pas faire appel Ă  un 
organisme extĂ©rieur pour avoir un avis contradictoire sur les choix de la direction. Ils ne 

                                                 

58

 Errasti AM, Heras I, Elgoibar P et Begiristain A, « 

La internacionalizaciĂłn de las cooperativas y su 

responsabilidad social

 Â», in 

Revista de DirecciĂłn y AdministraciĂłn de Empresas

, n°10, diciembre 2002, p.119-

145 

59

 Entretien avec un membre d’Ahots Kooperatibista et du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

60

  Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A, « 

Deslocalizaciones y empleo 

cooperativo. El caso de FAGOR ElectrodomĂ©sticos, S. Coop 

», p.237-268, CIRIEC, Valencia, p.260 

background image

 

18

peuvent faire appel qu’au centre de R&D et aux services liĂ©s Ă  l’universitĂ© de MCC, lĂ  oĂą 
sont formés leurs cadres. Donc, tout reste en cercle fermé »

61

.  

 
La seule fois oĂą, une action de type syndical c'est-Ă -dire une grève pour raison salariale et 
productive a eu, elle se solda par l'expulsion des 

socios

 est des piquets anti et pro grĂ©vistes 

très virulents entre coopĂ©rativistes

62

.  Cet Ă©vĂ©nement de l’automne 1974, a fortement marquĂ© 

le coopĂ©rativisme Ă  Mondragon. Depuis, seule la grève politique ou en solidaritĂ© d’un 
mouvement extĂ©rieur est acceptĂ©e, Ă  condition que la majoritĂ© de l’AG soit pour. Les 
coopĂ©rativistes grĂ©vistes de 1974 furent stigmatisĂ©s comme traĂ®tres, communistes et 

espagnolistes

, dans un cadre coopĂ©rativiste qui puise ses matrices identitaires dans la culture 

basque, l'action sociale catholique et la relation de confiance

63

. Depuis, toute action syndicale 

voire « critique envers les coopĂ©ratives est une atteinte au 

totem

, tant de l'intĂ©rieur que de 

l'extĂ©rieur. De mĂŞme, ce que l’on considère comme le mouvement politico-social le plus 
radical, la Gauche Abertzale, n'ose pas trop s'en prendre aux coopĂ©ratives. LAB a beaucoup 
de mal Ă  dĂ©fendre ses points de vue sans se faire critiquer par des membres coopĂ©rativistes et 
politiques de la mĂŞme sphère politique »

64

.   

 
Si l’action syndicalereste interdite Ă  l’intĂ©rieur des coopĂ©ratives, des raisons extĂ©rieures 
peuvent crĂ©er des actions de coopĂ©rativistes de type syndical comme on l’a soulignĂ© plus haut. 
D’une part, on trouve les arrĂŞts de travail en solidaritĂ© Ă  une revendication politique

65

 et 

d’autre part, on a les arrĂŞts de travail en solidaritĂ© avec les autres travailleurs comme peuvent 
l’être les arrĂŞts de travail inscrits dans un processus de nĂ©gociation de convention collective 
de branche. Pour le responsable syndical de LAB, « il est important que les travailleurs de la 
principale entreprise de la mĂ©tallurgie du Gipuzkoa bouge lors des grèves de branche. Tout 
d’abord, parce qu’elle a beaucoup de travailleurs Ă  qui s’applique cette convention collective 
de branche. Puis, parce que qu’ils le veuillent ou non, la base du salaire des coopĂ©rativistes se 
fait par rapport au salaire fixĂ© dans cette convention collective. Ce qui est malheureux, c’est 
que les 

socios

 ne se sentent pas assez concernĂ©s par le sort des autres travailleurs de la 

métallurgie »

66

.  

 
Si les coopĂ©ratives ont un rĂ´le Ă  jouer dans un cadre de nĂ©gociation collective, comme le 
prĂ©tend le syndicaliste de LAB, « 

de quel cĂ´tĂ© doivent ĂŞtre les reprĂ©sentants des 

coopĂ©ratives ? Du cĂ´tĂ© salarial pour faire pencher la balance du bon cĂ´tĂ© du rapport de force? 
Ou du cĂ´tĂ© patronal en vue d’adoucir leurs revendications patronales classiques ? Â»

67

. Aucun 

syndicaliste n’a su rĂ©pondre Ă  ces questions mais tous ont soulignĂ© que la transformation des 
conditions de travail des travailleurs du secteur de la mĂ©tallurgie se faisait par le biais de la 
nĂ©gociation de la convention collective de branche.  
 
Par contre, l’ensemble des responsables syndicaux soulignent la responsabilitĂ© sociale de 
FED-E-B dans sa politique salariale Ă  l’intĂ©rieur de l’entreprise et sa responsabilitĂ© extĂ©rieure 

                                                 

61

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate, le 3 octobre 2007 

62

 Pour plus d’explication sur cet Ă©vĂ©nement nous conseillons la lecture de, Kasmir S, 

El mito de Mondragon

, ed 

Txalaparta, Tafalla, 1999 

63

 Itçaina X, « 

L’identitĂ© au travail. Economie sociale et solidaire et mouvement identitaire en Pays Basque

 Â» 

Communication ISTR-EMES, Paris, CNAM,  Avril 2005 

64

 Entretien avec un membre d’Ahots Kooperatibista et d’ESK, Ă  Arrasate le 3 Octobre 2007 

65

 Ces arrĂŞts de travail partiels ou complets rĂ©pondent la plupart du temps aux appels lancĂ©s par la Gauche 

Abertzale, souvent pour dĂ©noncer des illĂ©galisations d’organisation ou association, la situation des prisonniers 
politiques… 

66

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate, le 3 octobre 2007 

67

 Entretien rĂ©alisĂ© avec la PrĂ©sidente du CS de FED-E-B Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

background image

 

19

quant Ă  la crĂ©ation ou destruction d’emplois. Le responsable d’Ahots Kooperatibista et 
membre d’ESK souligne que « FAGOR comme le reste de MCC n’a pas de plan de crĂ©ation 
d’emplois, elle n’a pas de planification et de stratĂ©gie Ă©tablies Ă  l’avance, qui prendraient 
l’ensemble des secteurs de la population, jeunes, femmes, immigrĂ©s… de la vallĂ©e. Les seuls 
plans qui existent, ce sont les plans de licenciements, de prĂ©retraites et les repositionnements 
de 

socios

 dans d’autres coopĂ©ratives. OĂą est donc passĂ©e notre responsabilitĂ© en tant que 

coopĂ©rative sur la crĂ©ation d’emploi de qualitĂ© et de richesse ? Â»

68

 
Pourtant, des pistes d’homogĂ©nĂ©isation des relations de travail entre l’ensemble des 
travailleurs du groupe FED-E-B existent. Si certains aspects coopĂ©rativistes paraissent 
difficilement transposables aux filiales l’hypothèse d’appliquer la distribution Ă©quitable de la 
richesse produite par le biais de la participation aux bĂ©nĂ©fices, qui est une des bases du 
coopĂ©rativisme, Ă  l’ensemble des travailleurs du groupe FED-E-B, pourrait ĂŞtre appliquĂ©e. 
Cette pratique n'est absolument pas gĂ©nĂ©ralisĂ©e actuellement au sein du groupe mais pourrait 
crĂ©er un socle commun entre les diffĂ©rents travailleurs du groupe.  
 
Pour rĂ©sumer, le bilan de la participation des travailleurs des unitĂ©s de production de 
l’étranger est nulle pour ce qui est de la gestion, de la participation aux bĂ©nĂ©fices et de la 
participation de la gestion de moyens de production, tant au sein de la coopĂ©rative FED-E-B 
que de MCC. Si l’on tient Ă©galement compte des 

eventuales

, intĂ©rimaires et sous-traitants 

travaillants Ă  FED-E, on  constate que 30% de travailleurs contrĂ´lent et dĂ©cident pour les 70% 
restants

69

.   Finalement, le positionnement de l’ensemble des travailleurs vis Ă  vis des 

principes coopĂ©rativistes se fait par rapport Ă  un noyau oĂą le statut de 

socio

 reprĂ©sente « 

le 

travail ascendant sur le capital

 Â» en cercles concentriques.   

 

 
 

 

 

 

 

 

 

 

 
 

 

 

La responsabilitĂ© sociale de la coopĂ©rative n’est plus limitĂ©e au territoire et Ă  la population sur 
lesquelles, elle s â€Ă©panouit mais bien au-delĂ . Aujourd’hui la responsabilitĂ© sociale de FED-E-
B s’étend Ă  sa pĂ©riphĂ©rie entrepreunariale c’est Ă  dire Ă  ses filiales et aux territoires sur lesquel 
celles-ci sont installĂ©es. L’

inter-syndicale 

de Brandt composĂ©e des syndicats français, CFDT, 

CFTC, CGT, FO et SUD a tentĂ© en Novembre 2006 par la mĂ©diatisation au Pays Basque et 
par une distribution de tracts directement devant l’entreprise  de renvoyer la responsabilitĂ©  
sociale des plans restructuration de Brandt aux 

socios

 de FED-E. Cette initiative est restĂ©e 

isolĂ©e mais alors que le plan de restructuration dans un premier temps prĂ©voyait 500 

                                                 

68

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’Ahots Kooperatibista et membre du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 

octobre 2007 

69

 Revue d’Ahots Kooperatibista (du mĂŞme nom), n°17, Septembre 2007 

SalariĂ© de filiale coopĂ©rative 

 

Sous-traitant 

IntĂ©rimaire 

eventual 

socio 

background image

 

20

suppressions d’emploi, après cette action syndicale Ă  MondragĂłn le plan ne comportait plus 
qu’une centaine de suppressions d’emploi

70

.  

 

3.1.2.

 

Le projet international de FAGOR : une multinationale comme les autres ? 

 

J Stiglitz signale, dans une entrevue rĂ©alisĂ©e dans le cadre d’une visite Ă  MondragĂłn, que les 
multinationales classiques ne se soucient guère de la perte d’emploi due aux dĂ©localisations, 
alors que les coopĂ©ratives, elles, se sont obligĂ©es Ă  prendre en compte le lien qui les unissent Ă  
leur territoire. Les dirigeants des coopĂ©ratives Ă©tant Ă©lus par les 

socios

 et ces derniers Ă©tant 

associĂ©s Ă  la gestion de leur entreprise Ă  travers les lieux de dĂ©cisions, les coopĂ©ratives ne 
peuvent fermer les unitĂ©s de production de Mondragon pour en ouvrir dans des pays oĂą les 
avantages comparatifs en main-d’œuvre sont supĂ©rieurs

71

. J Stiglitz ne prend en compte que 

l’emploi Ă  statut 

socio

-coopĂ©rativiste. Le responsable du syndicat LAB, par contre, souligne 

que « tout le monde pense qu’à FAGOR il n’y a que des 

socios

 heureux, qui n’ont pas de 

problèmes comme dans les autres entreprises. Or dans la rĂ©alitĂ©, l’ensemble des travailleurs ne 
sont pas 

socios

 et lorsque la direction de FED-E-B dĂ©cide qu’il faut rĂ©duire les coĂ»ts, les 

premières Ă©conomies se font en supprimant les postes de travail comblĂ©s par les sous-traitants, 
puis les intĂ©rimaires et enfin, des 

eventuales

 Â»

72

. Un membre d’Ahots Kooperatibista va plus 

loin car pour lui, « les coopĂ©ratives abusent de l'utilisation d’

eventuales

 qui occupent de façon 

permanente des postes de travail de 

socios

 non remplacĂ©s »

73

 
Si les reprĂ©sentants de directions de FED-E-B Ă©voquent diffĂ©rentes raisons qui ont poussĂ© la 
coopĂ©rative Ă  ne pas crĂ©er de postes de 

socios

 Ă  l’étranger, elles ont souvent Ă©tĂ© d’ordre 

juridique, Ă©conomique voire culturelle. Il semble incongru de demander Ă  la PrĂ©sidente du CS 
de FED-E-B si il existe une planification ou la volontĂ© de transformer les filiales Ă©trangères en 
coopĂ©ratives. « Tout le monde n’a pas l’esprit coopĂ©rativiste, on voudrait bien mais… ce n’est 
pas le cas. Le coopĂ©rativisme est surtout une culture ouvrière d’ici Â»

74

. Une autre hypothèse 

peut ĂŞtre posĂ©e pour l’ensemble de la stratĂ©gie d’internationalisation de la coopĂ©rative. La 
raison fondamentale de constituer des filiales par acquisition totale ou partielle de capital 
rĂ©side dans le fait que de cette façon le capital appartient Ă  la coopĂ©rative et cette dernière 
contrĂ´le de ce fait totalement sa filiale.  
 
La stratĂ©gie d’internationalisation du Groupe FAGOR par l’acquisition de filiales et du 
groupe Brandt lui permet de faire de grandes Ă©conomies d’échelles et d’atteindre des marchĂ©s 
auxquels elle n’avait pas accès. Wrozamet lui permet de dĂ©localiser une partie de sa 
production non rentable de MondragĂłn

75

 et l’acquisition de Brandt lui offre, outre les brevets, 

l’accès Ă  de nouveaux marchĂ©s. Il est assez facile de constater, avec le responsable du 
syndicat LAB du Alto Deba, que « les premières victimes de restructurations avenir ne seront 
pas les travailleurs de FAGOR mais bien ceux de Brandt et de Wrozamet… Nous l’avons bien 
vu lorsque FAGOR a voulu restructurer Brandt, les syndicalistes français nous informaient 
des licenciements en masse en France surtout dans les bureaux de R&D et de production pas 
assez rentables vis-Ă -vis de la production des pays de l’Est. La seule action syndicale efficace 
dans ce cas lĂ , c’est de s’en prendre Ă  la direction et aux actionnaires pour sauver l’emploi sur 
                                                 

70

 Voir Ă  ce sujet le film de H Peyret et Anne Argouse, 

Les Fagor et les Brandts

, Antoine Martin Production, 

Septembre 2007  

71

 T.U., Revue interne de MCC, Mars 2005 

72

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate, le 3 octobre 2007 

73

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’Ahots Kooperatibista et membre du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 

octobre 2007 

74

 Entretien rĂ©alisĂ© avec la PrĂ©sidente du CS de FED-E-B Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

75

 Une partie de la production froid a Ă©tĂ© dĂ©localisĂ©e en Pologne 

background image

 

21

son territoire. Mais avec FAGOR, vivre et travailler au Pays se limite Ă  la vallĂ©e de l’Alto 
Deba et le rachat de Brandt rĂ©pond Ă  une logique de dĂ©pouillement, on va amener au Pays 
Basque ce qui a de la valeur ajoutĂ©e et un certain avenir et dĂ©localiser le reste. Le projet de 
crĂ©ation d’emplois des coopĂ©ratives ne s’étend pas au-delĂ  d’Eibar. Mais Ă  long terme 
FAGOR va perdre au jeu de l’internationalisation et de la globalisation car les autres 
multinationales sont plus grandes et plus crĂ©atives qu’elle. Elle doit absolument changer de 
stratĂ©gie avant qu’il ne soit trop tard Â»

76

. A propos cette stratĂ©gie extĂ©rieure un membre 

d’Ahots Kooperatibista se pose la question  Â« ce que nous faisons, est-ce si diffĂ©rent de ce que 
font le reste des multinationales ? »

77

 
Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A ne le pensent pas et 
prĂ©disent que la tendance engagĂ©e va s’accentuer dans cette phase de globalisation et 
d’internationalisation de FED-E-B. Les diminutions d’emplois directs dont les premières 
victimes seront les salariĂ©s prĂ©caires (les intĂ©rimaires, sous-traitants et 

eventuales

) vont croĂ®tre 

au sein de la coopĂ©rative. Elle va continuer sa stratĂ©gie de quĂŞte de productivitĂ© et de valeur-
ajoutĂ©e, ce qui laisse supposer que les emplois locaux dĂ©veloppĂ©s seront liĂ©s Ă  la R&D

78

. En 

effet, d’après ces auteurs, « FAGOR est semble-t-il arrivĂ©e Ă  sa capacitĂ© maximum de 
crĂ©ation d’emplois productif local Â»

79

. Cette hypothèse est d'ailleurs soulevĂ©e par une 

dĂ©lĂ©guĂ©e CGT de Brandt qui craint « le dĂ©part de l'ensemble des unitĂ©s R&D de Brandt vers 
MondragĂłn. A terme, Ă  force de rĂ©duire nos effectifs de recherche, ils vont rapatrier les 
brevets au Pays Basque, dĂ©velopper la R&D Ă  MondragĂłn, produire Ă  l'Est et en Chine et 
fermer les sites de production et d'ingĂ©nierie en France »

80

 . 

  
La stratĂ©gie d’internationalisation de FED-E-B a dĂ©sormais dĂ©passĂ© le cadre coopĂ©rativiste et 
a crĂ©Ă© un nouveau paradigme organisationnel fondĂ© sur une dualitĂ©. On a d’une part, les 
travailleurs des coopĂ©ratives, et d’autre part, ceux des filiales. Paradoxalement seuls les 
travailleurs des filiales sont reprĂ©sentĂ©s syndicalement et les syndicats jouent un rĂ´le 
institutionnel et revendicatif. L’action syndicale s’arrĂŞte Ă  la porte d’entrĂ©e de la coopĂ©rative. 
Au sein de multinationales ordinaires, les diffĂ©rents salariĂ©s des filiales et de la maison mère 
se retrouvent au sein des ComitĂ© d’Entreprise Centraux de groupe. Ce lieu permet l’échange 
et les prĂ©misses d’actions syndicales communes Ă  l’ensemble des travailleurs ainsi que les 
discussions sur les plans de restructuration. Dans le cas de FED-E-B, comme on l’a signalĂ© 
prĂ©cĂ©demmen,t la disparitĂ© statutaire des salariĂ©s reprĂ©sente un frein Ă  l’action commune entre 
travailleurs. Dès lors, quel type de relations sociales structurelles peuvent avoir les 

socios

 ou 

leurs instances reprĂ©sentatives avec les syndicats reprĂ©sentants directs des salariĂ©s des 
filiales ?  
 

 
 
 
 
 
 
 

                                                 

76

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

77

 Ibidem 

78

 Mendizabal Etxabe A, Begiristain Zubillaga A, et Errasti Amonzarain A, Â« 

Deslocalizaciones y empleo 

cooperativo. El caso de FAGOR ElectrodomĂ©sticos, S. Coop 

», p.237-268, CIRIEC, Valencia, p. 258 

79

 Ibidem 

80

 Entretien rĂ©alisĂ© avec une dĂ©lĂ©guĂ©e CE CGT de Brandt Ă  Lyon Juin 2007   

background image

 

22

3.2.

 

Cadres coopĂ©rativistes et syndicaux antagonistes 

? Grammaires sociales 

incomprĂ©hensibles ?   
 
 

Les interactions entre 

socios

 et syndicalistes sont souvent remplies de prĂ©jugĂ©s, 

d'incompréhension voir d'autisme

81

. Si les syndicats ne reprĂ©sentent pas les intĂ©rĂŞts des 

socios

 

au sein de la coopĂ©rative, les 

socios

 sont-ils  Ă  mĂŞme de dĂ©fendre les intĂ©rĂŞts de l’ensemble 

des travailleurs de la coopĂ©rative comme le prĂ©tend la PrĂ©sidente du CS de FED-E ? La 
critique fondamentale que font les syndicalistes aux 

socios

 est d'ĂŞtre « fondamentalement 

Ă©goĂŻstes et individualistes Â»

82

 vis Ă  vis des travailleurs non 

socios

 des coopĂ©ratives mais 

Ă©galement du monde salarial qui les entoure. Les 

socios

 quant Ă  eux rĂ©pliquent qu’ils ne 

bĂ©nĂ©ficient guère de la solidaritĂ© des autres travailleurs puisqu'ils sont considĂ©rĂ©s lĂ©galement 
« comme travailleurs indĂ©pendants et [n'ont] pas droit Ă  la sĂ©curitĂ© sociale gĂ©nĂ©rale, aux 
allocations chômage…et [ils ont] du se construire seuls leur système de sécurité sociale »

83

.  

 
Si l'on considère qu'un cadre n’est pas un construit (une dĂ©finition de situations) mais ce qui 
permet de construire une « structure d’opportunitĂ© cognitive et normative Â» activĂ©e dans une 
opĂ©ration de dĂ©finition de situations on peut considĂ©rer que tant les coopĂ©rativistes que les 
syndicalistes disposent de cadres cognitifs diffĂ©rents. Le cadre syndical rĂ©pond a un construit 
historique oĂą le patronat est considĂ©rĂ© tantĂ´t comme partenaire tantĂ´t comme adversaire. Les 
rapports entre patronat et syndicats se fondent soit sur le rapport de force et la dĂ©fense des 
intĂ©rĂŞts de chaque partie soit sur des rapports de dialogue social et de partenariat. Le cadre 
coopĂ©rativiste ne rĂ©pond pas au cadre classique des entreprises oĂą les salariĂ©s et les dirigeants 
ont des intĂ©rĂŞts antagonistes, puisque les travailleurs sont eux mĂŞmes propriĂ©taires de 
l'entreprise et participent Ă  la gestion de l'entreprise. Contrairement Ă  l'entreprise capitalistique 
les 

socios

 dans une coopĂ©rative ne subissent pas les dĂ©cisions de la direction et des 

actionnaires.  
 
Les cadres sociaux

84

 tant des coopĂ©ratives que ceux Ă©manant des syndicats rĂ©sultent bien 

Ă©videmment de processus de construction 

socio-historiques.

 Ils Ă©manent de la construction de 

FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. sur un territoire donnĂ© Ă  une Ă©poque donnĂ©e et il en est 
de mĂŞme pour les syndicats basques et français de Brandt. Toutefois, ils ne constituent pas de 
simples conventions mais des institutions, des construits objectivĂ©s considĂ©rĂ©s comme 
valables en toute gĂ©nĂ©ralitĂ© (ainsi, les acteurs, dans la plupart des cas, se reposent, pour dĂ©finir 
les situations dans lesquelles ils sont engagĂ©s, sur des cadres qui font autoritĂ©s, le cadre 
coopĂ©rativiste pour le 

socio

 et le cadre salarial pour les syndicalistes). Les cadres constituent 

les supports de conduite et des stratĂ©gies interactives très variĂ©es : c’est Ă  travers eux que les 
stratĂ©gies sont pensĂ©es et sur eux qu’elles s’appuient pour se construire, c'est ce que l'on va 
tenter esquisser Ă  prĂ©sent.  

                                                 

81

 Cette remarque s’appuie sur une analyse faite a la suite d l’observation de deux rĂ©unions, l’une rassemblant de 

syndicalistes de Brandt et des membres du CS de FED-E, et l’autre rassemblant des syndicalistes basques et de 
coopĂ©rativistes 

82

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat ELA, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

83

 Entretien rĂ©alisĂ© avec la PrĂ©sidente du CS de FED-E-B Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

84

 Nous considĂ©rons que le cadre n'est pas le produit de la stratĂ©gie des acteurs mais bien un Ă©lĂ©ment constitutif 

des stratĂ©gies (une grammaire habilitante et contraignante pour les acteurs). Dès lors, on peut considĂ©rer que le 
cadre coopĂ©rativiste, dispose d'une grammaire contraignante fondĂ©e sur le principe du travailleur-actionnaire (et 
tout ce que cela suppose vis-Ă -vis des autres travailleurs du groupe, voir les disparitĂ©s statutaires des travailleurs 
et les rĂ©flexes d’actionnaires qu’ont les 

socios

 comme on l’a vue plus haut) mais Ă©galement une grammaire 

habilitante qui leur permet d'agir et d'orienter les stratĂ©gies Ă©conomiques et sociales qui sont menĂ©es au sein de 
leurs filiales Ă  travers leur code Ă©thique.  

background image

 

23

 

3.2.1. Un syndicalisme en quĂŞte d’esprit coopĂ©rativiste perdu : LAB et ESK 

  
On constate une profonde crise identitaire de la coopĂ©rative suite Ă  la forte expansion du 
groupe via le rachat de filiales. Les 

socios

 se sont transformĂ©s en entrepreneurs capitalistes et 

la possibilitĂ© de crĂ©er une nouvelle forme d’entreprise multinationale coopĂ©rative ou plus 
dĂ©mocratique ne se dessine pas Ă  l’horizon, mĂŞme si l’on a pu voir une certaine prĂ©occupation 
chez certains coopĂ©rativistes et syndicalistes. Pour les premiers, on fait rĂ©fĂ©rence aux 
membres d'Ahots Kooperatista qui est un courant de pensĂ©e au sein des coopĂ©ratives composĂ© 
de diffĂ©rents 

socios

 de  FAGOR ElectrodomĂ©sticos S. Coop. de Mondragon et de FAGROR-

EDESA de Basauri pour ce qui concerne notre Ă©tude (d'autres 

socios

 appartenant Ă  d'autres 

coopĂ©ratives du groupe MCC font Ă©galement parti de ce courant de pensĂ©e). Ahots 
Kooperatibista est principalement composĂ© de membres adhĂ©rents d'ESK et de LAB 
(rappelons que l'adhĂ©sion individuelle Ă  un syndicat est autorisĂ© au sein de la coopĂ©rative, 
c'est l'action syndicale et donc collective qui y est interdite). Pour ce qui est de la 
prĂ©occupation des syndicalistes seuls les responsables du syndicat LAB et ESK semblent 
porter une attention spĂ©ciale Ă  la coopĂ©rative dans sa forme complexe. Ils pensent que les 
coopĂ©ratives et FED-E-B plus prĂ©cisĂ©ment disposent d'instruments pouvant jouer un rĂ´le au 
sein de l'Ă©conomie basque et du mouvement social. Toutefois, les positions des syndicats 
divergent quant au rĂ´le que la coopĂ©rative doit jouer en prioritĂ© sur son territoire et espace 
social.  
 
Les membres d'Ahots Kooperatibista et d'ESK sont plus enclins au rĂ´le social que peut jouer 
FED-E-B au sein du mouvement social. Le membre d'Ahots Kooperatibista et ESK lors des 
entretiens, n'a cessĂ© de rappeler les principes de transformation sociale et d'Ă©ducation 
coopĂ©rativiste que devait jouer FED-E-B. D'après lui, « il suffit de voir le document interne

85

 

qui doit ĂŞtre votĂ© au sein de la coopĂ©rative sur l'adaptation et le potentiel du groupe FAGOR. 
Ils n'ont rien Ă©crit ni dĂ©veloppĂ© sous les chapitres 

éducation coopérative

 et 

transformation 

sociale

 Â»

86

. Cela dĂ©montre bien, d'après ce coopĂ©rativiste et la revue Ahots Kooperatibista que 

« comme expĂ©rience coopĂ©rative [FAGOR] naĂ®t avec des objectifs de transformation, elle a 
Ă©chouĂ© parce que dans les faits elle a abandonnĂ© l’application des dits principes et le code 
Ă©thique qui les rassemble. Cet Ă©chec n’a pas de retour en arrière possible. Il n’y a pas de 
renaissance possible du coopĂ©rativisme au sein de la CorporaciĂłn Cooperativa MondragĂłn 
parce que, comme on a pu le voir jusqu’à maintenant, il est incompatible de poursuivre 
l’efficacitĂ© Ă©conomique mesurĂ©e sur des paramètres conventionnels du système capitaliste et 
de satisfaire les principes coopĂ©rativistes. L’évolution prĂ©visible de MCC est fondĂ©e sur une 
intĂ©gration de plus en plus grande au sein de l’économie globalisĂ©e du capitalisme, avec 
comme consĂ©quence la perte de quelques traits identitaires dĂ©fĂ©rents, qu’elle conserve encore 
vis Ă  vis des entreprises de statut juridique capitalistique Â»

87

. Ce qui diffĂ©rencie encore la 

coopĂ©rative des autres multinationales, c'est la fenĂŞtre d'opportunitĂ© qu’offrent ces statuts 
juridiques à ses membres et la possibilité d'influer dans les décisions et les stratégies

88

L'esprit cooperativiste et le rĂ´le de transformation sociale que s'est donnĂ©e la coopĂ©rative 
peuvent redevenir une prioritĂ© « si les 

socios

 le dĂ©cident mais pour cela, il faut qu'ils en aient 

                                                 

85

 Document interne « 

Readecuacion y Potencionamiento del grupo FAGOR

 Â», Arrasate le 20 Novembre 2006, 

ce document n'a toujours pas Ă©tĂ© passĂ© Ă  l'ensemble des socios et votĂ© Ă  ce jour  

86

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’Ahots Kooperatibista et membre du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 

octobre 2007 

87

 Uribarri I, Â« 

El otro cooperativismo

 Â», revue 

HIKA

, n°59, Juillet-Aout 1995, Bilbao 

88

 Voir Ă  ce sujet l'Ă©viction de l'ancien gĂ©rant de la coopĂ©rative  Pablo Mongelos et du CR sous pression du CS 

suite Ă  la gestion et politique de rachat et d'internationalisation de FAGOR, Diario de Noticias, 2006/02/20 

background image

 

24

conscience et participent plus activement Ă  la gestion de leur entreprise. La preuve en est que 
l’euskara et la culture basque continuent d’avoir une grande place au sein des coopĂ©ratives 
parce que les coopérativistes y sont attachés »

89

.  

 
Pour les membres de LAB faisant ou non partie d'Ahots Kooperatibista, le potentiel de FED-
E-B rĂ©side dans son indĂ©pendance financière vis-Ă -vis du marchĂ© capitalistique et des 
investissements directs Ă©trangers. LAB partage avec ELA et ESK la volontĂ© de construire un 
Cadre Basque des Relations du Travail au sein d'un Espace Socio-Economique Basque. Pour 
ces derniers, Â« MCC et FED-E-B s'inscrivent parfaitement dans ce cadre lĂ . D'une part, ils ne 
dĂ©pendent pas financièrement de firmes multinationales espagnoles, françaises ou Ă©trangères 
et une telle situation de dĂ©pendance financière n'est pas permise par le statuts juridiques de la 
coopĂ©rative. Au sein de LAB, nous soutenons toutes les initiatives socio Ă©conomiques qui 
vont vers le sens de plus de souverainetĂ© »

90

. Le syndicat, dans un document interne, souligne, 

tout comme les membres d’ESK, que les coopĂ©ratives ont un grand potentiel de solidaritĂ© et 
de modèle social Ă  exploiter, c’est pourquoi les syndicats basques qui prĂ©tendent vouloir 
transformer le Pays Basque ne peuvent faire abstraction des coopĂ©ratives dans ce projet. 
Toutefois, le problème citĂ© plus haut demeure, comment syndicats et coopĂ©ratives peuvent-ils 
trouver des cadres et grammaires sociales communes en vue d’évoluer ensemble et non 
sĂ©parĂ©ment compte tenu des lois coopĂ©ratives autonomiques et des règlements intĂ©rieurs des 
coopératives ?

91

 
Il convient de souligner que si le syndicat ELA, principal syndicat basque de la CAB et du 
secteur mĂ©tallurgique du Pays Basque, n’a pas de stratĂ©gie Ă  proprement parler au sein de la 
coopĂ©rative, c’est que sa stratĂ©gie et son action syndicale se base essentiellement sur une 
action syndicale d’entreprise et non de branche. Â« ELA n’a pour but que de mener une action 
syndicale lĂ  oĂą elle est prĂ©sente. De fait, lĂ©galement nous n’avons pas le droit d’être prĂ©sent 
au sein des coopĂ©ratives. On en prend acte. ELA dĂ©fend les salariĂ©s qui dĂ©cident de le faire et 
pour cela il faut se syndiquer et ĂŞtre prĂŞt Ă  passer Ă  l’action syndicale et faire confiance au 
syndicat. Toutes ces conditions ne sont pas rĂ©unies au sein de FED-E-B. Nous considĂ©rons 
MCC et FED-E-B comme une multinationale parmis d’autres, certes basque, mais 
multinationale tout comme Electrolux, BHS… Â»

92

 souligne le responsable d’ELA du Alto 

Deba.   

 

3.2.2. L'action syndicale face Ă  FED-E-B : une action comme les autres ? 

 

L’action syndicale des syndicats, tant basques qu’extĂ©rieurs au sein de FED-E-B, peut-elle 
s’intĂ©grer au sein de l’action et stratĂ©gie classique des syndicats ? Comme le souligne un 
membre d’Ahots Kooperatibista et d’ESK, Â« tout d’abord nous devons apprendre Ă  nous 
connaĂ®tre. Non personnellement, nous nous connaissons quasiment tous dans la vallĂ©e, je 
parle de connaĂ®tre rĂ©ellement nos cadres de vie, de travail et militant. Un coopĂ©rativiste ne 
pense pas comme un salariĂ© et un syndicaliste, mĂŞme de l’Alto Deba Un salariĂ© comprend 

                                                 

89

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’Ahots Kooperatibista et membre du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 

octobre 2007 

90

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© 

d’Entreprise, et membre actuellement de Ahots Kooperatibista (et toujours adhĂ©rent de LAB), Ă  Arrasate le 3 
Octobre 2007 

91

 Document interne ronĂ©otypĂ© de rĂ©flexion du syndicat LAB, 

LĂ­neas de actuaciĂłn en las cooperativas

, Bilbao, 

14 Avril 2006 

92

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat ELA, Ă  Arrasate, le 3 octobre 2007 

background image

 

25

difficilement les sacrifices que peut faire un coopĂ©rativiste (comme celui d’aller travailler le 
samedi voire le dimanche sans contrepartie salariale) »

93

.   

 
Si effectivement les syndicats ont un long chemin d’apprentissage Ă  faire, les 

socios

 

Ă©galement, d’après le membre d’Ahots Kooperatibista de Basauri « moi tant que j’étais salariĂ© 
et syndicaliste, je me sentais partie prenante d’une classe sociale. Le syndicat me donnait les 
cadres d’analyse de ce qui se passait au sein de la sociĂ©tĂ© basque ; la reindustrialisation, 
l’autonomisme du PNV et sa trahison d’un projet souverainiste… Mais Ă©galement le cadre 
social dans lequel on Ă©tait, nous les travailleurs, et eux les patrons. Ce qui crĂ©ait chez nous Ă  
EDESA-FABRELEC une solidaritĂ© de classe avec les travailleurs d’Euskalduna, la Naval, 
AHV… Bref, nous Ă©tions solidaires avec le reste de la classe travailleuse, avec ce qui nous 
entourait. Les coopĂ©rativistes de FAGOR n’ont jamais connu cela et nous on commence Ă  
l’oublier avec ce discours que les cadres coopĂ©rativistes nous inculquent tous les jours, que 
nous sommes pas comme les autres travailleurs, que nous ne sommes des actionnaires, des 
propriétaires… »

 94

 
Ce que les dĂ©clarations des syndicalistes et 

socios

, tant de ESK que de LAB cristallisent, ce 

n’est pas tant les diffĂ©rences idĂ©ologiques entre 

socios

 et non 

socios

 que les diffĂ©rences de 

cadre entre ouvriers et coopĂ©rativistes. Si le travail peut très bien construire des identitĂ©s 
professionnelles diffĂ©rentes entre travailleurs d’une mĂŞme entreprise ancrĂ©es dans des formes 
« collectives Â» de division du travail, au sein d’une coopĂ©rative ce cadre cognitif perd de sa 
substance ou de la force. Comme le souligne le membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, 
ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© d’Entreprise et membre actuellement de Ahots Kooperatibista 
(et toujours adhĂ©rent de LAB), l’identitĂ© coopĂ©rativiste ne dĂ©coulerait pas mĂ©caniquement des 
situations dĂ©finies de l’extĂ©rieur de l’entreprise Ă  partir de critères « objectifs Â» (ou 
syndicaux), mais bien, de l’intĂ©rieur de l’entreprise oĂą l’on considère le 

socio

 Â« acteur Â»  au 

sein du cadre coopĂ©ratif. Son identitĂ© se base sur ses relations au travail et au capital basĂ©e sur 
le « pouvoir Â» d’agir et de dĂ©cider sur  les sujets concernant directement son travail (ce que ne 
peut avoir le non 

socio

). Les 

socios

 se dĂ©finissent comme Ă©lĂ©ments actifs de la coopĂ©rative et 

dĂ©finissent les non 

socios

 comme des Ă©lĂ©ments passifs de la vie de l’entreprise.   

 
Cette Ă©lĂ©ment actif du coopĂ©rativiste est repris Ă  charge par Ahots Kooperatibista pour 
exiger le maintient d’« une certaine sensibilitĂ© vis-Ă -vis des gens qui sont en train d’être 
exploitĂ©s par MCC Ă  cause de sa politique d’expansion entrepreneuriale (cas Loramendi ou 
Eroski au Pays Basque, cas Brandt au sein de l’Etat français). Nous croyons que les deux 
angles par lesquels nous devons regarder pour donner sens Ă  ce que l’on veut sont : a) L’angle 
de la responsabilitĂ©, pour ce qui est de celle de coopĂ©rativistes qui bĂ©nĂ©ficions des gains tirĂ©s 
par l’exploitation des travailleurs non 

socios

 au sein de nos coopĂ©ratives. b) DĂ©fendre ce type 

de salariĂ©s non coopĂ©rativistes puisqu’ils n’ont pas de possibilitĂ© de se dĂ©fendre par eux 
mĂŞme Ă  travers les organes de la coopĂ©rative Â»

95

. On constate aisĂ©ment que l’action positive 

envers les travailleurs non 

socios

, qu’elle vienne de 

socios

 ou d’organes ordinaires de la 

coopĂ©rative ou d’un courant critique de la coopĂ©rative comme Ahots Kooperatibista, rĂ©side 
dans la responsabilitĂ© du 

socio

 de son action en tant que coopĂ©rativiste et non dans une 

Ă©ventuelle reprĂ©sentation salariale sous forme instituĂ©e au sein des coopĂ©ratives.  

                                                 

93

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’Ahots Kooperatibista et membre du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 

octobre 2007 

94

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© 

d’Entreprise, et membre actuellement de Ahots Kooperatibista (et toujours adhĂ©rent de LAB), Ă  Arrasate le 3 
Octobre 2007 

95

 Revue d’Ahots Kooperatibista (du mĂŞme nom), non datĂ© 

background image

 

26

 
Le syndicat LAB propose des instances de gouvernance commune de l’entreprise oĂą se 
retrouveraient 

socios

 et non 

socios

. Par contre, Ahots Kooperatibista et par lĂ  mĂŞme, le 

syndicat ESK, s’attachent beaucoup plus au statut du coopĂ©rativiste et Ă  « sa capacitĂ© Ă  agir en 
tant que travailleur et actionnaire Ă  sensibilitĂ© sociale Â»

96

. Cette divergence est due Ă  la 

diffĂ©rence idĂ©ologique et stratĂ©gique d’apprĂ©hension des coopĂ©ratives par ces deux syndicats. 
Le syndicat ESK considère que les coopĂ©ratives sont un phĂ©nomène entrepreneurial 
intĂ©ressant parce qu’ Â« elles ouvrent des possibilitĂ©s de gestion du capital par les travailleurs 
eux mĂŞmes Â»

97

 alors que pour les syndicalistes de LAB le potentiel des coopĂ©ratives rĂ©sident 

dans leurs capacitĂ©s d’autofinancement et l’impossibilitĂ© qu’elles ont d’être rachetĂ©es par des 
financements Ă©trangers. Comme le souligne un membre d’Ahots Kooperatibista et 
syndicaliste de LAB, « la participation Ă  la gestion institutionnelle ou salariale des travailleurs 
des filiales au sein de la direction de leur entreprise-filiale, de la coopĂ©rative voire de MCC 
est nulle, sauf exception lĂ©gale des pays oĂą ils travaillent. Les lois des diffĂ©rents pays oĂą sont 
installĂ©es les filiales Ă©tablissent des organes de reprĂ©sentation salariale au sein desquels la 
participation est ouverte (voire exclusive) aux syndicats. Or, il est indispensable pour que les 
coopĂ©ratives puissent continuer Ă  grandir qu’elles intègrent les ComitĂ©s d’Entreprises des 
filiales au sein d’une super-structure CE-CS, car si non on risque de se retrouver assez vite en 
contradiction avec nous mĂŞmes. Une nouvelle organisation sociale et syndicale aiderait 
grandement Ă  retrouver l’aspect social de l’entreprise Â»

98

. Les deux courants syndicaux, tant 

ESK que LAB, au sein ou en dehors d’Ahots Kooperatibista, soulignent l’importance 
qu’aurait la participation de l’ensemble des travailleurs de FED-E-B Ă  l’AssemblĂ©e GĂ©nĂ©rale 
de FAGOR car c’est le lieu le plus symbolique de reprĂ©sentation des intĂ©rĂŞts des 
coopĂ©rativistes. Toutefois, comme le note la revue Ahots Kooperatibista dans son n°15, 
« 10%  des 

socios

 ont signĂ© une pĂ©tition en vue de  mettre Ă  l’ordre du jour de l’AG une 

question : la suppression des trois jours de carence maladie, afin de faire baisser l’absentĂ©isme 
contre lequel Ahots s’est prononcĂ©. Mais, mĂŞme cela ils ne nous l’ont pas donnĂ© Â»

99

. Cette 

difficultĂ© de mettre Ă  l’ordre du jour une question touchant l’ensemble des 

socios

 montre la 

difficultĂ© des 

socios

 Ă  contrĂ´ler l’ordre du jour des AssemblĂ©es GĂ©nĂ©rales oĂą les 

socios

 sont 

souverains des dĂ©cisions.  
 
MĂŞme si les syndicats ESK et LAB ainsi que Ahots Kooperatibista apprĂ©hendent la 
coopĂ©rative comme une entreprise spĂ©cifique oĂą l'action syndicale classique ne peut ĂŞtre 
menĂ©e. Les autres syndicats prĂ©sents dans le Alto Deba, CCOO, UGT ainsi qu'ELA ne font 
pas de distinctions et apprĂ©hendent la coopĂ©rative comme tout autre entreprise capitalistique 
de la vallĂ©e. Seuls ESK et LAB, en tant que structures, tentent de combler le vide syndical au 
sein de FED-E-B par la construction soit des courants d'opinions soit par des rĂ©seaux de 
syndiquĂ©s prĂŞts  Ă  faire Ă©voluer les idĂ©es des syndicats entre les 

socios

 et non 

socios 

en tentant 

de construire des ponts entre les identitĂ©s coopĂ©rativistes et les identitĂ©s syndicales. Pour le 
syndicaliste de LAB, les coopĂ©rativistes sont complètement coupĂ©s du cadre salarial qui les 
entourent et pensent qu'ils vivent dans une bulle Ă  part. Ils ne participent aux luttes sectorielles 
de la mĂ©tallurgie, Ă  la nĂ©gociation de l'accord de branche et des grilles de salaires... alors 
mĂŞme que leurs salaires se basent sur cette accord! »

100

                                                 

96

 Revue d’Ahots Kooperatibista (du mĂŞme nom), non datĂ© 

97

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable d’Ahots Kooperatibista et membre du syndicat ESK, Ă  Arrasate le 3 

octobre 2007 

98

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un membre de l’ancienne EDESA-FABRELEC, ancien dĂ©lĂ©guĂ© LAB au ComitĂ© 

d’Entreprise, et membre actuellement de Ahots Kooperatibista (et toujours adhĂ©rent de LAB), Ă  Arrasate le 3 
Octobre 2007 

99

 Revue d’Ahots Kooperatibista (du mĂŞme nom), non datĂ© 

100

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

background image

 

27

 
Par ailleurs « les syndicalistes français ou polonais connaissent mal ce qu’est la coopĂ©rative 
industrielle multinationale de MondragĂłn. Lorsque les syndicalistes de la CGT Lyon sont 
venus Ă  MondragĂłn, ils ne connaissaient rien Ă  la coopĂ©rative basque, au Pays Basque et très 
peu sur le syndicalisme basque et ses enjeux face au syndicalisme espagnol Â»

101

. Une 

responsable syndicale de la CGT Brandt Lyon dĂ©finie en ces termes la situation actuelle : « on 
connaĂ®t très mal ce que sont les coopĂ©ratives de MondragĂłn en France. De plus, Ă  MondragĂłn 
au Pays Basque, il faut rajouter la question Basque aux relations sociales et donc Ă  celles du 
travail. A la CGT, on a une culture d’entreprise qui est aux antipodes des relations sociales 
que l’on a vues Ă  MondragĂłn, d’assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales, de contrĂ´les financiers de 
coopĂ©rateurs, de leurs 

cash flow

, moyens financiers… Nos collègues ne comprennent pas 

comment ça marche lĂ  bas, je pense que l’on ne rĂ©ussira pas Ă  Ă©tablir de contact avec les 
coopĂ©rateurs et le CS. Notre seul lien ce sont les syndicats locaux qui n’ont pas d’intervention 
syndicale Ă  l’intĂ©rieur de l’entreprise, mais pour cela il faudrait que mĂŞme nous nous soyons 
unis ici, en France, pour ĂŞtre un interlocuteur face aux syndicats basques Â»

102

. C'est pourquoi 

le syndicaliste de LAB prĂ©cise qu'« il est indispensable que tous les syndicats prĂ©sents dans 
les filiales et ceux du Alto Deba tissent des liens, car pour l'instant on est la seule courroie de 
retransmission et d'action syndicale possible des salariĂ©s des filières de FED-E-B. Il est 
indispensable qu'Ă  l'heure de la globalisation et des dĂ©localisation nous puissions tous 
s'entraider en tant que travailleur Â»

103

. Ce manque de solidaritĂ© syndicale et salariale au sein 

des coopĂ©ratives est ce qui fait dire Ă  S Kassir, dans la conclusion de son livre, que les 
coopĂ©ratives ont certes crĂ©Ă© beaucoup d'emplois dans la vallĂ©e du Alto Deba mais elles ont 
Ă©galement participĂ© Ă  casser le sentiment de classe qu'il y existait jusqu'Ă  il a quelques 
dĂ©cennies.  

 

 

4.

 

CONCLUSION 

 
L’activitĂ© syndicale est interdite au sein des coopĂ©ratives de MondragĂłn. Il convient de noter 
que les seuls travailleurs ayant Ă©tĂ© licenciĂ©s sous le franquisme Ă  ne pas avoir Ă©tĂ© amnistiĂ© par 
les lois d’amnistie 

post-franquistes

, furent les coopĂ©rativistes grĂ©vistes de FAGOR de 1974 

(mĂŞme si il furent rĂ©admis postĂ©rieurement en 1978, en AssemblĂ© GĂ©nĂ©rale). Dès lors, les 
coopĂ©ratives apprĂ©hendent les syndicats avec mĂ©fiance au Pays Basque et tiennent les 
syndicats de leurs filiales dans leurs pĂ©rimètres territoriaux et d’établissement.  A l’heure de la 
stratĂ©gie d’internationalisation de FED-E-B, la coopĂ©rative se trouve face Ă  sa deuxième crise 
d’identitĂ© et de fonctionnement. La première crise est survenue suite aux annĂ©es 70, pendant 
lesquelles la coopĂ©rative avait grandi très vite sans trop contrĂ´ler sa croissance. Aujourd’hui, 
la croissance de FED-E-B semble entrer dans une double crise. La première de type identitaire 
est due au nombre minoritaire de travailleurs 

socios

 dans une entreprise coopĂ©rative qui, ne 

compte plus que, un tiers de 

socios

 au sein de sa masse salariale. La seconde est liĂ©e Ă  sa 

responsabilitĂ© sociale tant Ă  l’intĂ©rieur de l’entreprise qu’à l’extĂ©rieur de la coopĂ©rative sur le 
territoire le Alto Deba. 
 
Comme l’ont rappelĂ© l’ensemble des syndicats prĂ©sents dans l’Alto Deba, FED-E-B a une 
responsabilitĂ© sociale dans la vallĂ©e et lĂ  oĂą elle est propriĂ©taire d’unitĂ©s de production, 
comme en France ou en Pologne. Cette responsabilitĂ© est mesurĂ©e par  la qualitĂ© de l’emploi 
qu’elle dĂ©veloppe au sein de ses unitĂ©s de production mais Ă©galement par le projet industriel 
                                                 

101

 Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

102

 Entretien rĂ©alisĂ© avec une dĂ©lĂ©guĂ©e CE CGT de Brandt Ă  Lyon Juin 2007   

103

Entretien rĂ©alisĂ© avec un responsable du syndicat LAB, Ă  Arrasate le 3 octobre 2007 

background image

 

28

qu’elle dĂ©veloppe sur les territoires oĂą elle est prĂ©sente. « L’action syndicale conjointe menĂ©e 
entre l’Intersyndicale de FAGOR- BRANDT France et les syndicats LAB et ESK a tissĂ© le 
premier lien et a rappelĂ© aux 

socios

 que la responsabilitĂ© de FED-E-B ne se limitait plus 

dĂ©sormais Ă  l’Alto Deba, ni Ă  la CAB Â»

104

 et que FED-E-B comme toute multinationale Ă  des 

responsabilitĂ©s sociales partout oĂą elle se dĂ©veloppe. FED-E-B rappelle sans cesse les 
engagements qu’elle prend en termes de crĂ©ation d’emplois et de transformation sociale.   
 
Pour ce qui est de la responsabilitĂ© sociale Ă  l’intĂ©rieur de l’entreprise, elle devrait se traduire 
par de nouvelles formes de dĂ©mocratie interne Ă  l’heure oĂą seul un tiers des travailleurs de 
l’entreprise est 

socio

. Cette dualitĂ© de travailleurs risque de devenir schizophrĂ©nique Ă  terme 

pour les 

socios

 qui sont au quotidien en contact avec les non 

socios

 dans FED-E, mais 

Ă©galement avec les salariĂ©s de FED-E-B en France et en Pologne. Le fossĂ© dĂ©mocratique de 
capacitĂ© Ă  pouvoir influer sur la stratĂ©gie de l’entreprise Ă  court moyen terme, ne semble pas 
ĂŞtre comblĂ© par un processus d’intĂ©gration en 

socios

 de l’ensemble ou d’une majoritĂ© des 

travailleurs de l’entreprise. Dès lors, il apparaĂ®t inĂ©vitable que FED-E-B dans un souci de 
relations salariales basĂ©es sur le dialogue social, devra rapidement restructurer ses institutions 
de reprĂ©sentation salariale avec Ă  terme des rapports structurĂ©s entre le CS et les CE. Cette 
restructuration toucherait tant les unitĂ©s de production de l’étranger que celle du Alto Deba, 
oĂą une grande partie des travailleurs de FED-E-B ne sont pas 

socios

 et sont dĂ©pourvus de 

toute reprĂ©sentation syndicale. L’intĂ©gration de courants syndicaux au sein des coopĂ©ratives 
n’est-ils pas inĂ©vitable Ă  long terme ? Pour l’instant seul deux syndicats basques semblent ĂŞtre 
prĂŞts Ă  rĂ©pondre au dĂ©fi mais MCC est-elle prĂŞte Ă  cela ?  

 
 

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